Cour d'appel de Caen, 27 novembre 2015, n° 12/01404

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Caen, 27 nov. 2015, n° 12/01404
Juridiction : Cour d'appel de Caen
Numéro(s) : 12/01404
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lisieux, 17 avril 2012, N° F11/00129

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE : N° RG 12/01404

Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Conseil de prud’hommes – Formation de départage de LISIEUX en date du 18 Avril 2012 RG n° F11/00129

COUR D’APPEL DE CAEN

2° Chambre sociale

ARRET DU 27 NOVEMBRE 2015

APPELANT :

Monsieur Z-A Y

11 route de Saint A

XXX

Représenté par Me Eric SCHNEIDER, avocat au barreau de LISIEUX

INTIMEE :

SAS ADREXO

XXX

XXX

XXX

Représentée par Me Isabelle D’AUBENTON, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame TEZE, Présidente de chambre, rédacteur

Madame GUENIER-LEFEVRE, Conseiller,

Madame LEBAS-LIABEUF, Conseiller,

DEBATS : A l’audience publique du 24 septembre 2015

GREFFIER : Mme X

ARRET prononcé publiquement le 27 novembre 2015 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, par prorogation du délibéré initialement fixé au 20 novembre 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame TEZE, président, et Mme X, greffier

Faits – Procédure :

M. Y a été engagé en qualité de distributeur par la société SDP devenue Adrexo ayant pour objet la distribution de journaux, d’imprimés et d’objets publicitaires, suivant contrat à durée indéterminée à temps partiel du 28 février 2000 auquel a été substitué le 30 mai 2005 un contrat de travail à temps partiel modulé à effet du 18 juillet 2005 modifié par avenant du 2 juin 2006.

Par lettre du 4 décembre 2006, M. Y a notifié à l’employeur sa démission au motif qu’il n’avait pas été rémunéré à hauteur du travail effectué.

Le 18 avril 2007, M. Y a saisi le conseil de prud’hommes de Lisieux d’une demande en paiement de rappel de salaire et d’indemnités kilométriques qu’il a modifiée ultérieurement, sollicitant la désignation d’un expert aux fins de déterminer le montant de ce chef de créance, l’allocation d’une provision ainsi que le paiement de dommages-intérêts pour non respect de la procédure de licenciement et licenciement abusif.

Par jugement en date du 18 avril 2012, cette juridiction a débouté M. Y de l’intégralité de ses demandes et mis les dépens à sa charge.

Le 15 mai 2012, M. Y a interjeté appel de cette décision.

Lors de sa première comparution, l’appelant a formé de nouvelles demandes dont la requalification à temps plein de son contrat à temps partiel.

Par arrêt avant dire droit du 16 janvier 2015, cette cour a ordonné la production aux débats de l’original du contrat de travail initial liant les parties et renvoyé l’affaire à l’audience du 12 juin 2014 au cours de laquelle celles-ci ont indiqué ne pas le détenir.

Toutefois, M. Y ayant déclaré avoir travaillé auprès de la société Continent durant l’exécution des contrats le liant à la société Adrexo, l’affaire a été à nouveau renvoyée pour production des contrats conclus avec la société tiers et qu’il en soit débattu dans le respect du contradictoire.

L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 24 septembre 2015.

Aux termes de ses conclusions déposées et reprises oralement par son conseil auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, M. Y demande à la cour de :

— infirmer le jugement entrepris ;

— à titre principal ;

— requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein ;

— condamner la société Adrexo au paiement des sommes suivantes :

—  29.208,21 € à titre de rappel de salaire pour la période allant d’avril 2002 à juin 2005 ;

—  2.920,82 € au titre des congés payés afférents ;

—  500 € à titre de dommages-intérêts au regard de l’absence d’information de la convention collective applicable ;

—  1.134,08 € à titre de rappel de prime d’ancienneté pour la période allant d’avril 2002 à juin 2005 ;

—  113,41 € au titre des congés payés afférents ;

—  14.316,09 € à titre de rappel de salaire pour la période allant de juillet 2005 à décembre 2006;

—  1.431,61 € au titre des congés payés afférents ;

—  786,24 € à titre de rappel de prime d’ancienneté pour la période allant de juillet 2005 à décembre 2006 ;

—  78,62 € au titre des congés payés afférents ;

—  5.000 € à titre de dommages-intérêts pour violation des dispositions légales relatives au temps partiel modulé ;

—  600 € à titre de dommages-intérêts pour absence de visite médicale d’embauche ;

—  7.525,68 € à titre d’indemnité pour travail dissimulé en application des dispositions de l’article L.8223 du code du travail ;

