Cour d'appel de Dijon, 11 juin 2015, n° 11/01831

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Dijon, 11 juin 2015, n° 11/01831
Juridiction : Cour d'appel de Dijon
Numéro(s) : 11/01831
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Dijon, 4 septembre 2011, N° 10/00767

Texte intégral

XXX

XXX

C/

Société FASHION C D

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE – AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE DIJON

2 E CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 11 JUIN 2015

RÉPERTOIRE GÉNÉRAL N° 11/01831

Décision déférée à la Cour : au fond du 05 septembre 2011, rendue par le tribunal de grande instance de Dijon RG 1re instance : 10/00767

APPELANTE :

XXX prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège :

XXX

XXX

représentée jusqu’au 31 décembre 2011 par Me Philippe GERBAY, avoué à la cour ayant cessé ses fonctions au 1er janvier 2012 par l’effet de la loi n°2011-94 du 25 janvier 2011, et ultérieurement par Me E FAYARD, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 89

INTIMEE :

Société FASHION C D, agissant poursuite et diligences de son président en exercice, venant aux droit de la société DHL FASHION France, venant elle même aux droits de la société DANZAS FASHION au titre de son établissement secondaire sis :

XXX

ZAE NORD

XXX

représentée jusqu’au 31 décembre 2011 par la SCP FONTAINE TRANCHAND & SOULARD, avoué à la cour ayant cessé ses fonctions au 1er janvier 2012 par l’effet de la loi n°2011-94 du 25 janvier 2011, et ultérieurement par Me Florent SOULARD, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 127, assisté de Me Nicolas COHEN STEINER, de la SELARL ATTIQUE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 09 avril 2015 en audience publique devant la cour composée de :

Madame OTT, président de chambre, président, ayant fait le rapport

Monsieur WACHTER, conseiller,

Madame DUMURGIER, conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame Y,

DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 11 juin 2015,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Madame OTT, président de chambre, et par Madame Y, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Selon acte authentique du 1er février 2001, la société civile Immotrans III a consenti à la SA Danzas Fashion une mise à disposition sous forme de sous-location de biens à usage commercial (terrain avec entrepôt de 2 432 m2 et bureaux de 150 m2), situés rue des Ardennes dans la zone d’activité économique de Dijon – Saint Apollinaire, détenus par elle en vertu d’un contrat de crédit-bail immobilier conclu avec la société Slibail Immobilier. Cette sous-location commerciale a été consentie pour une durée de 9 années à compter rétroactivement du 1er février 2001 moyennant le loyer annuel de 685 000 F, soit 104 427,57€ avec indexation et clause d’échelle mobile, pour y exercer l’exploitation d’une base de transbordement et de stockage de vêtements.

Après avoir sollicité vainement dans les termes de l’article L.145-39 du code de commerce la fixation d’un nouveau loyer (103 320 au lieu de 164 000€), la SAS DHL Fashion France, venant aux droits de la société Danzas Fashion, a assigné devant le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Dijon la société Immotrans III par acte d’huissier de justice du 19 février 2010.

Suite au dépôt du rapport par l’expert désigné par décision avant dire-droit du 30 avril 2010, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Dijon, par jugement contradictoire du 5 septembre 2011, a :

fixé à compter du 7 mai 2009 le montant du loyer commercial annuel (hors charges et taxes) à la somme de 130 000 €,

condamné en tant que de besoin DHL Fashion France à payer à la Sci Immotrans III le dit loyer,

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

condamné la Sci Immotrans III à payer à DHL Fashion France la somme de 3 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné la Sci Immotrans III aux dépens.

Pour statuer ainsi, le juge a considéré que la condition posée par l’article L.145-39 du code de commerce pour la mise en jeu de la révision du loyer par le jeu de la clause d’échelle mobile était remplie, le loyer de 164 095,42 € à l’échéance du 2è trimestre 2009 représentant une augmentation de 57% du loyer fixé contractuellement et rappelé que par application de l’article R.145-22 le juge adapte le jeu de l’échelle mobile à la valeur locative au jour de la demande.

