Cour d'appel de Douai, 5 février 2015, n° 13/02145

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, 5 févr. 2015, n° 13/02145
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 13/02145
Décision précédente : Tribunal de grande instance, 11 mars 2013, N° 09/02573

Texte intégral

XXX

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 05/02/2015

***

N° MINUTE : 15/100

N° RG : 13/02145 (jonction avec le RG 13/2758 et 13/3386)

Jugement (N° 09/02573) rendu le 12 Mars 2013

par le Tribunal de Grande Instance de XXX

REF : CA/CL

APPELANTS

Monsieur E B

(APPELANT DANS RG 13/3386 et INTIME DANS RG 13/2145 et 13/02758)

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Représenté par Me Roger CONGOS, avocat au barreau de DOUAI

Assisté de Me Fabienne ROY-NANSION, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER,

SA MMA IARD agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualité audit siège

(APPELANTE dans RG 13/02145 et INTIMEE dans RG 13/03386 et 13/02758),

ayant son siège XXX

XXX

Représentée par Me Marie-Hélène LAURENT, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me François DEROUET, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER,

SCI LA QUESQUOISE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

(APPELANTE dans le RG 13/2758)

ayant son siège XXX

XXX

Représentée par Me Eric LAFORCE, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me Thierry NORMAND, avocat au barreau de XXX

INTIMÉS

Monsieur E B

(INTIME dans le RG 13/2145 et le RG 13/2758)

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Représenté par Me Roger CONGOS, avocat au barreau de DOUAI

Assisté de Me Fabienne ROY-NANSION, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

Madame C D

née le XXX à Z (59000)

XXX

XXX

Représentée par Me Anne-Bénédicte ROBERT, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER constituée aux lieu et place de Me Pierre FAUCQUEZ, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER,

Assistée de Me GIRARD, avocat au barreau de XXX substituant Me Anne-Bénédicte ROBERT, avocat au barreau de XXX

SA MMA IARD prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés

en cette qualité audit siège

(INTIMEE dans le RG 13/3386 et le 13/2758)

ayant son siège XXX

XXX

Représentée par Me Marie-Hélène LAURENT, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me François DEROUET, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER,

SCI LA QUESQUOISE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés

en cette qualité audit siège

(INTIMEE dans le RG 13/2145 et le RG 13/3386)

ayant son siège XXX

XXX

Représentée par Me Eric LAFORCE, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me Thierry NORMAND, avocat au barreau de XXX

DÉBATS à l’audience publique du 04 Décembre 2014 tenue par Cécile ANDRE magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Fabienne DUFOSSE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Françoise GIROT, Président de chambre

Cécile ANDRE, Conseiller

Paul BARINCOU, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 05 Février 2015 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Françoise GIROT, Président et Fabienne DUFOSSE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 18 novembre 2014

*****

C D est propriétaire d’un immeuble à usage d’habitation sis à XXX, qui jouxte celui appartenant à XXX.

En janvier 2007, XXX a entrepris la démolition de 3 garages qui se trouvaient adossés sur le mur mitoyen de l’immeuble de C D, aux fins d’édifier une maison individuelle. Elle a confié les travaux de démolition et de terrassement à E B, assuré auprès de la MAAF. Les travaux de la future construction ont été confiés à la société GEOXIA NORD OUEST.

Constatant de graves désordres sur son immeuble, C D a fait assigner XXX devant le juge des référés aux fins de désignation d’un expert.

Par ordonnance du 29 août 2007, un expert a été désigné ; l’expertise a été étendue à E B, à l’EURL I J et à la société GEOXIA NORD OUEST.

L’expert a déposé son rapport le 5 janvier 2009.

Puis C D a fait assigner XXX pour obtenir en référé le paiement de provisions. La SCI LA QUESQUOISE a appelé en garantie E B ce dernier appelant lui-même en garantie l’EURL I J et l’assureur de ce dernier, la société MMA IARD, ainsi que la société GEOXIA.

Par ordonnance du 1er avril 2009, le juge des référés du tribunal de grande instance de BOULOGNE-SUR-MER a condamné par provision in solidum XXX, E B, l’EURL I J et la société MMA IARD à payer à C D les sommes de 30 000 euros et 12 000 euros.

Par arrêt du 5 novembre 2009, la cour d’appel de Douai a confirmé cette ordonnance dans ses dispositions relatives à la condamnation de XXX à payer à C D la somme de 30 000 euros et celle de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts, et l’a infirmée pour le surplus.

