Cour d'appel de Colmar, 29 septembre 2016, n° 15/00682

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Colmar, 29 sept. 2016, n° 15/00682
Juridiction : Cour d'appel de Colmar
Numéro(s) : 15/00682
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Saverne, 22 janvier 2015

Texte intégral

ID

MINUTE N° 559/2016

Copies exécutoires à

Maître SENGELEN-CHIODETTI

Maîtres D’AMBRA & BOUCON

Maîtres CHEVALLIER-GASCHY,

RICHARD-FRICK

& HEICHELBECH

Le 29 septembre 2016

Le Greffier

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRÊT DU 29 septembre 2016

Numéro d’inscription au répertoire général : 2 A 15/00682

Décision déférée à la Cour : jugement du 23 janvier 2015 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de SAVERNE

APPELANT et demandeur :

Monsieur P Z

XXX

XXX

représenté par Maître SENGELEN-CHIODETTI, avocat à COLMAR

INTIMÉS et défendeurs :

1 – Monsieur B Y

XXX

XXX

représenté par Maîtres D’AMBRA & BOUCON, avocats à COLMAR

2 – Monsieur F A

XXX

XXX

représenté par Maîtres CHEVALLIER-GASCHY, RICHARD-FRICK & HEICHELBECH, avocats à COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 30 juin 2016, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Bernard POLLET, Président, et Madame Isabelle DIEPENBROEK, Conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Bernard POLLET, Président

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Conseiller

Madame Pascale BLIND, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Nathalie NEFF

ARRÊT Contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

— signé par Monsieur Bernard POLLET, Président et Madame Valérie ALVARO, greffier ad hoc, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * *

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES

Le 17 septembre 2009, une parcelle sise à Avolsheim section 7, XXX, a été inscrite au livre foncier de Molsheim au nom de M. B Y, au vu d’un certificat de possession trentenaire établi par le maire de la commune d’Avolsheim.

Selon acte authentique du 13 octobre 2009, M. B Y a vendu à M. F A les parcelles sises à Avolsheim section 7, XXX et 321.

Le 16 août 2012, M. P Z, contestant que M. Y soit devenu propriétaire de la parcelle XXX par usucapion, a assigné MM. Y et A devant le tribunal de grande instance de Saverne aux fins, selon ses dernières écritures, de rétractation des inscriptions prises au livre foncier au nom de M. Y puis de M. A et de constatation de la nullité de la vente passée entre eux.

Par jugement en date du 23 janvier 2015, le tribunal a déclaré la demande irrecevable et a condamné M Z au paiement d’une indemnité de procédure de 800 euros à chacun des défendeurs.

Le tribunal, après avoir constaté que, selon un bulletin de propriété établi le 7 décembre 1960, la parcelle litigieuse avait appartenu à M. X K, a considéré que M Z, qui prétend être l’arrière-petit-neveu de X K, décédé sans descendance, ne rapportait pas suffisamment la preuve de sa qualité d’héritier et donc de son intérêt à agir à ce titre, ne justifiant pas davantage de ce qu’il remplirait les conditions pour invoquer une possession trentenaire, quand bien même son père et lui auraient-ils réglés les taxes foncières relatives à cette parcelle depuis 1988.

*

M Z a interjeté appel de ce jugement le 4 février 2015.

Par conclusions transmises le 20 juillet 2015, il conclut à l’annulation, subsidiairement à l’infirmation, du jugement entrepris et demande à la cour de :

— constater son intérêt à agir,

— dire et juger que M. B Y ne pouvait se voir reconnaître la possession trentenaire,

— ordonner la rétractation de l’inscription de la parcelle litigieuses au livre foncier au nom de M. Y avec toutes conséquences de droit,

— en conséquence, dire et juger que la vente de la parcelle section 7 XXX, passée entre M. Y et M. A, est nulle et de nul effet,

— ordonner la rétraction de l’inscription au livre foncier au nom de M. A, avec toutes conséquences de droit,

— dire que M Z est propriétaire de ladite parcelle,

— subsidiairement, condamner M. Y au paiement de la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts,

— en tout état de cause, débouter 'les défendeurs’ de leurs prétentions et les condamner solidairement au paiement d’une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’appelant soutient qu’au décès de X K, qui n’avait pas d’enfants, la parcelle litigieuse a été exploitée par la soeur de celui-ci, L K, puis par le fils de cette dernière, N Z, par son petit-fils, H Z, et enfin par lui-même. Il indique justifier de son lien de parenté avec X K et, par voie de conséquence, de sa qualité d’héritier de X K et donc de son intérêt à agir.

