Cour d'appel de Douai, 30 juin 2006, n° 05/02266

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, 30 juin 2006, n° 05/02266
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 05/02266
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lille, 12 juin 2005

Sur les parties

Texte intégral

ARRET DU

30 Juin 2006

N° 1685/06

RG 05/02266

LD/NB

JUGEMENT DU

Conseil de Prud’hommes de LILLE

EN DATE DU

13 Juin 2005

NOTIFICATION

à parties

le 30/06/06

Copies avocats

le 30/06/06

BANDAR SE

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud’Hommes -

PPELINE
Mme Y X […]

[…]

Représentant: Me Jean-Luc WABANT (avocat au barreau de LILLE)

S.A.S. SOCIETE CLAIRE’S

[…]

Représentant: Me Evelyne AVAKIAN (avocat au barreau de PARIS)

à l’audience publique du 05 Avril 2006 DEBATS:

Tenue par L. DELHAYE magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré. les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER: A. KACZMAREK

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE

: PRESIDENT DE CHAMBRE J. DRAGNE

: CONSEILLER L. DELHAYE

J. LEBRUN : CONSEILLER en service extraordinaire

Contradictoire ARRET: prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Juin 2006 J. DRAGNE, Président, ayant signé la minute avec N. CRUNELLE, greffier lors du prononcé


05/2266 Mme X Y c/ SAS SOCIETE CLAIRE’S 2

FAITS ET PROCEDURE

La société par actions simplifiée CLAIRE’S exploite des magasins commercialisant des articles fantaisie de bijouterie et des articles pour cheveux de faible valeur, destinés à une clientèle d’enfants et d’adolescents.

Elle comptait parmi son personnel Mme Y X, engagée à compter du 12 septembre 1994 en qualité d’assistante de magasin et qui se trouvait en dernier lieu responsable du magasin situé dans le centre commercial EURALILLE.

Les relations entre Mme X et son employeur se sont dégradées, plus particulièrement compter du début de l’année 2001, dans des conditions sur lesquelles les parties sont contraires.

Mme X s’est trouvée en arrêt maladie à compter du 18 mai 2001.

Après convocation à l’entretien préalable prescrit, elle s’est vue notifier son licenciement par lettre du 21 février 2002, ainsi libellée :

< Suite à notre entretien du 19 février dernier, nous sommes au regret de devoir vous notifier votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Ce licenciement est motivé par les faits suivants :

- vous occupez le poste de responsable de notre magasin d’EURALILLE. Le poste de responsable de magasin est un poste clé dans l’organisation du magasin. La responsable a en charge l’organisation du magasin et des équipes, le recrutement, la motivation et la formation des équipes, l’optimisation du chiffre d’affaires, ainsi que la limitation des écarts d’inventaires et le contrôle des caisses.

or, votre absence de ce poste depuis le 17 mai nous amène à embaucher des contrats à durée déterminée successifs afin d’organiser votre remplacement, et ne nous permet pas de nommer une responsable de manière permanente sur ce point de vente, entraînant ainsi une désorganisation du magasin.

C’est pourquoi nous sommes aujourd’hui dans l’obligation de vous notifier votre licenciement pour absence prolongée entraînant une désorganisation du point de vente et nécessitant votre remplacement définitif.

Votre préavis, d’une durée de deux mois, débutera dès première présentation de cette lettre. »
Mme X a alors engagé le 25 mars 2002 une action prud’homale en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral et licenciement sans cause réelle et sérieuse.

C’est dans ces conditions que, par jugement du 13 juin 2005, le conseil de prud’hommes de LILLE

- a retenu :

< Pour faire la preuve du harcèlement dont elle aurait été victime de la part de M. RECQ, Mme X procède par voie d’affirmation ou en produisant des courriers de sa main ou des documents (fiches de suivi) établis par elle-même.


05/2266 Mme X Y c/ SAS SOCIETE CLAIRE’SCOVILLE
Mme X ne démontre pas avoir été victime d’agissements répétés de harcèlement moral de la part de M. RECQ, harcèlement ayant eu pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail et susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Lors de la mise en oeuvre de la procédure de licenciement en février 2002, le poste de responsable de magasin était vacant depuis le 17 mai 2001 du fait de la maladie de Mme X soit pendant plus de huit mois. Le recours aux contrats à durée déterminée ne pouvait que pallier imparfaitement cette carence.

L’absence de Mme X nécessitait son remplacement, que le recours aux contrats à durée déterminée ne pouvait que pallier et justifiait la mesure de licenciement pour cause réelle et sérieuse. »>

- pour se prononcer comme suit :

Constate l’absence d’acte constitutif de harcèlement moral à l’égard de Mme X

Dit que le licenciement a été prononcé pour cause réelle et sérieuse

Déboute Mme X de l’ensemble de ses demandes et la société CLAIRE’S de sa demande reconventionnelle

Condamne Mme X aux dépens.

Appelante de ce jugement, Mme X reproche aux premiers juges de

s'être < contenté des affirmations de l’employeur et d’un témoignage de complaisance » pour la débouter de l’ensemble de ses demandes.