—  5.000 € à titre de dommages-intérêts pour l’avoir contraint à utiliser son domicile privé à des fins professionnelle ;

— ordonner la rectification des bulletins de salaire en conformité avec les condamnations prononcées, et ce sous astreinte définitive de 150 € par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir, et ordonner la régularisation de sa situation auprès des organismes sociaux concernés et le versement des cotisations supplémentaires liées aux différents rappels ;

— à titre subsidiaire,

— désigner un expert avec pour mission de déterminer le rappel de salaire et les frais dus pendant toute la période d’exécution du contrat de travail ;

— d’ores et déjà,

— condamner la société Adrexo au paiement d’une somme provisionnelle de 47.876,73 € à valoir sur le rappel de salaire ;

— en tout état de cause, requalifier sa démission en licenciement,

— condamner en conséquence la société Adrexo au paiement des sommes de :

—  2.508,56 € représentant deux mois de salaires à titre de dommages-intérêts pour non respect de la procédure de licenciement ;

—  30.102,72 € représentant deux ans de salaire à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;

— condamner la société Adrexo au entiers dépens incluant les frais d’exécution de la décision à intervenir ainsi qu’au paiement de la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Aux termes de ses conclusions déposées reprises oralement auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, la société Adrexo demande au contraire de :

— à titre principal, débouter M. Y tant de ses demandes formées à titre principal que subsidiaire;

— subsidiairement, fixer le rappel de salaire dû pour la période écoulée entre l’embauche de M. Y et juillet 2005 à 23.306 € bruts et les congés payés afférents à 2.306 € ;

— en tout état de cause, débouter M. Y de ses demandes aux fins de requalification de sa démission en prise d’acte de la rupture aux torts de l’employeur produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, paiement de dommages-intérêts pour non respect de la procédure de licenciement, licenciement abusif, et utilisation sous la contrainte de son domicile privé à des fins professionnelles et indemnité au titre des frais irrépétibles ;

— condamner M. Y aux dépens et éventuels frais d’exécution de l’arrêt à intervenir ainsi qu’au paiement d’une somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Motifs

— Sur la requalification du contrat de travail antérieur au contrat de travail à temps partiel modulé

Selon l’article L.212-4-3 devenu L.3123-14 du code du travail le contrat de travail à temps partiel doit être établi par écrit et préciser la durée hebdomadaire ou mensuelle prévu et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les intervalles du mois.

Il en résulte que l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps complet et il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur.

En l’espèce, les parties déclarent être dans l’impossibilité de produire aux débats le contrat initial à temps partiel constatant l’engagement de M. Y par la société SDP devenue Adrexo, tout en s’accordant sur la date de prise d’effet du 28 février 2000.

Par ailleurs, la cour a constaté dans son précédent arrêt du 16 janvier 2015 que selon les mentions de l’acte daté du 15 mars 2003, M. Y était engagé aux fins de réaliser une vacation de préparation et de distribution prévue le lundi sur le secteur de Lisieux, la vacation contractuelle correspondant à la préparation lorsqu’elle est requise et à la distribution de '320 BAL poignées de document sur un secteur de type de densité 3".

Il résulte de ce qui précède qu’il n’est justifié d’aucun contrat écrit à temps partiel comportant les mentions légales requises de sorte que la présomption d’un contrat de temps de travail à temps complet a vocation à s’appliquer.

Le système de pré-quantification de la durée de travail opposé par la société Adrexo ne peut valoir preuve contraire d’un contrat de travail à temps partiel en ce qu’il ne permet pas de vérifier la durée effective du travail convenue ni que le salarié avait connaissance des rythmes de travail et ne devait pas se tenir en permanence à la disposition de l’employeur.

S’il est exact qu’au cours de la période considérée, M. Y a travaillé pour le compte de la société Continent à partir du 21 février 2000 sur la base de 30 heures par semaine élevée à 35 heures à compter du 6 mars suivant, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée, pour autant cette circonstance ne fait pas preuve de la durée exacte du travail convenue entre le salarié et la société Adrexo laquelle au demeurant ne la précise pas.

De plus, les feuilles de route et rapports journaliers de distribution ainsi que les bulletins de salaire révèlent une grande variation dans la quantité des documents remis aux fins de distribution et la rémunération corrélative de sorte que la durée de travail mensuelle ou hebdomadaire s’en trouvait affectée dans les mêmes proportions.

La société Adrexo succombant dans la charge de la preuve, il y a lieu de requalifier en contrat de travail à temps complet à effet du 28 février 2000, les contrats de travail ou avenant conclus antérieurement au contrat de travail à temps partiel modulé.