Par acte du 25 septembre 2009, C D a assigné XXX devant le tribunal de grande instance de BOULOGNE-SUR-MER aux fins de voir consacrer sa responsabilité et la condamner au paiement de dommages et intérêts au titre notamment de la perte de loyers, du montant des travaux de démolition et de reconstruction.

Par acte du 23 avril 2010, XXX a appelé E B en garantie.

Par actes des 3 et 7 février 2011, E B a appelé en garantie l’EURL I J et la société MMA IARD.

Par ordonnance du 17 juin 2011, le juge de la mise en état a condamné XXX à payer à C D la somme de 24.000 euros à titre de provision.

Seule l’EURL I J n’a pas constitué avocat. Elle fait l’objet d’une radiation le 6 août 2012 publiée au BODACC le 28 août 2012.

Selon jugement du 12 mars 2013, le tribunal de grande instance de BOULOGNE-SUR-MER a :

— dit que XXX, E B et l’EURL I J sont responsables du préjudice subi par C D au titre du trouble anormal de voisinage ;

— condamné en conséquence in solidum XXX, E B, l’EURL I J et la MMA IARD à payer à C D les sommes de:

*frais de remise en état de protection provisoire : 838,30 euros TTC outre les intérêts au taux légal à compter de la présente décision

*montant des travaux de démolition : 30.420 euros HT outre les intérêts au taux légal à compter de la présente décision

*montant des travaux de reconstruction : 181.443,47 euros HT à revaloriser en fonction de l’évolution de l’indice du coût de la construction en vigueur à la date du rapport du 5 janvier 2009 et la date du règlement

*10.000 euros à titre de dommages et intérêts outre les intérêts au taux légal à compter de la présente décision

*23.400 euros à titre provisionnel arrêté à la date de la présente décision au titre des frais de relogement à valoir sur sa créance définitive ;

Dans les rapports entre les co-obligés,

— débouté E B de ses demandes ;

— condamné E B à garantir XXX de la condamnation prononcée contre elle au profit de C D à concurrence de 60 % ;

— dit que l’EURL I J et la société des mutuelles du Mans IARD ne sont pas tenues de garantir E B des condamnations prononcées à son encontre;

— condamné ensemble XXX, E B, l’EURL I J et la société des mutuelles du Mans IARD à payer à C D la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

' condamné E B à payer la somme de 1300 euros à XXX en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné E B à payer la somme de 1300 euros à la société des mutuelles du Mans IARD en application de l’article 700 du code de procédure civile;

— fait masse des dépens et dit qu’ils seront supportés à concurrence de :

50 % par E B

30 % par XXX

10 % par la société des mutuelles du Mans IARD

10 % par l’EURL I J

— dit que les dépens seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile ;

— ordonné l’exécution provisoire ;

— rejeté toutes demandes plus amples ou contraires.

La société MMA IARD a formé appel de cette décision à l’encontre de toutes les parties le 12 avril 2013.

La SCI LA QUESQUOISE a formé appel de cette décision le 13 mai 2013 à l’encontre de toutes les parties.

Les dossiers ont été joints sous le n° 13/02145 par ordonnance du 28 mai 2013.

E B a formé appel de cette décision à l’encontre de toutes les parties le 10 juin 2013.

Les dossiers ont été joints sous le n° 13/0 245 par ordonnance du 21 juin 2013 rectifiée le 19 juillet 2013.

Par ordonnance du 20 février 2014 le conseiller de de la mise en état a :

' constaté le désistement d’appel de E B à l’encontre de l’EURL I J ;

' dit que les dépens afférents à cet appel resteront à la charge de l’appelant ;

' renvoyé l’affaire à l’audience sur incident du 17 avril 2014 et invité les parties et plus particulièrement XXX et la société MMA IARD à s’expliquer sur la recevabilité de l’appel dirigé contre l’EURL I J ;

' réservé les dépens de l’incident.

Par ordonnance du 22 mai 2014, le conseiller de la mise en état a :

' déclaré irrecevables les appels formés par la société MMA IARD et XXX contre l’EURL I J ;

' dit que les dépens afférents à cet appel seront supportés par la société MMA IARD et par XXX.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 30 septembre 2013, la société MMA IARD demande à la cour de :

' réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

' constater l’inopposabilité du rapport de Monsieur Y à l’égard de la société des MMA IARD ;

' dire l’action des autres parties à son égard irrecevable et subsidiairement mal fondée;

' débouter les parties au procès de toute demande de condamnation à son égard ;

' condamner C D, E B, XXX in solidum à lui payer la somme de 6000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les condamner in solidum aux dépens de première instance et d’appel.