Elle soutient notamment que « le harcèlement moral est constitué dans tous ses éléments »

Elle ajoute que « l’employeur a manifestement manqué à son obligation de sécurité et de protection de ses salariés au sens de l’article L. 230-2 du code du travail '>

Elle fait valoir que « la rupture du contrat de travail est imputable à l’employeur et doit être requalifiée en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, son état dépressif tant la conséquence directe du comportement de l’employeur à son égard

->

Elle demande à la Cour :

- d’infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris

de constater les atteintes à l’intégrité physique et mentale et la violence morale perpétrées sur sa personne en lien de causalité directe avec les conditions de travail au sein de la société CLAIRE’S

- de dire que l’employeur a manqué à ses obligations légales et notamment de sécurité à son égard


05/2266 Mme X Y c/ SAS SOCIETE CLAIRE’S

- de condamner en conséquence la société CLAIRE’S en réparation des préjudices subis à la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts

- de dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en ce qu’il découle directement des agissements et a fortiori de la négligence de l’employeur

- de condamner la société CLAIRE’S à lui verser les montants ci-après : 10 000 euros (dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse); 2500 euros (article 700 du nouveau code de procédure civile)

La société CLAIRE’S approuve la décision déférée.

Elle sollicite que la Cour déboute Mme X de l’ensemble de ses demandes et la condamne au paiement d’une somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Attendu que Mme X, justifiant d’une ancienneté de plus de six ans à la date des faits litigieux argués de harcèlement moral, a toujours fait preuve de dévouement à son entreprise ; que ses mérites lui ont d’ailleurs valu une progression honorable de carrière puisque d’assistante de magasin elle est devenue responsable de magasin; que les faits litigieux se sont inscrits dans un contexte de difficultés de fonctionnement du magasin d’EURALILLE;

Attendu que Mme X fixe au mois d’avril 2001 le début du harcèlement moral dont elle aurait été victime de la part de son supérieur hiérarchique M. RECQ ; qu’à compter du 18 mai 2001, Mme X s’est trouvée en arrêt maladie ; qu’était applicable durant cette période dans les relations de travail, même avant sa reprise à l’article L. 120-4 du code du travail par l’effet de la loi n° 2002/73 du 17 janvier 2002 sur la modernisation sociale, le principe général selon lequel « les conventions doivent être exécutées de bonne foi » (article 1134 du Code Civil);

Que s’en inférait la prohibition du harcèlement moral, aujourd’hui consacrée à l’article L. 122-49 du code du travail, également issu de la loi précitée du 17 janvier 2002, prescrivant que : « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel » ;

Qu’est dans ces conditions indifférente la date des faits invoqués, seul devant être écarté, dans la mesure où les faits dénoncés sont antérieurs à l’entrée en vigueur de la loi, l’article L. 122-52 nouveau du code du travail disposant qu'« en cas de litige relatif à l’application des articles L. 122-46 et L. 122-49, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement… » ;


05/2266 Mme X Y c/ SAS SOCIETE CLAIRE’S 5

Que cette facilité probatoire soit ou non applicable, les faits n’en doivent pas moins avoir été, par leur nature, répétition et conséquences, constitutifs d’un abus ; qu’ils ne doivent pas avoir tenu à de simples circonstances, à tort ou à raison, mal ressenties par le salarié, liées aux impératifs et aléas de gestion inhérents à la vie de toute entreprise ; que l’abus ne saurait se confondre avec des dysfonctionnements ponctuels ; qu’il implique une répétition d’actes en direction du salarié, tels que manque de respect; mise à l’écart; conditions de travail humiliantes; imposition de tâches subalternes ou de travaux complexes dans l’espoir que l’intéressé ne les mène pas à bien… ;

Attendu que le harcèlement moral dénoncé ne saurait se déduire de la seule altération de la santé de Mme X, constatée par les praticiens qu’elle a consultés ;

Attendu sans doute qu’en l’état des difficultés de fonctionnement évoquées plus haut, Mme X s’est trouvée confrontée dans son travail à un supérieur hiérarchique (M. RECQ) plus présent et plus pressant que ne l’avaient été ses prédécesseurs ;

Qu’il n’est cependant pas établi que l’intervention accrue de M. RECQ ait pu dégénérer en abus constitutif d’un harcèlement moral, même si ont pu être commises des erreurs ou maladresses ;

Que pour se rapporter à ces erreurs ou maladresses et à des rappels à l’ordre d’évidence difficilement supportés par Mme X, les pièces produites par l’ intéressée ne caractérisent en rien un harcèlement moral; que l’observation vaut notamment pour les différentes correspondances adressées à l’employeur par des collaboratrices du magasin;

Qu’il ressort du dossier que le personnel du magasin situé dans le centre commercial EURALILLE, s’il devait effectivement faire face régulièrement à des vols à l’étalage,

n’en était pas pour autant confronté à des conditions de travail pouvant être qualifiées de dangereuses ; que l’employeur a d’ailleurs pris les mesures nécessaires pour remédier au phénomène de vol à l’étalage, notamment en déposant systématiquement plainte ;

Que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a écarté le harcèlement en l’absence d’éléments précis et concordants permettant d’en établir l’existence, voire simplement de la présumer, et a débouté Mme X de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral et violation de l’obligation de sécurité

Que c’est de même à juste titre dans ces conditions que les premiers juges ont rejeté les prétentions de Mme X du chef de la rupture du contrat de travail;

Attendu que Mme X, qui succombe et doit supporter les dépens, ne peut prétendre au bénéfice de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, relatif aux frais non compris dans les dépens ; qu’il apparaît pour le surplus équitable de laisser à la charge de la société CLAIRE’S les frais de cette nature qu’elle a exposés ;

PAR CES MOTIFS, LA COUR

CONFIRME le jugement entrepris;


Mme X Y c/ SAS SOCIETE CLAIRE’S

05/2266

6

DEBOUTE Mme X de l’ensemble de ses demandes ;

DEBOUTE la société CLAIRE’S de sa demande au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile;

CONDAMNE Mme X aux dépens d’appel.

Le Greffier, Le Président,

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