Répondant aux critiques des termes de référence cités par l’expert judiciaire, le premier juge a considéré comme utiles 8 références présentées par l’expert en page 13 de son rapport, même si les activités ne cadrent pas exactement avec celle de DHL Fashion, car elles donnent une indication sur les valeurs locatives de bâtiments à usage d’entrepôts sur Dijon avec des chiffres assez disparates (de 29 € à 86 € le m2 par an) dont l’expert s’est bien gardé de tirer une moyenne, l’absence de foncier disponible (hors zone ZAE) ayant contribué à tirer les prix vers le haut. Il a approuvé l’expert d’avoir fait 'un mix’ entre les valeurs locales et la moyenne pour des locaux d’activité similaire implantés sur l’axe Auxerre- Marseille, soit 35 à 38 € par m2 et par an, en rappelant au surplus l’existence de surfaces d’entrepôts inoccupées à Beaune et Chalon sur Saône, voire Dijon. Il a en conséquence retenu la valeur proposée par l’expert de 130 000 € par an, hors charges et taxes.

Par acte du 30 septembre 2011, la Sci Immotrans III et son administrateur provisoire M. X H ont formé appel de ce jugement.

Par arrêt avant dire-droit en date du 7 mai 2013, la cour a mis hors de cause M. X H et a ordonné une nouvelle expertise, confiée à M. E B, avec mission de prendre connaissance du rapport d’expertise de M. Z, se rendre sur les lieux, XXX à Dijon, et de :

— décrire plus précisément les voies d’accès au site loué à la société DHL Fashion France, l’état d’entretien des locaux et la nature et l’état des équipements et moyens d’exploitation qui auraient été mis à la disposition du locataire,

— rechercher et détailler les caractéristiques d’éléments possibles de comparaison,

— donner à la cour tous éléments de fait utiles à l’appui de sa proposition quant à la valeur locative à compter du 7 mai 2009.

L’expert a déposé son rapport le 28 avril 2014.

Par ses dernières écritures du 19 février 2015, la Sci Immotrans III demande à la cour de :

'Vu l’arrêt avant dire droit rendu par la cour le 7 mai 2013 ayant désigné Monsieur B en qualité d’Expert ;

Vu le rapport déposé céans, le 24 avril 2014 et ayant à son égard tels égards que de droit;

Vu les dispositions des articles L.145-33, R.145-3 et R.145-4 du code de commerce, ensemble les pièces versées au débat ;

Constater que l’expert a, dénaturé l’activité exercée dans les lieux donnés à bail par la Sci Immotrans III qu’il a qualifiée de «messagerie» alors qu’il s’agit de «transbordement et entreposage de vêtements», identifié, à l’encontre des lieux et pour en réduire le montant du loyer, des inconvénients occultant le fait que l’implantation, la disposition, la conception et la réalisation des lieux ont été choisies par le preneur ou encore formulé des critiques dépourvues de légitimité et donc injustifiées, telles que l’inadéquation des lieux à des activités autres que celle qu’exerce la SAS DHL Fashion France ;

En conséquence, dire que ses conclusions méconnaissent ses constatations et les règles applicables et, partant, actant le fait que l’expert B n’a pas tiré de ses constatations et des pièces produites les conséquences qui s’imposaient, constater que la SAS DHL Fashion n’établit nullement que la valeur locative serait différente du loyer payé et la débouter de sa demande, d’autant plus que les mêmes constatations expertales – abstraction faite de l’impropriété de l’activité de lieux qu’il a référés- font apparaître des éléments de comparaison avec des chiffres unitaires supérieurs et donc légitiment de plus fort le loyer tel que payé à l’époque querellée ;

Et statuant sur la demande reconventionnelle de la Sci Immotrans III :

Condamner la SAS DHL Fashion France à lui payer la somme de 10 000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

La condamner enfin, en tant que de besoin, en tous les dépens d’instance – dans lesquels seront inclus les honoraires des experts Messieurs Z et B – et d’appel, jugeant que Maître Fayard, avocat à la cour, pourra les recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.'

