Cour d'appel de Douai, 11 juin 2015, n° 14/02822

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, 11 juin 2015, n° 14/02822
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 14/02822
Décision précédente : Tribunal d'instance de Lille, 23 mars 2014, N° 12/003790

Sur les parties

Texte intégral

XXX

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 11/06/2015

***

N° MINUTE : 15/472

N° RG : 14/02822

Jugement (N° 12/003790) rendu le 24 Mars 2014

par le Tribunal d’Instance de LILLE

REF : FB/CL

APPELANTE

XXX agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

ayant son siège XXX

XXX

Représentée et assistée par Me François DELEFORGE, avocat au barreau de DOUAI

INTIMÉS

Madame A B

née le XXX à TOURMIGNIES

XXX

XXX

XXX

Monsieur Y X

né le XXX à WAHAGNIES

XXX

XXX

XXX

Représentés et assistés par Me Christophe WERQUIN, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS à l’audience publique du 09 Avril 2015 tenue par Fabienne BONNEMAISON magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Fabienne DUFOSSE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Françoise GIROT, Président de chambre

Fabienne BONNEMAISON, Conseiller

Cécile ANDRE, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 11 Juin 2015 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Françoise GIROT, Président et Fabienne DUFOSSE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 10 mars 2015

*****

Par jugement du 24 mars 2014, le Tribunal d’Instance de Lille a constaté la résiliation au 13 mars 2012 du bail consenti par la SCI Lafargue Nal à Y X et A B, a fixé à 9.797,96€ la créance de la SCI à l’encontre des consorts X-B, a fixé à 8.000€ celle de ces derniers à l’encontre de la SCI et les condamnés solidairement, après compensation, à verser à la SCI une somme de 1.797,96€ au titre de leur arriéré de loyers, charges et indemnités mensuelles d’occupation, a débouté les parties du surplus de leurs demandes, laissant à chaque partie la charge de ses frais et dépens.

XXX a relevé appel de ce jugement le 5 mai 2014 et a transmis le 28 novembre 2014 des conclusions tendant à le voir réformer, rejeter les demandes adverses et condamner les consorts X-B à lui verser les sommes de 12.835,33€ (loyers et charges), 7.010,76€ (indemnités d’occupation), 2.587,80€ ( charges locatives), 179€ (volet roulant), 423,75€ (frais de déplacement), 750€ (résistance abusive), 10.967€ ( dégradations locatives), 500 et 2.000€ ( frais irrépétibles de première instance et d’appel).

Au terme de conclusions transmises le 30 septembre 2014, les consorts X-B demandent de dire irrecevable la demande relative à la régularisation des charges, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de condamner la SCI Lafargue Nal au paiement d’une indemnité de procédure de 1.500€.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 10 mars 2015.

SUR CE

Il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties au jugement entrepris duquel il résulte essentiellement que:

— les consorts X-B étaient locataires, suivant convention sous seing privée du 15 juin 2005, d’un appartement sis à XXX moyennant paiement d’un loyer mensuel de 620€ indexé et d’une provision sur charges de 40€;

— ce bail comportait une clause résolutoire de plein droit deux mois après un commandement de payer un terme de loyer ou charges demeuré infructueux;

— un commandement de payer rappelant les dispositions des articles 24 de la loi du 6 juillet 1989 et 6 de la loi du 31 mai 1990 a été délivré le 12 janvier 2012 aux consorts X-B pour avoir paiement d’un arriéré de loyers de 11.040,76€ au titre des impayés arrêtés en décembre 2011;

— au motif que les intéressés n’avaient pas apuré leur dette dans le délai imparti ni justifié de leur contrat d’assurance également réclamé au pied du commandement, la SCI Lafargue Nal a saisi le Tribunal le 31 octobre 2012 aux fins de résiliation de bail avec toutes conséquences de droit;

— les consorts X-B se sont principalement prévalus d’un arrêté d’insalubrité intervenu le 14 février 2013, ayant justifié leur départ fin février 2013, d’une créance indemnitaire compensable avec la créance du propriétaire dont ils ont, au demeurant, invoqué la prescription partielle.

C’est dans ces conditions qu’est intervenu le jugement entrepris qui a fait droit, pour partie, aux demandes de la SCI Lafargue Nal.

* * *

Ne sont contestés ni l’acquisition de la clause résolutoire par l’effet du commandement de payer délivré le 12 janvier 2012 ni le départ des locataires rendant sans objet la demande initiale d’expulsion.

Sur la dette locative

Sur la prescription

XXX fait grief au Tribunal d’avoir cantonné à 7.568,06€ la dette des consorts X-B au titre des loyers et provisions sur charges impayés au regard de la prescription quinquennale applicable aux échéances antérieures de plus de cinq ans à l’assignation délivrée le 31 octobre 2012 alors que cette prescription s’est trouvée interrompue tant par l’effet du commandement de payer délivré le 12 janvier 2012 que par la reconnaissance de dette des locataires au terme de différents courriers adressés en 2007, 2008 et 2011, la dette à fin décembre 2011 portant en définitive sur 15 mois d’arriérés de loyers du fait de l’imputation des règlements sur les échéances les plus anciennes.