Elle considère que le rapport d’expertise lui est inopposable dans la mesure où elle n’a pas été appelée aux opérations et n’y a pas participé, et qu’elle n’a pas été en mesure de faire valoir ses arguments ; que la carence de son assuré et des demandeurs ne saurait lui être opposable.

Elle observe également que E B ne fournit aucune pièce à l’appui de ses allégations selon laquelle l’EURL I J serait son sous-traitant et notamment aucun marché de sous-traitance ; que selon le rapport d’expertise, c’est l’entreprise B qui a fait réaliser un mur de clôture en limite séparative et un enduit sur la partie du pignon de l’immeuble de C D ; que selon les dires des parties ce ne serait qu’un mois après les travaux de démolition que seraient apparues les fissures dans l’immeuble voisin.

Elle soutient qu’il est nécessaire dans le cadre d’un litige de voisinage que le maître d’ouvrage qui appelle en garantie les locateurs d’ouvrage démontre une faute de leur part ; que cette règle est transposable dans les rapports entre entrepreneurs et sous-traitant ; que l’entrepreneur principal ne peut exercer de recours subrogatoire contre le sous-traitant que pour la fraction de la dette dont il ne doit pas assumer la charge définitive.

Selon les termes du rapport, elle relève qu’aucune faute contractuelle ne peut être reprochée à l’EURL I J qui n’a pas été tenue au courant des différentes opérations réalisées et éventuellement abandonnées par le maître d’ouvrage et l’entreprise principale. Or elle soutient qu’aucun élément n’est produit qui caractérise l’existence d’une relation de cause directe entre les troubles subis et les missions confiées à l’EURL I J de sorte que son assureur ne saurait être condamné.

Subsidiairement, elle rappelle que l’EURL I J conteste toute implication dans le litige de voisinage ; qu’à supposer qu’il soit établi qu’elle ait agi en qualité de sous-traitant de E B, il n’en demeure pas moins que si le sous-traitant a une obligation de résultat vis-à-vis de l’entrepreneur principal, c’est dans le cadre de l’exécution du marché qui lui est confié et non dans le cadre de la responsabilité à l’égard des tiers ; que le maître d’ouvrage doit faire preuve d’une faute ; qu’il en va de même de toute action contre le sous-traitant ; que de surcroît il apparaît que les fissures sont apparues environ un mois après l’achèvement des travaux de démolition ce qui laisse à penser que l’on a tardé à réaliser les travaux de construction après la démolition de l’ouvrage.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 26 juin 2014, E B demande à la cour de :

' annuler le jugement entrepris ;

au fond :

' réformer le jugement en ce qu’il a retenu la responsabilité pour trouble anormal de voisinage de E B à l’égard de C D ;

' Constater que E B n’a pas engagé sa responsabilité civile délictuelle vis-à-vis de C D ;

' Débouter C D de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de E B ;

' reconventionnellement, condamner C D à rembourser à E B la somme de 11 743,37 euros versée en exécution de l’ordonnance de référé du 5 mars 2008 ;

' la condamner à lui payer la somme de 4000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

' débouter XXX de ses demandes formées à l’encontre de E B ;

' condamner XXX à lui payer la somme de 4000 euros par application de l’article 700 de code de procédure civile ;

' condamner in solidum XXX et C D aux dépens.

Il expose que les travaux de démolition et de terrassements qui lui ont été confiés par XXX ont été sous-traités dans leur intégralité à l’EURL I J ; que des fissures sont apparues sur l’immeuble de C D ; que l’expert judiciaire l’a invitée à quitter son logement dans les meilleurs délais compte-tenu du risque d’effondrement.

Il reproche au tribunal de l’avoir condamné sur le fondement de la théorie des troubles du voisinage, alors que C D l’avait assigné sur le fondement de l’article 1382 du code civil , en soulevant d’office ce moyen de droit sans inviter les parties à conclure. Il conclut donc à la nullité du jugement pour non respect du principe contradictoire.