Par ses dernières écritures du 21 novembre 2014, la SAS Fashion C D, venant aux droits de la société DHL Fashion à la suite d’un changement de dénomination sociale en date du 3 avril 2013, elle-même venant aux droits de la société Danzas Fashion, demande à la cour de :

Vu les articles L.145-39 et R.145-7 du code de commerce,

Vu le rapport de l’expert B du 25 avril 2014

donner acte à la société DHL Fashion France de ce que sa nouvelle dénomination sociale est la société Fashion C D,

donner acte à la société Fashion C D de ce qu’elle acquiesce au rapport de l’expert E B déposé le 25 avril 2014,

fixer en conséquence, la valeur locative à la somme de 150 000 € ht / hors charges et an, sur la base d’une surface de 2 647 m² de surface utile pondérée, au titre des locaux sis XXX, et ce à compter du 7 mai 2009,

débouter la Sci Immotrans III de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions contraires, et ce même d’office,

condamner la Sci Immotrans III à payer à la société la société Fashion C D une somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction en ce qui concerne ces derniers au profit de Me Florent Soulard, avocat au barreau de Dijon.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 19 mars 2015.

SUR CE :

Vu les dernières écritures des parties auxquelles la Cour se réfère ; vu les pièces ;

Attendu que la société appelante critique le rapport déposé par l’expert désigné avant dire-droit par la cour, en soulignant le caractère parfaitement adapté au preneur des locaux qui ont été implantés à l’endroit voulu par lui et conçus par lui pour l’exercice de son activité spécifique, sans équivalence sur le bassin dijonnais, et qui sont particulièrement bien desservis par un noeud routier et autoroutier répondant parfaitement aux besoins de la livraison par gros camions et la distribution aux détaillants des zones commerciales ; que l’appelante critique particulièrement la méthode retenue par l’expert qui a opéré par comparaison, à tort, avec une activité de messagerie ne correspondant en rien à l’activité spécifique de 'transbordement et stockage de vêtements’ à laquelle les locaux sont destinés, puisque les locaux sont chauffés, d’une hauteur supérieure à celle habituelle des locaux de messagerie, avec un bâtiment non traversant et un faible nombre de quais ; que l’appelante estime en conséquence que les termes de comparaison retenus sur l’agglomération dijonnaise par l’expert B sont parfaitement inopérants ;

Attendu que l’intimée réplique que l’estimation doit être faite de façon objective au regard des qualités intrinsèques des locaux, non pas en fonction de l’intérêt particulier qu’y trouve le locataire, mais pour une activité qui est une sous-catégorie de la messagerie s’agissant d’un bâtiment à usage de plate-forme logistique ; qu’elle réfute les critiques, non pertinentes, émises par le bailleur et approuve le rapport d’expertise dont elle conclut à l’homologation ; qu’elle souligne la pertinence des termes de comparaison retenus par l’expert B, alors que les locaux en cause ne sont pas des locaux monovalents, au sens de l’article R.145-10 du code de commerce, qui permettraient de sortir de la zone géographique locale pour s’attacher à des termes de comparaison dans la branche d’activité, puisque l’aménagement intérieur, constitué par des racks automatisés pour le tri des vêtements sur cintre, est un équipement démontable qu’elle a elle-même installé ;

Attendu que par application de l’article L.145-39 du code de commerce, si le bail est assorti d’une clause d’échelle mobile, la révision du loyer peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d’un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire ;

que l’article R.144-22 précise que le juge adapte le jeu de l’échelle mobile à la valeur locative au jour de la demande ;

