Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 3 mai 2019, n° 17/03868

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Colmar, ch. 2 a, 3 mai 2019, n° 17/03868
Juridiction : Cour d'appel de Colmar
Numéro(s) : 17/03868
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Colmar, 26 juillet 2017
Dispositif : Délibéré prorogé

Sur les parties

Texte intégral

BP

MINUTE N° 186/2019

Copies exécutoires à

Maître ROUSSEL

La SCP CAHN & ASSOCIÉS

Le 03 mai 2019

Le Greffier

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRÊT DU 03 mai 2019

Numéro d’inscription au répertoire général : 2 A 17/03868

Décision déférée à la Cour : jugement du 27 juillet 2017 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de COLMAR

APPELANTES et défenderesses :

[…]

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège […]

[…]

2 – La S.A.S. EDF ASSURANCES

prise en la personne de son représentant légal

ayant son […]

[…]

représentées par Maître ROUSSEL, avocat à la Cour

INTIMÉS et demandeurs :

1 – Madame Z A épouse X

[…]

[…]

2 – Monsieur B X

[…]

[…]

3 – La S.A. ASSURANCES DU CREDIT MUTUEL IARD

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège […]

[…]

représentés par la SCP CAHN & ASSOCIÉS, avocats à la Cour

plaidant : Maître CALVANO, avocat à COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 15 mars 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Bernard POLLET, Président

Monsieur Emmanuel ROBIN, Conseiller

Madame Catherine GARCZYNSKI, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Dominique DONATH, faisant fonction

ARRÊT Contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

— signé par Monsieur Bernard POLLET, Président et Madame Dominique DONATH, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * *

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 31 juillet 2013, une surtension sur le réseau de distribution d’électricité a provoqué des dommages aux appareils électriques des époux X et un début d’incendie dans leur maison.

Une estimation des dommages a été réalisée le 12 novembre 2013 par les experts des assureurs des époux X et du distributeur d’électricité, la société ERDF. Les parties sont demeurées en désaccord sur l’imputabilité de l’incendie à la surtension.

Les époux X ont été indemnisés partiellement par leur assureur, la société Assurances du Crédit mutuel.

Par acte déposé au tribunal de grande instance de Colmar le 27 février 2017, la société Assurances du Crédit mutuel et les époux X ont fait assigner la société Enedis, venant aux droits et obligation de la société ERDF, et la société EDF assurances, en remboursement, pour les Assurances du Crédit mutuel, des indemnités versées à leurs assurés, et en indemnisation, pour les époux X, de leur préjudice non pris en charge par leur assureur.

Par jugement réputé contradictoire en date du 27 juillet 2017, le tribunal de grande instance de Colmar a, notamment, déclaré la société Enedis responsable des préjudices causés aux époux X lors du sinistre du 31 juillet 2013 et condamné in solidum la société Enedis et la société EDF assurances à payer la somme de 20 226,87 euros aux époux X et celle de 40 569,13 euros à la société Assurances du Crédit mutuel, avec intérêts au taux légal à compter du 14 mars 2017.

Le tribunal a considéré que la responsabilité de la société Enedis était engagée, sur le fondement de l’article 1386-1, ancien, du code civil, afférent à la responsabilité du fait des produits défectueux, y compris pour les dommages causés par l’incendie, dès lors que les époux X avaient obtenu un certificat

de conformité de l’installation électrique de leur maison et que la preuve d’une défectuosité de cette installation n’était pas rapportée. Il a entériné l’estimation contradictoire des dommages faite par les experts des assureurs des parties, alloué à la société Assurances du Crédit mutuel la somme versée par celle-ci aux époux X, sous déduction de la franchise de 500 euros prévue par l’article 1386-2, ancien, du code civil, et aux époux X le solde de leur préjudice non indemnisé par leur assureur.

*

La société Enedis et la société EDF assurances ont régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 25 août 2017.