Il prétend que la parcelle a toujours été déclarée au nom de la famille K et gérée par elle, que les taxes foncières ont toujours été réglées par les consorts K-Z, ainsi qu’il en justifie depuis 1988, et que son père avait demandé en 2005 la délivrance d’un certificat de possession trentenaire, demande restée sans suite.

Il affirme que c’est sur la base d’éléments mensongers et erronés que le maire de la commune a établi une attestation de possession trentenaire, alors que M. Y ne justifie pas d’une possession trentenaire répondant aux critères exigés par l’article 2229 (désormais 2261) du code civil, dans la mesure où, d’une part, il ne précise pas quand cette possession aurait débuté, et où, d’autre part, la parcelle est exploitée depuis 2006 par M. A.

Selon l’appelant, la possession de M. Y est en outre entachée d’équivoque, dans la mesure où, le père de l’appelant, H Z, lui avait seulement consenti une autorisation d’exploiter à titre précaire.

Il estime être fondé à demander la 'rétractation’ de l’inscription au livre foncier et la nullité de la vente, s’agissant de la chose d’autrui, sans que puisse lui être opposé le fait qu’il n’ait pas agi dès l’inscription de la parcelle au nom de M. Y, laquelle, pas plus que la vente, n’a été portée à sa connaissance.

Il considère que M. A, qui exploite la parcelle depuis 2006, ne peut invoquer sa bonne foi, dès lors que le certificat de possession trentenaire établi le 25 juin 2009 contenait des informations qu’il savait erronées, puisque faisant mention d’une possession continue et non interrompue de M. Y depuis plus de trente ans.

Subsidiairement, il estime être recevable à agir pour obtenir indemnisation de son préjudice contre le vendeur, qui a usé de la fausse qualité de propriétaire, son indemnisation ne pouvant être inférieure au prix perçu par M. Y, soit la somme de 13 337 euros et devant réparer son entier préjudice et notamment la perte de gains.

*

Par conclusions du 9 septembre 2015, M. Y conclut au rejet de l’appel, à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de M Z au paiement d’une indemnité de procédure de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

M. Y considère que, si M Z démontre être l’arrière petit-neveu de X K, il n’apporte toujours pas la preuve d’un intérêt légitime à agir et que, notamment, il n’établit pas qu’il pourrait être le propriétaire légitime du bien litigieux, qui lui serait revenu par héritage, aucun élément relatif à la succession de X K, qui était né le XXX, n’étant produit de nature à démontrer qu’il aurait plus de droits sur la parcelle litigieuse que les neuf autres arrières petits neveux du défunt.

Il relève que, si le bulletin de propriété du 7 décembre 1960 mentionne X K comme propriétaire de la parcelle, il indique également qu’à l’issue des formalités réalisées en mairie le propriétaire a été déclaré introuvable.

Il prétend que la parcelle litigieuse a été plantée et exploitée par ses soins dès 1970 jusqu’à sa mise en location en 2006 puis sa vente par acte authentique du 13 octobre 2009. Il conteste la valeur probante du courrier de H Z daté du 10 décembre 2005, lequel n’a été réceptionné en mairie que le 27 janvier 2011, et relève qu’il n’est pas justifié du paiement des taxes foncières, les avis d’imposition étant de surcroît libellés au nom de X K.

Il affirme rapporter la preuve d’une possession trentenaire répondant aux exigences de l’article 2261 du code civil.

*

Par conclusions du 29 mai 2015, M. A conclut à la confirmation du jugement déféré, à l’irrecevabilité de la demande de M Z, subsidiairement au débouté et, à titre infiniment subsidiaire, il forme un appel en garantie contre M. Y. Il sollicite enfin le versement par M Z d’une indemnité de procédure de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

M. A conteste également l’intérêt à agir de M Z et relève que, quand bien même H Z aurait-il demandé un certificat de possession trentenaire en 2005, il ne l’a pas obtenu, de sorte que cette demande ne peut valoir preuve d’un quelconque droit de propriété sur la parcelle, et que le seul paiement des taxes foncières depuis 1988 ne permet pas à M. Z d’invoquer le bénéfice de la possession acquisitive, le délai de trente ans n’étant pas écoulé.