Attendu que force est de constater que si l’appelante critique la méthode et les conclusions de l’expert B comme elle avait auparavant critiqué le rapport de l’expert désigné en première instance, pour autant elle ne remet nullement en cause le constat fait par le premier juge d’une augmentation de 57% du loyer par le jeu de la clause d’indexation, le portant ainsi à 164 095,42 € au 2e trimestre 2009, et par voie de conséquence le constat de la réunion des conditions d’application des dispositions précitées des articles L.145-39 et R.145-22 du code de commerce ;

qu’il appartient en conséquence à la cour de fixer le loyer en fonction de la valeur locative, et ce à compter du 7 mai 2009 eu égard à la date de la lettre recommandée avec accusé de réception par laquelle le preneur a demandé la révision du loyer par le jeu de la clause d’échelle mobile ;

Attendu que le bail liant les parties désigne ainsi les locaux loués : 'un bâtiment à usage de plate forme logistique de vêtements et de bureaux’ ;

que l’expert B dans son rapport a pris en compte cette désignation, en précisant que le preneur y exploite une base de transbordement et stockage de vêtements, ayant pour finalité de livrer les commerces de vêtements, qu’il s’agisse de boutiques de pied d’immeubles en centre-ville ou de coques en centre commerciaux, ce qui suppose que le bâtiment soit doté de quais en grand nombre pouvant accueillir aussi bien des poids-lourds avec remorques effectuant les transports sur longues distances que des véhicules de petite taille effectuant les livraisons auprès des commerces revendeurs ; que selon l’expert, le nombre important de quais rapporté à la surface des locaux est une caractéristique des bâtiments à usage de messagerie, sous-catégorie du générique de local à usage de plate-forme logistique ; qu’or le bâtiment comporte 14 quais, dont 10 fixes et 4 avec niveleurs, ce qui caractérise bien ici l’activité de messagerie ;

que l’expert a dans son rapport répondu au dire formé par la bailleresse pour contester cette qualification de messagerie ; que l’expert a rappelé que pour les professionnels de l’immobilier en zones d’activité, les locaux de messagerie sont 'destinés spécifiquement au transport et à la gestion rapide des flux de petits envois, inférieurs à 3 tonnes. Des véhicules gros porteurs déchargent les biens, ils sont entreposés un temps très court et chargés dans de petits porteurs qui les livrent sur la zone de chalandise proche. La proximité de cette zone est l’élément essentiel’ ; que l’expert précise encore que 'ces biens peuvent être divers (électro-ménager, bricolage, vêtements, etc.) mais les locaux les hébergeant ont tous des caractéristiques communes telles qu’un nombre de quais important rapporté à la surface de locaux, une absence de chauffage et de sprinklers, une hauteur assez faible à 7 mètres, et en général des bâtiments traversants avec quai sur les 2 longueurs. Toutefois, en fonction des biens y transitant et des besoins particuliers de chaque activité, des aménagements spécifiques sont apportés à ces locaux. Ils ne remettent toutefois pas en cause leur usage général qui est celui de messagerie ou transbordement’ ;

que la société appelante n’est donc pas fondée en sa critique de la classification faite des locaux loués, l’évaluation de la valeur locative devant se faire en fonction de la configuration des locaux relevant d’une activité de messagerie, même si le preneur y exerce une variante de messagerie ;

Attendu que s’il est établi que les locaux répondent aux besoins du preneur actuel, l’appelante justifiant par ses pièces la prépondérance de la société Danzas Fashion dans la conception et la réalisation du bâtiment, pour autant la société appelante ne peut prétendre à une spécificité telle des locaux qu’ils ne seraient susceptibles d’aucune autre utilisation ;

que certes, conformément à l’article R.145-10 du code de commerce, le prix du bail des locaux construits en vue d’une seule utilisation peut, par dérogation aux articles L.145-33 et R.145-33 et suivants, être déterminée selon les usages observés dans la branche d’activité considérée ;

que cependant, le local construit ou aménagé à l’effet de servir à un seul type d’exploitation ne peut être considéré comme monovalent que s’il ne peut être affecté à un autre usage sans des transformations importantes et onéreuses ;