Au fond, il indique produire un devis de l’EURL I J pour justifier du contrat de sous-traitance, et la facture qui lui a été présentée. Il soutient que la jurisprudence exclut que la victime puisse agir sur le fondement des troubles du voisinage dès l’instant où l’entrepreneur principal n’a pas réalisé les travaux et n’est donc pas l’auteur du trouble.

Sur la demande de condamnation subsidiaire fondée sur l’article 1382, il affirme que C D ne démontre aucune faute à son encontre. Il explique qu’à l’issue des travaux de démolition, il a en effet rencontré le gérant de XXX et l’a informé de la nécessité de faire réaliser des travaux afin d’assurer la stabilité du mur pignon de l’immeuble voisin.

Il s’oppose également aux demandes formées contre lui par XXX, et rappelle que le gérant lui a indiqué qu’il envisageait de réaliser des plots en béton pour soutenir le pignon ; qu’il pouvait donc considérer que XXX allait effectuer les travaux nécessaires pour remédier aux désordres. Il fait valoir que l’action du maitre de l’ouvrage dont le bien est à l’origine de troubles du voisinage, qui n’a pas été subrogé après paiement dans les droits du voisin victime, contre l’entrepreneur est fondée sur la responsabilité contractuelle de droit commun ; qu’il est susceptible de conserver à sa charge une part d’indemnisation dès lors qu’est caractérisée son acceptation délibérée des risques ; que le rapport d’expertise met en évidence cette acceptation.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 4 novembre 2014, XXX demande à la cour de :

' dire que E B est tenu de garantir XXX de toute somme en principal, intérêts et frais susceptible de revenir à C D ;

' dire n’y avoir lieu à retenir un pourcentage de responsabilité dans la répartition des dommages ;

' condamner E B à verser à XXX la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

' constater que XXX se réserve le droit d’agir à l’encontre de E B en réparation des dommages qu’elle a subis du fait de son incurie;

' le condamner aux dépens.

Elle indique ne pas contester que la construction qu’elle a fait édifier a entraîné à la suite de différents désordres la démolition effective de l’immeuble de C D et que cette situation conduit à sa responsabilité de plein droit envers elle.

Elle considère toutefois que E B, professionnel du bâtiment, est tenu de la garantir et de la relever de toute condamnation résultant des conséquences des travaux qui n’ont pas été réalisés dans les règles de l’art ; qu’il importe peu que E B ait sous-traité une partie des travaux de démolition à l’EURL I J ; que c’est à tort que le tribunal a laissé 40% des dommages à la charge de XXX, en ne tirant pas toutes les conséquences du contrat d’entreprise qui la liait à E B.

Par ses conclusions signifiées le 2 décembre 2013, C D demande à la cour de :

' consacrer la pleine et entière responsabilité in solidum de XXX, de E B et de l’EURL I J et entériné la conclusion du rapport de l’expert ;

' débouter la société MMA IARD de ses demandes ;

' débouter E B de ses demandes ;

' confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris sauf à actualiser les sommes en fonction de l’indice du coût de la construction en vigueur entre le 5 janvier 2009, date du rapport, et la date du règlement à intervenir ;

Y ajoutant,

' condamner XXX, E B et la société MMA IARD à lui payer à titre de dommages et intérêts supplémentaires la somme de 50.000 euros, outre la somme de 110 euros pour la location du camion de déménagement et 37, 11 euros pour les frais de poste ;

' condamner enfin les susnommés in solidum à lui régler une indemnité de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

' les condamner aux dépens en ce compris ceux exposés au stade des procédures de référé, de première instance et en cause d’appel.

Elle rappelle que de nombreuses fissures sont apparues dans son immeuble à l’issue des travaux de démolition et de terrassement commandés par XXX ; qu’elle a dû quitter l’immeuble frappé d’un arrêté de péril et louer un logement provisoirement ; qu’elle a subi de nombreux préjudices à cette occasion. Elle s’oppose à la nullité du jugement et affirme que son argumentation devant les premiers juges reposait sur le trouble anormal du voisinage causé par XXX, et par ses voisins occasionnels E B et l’EURL I J ; que quelque soit le fondement invoqué, la responsabilité de E B est engagée ; que le principe contradictoire a été respecté.

Elle maintient sa demande envers XXX sur le fondement du trouble anormal causé par les travaux de démolition et de terrassement exécutés sur sa demande.

