Cour d'appel de Chambéry, 1ère chambre, 24 septembre 2019, n° 17/01641

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Chambéry, 1re ch., 24 sept. 2019, n° 17/01641
Juridiction : Cour d'appel de Chambéry
Numéro(s) : 17/01641
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Annecy, 5 juillet 2017, N° 14/01903
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

PG/SL

COUR D’APPEL de CHAMBÉRY

Chambre civile – Première section

Arrêt du Mardi 24 Septembre 2019

N° RG 17/01641 – N° Portalis DBVY-V-B7B-FX2E

Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Grande Instance d’ANNECY en date du 06 Juillet 2017, RG 14/01903

Appelants

SARL ANNECY ASSISTANCE DEPANNAGE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, […] […]

SCI LA CESIERE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, dont le siège social est situé […]

représentées par Me Guillaume PUIG, avocat au barreau de CHAMBERY

Intimées

SA BPI FRANCE FINANCEMENT, dont le siège social est situé […]

SA NORBAILIMMOBILIER, dont le siège social est situé […]

SA NATIXIS LEASE IMMO, dont le siège social est situé […]

représentées par la SCP BOLLONJEON ARNAUD BOLLONJEON, avocats postulants au barreau de CHAMBERY et CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE avocats plaidants au barreau des HAUTS DE SEINE

— =-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l’audience publique des débats, tenue le 20 mai 2019 avec l’assistance de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,

Et lors du délibéré, par :

—  Monsieur Philippe GREINER, Président, qui a procédé au rapport

—  Mme Alyette FOUCHARD, Conseiller,

—  Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseiller,

— =-=-=-=-=-=-=-=-

Par contrat du 06/12/2007 et avenant du 23/01/2009, les sociétés BPI FRANCE FINANCEMENT, NATIXIS LEASE IMMO et NORBAIL IMMOBILIER ont consenti à la société civile immobilière LA CESIERE un crédit bail immobilier de 15 ans pour financer la construction de locaux à usage de fourrière sur la commune de SEYNOD.

Par ordonnance du 28/06/2010, le juge des référés du tribunal de grande instance d’Annecy a constaté la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et a ordonné l’expulsion de la société civile immobilière LA CESIERE et de tous occupants de son chef, en l’occurrence, la société ANNECY ASSISTANCE DEPANNAGE (AAD).

Il a été procédé à cette expulsion le 23/06/2014.

Diverses procédures vont être engagées par la société civile immobilière LA CESIERE et la société AAD, la vente aux enchères des biens meubles étant prévue le 24/02/2017.

Ainsi, par acte du 13/10/2014, les sociétés AAD et LA CESIERE ont assigné les organismes de crédit bail devant le tribunal de grande instance d’Annecy aux fins de voir notamment prononcer la nullité du commandement délivré le 23/03/2010 et ordonner la réintégration de la société LA CESIERE dans les locaux.

Par jugement du 06/07/2017, le tribunal de grande instance d’Annecy a :

— dit les actions des sociétés AAD et la CESIERE recevables ;

— dit le commandement de payer du 23/03/2010 régulier en la forme et justifié au fond ;

— dit l’expulsion de la société AAD fondée ;

— débouté les sociétés AAD et la CESAIRE de leurs demandes ;

— dit n’y avoir lieu à expertise pour déterminer la fin d’achèvement des travaux et faire le compte entre les parties ;

— débouté les sociétés défenderesses de leurs demandes d’amende civile et de d dommages intérêts pour résistance abusive ;

— condamné les sociétés demanderesses au paiement de la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles visés à l’article 700 du code de procédure civile.

Les sociétés AAD et LA CESIERE ont relevé appel de cette décision.

Par conclusions du 13/10/2017, les appelantes ont conclu à la réformation du jugement déféré et ont réitéré leurs demandes, demandant à la Cour, dans leurs conclusions du 06/02/2018 de :

— prononcer la nullité du commandement de payer visant la clause résolutoire du 23/03/2010 et constaté que le crédit bail n’est à ce jour pas résilié ;

— ordonner la réintégration sans delais des sociétés LA CESIERE et AAD dans les locaux objets du litige ;

— fixer à 3.500 euros mensuels l’indemnité d’occupation due par la SCI LA CESIERE dans l’attente de l’issue de la procé&dure et dire que cette indemnité viendra en déduction des sommes dues par la

SCI LA CESIERE une fois effectué le compte entre les parties ;

— constater que la date d’entrée en loyers telle que fixée unilatéralement par les crédit-bailleurs ne correspond pas à la volonté des parties ;

