Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 21 septembre 2017, n° 15/08101

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 1re ch. civ., 21 sept. 2017, n° 15/08101
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 15/08101
Décision précédente : Tribunal d'instance de Périgueux, 4 octobre 2015, N° 11-14-821
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE


ARRÊT DU : 21 SEPTEMBRE 2017

(Rédacteur : Catherine BRISSET, conseiller,)

N° de rôle : 15/08101

Z X

c/

SA BANQUE SOLFEA

SAS NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE

SCP B Y

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

D Y MJ

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 05 octobre 2015 par le Tribunal d’Instance de PERIGUEUX (RG : 11-14-821) suivant déclaration d’appel du 23 décembre 2015

APPELANT :

Z X

né le […] à […]

de nationalité Française

[…]

représenté par Maître NUNEZ substituant Maître Bénédicte LAGARDE-COUDERT de la SELAS NUNEZ-LAGARDE COUDERT-MARTINS DA SILVA, avocats au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉES :

SA BANQUE SOLFEA, dont le siège social est sis […] – […], aux droits de laquelle vient la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en vertu de la cession de créance du 28 février 2017 représentée par Maître NAVEILHAN substituant Maître Philippe LECONTE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocats postulants au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Edgard VINCENSINI, avocat plaidant au barreau de PARIS

SAS NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE, dont le siège social est sis […], prise en la personne de son représentant légal, la SCP B-Y, ès qualité de mandataire judiciaire domiciliée en cette qualité 14/[…]

non représentée, assignée à domicile

SCP B Y, es qualité de mandataire liquidateur de la SAS NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis 14/[…]

non représentée, assignée à domicile

INTERVENANTES :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la BANQUE SOLFEA en vertu de la cession de créance du 28 février 2017, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis […]

représentée par Maître NAVEILHAN substituant Maître Philippe LECONTE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocats postulants au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Edgard VINCENSINI, avocat plaidant au barreau de PARIS

D Y MJ, en remplacement de la SCP B Y, es qualité de mandataire liquidateur de la SAS NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis […]

non représentée, assignée à personne habilitée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 juillet 2017 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Catherine BRISSET, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Elisabeth LARSABAL, président,

Catherine COUDY, conseiller,

Catherine BRISSET, conseiller,

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

— par défaut

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

Selon bon de commande du 13 septembre 2012, la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France exerçant sous le nom commercial de Groupe Solaire de France s’est engagée à fournir et à installer un dispositif photovoltaïque à M. X à son domicile de Tocane Saint Apre (24) pour le prix de 19 900€. Une offre de crédit accessoire à cette vente établie par la SA Banque Solféa pour ce même montant de19 900 € a été acceptée le même jour par M. X.

L’attestation de fin de travaux a été signée le 29 octobre 2012 et les fonds débloqués.

Invoquant différents désordres, M. X a, par actes des 9 et 11 septembre 2014, fait assigner la société Groupe Solaire de France, la SCP B Y ès qualités de mandataire judiciaire et la société Banque Solféa devant le tribunal d’instance de Périgueux.

Par jugement du 5 octobre 2015, le tribunal a :

• rejeté la demande de nullité du contrat de vente et d’installation de panneaux photovoltaïques conclu le 13 septembre 2012 entre M. X et la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France,

• condamné M. X à payer la somme de 19 900 € à la banque Solféa avec intérêts légaux à compter du 13 mars 2015,

• rejeté les autres demandes,

• condamné M. X aux dépens.

Le tribunal a considéré que la mise en service de l’installation constituait la ratification du bon de commande, le purgeant de ses nullités et qu’il n’était pas établi par M. X un abus de faiblesse. Il a retenu une cause de déchéance du droit aux intérêts pour la banque en l’absence de fiche d’information précontractuelle et de consultation du FICP.