SUR CE :

Sur la nullité du jugement

Attendu que les premiers juges ont rappelé dans l’exposé des prétentions des parties que dans son acte introductif d’instance, C D fondait sa demande d’indemnisation à l’égard des défendeurs sur l’article 544 du code civil, c’est-à-dire sur le fondement des troubles anormaux du voisinage ; que c’est donc à tort qu’il est reproché au jugement d’avoir modifié le fondement juridique de la demande sans inviter les parties à conclure sur ce point alors que ce moyen de droit était dans le débat;

Qu’aucune violation du principe contradictoire n’étant établie, la demande tendant au prononcé de la nullité du jugement sera rejetée ;

Sur la demande de C D à l’égard de XXX, E B, l’EURL I J et la société MMA IARD

— sur l’opposabilité du rapport d’expertise à la société MMA IARD

Attendu que par ordonnance de référé du 30 avril 2008, les opérations d’expertise ordonnées sur l’assignation de C D ont été étendues à l’EURL I J ; que cette dernière a été convoquée par l’expert par lettre recommandée avec accusé de réception aux réunions des 23 juin et 12 décembre 2008 mais ne s’est pas présentée ni fait représenter.

Que la société MMA IARD a pu prendre connaissance du rapport d’expertise qui avait pour objectif de déterminer la responsabilité de son assuré l’EURL I J, et en discuter les conclusions dans le cadre du présent litige ; qu’il n’est ni soutenu ni établi que son absence aux opérations d’expertise résulte d’une fraude à ses droits ou à ceux de son assuré ; que l’expertise constitue donc un élément de preuve parmi d’autres soumis à l’appréciation de la cour, et demeure opposable à la société MMA IARD ;

— sur la responsabilité de XXX, E B et de l’EURL I J

Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article 544 du Code civil que la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou les règlements ; que ce droit absolu se trouve seulement limité par l’obligation du propriétaire de ne causer à la propriété d’autrui aucun dommage dépassant les inconvénients normaux de voisinage ;

Attendu que selon les conclusions de l’expert judiciaire, les travaux de démolition et de terrassements ont été confiés à l’entreprise E B qui a sous-traité la totalité de ces travaux à l’EURL I J ; que les premières fissures sont apparues dans l’habitation de C D environ un mois après l’achèvement des travaux de démolition et de terrassement réalisés par l’EURL I J ; qu’il est apparu que la base du mur pignon de C D était dépourvue de fondations, ou qu’elles avaient été arrachées et que le gérant de XXX avait déclaré à E B qu’il allait faire réaliser des « plots en béton » pour soutenir le pignon ; que les réparations nécessaires n’ont pas été réalisées et les fissures se sont aggravées progressivement ; que les travaux d’édification de l’immeuble situé à proximité immédiate de celui de C D ont été entrepris par la société GEOXIA, sur le terrain de XXX ; qu’en raison de la proximité de ce nouvel immeuble, il est devenu impossible d’étayer le mur pignon de l’immeuble de C D et les fissures se sont aggravées progressivement ; que les fissures ont pris une telle ampleur qu’il est devenu impossible d’envisager une réparation, que le mur pignon menace de s’effondrer sur le nouvel immeuble ou sur la voie publique et qu’il est devenu nécessaire d’envisager la démolition de l’immeuble de C D dans les plus brefs délais ;

Que par ailleurs, les conclusions de ce rapport sont confortées par les factures relatives à la démolition établies par E B à l’attention de XXX, par les factures de démolition établies par l’EURL I J à l’attention de E B, et par le procès-verbal de Maitre A qui a constaté le 5 avril 2007, soit deux mois après les travaux de démolition des garages, que le mur de façade présentait plusieurs fissures ; qu’au demeurant, E B n’a pas contesté avoir sous-traité à l’EURL I J les travaux de démolition, ni le lien de causalité entre ceux-ci et les graves désordres affectant l’immeuble de C D ; que XXX reconnait également que l’élément causal est bien les travaux de démolition ;

Attendu que les parties n’apportent donc aucune critique utile aux conclusions de l’expert ainsi qu’aux faits établis par les pièces examinées au paragraphe précédent; Qu’il convient de dire que les désordres subis par l’immeuble ont pour cause les travaux entrepris par XXX sur son propre terrain ;

Que la gravité de ces désordres, qui conduit à l’obligation de démolir l’immeuble, caractérise l’anormalité des inconvénients de voisinage dont est à l’origine XXX, responsabilité qu’au demeurant elle admet ;