— fixer en conséquence judiciairement la date d’entrée en loyers et pour ce faire, ordonner une expertise aux fins de déterminer la date d’achèvement des travaux au sens de l’article R.261-1 du code de la construction et de l’habitation et en considération de la destination de l’immeuble liée à l’activité des sociétés locataires ;

— dire que l’expulsion sans titre valable leur cause un préjudice, notamment d’exploitation et condamner solidairement les crédit-bailleurs à payer à la société AAD la somme de 150.000 euros de dommages intérêts au titre du préjudice en terme d’image outre celle de 1.150.000 euros à titre provisionnel au titre de la perte des agréments « autoroute » et « fourrière » ;

— ordonner une expertise pour faire le compte entre les parties et chiffrer le préjudice d’exploitation ;

— débouter les crédit-bailleurs de leurs demandes et les condamner au paiement de la somme de 15.000 euros au titre des frais irrépétibles visés à l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions du 08/12/2017, les sociétés intimées concluent à la confirmation du jugement entrepris et réclament, outre le prononcé d’une amende civile, 30.000 euros de dommages intérêts pour procédure dilatoire et abusive et 10.000 euros au titre des frais irrépétibles visés à l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 11/01/2018, le conseiller de la mise en état a ordonné la comparution personnelle des parties.

A cette occasion, les appelantes ont expliqué que :

— la société AAD, qui exerçait des activités de dépannage et de fourrière, avait un local en fin de bail ; un terrain a été trouvé alors à Seynod et une construction a été financée par un crédit-bail ;

— des travaux supplémentaires ont dû être engagés à hauteur de 200.000 euros pour finir l’immeuble, notamment concernant le goudronnage de la cour et la clôture ;

— il ne leur a pas été possible de régler les échéances du crédit-bail, d’où le litige ;

— la société AAD a été relogée dans l’ancienne concession Mercedes, et a perdu des agréments puis a pu occuper un nouveau bâtiment de 1.000 m² à Seynod, avec un nouvel agrément ;

— son chiffre d’affaires est passé de 750.000 à 600.000 euros et elle emploie trois salariés.

Les intimées ont exposé qu’elles n’ont fait qu’appliquer le contrat, que suite à un jugement de 2013 ayant réglé les litiges de la SCI avec les entreprises, il restait un disponible, que des pourparlers n’ont jamais pu aboutir, alors qu’une proposition de réaménagement avait été faite dans le cadre d’un mandat ad hoc, que les procédures opposant les parties ont été très nombreuses, et que l’expulsion a eu lieu en 2014

Des pourparlers se sont engagés devant le conseiller de la mise en état mais n’ont pu aboutir, les parties reprenant à l’audience leurs conclusions initiales.

MOTIFS DE LA DECISION

Une ordonnance de référé, même définitive, n’est qu’une décision provisoire, qui peut toujours être remise en cause par un décision statuant au fond. Dès lors, la société LA CESIERE est recevable à contester la validité du commandement qui lui a été délivré, le 23/03/2010.

Sur la signification du commandement du 23/03/2010

Les appelantes font valoir que Mme X, qui a reçu l’acte n’a pas déclaré être habilitée à le recevoir et que la copie qui lui a été remise ne l’a pas été au siège social mais à son domicile de Seynod.

Aux termes de l’article 654 du code de procédure civile, «la signification à une personne morale est faite à personne lorsque l’acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à toute autre personne habilitée à cet effet».

En l’espèce, l’acte litigieux a été remis à « Mme X Y, l’épouse du fils du gérant ainsi déclaré qui a accepté de recevoir copie de l’acte étant habilitée à le faire », étant observé que Mme X recevra de la même façon le 15/07/2010 un acte de signification de l’ordonnance de référé du 28/06/2010, en précisant qu’elle était la secrétaire de la SCI LA CESIERE.

Certes, l’acte n’a pas été délivré au siège de la société. Toutefois, l’huissier instrumentaire a pris soin de noter dans l’acte de signification que « après accord téléphonique avec le gérant M. X Z, avons remis l’acte à son domicile » et que « en l’absence de M. X Z gérant de la SCI LA CESIERE et après accord téléphonique avec lui-même, j’ai remis l’acte à son domicile […] ».

Il en résulte que l’huissier n’a pu remettre l’acte au siège de la société, qu’il a alors pris contact avec son gérant, et qu’il a été convenu qu’il le remettrait au domicile de ce dernier, ce qui a été fait, et ce qui a permis du reste à la SCI LA CESIERE de recevoir l’acte.

