Cour d'appel de Douai, 29 juin 2012, n° 11/03390

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, 29 juin 2012, n° 11/03390
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 11/03390
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Tourcoing, 7 septembre 2011, N° 11/33

Sur les parties

Texte intégral

ARRET DU

29 Juin 2012

N° 1151/12

RG 11/03390

XXX

@

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOURCOING

en date du

08 Septembre 2011

(RG 11/33 -section 3)

NOTIFICATION

à parties

le 29/06/12

Copies avocats

le 29/06/12

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

— Prud’Hommes-

APPELANT :

M. E X

XXX

XXX

Représenté par Me Gabriel DENECKER (avocat au barreau de LILLE) substitué par Me JALQUELARD

INTIMEE :

SAS AXECIBLES

XXX

Représentée par Me UZAN (avocat au barreau de PARIS)

DEBATS : à l’audience publique du 15 Mai 2012

Tenue par Y Z

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Serge BLASSEL

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE

Y Z

: PRESIDENT DE CHAMBRE

C D

: CONSEILLER

A B

: CONSEILLER

ARRET : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Juin 2012,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Y Z, Président et par Annick GATNER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société AXECIBLES a une activité de conseil en communication « web », développement, hébergement et promotion de sites internet.

Monsieur X a été embauché en qualité de « hot liner » le 19 mai 2008, afin d’assurer le service d’aide au téléphone.

La relation de travail était régie par la convention collective « bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieur conseil ».

Le 3 novembre 2010, son employeur a remis en mains propres à Monsieur X une convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement et a pris à son encontre une mesure de mise à pied à titre conservatoire.

Après l’entretien le 15 novembre 2010, aucune mesure n’a été prise. Pour autant, Monsieur X n’a pas repris ses fonctions, les parties étant par ailleurs en désaccord sur la raison d’une telle situation. Elles se sont rencontrées le 20 janvier 2011 et ont évoqué une rupture conventionnelle du contrat de travail sans toutefois la mener à terme.

Par courrier du 26 janvier 2011, Monsieur X prenait acte de la rupture de son contrat de travail, prise d’acte réitérée par courrier de son conseil en date du 27 janvier 2011.

Le conseil de prud’hommes de Tourcoing, par jugement du 8 septembre 2011, a :

— Dit que la prise d’acte produit les effets d’une démission au 28 janvier 2011,

— Condamné la société AXECIBLES à payer à Monsieur X les sommes suivantes :

*600€ à titre d’indemnité compensatrice de congés payés,

*400€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— Ordonné à la société AXECIBLES de remettre à Monsieur X un bulletin de paie portant le rappel d’indemnités de congés payés, un certificat de travail corrigé, un reçu pour solde de tout compte, et une attestation Pôle emploi corrigée,

— Débouté chacune des parties du surplus de ses demandes.

Ayant régulièrement interjeté appel par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 septembre 2011, Monsieur X par conclusions déposées le 19 janvier 2012 et reprises à l’audience, forme les demandes suivantes :

— Réformer le jugement entrepris,

— Dire que la rupture du contrat de travail est imputable à la société AXECIBLES,

— Dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

— Condamner la société AXECIBLES à lui payer les sommes suivantes :

*4500€ à titre de rappel de salaires pour la période du 3 novembre 2010 au 28 janvier 2011, outre 450€ au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés,

*3000€ à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 300€ au titre des congés payés afférents,

*3000€ à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement,

*36000€ à titre de dommages et intérêts pour procédure sans cause réelle et sérieuse ;

9000€ à titre d’indemnité pour travail clandestin,

*4064,17e au titre des heures supplémentaires outre 406,41€ au titre des congés payés afférents,

1500€ au titre des congés payés illégalement imputés,

— Condamner la société AXECIBLES à modifier les bulletins de paie depuis l’entrée de Monsieur X en faisant figurer les 2 heures 30 de travail supplémentaires effectuées mensuellement,

— Ordonner la remise de l’attestation Pôle emploi, du certificat de travail et du reçu pour solde de tout compte sous astreinte,

— Condamner la société AXECIBLES à lui payer la somme de 3000€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Par conclusions déposées le 15 mai 2012, la société AXECIBLES prie la cour de :

— A titre principal, confirmer le jugement sauf en ce qu’il l’a condamnée à payer la somme de 600€ au titre des congés payés, et fixer à 150€ la somme effectivement due à ce titre ;

— Subsidiairement, ramener à de plus justes proportions le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et limiter à 1500€ l’indemnité pour non respect de la procédure,

— Limiter également à un mois de salaire le montant de l’indemnité compensatrice de préavis compte tenu du paiement du mois de février 2011,

— A titre reconventionnel, condamner Monsieur X à lui payer les sommes suivantes :

*3000€ bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

*1500€ bruts (1160,44€ nets) à titre de remboursement de la somme versée pour le mois de février 2011 en application de l’article L1235 du code civil,

*1€ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

*3000€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, tant au titre de la première instance que de l’instance d’appel.