Attendu que XXX, maître de l’ouvrage, est tenue des conséquences au titre des troubles du voisinage ; que le sont également les entrepreneurs sur ce même fondement, au titre de voisins « occasionnels », sous réserve de ce qu’il soit établi que les troubles subis sont en relation de cause directe avec la réalisation des missions qui leur étaient confiées ;

Attendu que les parties admettent que l’entreprise B n’a pas réalisé elle-même les travaux de démolition et de terrassement des garages de XXX ; que cela résulte des affirmations de E B à l’expert, confortées par le devis établi par l’EURL I J et signé de E B et la facture du 13 février 2007 ; qu’il ressort des termes de l’arrêt de la cour d’appel de Douai du 5 novembre 2009 que selon les conclusions signifiées par l’EURL I J, celle-ci a admis avoir effectué ces travaux en qualité de sous-traitant; qu’enfin E B a facturé ces travaux à XXX ; que la relation de sous-traitance entre E B et l’EURL I J est donc démontrée ;

Que E B ne peut contester sa participation aux travaux de démolition et de terrassement, dès lors qu’il a lui-même choisi l’EURL I J pour lui confier leur réalisation effective, en sollicitant un devis, et en facturant à la SCI les travaux ; qu’il lui incombait de surveiller les travaux et d’en contrôler la bonne exécution ; qu’au demeurant il résulte des dires de XXX qui n’ont pas été démentis par E B que ce dernier ne l’avait pas informée du contrat de sous-traitance et s’est toujours présenté au maitre d’ouvrage comme son seul interlocuteur pour les travaux qui lui étaient confiés ;

Que ces faits caractérisent les actes matériels commis à la fois par E B et par l’EURL I J, ayant effectivement contribué à la survenance du dommage ;

Que c’est donc à juste titre que le tribunal a retenu le principe d’une condamnation in solidum de XXX, de E B et de l’EURL I J à l’égard de C D ;

Que par ailleurs, la société MMA IARD ne remet pas en cause son obligation d’assurance envers l’EURL I J eu égard à la police souscrite par celle-ci ;

Qu’il convient donc de confirmer le principe de sa condamnation, in solidum avec son assurée, XXX et E B ;

Sur l’indemnisation du préjudice de C D

Attendu que ni XXX ni E B ni la société MMA IARD ne formulent de critique à l’encontre des sommes fixées par le jugement entrepris à titre de dommages et intérêts ; que C D n’a pas formulé d’appel incident expressément mais a réclamé une somme complémentaire à celle de 10.000 euros allouée par le tribunal, ainsi que l’actualisation des sommes auxquelles les défendeurs avaient été condamnés ;

Qu’il convient donc, eu égard aux conclusions du rapport d’expertise relatives à l’estimation du coût des travaux destinés à remédier aux désordres que le jugement a entérinées, de confirmer les dispositions ayant condamné XXX, E B, l’EURL I J et la société MMA IARD en sa qualité d’assureur de ce dernier, à verser à C D les sommes de 838,30 euros TTC (frais de remise en état de protection provisoire), 30.420 euros HT (travaux de démolition), 181.443,47 euros HT (travaux de reconstruction) ;

Attendu par ailleurs que le jugement a expressément prévu que le montant des indemnités dues au titre des travaux serait à revaloriser en fonction de l’évolution de l’indice du coût de la construction à la date du règlement de l’indemnité ; que toutefois l’indemnité doit être évaluée à la date à laquelle statue la juridiction ; que son montant ne saurait dépendre de la seule initiative de C D pour faire exécuter ces travaux ; qu’en considération de la décision qui fait droit à la demande et ordonne l’exécution provisoire , il y a donc lieu de dire que la revalorisation s’opèrera en fonction de l’évolution de l’indice du coût de la construction à la date du jugement entrepris ;

Attendu que C D réclame également des dommages et intérêts supplémentaires, soit la somme de 50.000 euros (au lieu et place de celle de 10.000 euros allouée par le tribunal) ;

Qu’elle fait valoir l’impact psychologique de cette nouvelle procédure qui retarde encore l’effectivité de la reconstruction de son logement ;

Attendu que le tribunal a justement retenu que par la production d’un certificat médical et de deux attestations d’un psychologue, C D démontrait son état dépressif lié au traumatisme de la perte de son habitation et des conséquences en découlant ;