En outre, il sera relevé que :

— M. Z X s’est vu signifier cet acte, tant en sa qualité de caution solidaire que de gérant de la société civile immobilière LA CESIERE ; c’est ainsi qu’il a été destinataire d’un avis de signification, l’acte n’ayant pu lui être délivré à personne ;

— suite au commandement, la société civile immobilière LA CESIERE a comparu devant le juge des référés dans le cadre de la procédure d’expulsion .

Dès lors, la signification du commandement a bien respecté les exigences du texte susvisé et le commandement sera déclaré régulier.

Sur la résiliation du bail

Les appelantes font valoir que la date d’entrée en loyers doit être fixée au 1er jour du mois suivant celui au cours duquel est intervenu l’achèvement de l’immeuble, conformément à l’article R.261-1 du code de la construction et de l’habitation, et que l’immeuble n’était pas achevé au 01/10/2008.

En l’espèce :

— le 23/01/2009, les parties ont signé par devant Me GOUGUENHEIM, notaire à Paris, avec notamment la participation de Me PACAUD, notaire à Annecy, un avenant au contrat de crédit-bail stipulant enb page 6 que « la durée du présent avenant sera de 14 ans et 9 mois à compter de l’entrée en loyers fixée rétroactivement le 1er janvier 2009 » ; il en résulte que c’est d’un commun accord entre les parties que la date du 01/01/2009 a été retenue ;

— le contrat de crédit-bail prévoit, page 9, que « le crédit-preneur prend à sa charge exclusive tous les risques qui incombent au propriétaire de construction en voie d’édification (..) le transfert des risques ainsi réalisé faisant obligation au crédit-preneur d’assumer seul toutes les conséquences de la survenance de l’un quelconque de ces risques » ; dès lors, il ne peut être imputé à faute au crédit-bailleur d’avoir exigé le paiement des loyers, alors que la société LA CESIERE avait dû engager des travaux qu’elle n’avait pas prévus au départ (goudronnage et clôture du parking) ;

— du reste, la SCI LA CESIERE avait reçu mandat du crédit-bailleur de construire l’immeuble financé et de procéder à sa réception, ce qu’elle a fait ;

— le contrat de crédit-bail stipule en outre page 58 que « le montant maximum du financement des constructions par le crédit-bailleur est fixé à 896060,50 euros HT » ce qui a pour conséquence que tous les travaux supplémentaires ne pouvaient être financés par le crédit-bailleur, et qu’ils devaient donc être pris en charge par le crédit-preneur.

Dans ces conditions, aucune faute ne peut être relevée à l’encontre des intimées.

Le crédit-preneur ne s’étant pas acquitté des causes du commandement, et n’ayant pas réglé les loyers dus, un arriéré de 697.881,82 euros existant au 02/01/2014, la clause résolutoire stipulée au bail a joué, et il convient en conséquence de constater au fond, comme l’avait fait exactement le juge des référés, la résiliation du bail.

C’est donc à bon droit que le crédit-bailleur a fait procéder à l’expulsion de la société civile immobilière LA CESIERE et du locataire de celle-ci des lieux loués le 23/06/2014.

Les appelantes se verront ainsi déboutées de leurs demandes de dommages intérêts, le préjudice qu’elles allèguent n’étant pas imputable aux intimées.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes des intimées

Il y a abus manifeste lorsque le demandeur ne pouvait pas se méprendre sur l’étendue de ses droits et que ses contestations étaient dénuées de fondement ou lorsqu’un appelant ne développe aucun moyen à l’appui de son recours puis s’en désiste.

Tel n’est pas le cas en l’espèce.

Dès lors, l’abus du droit d’ester en justice n’est pas suffisamment établi, et les demandes de dommages intérêts pour procédure abusive et de condamnation au paiement d’une amende civile seront rejetées.

De même, c’est exactement que le premier juge a considéré que l’équité ne commandait pas l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance.

En revanche, concernant ceux exposés en cause d’appel, il convient de faire une application modérée des dispositions du texte susmentionné au titre des frais irrépétibles exposés par les intimées.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE solidairement la société civile immobilière LA CESIERE et la société ANNECY ASSISTANCE DEPANNAGE à payer aux sociétés BPI FRANCE FINANCEMENT, NATIXIS LEASE IMMO et NORBAIL IMMOBILIER la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles visés à l’article 700 du code de procédure civile,

LES CONDAMNE solidairement aux dépens de première instance et d’appel,

AUTORISE la SCP BOLLONJEON ARNAUD BOLLONJEON, avocats, à recouvrer directement les dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision.

Ainsi prononcé publiquement le 24 septembre 2019 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Philippe GREINER, Conseiller HH et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier, Le Président,

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