Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 8 juin 2023, n° 21/00279

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Dijon, ch. soc., 8 juin 2023, n° 21/00279
Juridiction : Cour d'appel de Dijon
Numéro(s) : 21/00279
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Mâcon, 14 avril 2021, N° 17/00197
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 13 juin 2023
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Sur les parties

Texte intégral

KG/SC

[S] [I]

C/

Caisse Primaire d’Assurance Maladie de la Saône et-Loire (CPAM)

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE – AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 08 JUIN 2023

MINUTE N°

N° RG 21/00279 – N° Portalis DBVF-V-B7F-FV6I

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Pole social du TJ de MACON, décision attaquée en date du 15 Avril 2021, enregistrée sous le n°17/00197

APPELANT :

[S] [I]

[Adresse 3]

[Localité 2]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/003417 du 08/07/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Dijon)

comparant en personne, assisté de Me Karen CHARRET de la SCP SAGGIO/CHARRET, avocat au barreau de MACON/CHAROLLES

INTIMÉE :

Caisse Primaire d’Assurance Maladie de la Saône et-Loire (CPAM)

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Mme [P] [U] (Chargée d’audience) en vertu d’un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Avril 2023 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller chargé d’instruire l’affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre,

Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,

Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Sandrine COLOMBO,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Sandrine COLOMBO, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Embauché par la société [5] au sein de l’établissement de [Localité 6] en tant que manager, M. [I] a été victime d’un accident de travail (agression par un collégue de travail), le 27 avril 2016, pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie de Saône et Loire (la caisse).

M.[I] a présenté un certificat de prolongation mentionnant de nouvelles lésions (persistance de bourdonnements de l’oreille droite, vulnérabilité psychique avec anxiété, troubles du sommeil et flashs liés à l’agression) le 2 mai 2016 qui n’ont pas été prises en charge par la caisse par décision du 31 mai 2016.

M. [I] a contesté cette décision et a sollicité une expertise médicale qui a été ordonné par le pôle social du tribunal de grande instance de Mâcon par décision du 11 décembre 2018 et par décision du 26 décembre 2019 pour un complément de mission d’expertise.

Le docteur [D] et Mme [X], psychologue, ont déposé leurs rapports.

Par jugement du 15 avril 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Mâcon :

— déboute M. [I] de ses demandes,

— condamne M. [I] aux entiers dépens qui seront recouvrés, le cas échéant, par l’aide juridictionnelle.

Par déclaration enregistrée le 3 mai 2021, M. [I] a relevé appel de cette décision.

Dans le dernier état de ses conclusions reçues à la cour le 22 décembre 2022 et reprises à l’audience sans ajout ni retrait au cours des débats, il demande à la cour de :

— réformer en tous points le jugement entrepris,

statuant à nouveau,

— dire son recours à l’encontre de la décision de rejet de la commission de recours amiable du 28 février 2017 recevable et bien fondé,

— dire que l’arrêt de travail à compter du 2 mai 2016 est justifié au titre de la législation professionnelle et non au titre de la maladie,

— le renvoyer à l’examen de ses droits.

— statuer ce que de droit sur les dépens.

Par ses dernières écritures reçues à la cour le 31 mars 2023, la caisse demande à la cour de confirmer le jugement du 15 avril 2021 et de débouter M. [I] de l’ensemble de ses demandes.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.

MOTIFS

— Sur l’imputabilité des arrêts de travail à l’accident du travail de M. [I]

M. [I] fait valoir qu’il bénéficie de la présomption d’imputabilité et que la CPAM n’apporte pas la preuve d’un état pathologique préexistant qui évoluerait pour son propre compte sans lien auquel se rattacheraient exclusivement les soins et arrêts de travail. Il estime que les expertises n’ont pas tranchées la problématique du bourdonnement dans les oreilles et qu’en ce qui concerne ses problématiques psychologiques,elles ont été exacerbées par l’accident.

La caisse indique que les soins concernant la problématique des bourdonnements de l’oreille droite ont bien été pris en charge par la caisse mais par les arrêts de travail à compter du 2 mai 2016 dans la mesure où M. [I] ne démontre pas qu’il ne peut pas exercer une activité professionnelle.

La caisse soutient que les deux experts concernant les troubles psychiques de M. [I] ont conclu qu’ils relevaient du risque maladie (antécédents anxio-dépressifs) et que les conclusions des experts s’imposent à la caisse mais également à l’assuré.

Il résulte de la combinaison des articles 1353 du code civil et L. 411-1 du code de la sécurité sociale que la présomption d’imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, dès lors qu’un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d’accident du travail est assorti d’un arrêt de travail, s’étend à toute la durée d’incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l’état de la victime et qu’il appartient à celui qui le conteste de rapporter, par tous moyens, la preuve de l’absence de lien de causalité, c’est-à-dire d’établir que les arrêts de travail et les soins prescrits en conséquence résultent d’une cause totalement étrangère au travail.