En conséquence, la société Adrexo sera condamnée à un rappel de salaire pour la période d’avril 2002 à juin 2005 calculé sur la base du taux horaire du SMIC applicable au temps considéré, soit après déduction du salaire versé, la somme de 23.306 € bruts telle que fixée à titre subsidiaire par la société Adrexo outre celle de 233,06 € au titre de l’indemnité de congés payés afférents.

— Sur la prime d’ancienneté

Il n’est pas contesté qu’à compter de juillet 2005, la convention collective de la distribution directe signée le 9 février 2004 et étendue par arrêté du 16 juillet 2004 s’applique à la relation de travail.

S’agissant de la période antérieure, M. Y est bien fondé à revendiquer le bénéfice de la convention collective nationale de travail des cadres, techniciens et employés de la publicité française du 22 avril 1955, étendue par arrêté du 29 juillet 1955, en ce que la société Adrexo a pour activité essentielle la distribution de documents publicitaires et de journaux gratuits, ce dont il se déduit qu’elle était appelée à intervenir dans le cadre de campagnes publicitaires dont son activité constituait l’un des vecteurs et qu’elle faisait dès lors partie du groupe APE 77-10 'créateurs et intermédiaires en publicité’visé dans le champ d’application de cette convention.

En conséquence, M. Y est en droit de solliciter l’application de l’article 18 de la convention collective qui prévoit le versement d’une prime égale au moins à 3 % pour trois années d’ancienneté révolues puis 1 % par année supplémentaire, pour la période d’avril 2002 à juin 2005 inclus.

Les parties seront en conséquence renvoyées à en faire le calcul en considération du rappel dû calculé sur la base d’un temps complet tel qu’indiqué ci-dessus.

— Sur la requalification du contrat de travail à temps partiel modulé à effet du 18 juillet 2005

Selon l’article L.212-4-6 devenu L.3123-25 du code du travail abrogé par la loi du 20 août 2008 mais applicable à la cause, 'une convention ou un accord collectif de travail étendu ou un accord d’entreprise ou d’établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire ou mensuelle peut varier dans certaines limites sur tout ou partie de l’année à condition que, sur un an, la durée hebdomadaire ou mensuelle n’excède pas en moyenne la durée stipulée au contrat de travail.

Cette convention ou cet accord prévoit :

1) les catégories de salariés concernés ;

2) les modalités selon lesquelles la durée de travail est décomptée ;

3) la durée minimale de travail hebdomadaire ou mensuelle ;

4) la durée minimale de travail pendant les jours travaillés ;

5) les limites à l’intérieur desquelles la durée du travail peut varier ;

6) les modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié ;

7) les conditions et les délais dans lesquels les horaires de travail sont notifiés par écrit au salarié ;

8) les modalités et les délais selon lesquels ces horaires peuvent être modifiés ;

Le contrat de travail mentionne la qualification du salarié, les éléments de sa rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle de référence'.

Or, selon la convention collective de la distribution directe, les entreprises de la distribution peuvent avoir recours au travail à temps partiel modulé pour les salariés de la filière logistique, aucun contrat de travail ne pouvant avoir une durée inférieure à 2 heures quotidiennes, 6 heures hebdomadaire et 26 heures mensuelles hors modulation.

Il est par ailleurs prévu que compte tenu des spécificités de l’entreprise, la durée du travail hebdomadaire ou mensuelle des salariés à temps partiel peut être modulée sur l’année, que la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail peut varier au dessous ou au dessus de celle prévue au contrat dans la limite d’un tiers, qu’un récapitulatif mensuel des heures travaillées est annexé au bulletin de paie, que le programme indicatif de répartition de la durée du travail et les horaires de travail sont communiqués par écrit aux salariés selon les modalités définies au sein de chaque entreprise et que la durée des horaires peut être modifiée sous réserve d’un délai de prévenance de 7 jours réduit exceptionnellement à 3 jours dans certains cas, que le distributeur perçoit une rémunération assise sur la base de la grille de correspondance prévue à l’annexe III pour le volume de distribution confié, que

le calcul de temps de travail procède d’une quantification au préalable de l’ensemble des missions accomplies, en fonction de critères associés à un référencement horaire du temps de travail et que la rémunération comprend selon les modes d’organisation du travail définis dans chaque entreprise, le temps de préparation, les temps forfaitaires d’attente/chargement et le temps de déplacement du dépôt au secteur.