M. X a relevé appel de la décision le 23 décembre 2015.

Dans ses dernières écritures en date du 13 juillet 2016, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, M. X conclut à l’infirmation du jugement et formule les demandes suivantes :

À titre principal,

Dire et juger nul le bon de commande conclu à domicile entre la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France exerçant sous l’enseigne commerciale G.S.F. et M. X en date du 13.09.2012 pour abus de faiblesse, sinon pour pratiques commerciales agressives et insistantes, en tout état de cause, pour non-respect des dispositions d’ordre public des articles L 121-21 et suivants du code de la consommation,

À titre subsidiaire,

Prononcer la résolution du bon de commande du 13.09.2012 sur le fondement des articles 1184 et suivants du code civil,

En tout état de cause, constater que l’offre de crédit souscrite auprès de la Banque Solféa contrevient aux dispositions d’ordre public du code de la consommation et n’a pas d’objet, est donc nulle en application de l’article 1108 du code civil ;

En conséquence, prononcer l’annulation ou la résolution du contrat de crédit affecté en date du 13.09.2012 sur le fondement de l’article L 311-32 du code de la consommation,

Dire et juger que les fautes de la Banque Solféa la privent du droit de demander à M. X, emprunteur, la restitution du capital prêté,

Condamner la Banque Solféa à restituer à M. X les sommes perçues dans le cadre du remboursement des crédits à la consommation ;

Condamner solidairement la SCP B Y ès qualités de mandataire liquidateur

de la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France et la Banque Solféa à verser à M. X la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts ;

À titre infiniment subsidiaire, pour le cas où par impossible, la cour rejetterait les demandes de nullité et de résolution du contrat principal et du crédit affecté et confirmait le jugement en ce qu’il a fait droit à la demande de la Banque Solféa de remboursement du capital prêté à l’égard de M. X, il sera fait droit aux demandes suivantes :

- Condamner la Société G.S.F. prise en la personne de son liquidateur, Maître F Y, à le relever et garantir intégralement,

- Fixer la créance au passif SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France (enseigne G.S.F.),

- Confirmer le jugement en ce qu’il a retenu la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la Banque Solféa,

Débouter la Banque Solféa de toute demande, fin, moyens et conclusions contraires ou plus amples,

Condamner solidairement la SCP B-Y ès qualités de mandataire liquidateur

de la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France et la Banque Solféa à verser à M. X la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamner solidairement la SCP B-Y ès qualités de mandataire liquidateur

de la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France et la Banque Solféa aux entiers dépens en ceux compris les frais d’exécution.

Il soutient que le contrat est nul pour abus de faiblesse puisque du fait des manoeuvres du commercial, il a souscrit des engagements supérieurs à ses capacités alors que le vendeur avait connaissance de ses conditions de vie modestes. Il invoque des pratiques commerciales agressives et insistantes. Il se prévaut enfin du non respect des dispositions des articles L 121-21 et suivants du code de la consommation et conclut à la nullité du contrat principal. Il conteste que la nullité puisse être couverte dans la mesure où il n’avait pas connaissance des vices entachant la commande. Il conteste avoir signé l’attestation de fin de travaux et ajoute que sa date est antérieure à la réalisation des travaux. Il invoque en outre une résolution du contrat pour inexécution. Il tire les conséquences de la nullité ou de la résolution du contrat et invoque une faute de la banque la privant de son droit à restitution du capital. Il formule une demande indemnitaire et plus subsidiairement, reprend la déchéance du droit aux intérêts et formule une demande en garantie à l’encontre de GSF.

Dans ses dernières écritures en date du 1er juin 2017, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Banque Solféa formule ses prétentions dans les termes suivants :

Donner acte à BNP Paribas Personal Finance qu’elle vient aux droits de Banque Solféa aux termes de la cession de créance intervenue le 28 février 2017 ;

Donner acte à BNP Paribas Personal Finance de son intervention volontaire ;

Constater que les présentes conclusions valent notification de la cession de créance

intervenue en application des dispositions de l’article 1324 du code civil ;

À titre principal :

Déclarer les demandes en nullité et en résolution du contrat de vente et à fortiori du

contrat de crédit irrecevables faute de mise en cause de la D Y MJ;

À titre subsidiaire :

Sur le contrat principal :

Dire et juger que la preuve d’une cause de nullité du contrat n’est pas rapportée ;

Dire et juger que la violation des dispositions des articles L 121-21 et suivants du code de la consommation est sanctionnée par une nullité relative ;