Au fond, il invoque sa bonne foi et fait valoir qu’il n’avait aucune raison de mettre en doute le certificat de possession trentenaire établi par le maire de la commune d’Avolsheim, lequel a été avalisé tant par le juge du livre foncier que par le notaire, et qu’il ignorait que le fait qu’il exploite cette parcelle depuis 2006 puisse faire obstacle à la prescription acquisitive, laquelle était en tout état de cause acquise au profit de M. Y bien avant 2006.

Il invoque les dispositions de l’article 1599 du code civil et fait valoir que la nullité de la vente de la chose d’autrui est relative, seul l’acquéreur pouvant s’en prévaloir. Il ajoute que la vente a été transcrite au livre foncier en 2009 sans réaction de la part de M Z. Subsidiairement, il forme un appel en garantie contre M. Y.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 18 avril 2016 .

MOTIFS

Si M. Z démontre être l’arrière-petit-neveu de X K, dernier propriétaire inscrit au livre foncier, de la parcelle litigieuse, ce lien de parenté n’est pas suffisant pour démontrer sa qualité de propriétaire de la parcelle, en l’absence de tout élément relatif à la dévolution des biens de X K.

L’absence de preuve de sa qualité de propriétaire de la parcelle en cause ne prive pas pour autant M. Z de son intérêt à agir pour revendiquer la propriété de cette parcelle, dès lors qu’il invoque également la possession trentenaire.

Le jugement doit donc être réformé en ce qu’il a déclaré la demande irrecevable pour défaut d’intérêt à agir de M Z, celui-ci ayant en effet un intérêt à agir sur le fondement de la possession.

Au fond, il appartient à l’appelant de démontrer que l’inscription de la parcelle au livre foncier au nom de M. Y serait erronée et que lui-même remplit les conditions pour se prévaloir d’une possession trentenaire conforme aux exigences de l’article 2261 du code civil.

Cette preuve n’est toutefois pas rapportée par les éléments qu’il verse aux débats.

L’appelant ne justifie en effet d’aucun acte de possession effective de la parcelle litigieuse en qualité de propriétaire, alors qu’il est constant que M. A l’exploite depuis 2006, d’abord en qualité de locataire, en vertu d’un bail consenti par M. Y, puis en qualité de propriétaire depuis 2009.

La seule production des avis d’imposition au titre de la taxe foncière de 1988 à 2009, lesquels sont établis au nom de 'K X fils de Joseph', n’est pas suffisante, en l’absence de toute justification du paiement des dites taxes, à caractériser la possession invoquée par l’appelant et, en tout état de cause, ne permet pas d’établir sa durée trentenaire à la date de l’inscription de la parcelle au livre foncier au nom de M. Y.

De même, sont dépourvus de valeur probante le courrier du 10 décembre 2005 attribué à H Z, lequel n’a pas date certaine, en l’absence de preuve de sa réception en mairie avant le 27 janvier 2011, ni le courrier du maire de la commune d’Avolsheim en date du 8 août 2005, relatif à une location de chasse communale, lequel ne comporte pas les références de la parcelle concernée.

M. Z ne rapportant pas la preuve d’une possession répondant aux critères de l’article 2261 du code civil depuis plus de trente ans doit dès lors être débouté de l’ensemble de ses prétentions.

L’appelant, qui succombe, supportera la charge des dépens d’appel ainsi que d’une indemnité de procédure de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, en faveur de chacun des intimés, sa propre demande de ce chef étant rejetée.

Le jugement entrepris sera par ailleurs confirmé en ses dispositions afférentes aux dépens et aux frais non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant, contradictoirement, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement du tribunal de grande instance de Saverne en date du 23 janvier 2015, sauf en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

DÉCLARE la demande de M. P Z recevable, mais mal fondée ;

DÉBOUTE M. P Z de l’ensemble de ses prétentions ;

CONDAMNE M. P Z aux dépens d’appel ainsi qu’à payer à M. B Y d’une part, et à M. F A d’autre part, la somme de 1 500 € (mille cinq cents euros), chacun, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

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Textes cités dans la décision

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