Elles demandent à la cour d’infirmer le jugement déféré et, à titre principal, de mettre hors de cause la société EDF assurances et dire que la demande est prescrite, à titre subsidiaire de constater que l’incendie n’est pas imputable à la société Enedis, cantonner toute condamnation à son encontre à la seule réparation des appareils électriques endommagés, soit un montant de 3 520,53 euros après application de la franchise de 500 euros, et, en tout état de cause, de condamner la société Assurances du Crédit mutuel et les époux X, outre aux dépens, à verser à la société Enedis la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Les appelantes font valoir

— que l’assureur de la société Enedis est la société Axa corporate solution, et non la société EDF assurances,

— que le délai pour agir sur le fondement, seul applicable, de la responsabilité du fait des produits défectueux, était, en vertu de l’article 1386-17, ancien, du code civil, de trois ans à compter de la date où les époux X avaient eu connaissance du dommage, du défaut du produit et de l’identité du producteur, que ce délai avait commencé à courir, en l’espèce, au plus tard le 12 novembre 2013, date de l’expertise amiable, et qu’il était par conséquent expiré le 27 février 2017, date d’introduction de la présente instance,

— que l’incendie n’a pas pu être causé par la rupture du neutre, car une installation électrique conforme aux normes de sécurité doit pouvoir résister à la surtension résultant d’un tel incident et car, en l’espèce, l’installation des époux X n’était pas conforme.

*

La société Assurances du Crédit mutuel et les époux X concluent à la confirmation du jugement déféré, sauf en ce qu’il a fait application de la franchise de 500 euros prévue par l’article 1386-2, ancien, du code civil. Formant appel incident sur ce point, la société Assurances du Crédit mutuel demande que la condamnation prononcée en sa faveur soit portée à 41 069,13 euros. La société Assurances du Crédit mutuel et les époux X sollicitent chacun la condamnation des appelantes à leur payer une somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés pour leur défense en appel.

La société Assurances du Crédit mutuel et les époux X fondent leurs prétentions, à titre principal, sur l’article 1147, ancien, du code civil, afférent à la responsabilité contractuelle, au motif que la responsabilité du fait des produits défectueux serait inapplicable en l’espèce, l’alimentation en électricité assurée par la société Enedis étant 'un transport et non une production'.

Subsidiairement, sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, la société Assurances du Crédit mutuel et les époux X font valoir que le délai de prescription a été interrompu, conformément à l’article 2240 du code civil, par l’offre d’indemnisation présentée par la société Enedis le 31 juillet 2014, qui valait reconnaissance de leur droit à indemnisation, et que la prescription n’était donc pas acquise lors de l’introduction de l’instance.

Les intimés ajoutent que l’incendie a bien été provoqué par la rupture du neutre, dès lors qu’il a pris naissance dans le compteur électrique et que les époux X avaient obtenu une attestation de conformité de leur installation électrique.

*

Pour l’exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises à la cour par voie électronique

— le 11 août 2018 pour la société Enedis et la société EDF assurances,

— le 30 août 2018 pour la société Assurances du Crédit mutuel et les époux X.

L’instruction de l’affaire a été clôturée par ordonnance en date du 4 septembre 2018.

A la demande de la cour, les époux X ont fait parvenir une note en délibéré en date du 5 avril 2019, avec cinq pièces jointes, concernant la conformité de leur installation électrique.

MOTIFS

La société EDF assurances justifie qu’elle n’est pas l’assureur de la société Enedis. Elle sera donc mise hors de cause.

Sur le fondement de l’action

Aux termes de l’article 1386-4, devenu article 1245-2, du code civil, l’électricité est un produit.

Par ailleurs, si le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux qui ne sont pas destinés à l’usage professionnel, ni utilisés pour cet usage, n’exclut pas l’application d’autres régimes de responsabilité, contractuelle ou extra contractuelle, c’est à la condition que ceux-ci reposent sur des fondements différents de celui d’un défaut de sécurité du produit litigieux, telles la garantie des vices cachés ou la faute.

En l’espèce, dès lors qu’est invoquée comme cause des dommages une surtension sur le réseau de distribution d’électricité, c’est-à-dire un défaut de sécurité de l’électricité, laquelle est un produit au sens des articles 1386-1 et suivants anciens, devenus 1245 et suivants, du code civil, la responsabilité de la société Enedis, fournisseur d’électricité, ne peut être recherchée que sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux.