Dire et juger que la nullité relative éventuellement encourue a été couverte par des actes non équivoques ;

Déclarer la demande en résolution judiciaire du contrat irrecevable comme étant nouvelle en cause d’appel ;

Dire et juger qu’en toute hypothèse la preuve d’une cause de résolution du contrat n’est pas rapportée ;

En conséquence,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. X de ses demandes en nullité du contrat conclu avec GSF et a fortiori du contrat de crédit ;

Débouter M. X de sa demande en résolution judiciaire du contrat de vente et a fortiori du contrat de crédit ;

Sur le contrat de crédit,

Dire et juger que le contrat de crédit est parfaitement valable et qu’il a un objet certain ;

En conséquence,

Débouter M. X de sa demande en nullité du contrat ;

Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la banque ;

À titre reconventionnel :

Dire et juger qu’en conséquence du défaut de paiement de M. X, la déchéance du terme est acquise ;

Condamner M. X à payer à BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Banque Solféa de la somme de 24 158,79 € correspondant au montant du capital prêté augmenté de pénalités.

À titre plus subsidiaire, pour le cas où le contrat de crédit serait annulé ou résolu :

Condamner M. X à restituer à BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Banque Solféa l’intégralité du capital restant dû à la date du jugement, soit la somme de 19 900 €, sous déduction des échéances déjà payées, mais avec intérêts au taux légal à compter de la remise des fonds ;

Dire et juger que Banque Solféa n’a pas commis de faute ;

Dire que M. X ne caractérise pas son préjudice ;

Dire que M. X ne caractérise pas non plus pas son préjudice moral;

Dire et juger que les liens de causalité entre fautes de la banque et préjudices éventuellement ne sont pas caractérisés ;

Dire qu’en toute hypothèse M. X ne justifie d’aucun préjudice équivalent au montant du capital emprunté ;

En conséquence,

Débouter M. X de toutes demandes de dommages et intérêts à l’encontre de Banque Solféa ;

Débouter M. X de sa demande tendant à être dispensé de restituer à la banque le capital emprunté ;

À titre infiniment subsidiaire, si la cour estimait que la responsabilité de Banque Solféa est engagée :

Dire et juger que le montant du préjudice de M. X ne peut être égal au montant du contrat de crédit principal et réduire le montant des dommages et intérêts à de plus justes proportions.

En toute hypothèse :

Condamner M. X à payer à BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Banque Solféa la somme de 2 500,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Le condamner aux dépens et admettre Lexavoué Bordeaux, au bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Elle soutient que la société venderesse n’est plus valablement représentée faute de mise en cause du mandataire désormais désigné. Sur le fond, elle soutient qu’il n’est pas établi d’abus de faiblesse. Quant aux irrégularités du bon de commande elle estime que seule la production en original, comprenant les conditions générales permettrait de l’apprécier. Elle considère que les irrégularités éventuellement encourues sont sanctionnées par une nullité relative laquelle a été couverte au regard, en particulier, de la signature de l’attestation de fin de travaux et des démarches accomplies après la mise en service. Elle soulève l’irrecevabilité de la demande en résolution formée pour la première fois en cause d’appel et en discute le bien fondé au regard de la faiblesse des griefs. Elle se prévaut de la déchéance du terme et conteste qu’il existe une cause de déchéance du droit aux intérêts. Subsidiairement, elle conteste avoir commis une faute et prétend au remboursement du capital prêté majoré des intérêts au taux légal. Elle précise qu’aucune disposition légale ou réglementaire ne l’oblige à détenir le bon de commande alors en outre que la copie du bon de commande qui lui a été remise comprenait les mentions obligatoires. Elle se prévaut de l’attestation de fin de travaux et soutient qu’elle a été signée par M. X ou qu’à tout le moins l’imitation n’était pas aisément décelable. Elle ajoute que si une faute était retenue à son encontre, celle-ci ne saurait la priver de l’intégralité du capital prêté. Elle considère que le préjudice ne pourrait résulter que de l’absence de mise en service qu’elle se propose pourtant d’offrir.