Vu les conclusions déposées et reprises par les parties qui ont été entendues en leurs plaidoiries ;

Vu l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE

Le bien fondé de la prise d’acte par Monsieur X de la rupture de son contrat de travail

Lorsque le salarié a mis fin au contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits reprochés sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, ou bien d’une démission dans le cas contraire.

La preuve en incombe au salarié.

Le 26 janvier 2011, Monsieur X écrivait :

« ce 20 janvier dernier, vous m’avez convoqué pour tenter d’obtenir mon accord sur une proposition de licenciement conventionnel antidaté alors que je suis mis à pied depuis le 03 novembre 2010 et que l’entretien préalable s’est déroulé le 15 novembre.

Vous avez modifié le document que j’ai signé sous la contrainte de vous-même et de votre collaborateur.

Je m’aperçois que vous m’avez abusé et entend user de la voie de rétractation alors que je n’ai commis aucune faute et que vous ne me réglez pas de la totalité de mes heures travaillées.

Je prends acte de la rupture de mon contrat de travail puisque vous m’aviez indiqué m’avoir « oublié ».

J’ai d’ailleurs été remplacé le jour même de la mise à pied. »

L’employeur répondait le 3 février :

« Nous contestons formellement vos propos et affirmations, contraires à la réalité.

Manifestement, vous avez mal compris le but de notre dernière entrevue.

Je vous rappelle que vous êtes toujours salarié et que nous vous attendons à votre poste de travail.

Si vous refusiez de reprendre votre activité à réception de la présente, votre absence sera constitutive d’un abandon de poste ».

La mise à pied

En droit, par application de l’article L1332-2 du code du travail, lorsque l’employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié, et la sanction ne peut intervenir plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien.

En l’espèce, l’entretien a eu lieu le 15 novembre 2010. Une éventuelle sanction devait être prononcée au plus tard le 15 décembre 2010.

Pour expliquer l’absence de sanction et l’absence concomitante de Monsieur X de l’entreprise, la société AXECIBLES fait valoir qu’après avoir entendu l’intéressé lors de l’entretien préalable, elle a alors décidé malgré les nombreuses plaintes de la clientèle, de lui laisser une chance et lui a alors conseillé de prendre ses congés, mais qu’à l’issue de ceux-ci, au début du mois de janvier, l’intéressé n’est pas revenu dans l’entreprise.

Le bulletin de paie du mois de décembre fait effectivement état de 23 jours de congés payés, du 1er au 31 décembre.

Monsieur X soutient au contraire que cette mention sur son bulletin de paie n’a été faite qu’a posteriori pour justifier son absence de l’entreprise.

Mais les éléments produits accréditent la thèse de l’employeur

En effet, Monsieur X contrairement à ce qu’il prétend, a toujours normalement perçu son salaire, l’employeur justifiant par des documents comptables, du virement des sommes considérées chaque fin de mois et ce jusqu’au mois de février 2011. D’ailleurs, Monsieur X ne se plaint pas dans son courrier du 26 janvier 2011, de rester sans rémunération. Les pièces qu’il fournit, faisant état de difficultés financières, sont postérieures à la rupture du contrat de travail (avril et mai 2011).

Il ne prétend pas non plus que le bulletin de paie du mois de décembre n’ait pas dès l’origine mentionné la prise de congés payés, de sorte qu’il n’a pas été réalisé après l’entretien du 20 janvier pendant lequel l’employeur aurait avoué à l’intéressé qu’il l’aurait « oublié », allégation qu’au demeurant celui-ci conteste formellement.

Le remplacement au poste dès le lendemain de la mise à pied est dépourvu de signification, un remplacement provisoire pouvant être organisé.

L’absence de courrier notifiant la fin de la mise à pied et la prise de congé n’est pas non plus de nature à démontrer le manquement de la société AXECIBLES au contrat de travail consistant en une mesure écartant le salarié de l’entreprise.

La cour considère dans ces conditions que le grief n’est pas établi.

Les heures supplémentaires

En application de l’article L3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction.