Sur la prescription

Selon l’article 1386-17 ancien, devenu 1245-16, du code civil, l’action en réparation fondée sur la responsabilité du fait des produits défectueux se prescrit dans un délai de trois ans à compter de la date à laquelle le demandeur a eu ou aurait dû avoir connaissance du dommage, du défaut et de l’identité du producteur.

En l’espèce, la société Assurances du Crédit mutuel et les époux X ne contestent pas que le délai de prescription a commencé à courir à compter du 'procès verbal de constatations relatives aux causes et circonstances et à l’évaluation des dommages' établi le 12 novembre 2013 contradictoirement pas les experts respectifs des parties, antérieur de plus de trois ans à la date d’introduction de l’instance.

Toutefois, l’article 2240 du code civil dispose que la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription, et il est de jurisprudence constante qu’une reconnaissance partielle du droit du créancier produit un effet interruptif de la prescription pour la totalité de la créance.

Dès lors, la prescription a été interrompue, en l’espèce, par le courrier adressé le 31 juillet 2014 par l’assureur de la société Enedis à la société Assurances du Crédit mutuel, proposant une indemnisation à hauteur de 4 020,53 euros et ne contestant que le montant des dommages imputables à la surtension.

La société Enedis n’est donc pas fondée à prétendre que l’action des intimés est prescrite.

Sur l’imputabilité de l’incendie au défaut de sécurité de l’électricité

Il n’est pas contesté qu’une surtension due à une rupture du neutre s’est produite le 31 juillet 2013 sur le réseau d’alimentation en électricité de la maison des époux X. Dès lors, le lien de causalité entre, d’une part, le défaut de sécurité de l’électricité fournie par la société Enedis et, d’autre part, non seulement les dommages causés à l’appareillage électrique des époux X, mais aussi l’incendie qui a pris naissance à cette occasion au niveau du compteur d’électricité, est établi.

Les époux X produisent un rapport d’inspection du Comité national pour la sécurité des usagers de l’électricité (Consuel) en date du 28 décembre 2009, ayant relevé trois non-conformités de leur installation électrique, et un second rapport du même organisme, établi le 16 mars 2010, après réalisation de travaux de mise en conformité sollicités, qui a permis la mise sous tension de l’installation. Ces éléments permettent de présumer que l’installation était conforme aux règles de sécurité et, en toute hypothèse, aucune non-conformité de l’installation aux normes de sécurité n’est établie, en l’absence de toute constatation en ce sens. En outre, la non-conformité ne saurait être déduite du seul fait que

l’installation aurait dû être conçue pour éviter tout risque d’incendie jusqu’à un certain niveau de surtension, alors que l’importance de la surtension survenue en l’espèce est ignorée.

Le jugement déféré sera donc confirmé, y compris en ce qu’il a fait application de la franchise de 500 euros prévue à l’article 1386-2, devenu 1245-1, du code civil, l’appel incident des époux X sur ce point devant être rejeté.

Sur les dépens et les frais exclus des dépens

Le jugement déféré étant confirmé sur le fond, il le sera également en ses dispositions afférentes aux dépens et aux frais non compris dans les dépens.

La société Enedis, qui succombe en son recours, sera condamnée aux dépens d’appel, ainsi qu’au paiement d’une somme de 2 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par les intimés en cause d’appel, ces condamnations entraînant le rejet de la demande de l’appelante tendant à être indemnisée de ses propres frais exclus des dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, après débats en audience publique,

CONFIRME le jugement rendu le 27 juillet 2017 par le tribunal de grande instance de Colmar, sauf en ses dispositions concernant la société EDF assurances ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

MET HORS DE CAUSE la société EDF assurances ;

Ajoutant au jugement déféré,

CONDAMNE la société Enedis à payer à la société Assurances du Crédit mutuel et aux époux B X et Z A, la somme globale de 2 500 € (deux mille cinq cents euros) au titre des frais non compris dans les dépens exposés en cause d’appel ;

REJETTE la demande de la société Enedis formée en cause d’appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Enedis aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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