Par acte du 16 juin 2017, M. X a mis en cause la D Y MJ désignée comme mandataire à la liquidation judiciaire de la SAS Nouvelle Régie des Jonction de Energies de France et lui a notifié la déclaration d’appel, les écritures des parties et ses pièces.

La D Y ès qualités de liquidateur de la SAS Nouvelle Régie des Jonction de Energies de France, en remplacement de la SCP B Y, précédemment désignée, n’a pas constitué avocat.

La clôture de la procédure a été prononcée selon ordonnance du 22 juin 2017.

À l’audience, la BNP a été invitée à produire, par note en délibéré à 8 jours, sa pièce 9 (attestation de fin de travaux) en original. Il n’a pas été produit l’original de la pièce, la banque indiquant ne pas la détenir dans une note en délibéré du 20 juillet 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La D Y MJ a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Nouvelle Régie des Jonction de Energies de France aux lieux et places de la SCP B Y initialement désignée, étant observé que cette dernière était prise en la personne de maître Y aux termes du jugement de désignation initiale. Si la personnalité morale a évolué, c’est bien maître Y qui exerce le mandat propre à la liquidation judiciaire. En toute hypothèse l’appelant a procédé à la mise en cause de la nouvelle entité désignée comme liquidateur judiciaire. Si une constitution de cette nouvelle entité aurait pu conduire à envisager une révocation de l’ordonnance de clôture, il n’en demeure pas moins que le délai de quinzaine depuis cette mise en cause est expiré et qu’il n’est pas intervenu de constitution d’avocat. La procédure est donc régulière et la cour en mesure de statuer au fond.

Il est justifié de la cession de créance au profit de la BNP de sorte que cette société vient bien aux droits de la Banque Solféa.

Sur le fond, M. X invoque à titre principal une annulation du contrat conclu le13 septembre 2012 pour abus de faiblesse et pratique commerciale agressive. C’est cependant à bon droit que le premier juge a écarté à ce titre toute cause de nullité. En effet, M. X n’apporte aucun élément de preuve permettant de caractériser qu’il aurait été dans une situation de faiblesse ou d’ignorance connue de son co contractant, lequel en aurait abusé au sens des dispositions de l’article L 121-8 du code de la consommation. M. X développe certes à ce titre une argumentation quant à l’inadaptation du contrat à sa situation mais n’apporte aucun élément démonstratif quant à sa situation de faiblesse. De même s’il invoque des pratiques commerciales agressives, il ne procède que par affirmations et ne produit pas d’élément démonstratif étant observé que sa pièce 2 correspondant à la simulation qui aurait été faite par le commercial n’est ni datée, ni signée et ne peut donc, alors en outre qu’il s’agit du seul élément de preuve, constituer la démonstration de pratiques commerciales agressives.

En revanche, il est constant que le contrat conclu le 13 septembre 2012 entre la société Groupe Solaire de France d’une part et M. X d’autre part l’était dans le cadre d’un démarchage à domicile. Il devait donc respecter le formalisme de l’article L 121-23 de l’ancien code de la consommation tel qu’applicable au jour de la formation du contrat. M. X dans ses écritures se prévaut expressément des dispositions des anciens articles L 121-23 et L 121-24 du code de la consommation et reprend les énonciations qui y sont contenues quant aux mentions obligatoires du contrat.

Force est de constater que le bon de commande produit ne satisfait pas à ces obligations et qu’il n’y satisfait pas au delà de ce qu’a retenu le premier juge. La cour observe en premier lieu qu’il n’y est pas mentionné les conditions d’exécution du contrat en particulier quant au délai de livraison, ainsi que l’a dit le premier juge. Celles-ci ne sont précisées que dans les conditions générales sous forme d’un délai générique de trois mois. En outre, la description des biens est particulièrement imprécise puisqu’elle se limite à la mention d’une installation photovoltaïque d’une puissance globale de 2 960 Wc sous forme de 12 panneaux de 250 Wc sans aucune précision sur la marque ainsi que sur les caractéristiques essentielles des panneaux eux mêmes et de l’ensemble du dispositif. Alors qu’il était prévu un financement à crédit, aucune mention quant au taux d’intérêt et au montant des échéances ne figure sur le bon de commande. Le bordereau de rétractation n’est pas facilement détachable, étant observé que c’est bien l’original du bon de commande qui est produit.