Conclu le 11 mai 2005, l’accord d’entreprise d’adaptation reprend notamment la durée minimale de travail hebdomadaire ou mensuelle de la convention collective.

Par ailleurs, la préquantification ne se heurte à aucune disposition légale.

En l’espèce, le contrat de travail à temps partiel modulé conclu le 30 mai 2005 stipule une durée annuelle de travail moyenne de référence de 1.039,20 heures et une durée indicative mensuelle moyenne de travail variable selon le planning de 86,60 h, réduite respectivement par avenant du 2 juin 2006 à 521,20 heures et 47,60 heures.

Le contrat précise que les distributions sont réalisées à des jours fixés par le responsable du dépôt en accord avec le salarié parmi les jours de disponibilité que le salarié communique à sa direction à son embauche, ceux-ci pouvant être modifiés d’un commun accord.

Enfin, la mention de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, n’est pas exigée dans un contrat de travail à temps partiel modulé.

Il résulte de ce qui précède que la convention collective de la distribution et l’accord d’entreprise satisfont aux dispositions légales et que le contrat de travail est régulier de sorte que la requalification du contrat en temps complet ne peut être encourue du chef d’illicéité.

Cela étant aux termes de l’article L.3171-4 du code du travail en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu des ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande et après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si la preuve des horaires de travail effectuées n’incombe ainsi spécialement à aucune des parties, il appartient cependant au salarié de fournir préalablement au juge des éléments suffisamment précis quant aux horaires de travail effectivement réalisés pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

L’article D.317-8 du code du travail précise que lorsque les salariés ne travaillent pas selon le même horaire collectif de travail, la durée est décomptée quotidiennement, par enregistrement selon tous moyens des heures de début et de fin de chaque période de travail ou par le relevé de nombre d’heures de travail accomplies et chaque semaine par récapitulation selon tous moyens du nombre d’heures de travail accomplies.

En l’espèce, avant chaque distribution, la société Adrexo remettait à M. Y une feuille de route mentionnant notamment le nombre de documents à distribuer, leurs poids, la zone à desservir, les frais et une rémunération résultant de la pré-quantification du temps de travail. Etait annexé au bulletin de salaire un détail de la rémunération définitive en fonction de ces vacations et éventuelles observations ou contestations du distributeur.

S’agissant des heures prétendument réalisées, M. Y produit un décompte personnel faisant apparaître un dépassement des horaires théoriques ou tels que résultant du décompte figurant sur les bulletins de salaire.

Toutefois, le relevé communiqué par M. Y fait mention d’horaires travaillés tels que 10 heures ou 15 heures par jour, non davantage explicités, et en tous les cas incompatibles avec l’emploi à temps complet, occupé auprès d’un autre employeur.

Ce document étant insuffisant à étayer une durée de travail à temps complet, la requalification en ce sens du contrat de travail ne peut davantage être accueillie.

S’agissant de la variation des horaires, le grief tiré du non respect de la limite du tiers fixée par la convention collective et l’accord d’entreprise est, à le supposer démontré, insuffisant en soi pour justifier une telle requalification.

Enfin, l’emploi précité occupé par M. Y auprès d’un autre employeur comportait des horaires variables impliquant une parfaite connaissance de son rythme de travail au sein de la société Adrexo.

En conséquence, M. Y sera débouté de sa demande en requalification du contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps plein.

— Sur les autres demandes formées au titre de l’exécution du contrat de travail

L’absence de visite médicale d’embauche prescrite par l’article R.4624-10 du code du travail

a nécessairement causé à M. Y un préjudice qui sera réparé, en l’absence d’autre élément, par l’allocation d’un somme de 500 €.

Le fait que l’employeur n’ait pas davantage informé M. Y de ce que la convention collective nationale de la publicité était applicable à la relation de travail jusqu’au 1er juillet 2005 lui cause également un préjudice qu’il convient d’indemniser en l’absence de données plus spécifiques par la somme de 300 €.

A défaut de local mis à disposition par l’employeur aux fins d’exécution des tâches de préparation des poignées à distribuer et en considération du fait rappelé par la société Adrexo selon lequel les partenaires sociaux ont fixé une quantification préalable du temps de la préparation effectuée à domicile, M. Y sera réputé, à défaut de preuve contraire, avoir accompli ces prestations à son propre domicile.

Cette utilisation à des fins professionnelles ouvrant droit à indemnisation, il sera alloué de ce chef la somme de 3.000 € au salarié.

S’agissant du non respect des dispositions légales relatives au temps partiel modulé, l’analyse des éléments qui précèdent ne permet pas de retenir un manquement de la société Adrexo. En conséquence, M. Y sera débouté de la demande en dommages-intérêts formée de ce chef.