Les consorts X-B démentent l’effet interruptif de prescription attaché au commandement de payer, réfutent toute application de l’article 1256 du code civil et demandent la confirmation du jugement de ce chef.

Selon l’article 2240 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription.

L’article 2244 dispose, en outre, que le délai de prescription est interrompu par une mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d’exécution ou un acte d’exécution forcée.

Le Tribunal, à juste titre, a considéré qu’un commandement de payer visant la clause résolutoire ne constituait pas un acte d’exécution forcée au sens de l’article 2244 du code civil.

Par contre, la Cour relève que, selon le décompte de la SCI Lafargue Nal, les impayés susceptibles d’être affectés par la prescription portent sur la période d’avril à octobre 2007.

Or, le 21 août 2007 Mme X était intervenue auprès du bailleur pour qu’il lui transmette un ' justificatif de la dette de loyer pour la sécurité sociale, pour débloquer l’argent que l’on vous doit', reconnaissant ainsi explicitement des impayés qui donneront lieu en juillet 2008 au dépôt d’un dossier de demande d’aide aux impayés Fonds Solidarité Logement.

Cette reconnaissance de la dette a valablement interrompu le délai de prescription quinquennale quant aux impayés accumulés au mois d’ août 2007.

Ensuite, s’agissant des échéances de septembre et octobre 2007, SCI Lafargue Nal se prévaut légitimement, en l’absence d’un quittancement différent convenu par les parties et en vertu des dispositions de l’article 1256 du code civil, d’une imputation des règlements reçus sur les dettes les plus anciennes.

Le jugement sera donc réformé en ce qu’il dit prescrits les loyers antérieurs au 31 octobre 2007.

S’agissant des charges

Le Tribunal a déduit de la créance du bailleur une somme de 2.400€ correspondant aux provisions sur charges acquittées pendant cinq ans par les consorts X-B à défaut de justification par le bailleur des charges ainsi facturées.

Prétextant l’ignorance de la nécessité d’une régularisation annuelle des charges, la SCI Lafargue Nal produit en appel un décompte de créance et réclame un versement complémentaire de 2.587,80€, demande que les consorts X-B prétendent irrecevable en application de l’article 564 du code de procédure civile, sinon injustifiée au regard de la répartition que prétend opérer le bailleur entre les 4 logements de l’immeuble.

Dans la mesure où la demande principale de la SCI Lafargue Nal incluait des provisions mensuelles sur charges au titre de quelques 22 échéances impayées, la demande complémentaire présentée en appel est recevable en application de l’article 566 du code de procédure civile.

Il est sollicité une régularisation au titre de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (677€ sur 5 ans), de l’électricité des parties communes (167,22€) et des dépenses d’eau (4.103,51€) que la SCI Lafargue Nal répartit à hauteur des 2/3 pour le rez-de-chaussée et d’un tiers pour le premier étage.

Les consorts X-B objectent à raison que, selon l’arrêté d’insalubrité l’immeuble comporte quatre niveaux et qu’aucune indication n’est fournie sur l’affectation du logement du dernier niveau, ce qui rend pour le moins approximative la répartition invoquée par le bailleur, qu’ils ne peuvent se voir réclamer des charges pour la période postérieure à l’arrêté d’insalubrité et à leur départ fin février 2013 (il est réclamé une consommation d’eau jusqu’en juillet 2013).

Il n’est encore fourni aucune précision sur la surface respective des logements ni d’ailleurs sur le bail du logement supérieur.

Néanmoins, ils ne peuvent être dispensés d’une quelconque contribution comme l’a jugé le Tribunal dès lors que l’occupation de leur logement induit nécessairement une dépense d’eau, d’électricité des parties communes et impose une contribution au paiement de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.

Le jugement sera donc réformé de ce chef.

En l’état des pièces communiquées, la Cour estime que la provision convenue de 40€ par mois couvre suffisamment la contribution des consorts X-B aux charges récupérables, le bailleur ne faisant pas la preuve de l’exigibilité d’une régularisation annuelle telle que réclamée.

Sur le dépôt de garantie

Le bail prévoyait le versement d’un dépôt de garantie de 1.240€ et rendait compte d’un règlement de 300€ au jour de la signature du bail.

Le Tribunal a déduit de la créance du bailleur une somme de 1.240€ estimant qu’il appartenait à la SCI Lafargue Nal de faire la preuve de l’absence de paiement ultérieur du solde exigible.

Ce faisant, le Tribunal a effectivement inversé la charge de la preuve, la consorts X-B devant établir le paiement effectif du solde du dépôt de garantie convenu (preuve non rapportée) dont ils réclament aujourd’hui le remboursement.

Le jugement sera, de même, réformé de ce chef.