Or attendu qu’il ressort du rapport d’expertise que près de la moitié de la surface du bâtiment est équipé de racks sur 2 niveaux, avec une installation automatisée destinée à déplacer les vêtements sur cintres ; que toutefois l’expert a précisé que le démontage de ces racks ne dépassera pas la somme de 15 000 €hors taxes, représentant à peine 1% de la valeur des murs, de sorte que leur enlèvement pour adapter les locaux à une activité de transbordement de marchandises d’une autre nature que des vêtements ne peut être pris comme une transformation importante et onéreuse ;

que si le bâtiment d’espèce n’est pas traversant, avec les quais d’un seul côté, contrairement à la plupart des locaux de messagerie comme le note l’expert, pour autant l’expert a spécialement répondu au dire du bailleur en indiquant que la particularité des quais unilatéraux ne suffit pas à rendre atypiques les locaux d’espèce ; que certes l’expert a tenu compte dans la valorisation d’une marge de recul dans la cour, au droit des quais, de 30 mètres pouvant induire des manoeuvres d’accès en cas d’afflux de véhicules ; que toutefois ce désavantage dans la caractéristique des locaux n’empêche pas l’utilisation des locaux à des fins de transbordement d’autres marchandises que des vêtements ;

Attendu qu’il s’ensuit que les locaux, ne nécessitant pas d’importants et onéreux aménagements ou transformations afin de servir de plate-forme de transbordement pour des marchandises autres que des vêtements, ne peuvent être qualifiés de monovalents, même s’ils ont répondu originairement aux attentes spécifiques du preneur ;

que l’appelante ne peut dès lors prétendre à comparaison avec des termes situés hors bassin géographique dijonnais ou même avec des locaux de DHL Fashion sur d’autres sites géographiques ;

Attendu que l’expert a clairement explicité les faiblesses de la méthode du rendement, conduisant à une grande imprécision de l’évaluation, de sorte qu’il a privilégié la méthode comparative de valeurs locatives sans ce que cela ne puisse lui être reproché ;

Attendu qu’il a à juste titre étudié les termes de comparaison relevant de l’activité de messagerie, en soulignant que les emplacements de ces locaux doivent se trouver à proximité des axes de communication majeurs et d’un important bassin de population ; qu’il a ainsi retenu le secteur de Dijon et celui, proche, de Beaune, qui, s’il dispose d’un bassin de population et commerces moindre, bénéficie d’une situation générale encore meilleure ; que l’expert a ainsi pris en compte la situation géographique privilégiée au regard des axes de communication et de desserte mise en avant par la société appelante ;

que l’expert a comparé 4 locaux situés à proximité de Beaune : à Savigny-les-Beaune, un local avec 2 quais de fosse pour un loyer de 34,50 €/m2, à Beaune ZAE Vignolles un local (chauffé mais non isolé) avec 2 quais complétés par 2 portes plain-pied pour un loyer de 32 €/m2, à Beaune ZAE 'bonnes filles’ un local d’une hauteur de 8,60 à 11,20 mètres, 7 quais et une porte rampe pour un loyer de 54 €/m2 et à Beaune ZAC 'blasons de Bourgogne’ un local de 8 quais, une rampe et un local de charge dans un bâtiment isolé et climatisé d’une hauteur de 10,60 mètres au minimum pour un loyer de 35 €/ m2, et 4 locaux à proximité de Dijon, tous quatre situés à Longvic : un local traversant avec 59 portes à quais électrifiées se répartissant sur 2 façades pour un loyer de 65 €/m2, un local traversant et disposant de 15 quais pour un loyer de 53,68 € /m2, un local de 40 quais sur 2 façades avec un grand espace destiné aux circulations et stationnement de véhicules de toutes tailles pour un loyer de 64,46 € /m2 et enfin un local de 4 quais et une rampe d’accès à niveau pour un loyer de 41,60 €/m2 ;