La BNP ne s’explique d’ailleurs pas véritablement sur les carences du bon de commande au regard des dispositions impératives du code de la consommation. Elle fait valoir que M. X avait nécessairement connaissance des vices affectant son contrat et que la nullité relative n’est pas encourue. Elle invoque à ce titre les dispositions de l’article 1338 du code civil telles qu’applicables antérieurement au 1er octobre 2016. Cependant, si la nullité encourue est certes relative, en ce sens que bien que procédant du non respect de règles relevant d’un ordre public de protection, elle est susceptible de régularisation, encore faut-il que toutes les conditions d’une régularisation soient remplies et qu’en particulier M. X ait eu l’intention de réparer le vice dont il avait connaissance. En l’espèce, on ne peut caractériser aucune intention en ce sens. On ne peut en particulier considérer que M. X, simple consommateur, avait connaissance des insuffisances du bon de commande et entendait les réparer en laissant les travaux se réaliser. Cela est contraire aux dispositions, par nature protectrices du consommateur, édictant les nullités et qui prévoient des mentions dans les contrats non au seul titre de conditions générales mais bien au titre des conditions particulières qui sont celles sur lesquelles l’attention du consommateur peut et doit être alertée. Le rappel dans les conditions générales des dispositions du code de la consommation ne saurait constituer la connaissance du vice sauf à priver d’effet ces mêmes dispositions imposant le rappel d’éléments essentiels du contrat au titre des conditions particulières. Quant à l’absence de rétractation, on ne saurait déduire d’une simple abstention une ratification du contrat, étant en outre observé que le formulaire n’était pas aisément détachable. Le seul fait que M. X ait admis, dans sa réponse aux services de protection économique du consommateur (pièce 7) qu’il avait signé un document de fin d’installation ne saurait démontrer qu’il entendait réparer des vices dont il avait connaissance. On ignore d’ailleurs quel document a précisément été signé par M. X. Celui produit à ce titre par la banque (pièce 9) outre qu’il serait en lui même insuffisant à démontrer la connaissance par M. X des irrégularités du contrat est contesté par l’appelant qui dénie sa signature, point sur lequel il sera revenu ci-après.

Si M. X a effectivement entamé les démarches pour la mise en service de l’installation en janvier 2014, il apparaît également qu’il a immédiatement adressé une réclamation à la société GSF, ce qui ne saurait caractériser un acte non équivoque de ratification.

Il n’est donc pas justifié d’une ratification des causes de nullité du contrat, de sorte que c’est la nullité du contrat principal qui est encourue. Le jugement sera ainsi infirmé et la nullité prononcée. Si aucune des parties ne s’est expliquée spécifiquement de ce chef, cette nullité emporte de plein droit la faculté pour la liquidation judiciaire de reprendre possession, à ses frais et avec remise en l’état antérieur du toit, des panneaux. Il sera précisé un délai de 3 mois à compter de la signification de l’arrêt pour cette remise en état. La question de la résolution du contrat pour inexécution présentée à titre subsidiaire devient sans objet.

Par application des dispositions de l’article devenu L 312-55 du code de la consommation, cette annulation du contrat principal emporte annulation de plein droit du contrat de prêt qui en est l’accessoire. Par suite de cette annulation, l’emprunteur doit en principe restituer les fonds versés par le prêteur au titre de la remise en état consécutive d’une annulation, sauf faute du prêteur.

En l’espèce, la banque a bien commis une faute. Il apparaît qu’elle avait parfaitement les moyens par une vérification, même sommaire, du bon de commande de se convaincre que le contrat était susceptible d’encourir une nullité. S’il est exact qu’aucune disposition n’impose la communication au prêteur de l’original du bon de commande, il n’en demeure pas moins que dans le contrat de crédit l’installation financée était décrite de manière on ne peut plus sommaire (pack photovoltaïque sans autre précision même de puissance globale), de sorte que la banque ne pouvait savoir ce qu’elle finançait précisément que par la production du bon de commande. Il résulte expressément du contrat qu’elle demandait la communication du devis détaillé. Aucun devis détaillé n’a été produit et seul le bon de commande a du l’être ce qui permettait, encore une fois par un examen sommaire, de s’assurer de causes de nullité et de l’absence de précision quant aux biens fournis. La banque, professionnelle du crédit, ne pouvait ignorer les règles applicables et ne pouvait que détecter les très nombreuses irrégularités dès communication du dossier.