Les lésions liées à un état antérieur ou indépendant évoluant pour son propre compte et n’ayant aucun lien avec l’accident du travail ne peuvent être prises en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.

En l’espèce, le certificat médical initial du 27 avril 2016 mentionne : 'plaie et contusion oreille droite.' avec un arrêt de travail jusqu’au 28 avril 2016.

La déclaration d’accident de trajet du 27 avril 2016 indique au niveau des lésions : 'appareil auditif (oreille droit, face machoire) troubles auditifs (plaie profonde) contusion (douleur).' suite à l’agression (insulte, coups de poings) d’un collègue de M. [I] alors que ce dernier conduisait la voiture pour se rendre à une formation.

Le certificat médical de prolongation du 2 mai 2016 de l’arrêt de travail initial et après hospitalisation mentionne : 'persistance de bourdonnements de l’oreille droite, vulnérabilité psychique avec anxiété, troubles du sommeil et flashs liés à l’agression.'

L’arrêt de travail est prolongé jusqu’au 9 mai 2016 et les soins jusqu’au 31 mai 2016.

En ce qui concerne la problèmatique des bourdonnements de l’oreille droite et la surdité :

M.[I] bénéficie de la présomption d’imputabilité des arrêts de travail en lien avec l’accident du travail du 27 avril 2016.

D’une part ,le cerficat médical initial et celui de prolongation susvisés sont assortis d’un arrêt de travail et donc la présomption s’étend sur toute la durée d’incapacité de travail, contrairement à ce que prétend la caisse.

Les experts judiciaires, le docteur [D] et Mme [X], ne se sont pas prononcés sur le lien entre les lésions auditives et l’accident du travail.

Les certificats médicaux du 6 mars 2017, du 20 octobre 2018 et du 3 mars 2020 concernant les soins de M.[I] établissent les lésions auditives (surdité droite, acouphènes droits suite traumatisme et agression) en lien avec l’accident du travail.

Enfin, la caisse ne démontre pas que ces lésions auditives résultaient d’un état de santé antérieur et donc ne renverse pas la présomption d’imputabilité en apportant la preuve contraire.

En effet, les conclusions du médecin conseil, le docteur [E], dans son rapport du 4 novembre 2016, rapportent que les lésions mentionnées dans le cerficat médical du 2 mai 2016 sont en lien direct et certain avec l’accident du travail du 27 avril 2014 mais n’opérent pas aucune distinction sur le type de lésion, concluant que l’arrêt de travail se justifie au risque de la maladie. Cet avis est insuffisant pour remettre en cause les justificatifs produits par M. [I].

En ce qui concerne la problèmatique psychologique :

La présomption d’imputabilité à l’accident peut être renversée par la production d’un commencement de preuve de l’existence d’un état pathologique antérieur.

Contrairement à ce que soutient la caisse, les avis des experts judiciaires le docteur [D] et Mme [X] ne portent pas sur les mêmes questions et ne s’imposent ni à la caisse ni à la victime.

Si effectivement le psychiatre conseil de la caisse, le docteur [E], et l’expert judiciaire, le docteur [D], concluent à un état pathologique antérieur en précisant une fragilité préexistante, il n’en demeure pas moins que le rapport de la psychologue Mme [X] est particulièrement circonstancié sur l’état psychologique de M.[I] et ses conditions de vie.

Elle conclut : 'qu’ au moment de l’accident de travail il ne souffrait d’aucun état dépressif et que la tentative de suicide semble avoir été directement en lien avec l’agression subie et par les conséquences médicales qui en découlent.'

Il convient de rappeler que toutes les conséquences directes de l’accident du travail doivent être prises en charge à titre professionnel et la caisse ne démontre pas que les lésions, soins et arrêts de travail ont pour cause exclusive cet état pathologique antérieur.

Des lors que la caisse n’apporte pas d’éléments suffisants pour renverser la présomption d’imputabilité à l’accident de travail du 27 avril 2016 de M.[I], le jugement sera donc infirmé.

— Sur les autres demandes

La caisse supportera les dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par décision contradictoire,

INFIRME le jugement du 15 avril 2021,

Statuant à nouveau :

— Dit que l’arrêt de travail du 2 mai 2016 est en lien direct avec l’accident du travail de M. [I] du 27 avril 2016 et doit être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels par la caisse primaire d’assurance maladie de Saône et Loire,

Y ajoutant :

— Condamne la caisse primaire d’assurance maladie de Saône et Loire aux dépens d’appel.

Le greffier Le président

Sandrine COLOMBO Olivier MANSION

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