La clause pénale

La Cour estime, à la suite du Tribunal, et en présence d’un arrêté de péril caractérisant les manquements du bailleur à ses propres obligations au regard de la loi et de la convention des parties, que la SCI Lafargue Nal est mal fondée à solliciter l’application d’une clause pénale pour retard de paiement des loyers.

Le compte entre les parties

Il s’établit comme suit:

Créance du bailleur:

loyers et provisions sur charges échus au 13 mars 2012: 11.168,45€ (loyers à février 2012 inclus)

indemnités mensuelles d’occupation du 13 mars 2012 au 18 mars 2013: 736,80€ x 12 mois = 8.841,60€ dont à déduire les allocations logement perçues (794,44€), les versements opérés (2.510€), soit la somme de 5.537,16€

total: 16.705,61€

créance du locataire: dépôt de garantie pour 300€

Dette locative:

16.405,61€

Sur le préjudice de jouissance

Le Tribunal a indemnisé à hauteur de 8.000€ le préjudice de jouissance subi par les consorts X-B du fait de l’état d’indécence du logement, attesté dès juillet 2009 par un compte-rendu de visite des services d’hygiène de la ville de Lille, vainement dénoncé au bailleur en août 2009, aboutissant à l’arrêté d’insalubrité prononcé le 14 février 2013.

Rappelant le bon état général des lieux à l’entrée des consorts X-B, la SCI Lafargue Nal fait valoir que les dommages affectant ce logement sont la conséquence d’un défaut d’entretien (que traduisent les photographies versées aux débats) et d’une fuite provenant de l’appartement supérieur que les intéressés, dépourvus d’assurance, n’ont pas signalée, aucune réclamation n’ayant jamais été formée auprès du bailleur, par ailleurs tenu à l’écart des enquêtes administratives menées.

Il conclut à la réformation du jugement de ce chef et sollicite une indemnité de 10.967€ au titre des travaux de réfection qu’impose l’état du logement suivant devis du 6 juin 2014.

Il n’est pas fait état ni justifié d’un état des lieux à l’entrée des consorts X-B.

Il est, par contre, établi que suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 19 août 2009, le service communal d’hygiène et de santé de la ville de Lille a transmis à la SCI Lafargue Nal un rapport de visite dénonçant des moyens de chauffage insuffisants, l’absence d’aération et ventilation de certaines pièces (cuisine et salle de bains), de grosses infiltrations en salle de bains, des traces d’infiltrations dans la cuisine et les chambres, une humidité générale du logement et invitant le propriétaire à prendre les mesures nécessaires dans un délai de deux mois.

XXX ne justifie d’aucune intervention dont ne le dispensaient pas les impayés du locataire (qui, au demeurant, selon son décompte, avait repris leurs versements depuis juillet 2008).

L’arrêté d’insalubrité confirme l’absence de toute intervention du bailleur et un très important développement des moisissures lié aux problèmes non résolus d’humidité.

La Cour estime légitime l’indemnisation allouée par le Tribunal à hauteur de 8.000€, tenant compte du défaut d’entretien locatif imputable aux consorts X-B également mis en exergue par les services municipaux.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

XXX sera, par ailleurs, du fait de sa carence ainsi mise en évidence, déboutée de sa demande tendant à faire supporter aux consorts X-B les travaux de remise en état du logement.

Sur les demandes accessoires

* Le jugement sera confirmé en ce qu’il déboute la SCI Lafargue Nal de sa demande de remboursement d’un volet roulant dont elle ne justifie pas la remise aux consorts X-B.

* Les frais de déplacement réclamés à hauteur de 423,75€ par la SCI Lafargue Nal ne sont pas plus établis, l’intéressée étant déboutée de ce chef.

* La résistance opposée par les consorts X-B n’apparaît pas abusive au regard des propres manquements du bailleur.

* Par contre, la Cour constate, au terme de cette instance, que la SCI Lafargue Nal reste créancière envers les consorts X-B de plus de 8.000€ d’impayés de loyers et charges en sorte qu’elle estime justifié d’une part de faire supporter aux consorts X-B les dépens de première instance et d’appel, d’autre part d’allouer à la SCI Lafargue Nal une indemnité de procédure de 400€.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en ce qu’il constate la résiliation du bail au 13 mars 2013, dit sans objet la demande d’expulsion compte-tenu de la libération du logement en février 2013, fixe l’ indemnité mensuelle d’occupation au même montant que le loyer, fixe à la charge de la SCI Lafargue Nal une indemnité de 8.000€ au titre du préjudice de jouissance subi par les consorts X-B et déboute les parties de leurs demandes accessoires.

Le réformant pour le surplus et y ajoutant:

Condamne les consorts X-B à verser à la SCI Lafargue Nal:

— une somme de 16.405,61€ au titre des loyers, charges et indemnités d’occupation

— une indemnité de procédure de 400€

Ordonne la compensation entre cette créance et l’indemnité allouée aux consorts X-B au titre du préjudice de jouissance.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

Condamne les consorts X-B aux dépens de première instance et d’appel.

Le Greffier Le Président

F. DUFOSSÉ F. GIROT

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