Quant à l’attestation de fin de travaux dont se prévaut la BNP, si M. X a admis avoir signé un document de fin d’installation on ignore quels étaient ses termes et il ne peut être contrôlé par la cour. Le seul document produit est l’attestation de fin de travaux versée aux débats par la banque en pièce 9. Cependant, M. X dénie sa signature sur ce document, ce qui constitue un incident de vérification au sens des dispositions des articles 287 et suivants du code civil. Or, il résulte de la pièce produite par la banque, au demeurant en copie de fort mauvaise qualité, que la signature apposée sur ce document n’est manifestement pas celle de M. X. La banque se contente de soutenir que la signature de celui-ci serait évolutive et que la falsification si elle existe n’est pas aisément décelable. Cependant, la cour constate qu’au delà des évolutions que peut connaître toute signature, celle qui figure sur le document produit par la banque ne correspond en rien à celle figurant sur le bon de commande et sur le contrat de prêt ainsi que sur la fiche de solvabilité, même si certains de ces documents sont fort peu lisible. La discordance des signatures était bien apparente étant observé qu’en toute hypothèse, la banque ne saurait opposer à l’appelant un document qu’il n’a manifestement pas signé, sans qu’il y ait lieu pour la cour de recourir à une mesure d’instruction supplémentaire, étant observé qu’il n’a pas été produit l’original demandé. Si, comme l’indique la banque dans la note en délibéré il n’existe pas de disposition légale ou réglementaire imposant la détention par elle d’un original, force est de constater que face à un incident de vérification, aucun original n’a été remis et que la copie produite fait apparaître une signature ne correspondant pas à celle de celui à qui on l’oppose. En outre, au delà même de la signature et à supposer que la banque n’ait pas été en mesure de détecter la fausse signature, le document présentait en lui même des incohérences. En effet, la case correspondant à une demande de réduction du délai de rétractation était cochée, sans que soit produite une demande expresse rédigée et datée de la main du client alors que le document rappelle une telle exigence, ce qui était apparent par un simple contrôle formel.

En outre, les termes mêmes de l’attestation ne pouvaient en toute hypothèse exonérer la banque de toute faute. Au contraire, outre les manquements relevés ci-dessus, l’attestation était tout aussi laconique que le bon de commande lui même. Il était ainsi mentionné que les travaux suivants : photovoltaïque étaient terminés et conformes au devis. Si la banque n’a effectivement pas les moyens de s’assurer in situ de la réalité et du caractère complet des travaux, encore faut-il que les documents qui lui sont adressés sur cet achèvement permettent à minima de s’assurer que l’ensemble des travaux a bien été réalisé. Cela ne saurait être le cas lorsque les travaux sont désignés de manière aussi vague dans l’attestation et qu’il ne peut être suppléé à cette imprécision par le renvoi au bon de commande lequel est tout aussi imprécis.

En outre, il était expressément mentionné dans l’attestation que les travaux n’étaient pas complets. En effet, il était indiqué que les travaux ne couvraient pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles. Or, si ces éléments dépendent certes d’un tiers, il n’en demeure pas moins qu’il résulte du bon de commande, aussi succinct soit-il, que ces prestations étaient incluses et n’étaient pas à la charge du client. En effet, les démarches énumérées ainsi que suit : raccordement de l’onduleur au compteur, obtention du contrat de rachat de l’électricité produite, démarche auprès du consuel étaient mentionnées à la charge de Groupe Solaire de France de sorte qu’elles étaient bien dans le champ contractuel. Il était encore précisé à la rubrique observations sous réserve d’acceptation de la commission et des démarches administratives.