que l’expert a tenu compte du point fort que représente la situation géographique privilégiée sur la région de Dijon mais aussi de certains points faibles : local non traversant, cour de circulation et de mise à quai de dimension plutôt réduite en l’absence de sens unique autour des constructions, présence de poteaux en partie centrale de la surface de la plate-forme sans véritable gêne pour des quais situés sur une seule façade, soit des caractéristiques objectives qui amènent nécessairement à pondérer les valeurs relevées sur Longvic pour des biens aux espaces plus dégagés ;

que l’expert a ainsi, en fonction des prix constatés sur Longvic, proposé une valeur moyenne de 58 € /m2, soit 150 000 €/ an hors taxes et charges pour les locaux donnés à bail par la Sci Immotrans III ;

que la société appelante ne peut sérieusement contester ces termes de comparaison et conclusions de l’expert en se prévalant de l’absence de locaux équivalents et de la spécificité de l’activité exercée, alors que précisément la méthode de comparaison consiste à confronter des locaux qui ne sont pas rigoureusement identiques mais des locaux équivalents ou approchants, en prenant en considération leurs avantages et désavantages respectifs, étant rappelé que la valeur locative, aux termes de l’article L.145-33 du code de commerce, est notamment déterminée par les prix couramment pratiqués dans le voisinage ;

Attendu que ce rapport, par lequel l’expert a répondu de façon circonstanciée aux dires des parties, mérite de servir de base à l’évaluation du loyer du par la SAS Fashion C D ;

qu’il sera observé que la Sci Immotrans III, qui en contestant ce rapport en déduit implicitement, par le rejet sollicité des prétentions adverses, que devrait être maintenu le loyer contractuel, ne démontre toutefois pas que ce loyer, de 164 095,42 € au 2è trimestre 2009 ainsi qu’il a été précédemment rappelé, corresponde à la valeur locative effective des locaux, alors que l’avis de valeur établi à sa demande par M. A, produit par elle en pièce n°1, daté de juillet 2009, propose une évaluation de la valeur locative à cette date de 141 800 € /an hors taxes, soit inférieure au loyer contractuel ;

Attendu qu’il convient en conséquence de réformer le jugement entrepris et de fixer à compter du 7 mai 2009 le loyer dû par la SAS Fashion C D, nouvelle dénomination de la SAS DHL Fashion France, à la somme de 150 000 €/an hors taxes et charges ;

Attendu que la Sci Immotrans III qui succombe sur son appel doit être condamnée aux entiers frais et dépens d’appel ;

Attendu qu’il est inéquitable de laisser à la charge de l’intimée les frais exposés à hauteur de Cour et non compris dans les dépens ; qu’il convient de lui allouer la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS:

la Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort :

Vu l’arrêt de la cour de céans en date du 7 mai 2013

Donne acte à la SAS DHL Fashion France de ce que sa nouvelle dénomination sociale est la SAS Fashion C D ;

Réforme le jugement du juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Dijon en date du 5 septembre 2011, en ce qu’il a fixé à compter du 7 mai 2009 le montant du loyer commercial annuel (hors charges et taxes ) à la somme de 130 000 € et condamné, en tant que de besoin, la SAS DHL Fashion France à payer à la Sci Immotrans III le dit loyer ;

Statuant à nouveau dans cette limite :

Homologue le rapport d’expertise de M. B ;

Fixe, à compter du 7 mai 2009, à 150 000 €/ an (hors taxes et charges) le loyer du bail commercial liant les parties au titre des locaux situés XXX à XXX;

Confirme en toutes ses autres dispositions le jugement entrepris ;

Y ajoutant:

Condamne la Sci Immotrans III à payer à la SAS Fashion C D la somme de 2000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs plus amples prétentions ;

Condamne la Sci Immotrans III aux entiers frais et dépens d’appel, comprenant les frais de l’expertise de M. B ;

Autorise Maître Florent Soulard, avocat, à recouvrer directement conformément à l’article 699 du Code de Procédure Civile ceux des dépens dont avance a été faite sans avoir reçu provision.

Le greffier, Le président,

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