Monsieur X soutient qu’il effectuait 7 heures 30 de travail par jour pendant cinq jours par semaine, et pour étayer sa demande, produit la lettre notifiant un avertissement le 29 mai 2009, lui rappelant qu’il doit « être joignable de 9h à 12h30 et de 13h30 à 17 heures, soit 7 heures 30 par jour, du lundi au vendredi. »

L’employeur répond que Monsieur X bénéficiait de deux pauses quotidiennes, de 15 minutes chacune, entre 10h30 et 10h45, puis entre 15h30 et 15h45 et produit à cet effet la fiche d’entreprise validée par le médecin du travail faisant état de l’organisation de pauses matin et après midi.

Dès lors, étant par ailleurs observé que la demande a été formée pour la première fois lors de la prise d’acte et qu’aucun litige sur le paiement des heures de travail n’avait été préalablement évoqué, et au vu des éléments fournis par le salarié comme par l’employeur, la cour considère que Monsieur X n’a pas accompli d’heures supplémentaires non payées.

La cour considère dans ces conditions que Monsieur X ne fait pas la preuve des manquements invoqués et que la prise d’acte doit s’analyser en une démission. Le jugement sera confirmé.

Monsieur X sera en conséquence dit mal fondé en ses demandes d’indemnité au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour procédure irrégulière, de rappel de salaires pour les mois de novembre, décembre et janvier, ainsi qu’au titre d’heures supplémentaires et d’indemnité pour travail dissimulé.

Les demandes d’indemnité de congés payés

Monsieur X fait valoir que l’employeur a en 2010 de manière illégale imputé des congés payés sur le mois de décembre.

Mais de ce qui précède, il y a lieu de déduire que Monsieur X ne fait pas la preuve de ce qu’il avance.

Par ailleurs, la fixation de la période de prise des congés relève du pouvoir de direction de l’employeur, et des circonstances exceptionnelles peuvent justifier l’absence de respect du délai d’un mois fixé pour en modifier la date.

Le souhait de l’employeur de donner une chance à Monsieur X peut revêtir ce caractère.

La demande est en conséquence mal fondée.

Enfin, les bulletins de paie montrent qu’au 30 novembre 2010, il restait 14 jours de congés sur la période 2009/2010 et que le reste a été pris sur la période 2010/2011. Il lui restait donc à la fin du mois de décembre, 2,56 jours de congés acquis, son absence du mois de janvier n’ayant pu générer de droit à congé, de sorte que c’est à bon droit que l’employeur estime ne plus devoir que la somme de 150€ à ce titre.

De même, c’est à tort que le conseil de prud’hommes a fait droit à la demande d’indemnité compensatrice de congés payés à hauteur de 150€ au titre du mois de février 2011, le contrat ayant en toute hypothèse été rompu dès le 26 janvier et le salarié n’ayant accompli aucune prestation de travail depuis cette date.

La demande reconventionnelle

L’indemnité de préavis

La société AXECIBLES qui demande l’indemnisation du préjudice subi du fait du non respect par Monsieur X du délai de préavis, ne fait pas la preuve de son préjudice dans la mesure où elle n’a jamais relancé l’intéressé avant la prise d’acte près d’un mois après la constatation de son absence.

Elle sera déclarée mal fondée en sa demande.

Le remboursement des salaires

La société AXECIBLES réclame le remboursement de la somme de 1160,44€ correspondant au salaire net versé le 3 mars 2011, au titre du mois de février, après la rupture du contrat de travail sans respect d’un préavis.

Le versement de cette somme étant dépourvu de cause, il sera fait droit à la demande.

L’indemnité pour procédure abusive

C’est en toute connaissance de cause, et de mauvaise foi, que Monsieur X a soutenu ne pas avoir perçu de salaire, de sorte que la demande est fondée.

Les frais irrépétibles

Monsieur X qui succombe en son appel sera condamné à payer à la société AXECIBLES la somme de 500€ application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Réforme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société AXECIBLES de sa demande de remboursement de salaire trop versé, ainsi que de sa demande d’indemnité pour procédure abusive, et l’a condamnée à payer la somme de 600€ à titre d’indemnité compensatrice de congés payés,

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Condamne Monsieur X à payer à la société AXECIBLES les sommes suivantes:

*1160,44€ (mille cent soixante euros et quarante quatre centimes) à titre de remboursement du salaire trop versé pour le mois de février 2011,

*1€ (un euro) à titre d’indemnité pour procédure abusive;

Condamne la société AXECIBLES à payer à Monsieur X la somme de 150€ (cent cinquante euros) à titre d’indemnité de congés payés,

Condamne Monsieur X à payer à la société AXECIBLES la somme de 500€ (cinq cents euros) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;

Le condamne aux dépens.

Le Greffier, Le Président,

A. GATNER A. Z

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