— Sur la rupture

Assortie de griefs à l’encontre de l’employeur quant au non respect des règles relatives à la rémunération du temps de travail, la démission de M. Y sera assimilée en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire, d’une démission.

Or, en l’espèce le grief tiré de l’illicéité du contrat de travail à temps partiel modulé n’est pas fondé. Par ailleurs, les autres manquements constatés ayant donné lieu à une requalification assortie d’un rappel de salaire ou de primes ou à l’allocation de dommages-intérêts ne constituaient pas au regard de leur ancienneté ou manque de gravité, des obstacles à la poursuite du contrat de travail.

La rupture devant produire les effets d’une démission, M. Y sera débouté de ses demandes tendant à lui voir produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

— Sur l’indemnité pour travail dissimulé

Selon les dispositions de l’article L.8223-1 du code du travail, le salarié auquel un employeur a eu recours en violation des dispositions de l’article L.8221-5 du code du travail a droit en cas de rupture de la relation de travail à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Toutefois le seul défaut de mention sur le bulletin de paie d’un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué est en soi insuffisant à caractériser l’intention de l’employeur de se soustraire à son obligation.

L’élément intentionnel requis par le texte précité faisant défaut, M. Y sera débouté de ce chef de demande.

— Sur la remise des bulletins de salaire rectifiés et la régularisation de la situation de M. Y auprès des organismes sociaux et le versement des cotisations supplémentaires liées au rappel de salaires

Il sera enjoint à la société Adrexo d’établir et de remettre un nouveau bulletin de paie récapitulatif conforme aux dispositions de l’arrêt, de procéder après paiement aux déclarations destinées aux organismes sociaux conformément aux dispositions de l’article L.242-1 du code de la sécurité sociale.

— Sur les dépens et article 700 du code de procédure civile

Echouant pour l’essentiel, la société Adrexo supportera la charge des dépens de première instance et d’appel et sera déboutée de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il sera en revanche alloué à M. Y la somme de 2.500 € en application du même texte.

Décision

La cour

Requalifie en contrat de travail à temps complet les contrats de travail ou avenants conclus entre la société Adrexo et M. Y à compter du 28 février 2000 et pour la période antérieure au contrat de travail à temps partiel modulé à effet du 18 juillet 2005 ;

Condamne la société Adrexo à payer à M. Y la somme de 23.306 € bruts à titre de rappel de salaire outre celle de 2.330 € au titre de l’indemité de congés payés afférents ;

Condamne la société Adrexo à payer à M. Y la prime d’ancienneté due pendant cette période selon les dispositions de la convention collective nationale Publicités et Assimilés ;

Renvoie les parties pour ce faire à procéder au calcul de la prime d’ancienneté due conformément aux conditions prévues par l’article 18 de la convention collective nationale Publicité et Assimilés régissant la relation de travail jusqu’au mois de juin 2005 inclus et des salaires calculés sur la base d’un temps complet, à charge pour la plus diligente, de saisir la cour en cas de difficultés ;

Déboute M. Y de ses demandes en requalification du contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps complet et paiement de rappel de salaire et indemnité de congés payés consécutifs ;

Condamne la société Adrexo à payer à M. Y :

— la somme de 500 € à titre de dommages-intérêts pour absence de visite médicale d’embauche;

— la somme de 300 € à titre de dommages-intérêts pour défaut d’information de la convention collective Publicité et Assimilés applicable à la relation de travail jusqu’au mois de juin 2005 inclus;

— la somme de 3.000 € pour utilisation de son domicile privé à des fins professionnelles ;

Déboute M. Y de sa demande tendant à voir dire que sa démission doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que de ses demandes en paiement d’indemnités de rupture ;

Déboute M. Y de ses autres demandes en dommages-intérêts ;

Rappelle que les sommes à caractère salarial sont productives d’intérêts au taux légal à compter de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation du congés payés afférents et que celles à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Ordonne à charge de la société Adrexo de remettre à M. Y un nouveau bulletin de salaire récapitulatif conforme aux dispositions du présent arrêt et de procéder après paiement aux déclarations destinées aux organismes sociaux conformément aux dispositions de l’article L.242-1 du code de la sécurité sociale ;

Rejette la demande formée par la société Adrexo au titre des frais irrépétibles ;

Condamne la société Adrexo aux dépens de première instance et d’appel ainsi qu’à payer à M. Y la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

E. X A. TEZE

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Cour d'appel de Caen, 27 novembre 2015, n° 12/01404