Dès lors, l’attestation dans les termes rappelés ci-dessus emportait en elle-même une discordance avec le contrat dont elle ne pouvait constater l’exécution et ne pouvait permettre de libérer les fonds.

Il existe donc bien une faute de la banque à la fois dans l’accord de financement et dans le déblocage des fonds. Au regard des dispositions combinées des articles L 311-20 et L 311-21 du code de la consommation telles qu’applicables au jour du contrat, les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de l’exécution de la prestation de service qui doit être complète. Dès lors que le prêteur a délivré les fonds au vendeur sans s’assurer que celui-ci avait exécuté complètement son obligation, compte tenu de l’insuffisance manifeste de l’attestation de fin de travaux, il a bien commis une faute le privant de la possibilité de se prévaloir, à l’égard de l’emprunteur, des effets de l’annulation du contrat de prêt.

À titre subsidiaire, la banque soutient que le montant du préjudice de M. X ne saurait être égal au montant du contrat de crédit en principal et demande qu’il soit réduit à de plus justes proportions. Cependant, il apparaît que le contrat principal est annulé de sorte que la liquidation judiciaire de Groupe Solaire de France a la faculté de faire ôter les panneaux photovoltaïques pour réaliser l’actif, peu important en droit la probabilité ou non d’un retrait effectif. Dès lors c’est bien une privation totale de son droit à remboursement qui doit être appliquée au prêteur puisque les fautes de la banque ont eu pour conséquences directes le financement d’un contrat qui est annulé et d’un matériel qui ne peut être utilisé.

C’est donc à tort que la BNP prétend à la condamnation au paiement de M. X de quelque somme que ce soit. L’appelant ne peut être condamné au paiement des sommes dues au titre d’un prêt déchu du terme puisque le contrat est annulé. Il ne peut davantage être condamné au paiement du capital à titre de restitution puisque la banque est privée de cette créance de restitution. La BNP sera en conséquence déboutée de ses demandes et condamnée à restituer à M. X le montant des échéances par lui payées.

M. X sollicite enfin la condamnation solidaire du vendeur représenté par son liquidateur et de la banque à des dommages et intérêts. S’agissant du vendeur, aucune condamnation ne peut intervenir et seule pourrait être envisagée une fixation au passif. Or, si M. X justifie d’une déclaration de créance celle-ci n’a été faite que pour 1 € à titre provisoire et sans aucune référence à une créance indemnitaire. Quant à la banque, si la cour retient des fautes la privant de sa créance de restitution, M. X ne justifie pas d’un préjudice subsistant après dispense de remboursement du capital en lien de causalité avec les fautes de la banque telles que retenues ci-dessus. Il invoque en effet un préjudice moral dont il ne justifie pas et un préjudice en lien avec des infiltrations qui ne pourrait procéder que de l’installation technique des panneaux et non des actes de la banque. M. X sera donc débouté de sa demande indemnitaire.

L’appel est à titre principal bien fondé et la BNP sera condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement de la somme de 2 000 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Reçoit la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la Banque Solféa en son intervention,

Déclare les demandes de M. X recevables,

Infirme le jugement entrepris

Statuant à nouveau,

Prononce la nullité du contrat conclu entre M. X et la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France le 13 septembre 2012,

Dit que cette nullité emporte remise en l’état antérieur et que la liquidation judiciaire de la SAS Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France pourra reprendre à ses frais les panneaux photovoltaïques si elle assure la remise en état du toit, et ce dans un délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt,

Prononce la nullité subséquente du contrat de prêt conclu selon offre préalable du 13 septembre 2012 entre la banque Solféa aux droits de laquelle se trouve la SA BNP Paribas Personal Finance et M. X,

Dit que les fautes de la banque la privent de sa créance de restitution du capital emprunté,

Déboute la SA BNP Paribas Personal Finance de toutes ses demandes,

Condamne la SA BNP Paribas Personal Finance à restituer à M. X le montant des échéances du prêt réglées,

Condamne la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à M. X la somme de 2 000 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens d’appel et dit qu’il pourra être fait application au titre des dépens d’appel des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Madame Elisabeth LARSABAL, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,



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Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 21 septembre 2017, n° 15/08101