Que la cour ne peut que constater que l’intimée subit de nouveaux tracas du fait de l’appel interjeté par XXX, E B et la société MMA IARD, ainsi qu’une perte de temps qui lui est particulièrement préjudiciable puisqu’elle n’a été que partiellement indemnisée de ses préjudices et voit encore retardées les conditions de reconstruction de son immeuble ;

Qu’il convient en conséquence d’indemniser son préjudice moral par l’octroi d’une somme de 13.000 euros que XXX, E B et la société MMA IARD en sa qualité d’assureur de l’EURL I J seront condamnés à lui verser ;

Qu’en revanche, C D ne formant aucune demande contre l’EURL I J au titre d’un complément de dommages et intérêts, il convient de confirmer la disposition ayant condamné l’EURL I J à lui verser une somme de 10.000 euros de dommages et intérêts ;

Attendu que C D réclame également la somme de 110 euros pour la location d’un camion ; qu’elle produit une facture de ce montant pour la location d’un véhicule Ford Transit le 16 juin 2013, justifiée par les nécessités de son déménagement ;

Attendu qu’elle justifie encore d’une facture au titre d’un contrat de réexpédition de son courrier, de son adresse de LONGFOSSE à celle de Z, le 23 juillet 2013 ; que ces frais ont été exposés en raison de son départ de l’immeuble et de son relogement temporaire ;

Qu’elle est fondée à réclamer l’indemnisation de ces frais, soit au total 147,11 euros (110 + 37,11) que XXX, E B, et la société MMA IARD en sa qualité d’assureur de l’EURL I J seront condamnés in solidum à lui payer ;

Sur les appels en garantie

— sur l’appel en garantie de XXX à l’encontre de E B

Attendu que XXX demande que E B le garantisse entièrement des sommes dont elle est redevable envers C D ;

Attendu qu’il appartient au maître de l’ouvrage, condamné envers la victime d’un trouble de voisinage, et qui entend recourir contre l’entrepreneur, de mettre en oeuvre une responsabilité contractuelle et de faire la preuve d’une faute de cet entrepreneur ;

Attendu que le gérant de XXX, Monsieur X, a reconnu avoir fait part à E B, après l’exécution des travaux de démolition, qu’il envisageait de faire réaliser des plots en béton pour soutenir le pignon de l’immeuble voisin mais n’a cependant pas mis à exécution ce projet de consolidation ;

Attendu que cette circonstance ne signifie pas pour autant qu’il avait connaissance dès avant le début des travaux de démolition de l’étendue des risques sur l’immeuble voisin; qu’il appartenait à E B, professionnel de la construction, d’inviter le maitre d’ouvrage à se prémunir de ce risque avant de débuter les travaux, et de l’informer sur les différentes solutions qui s’offraient à lui ; qu’il n’apporte pas la moindre justification de l’information qu’il aurait donnée au maitre d’ouvrage sur ce point, ni des conseils qu’il aurait pu dispenser conformément à son obligation ; qu’il n’est pourtant pas soutenu que XXX aurait des compétences particulières dans le domaine de la construction immobilière ; que le manquement de l’entrepreneur à son obligation d’information et de conseil est caractérisé, ainsi que sa faute relevant de son devoir de surveillance et de contrôle de son sous-traitant ;

Qu’en conséquence, l’acceptation des risques dont se prévaut E B à l’égard de XXX n’est nullement caractérisée, de sorte qu’il n’est pas exonéré de sa responsabilité envers elle ;

Qu’en conséquence, il convient de réformer la décision des premiers juges, qui a limité la garantie de E B à son égard ; qu’il convient de dire que E B sera condamné à garantir XXX de toute condamnation prononcée à son encontre au profit de C D, en principal, intérêts et accessoires ;

— sur l’appel en garantie de E B à l’encontre de l’EURL I J

Attendu qu’en cause d’appel, E B ne formule pas de demande tendant à voir réformer la disposition relative au rejet de son appel en garantie de l’EURL I J, étant observé que son appel à l’encontre de l’EURL a été déclaré irrecevable ;

Qu’il y a lieu en conséquence de confirmer la disposition ayant jugé que E B devait conserver à son entière charge la condamnation prononcée à son encontre au profit de XXX, et l’ayant débouté de sa demande à ce titre contre l’EURL I J et son assureur la société MMA IARD ;

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Attendu que XXX obtient gain de cause en appel sur son recours en garantie contre E B ; que E B succombe entièrement en son recours comme la société MMA IARD ; que la condamnation in solidum de XXX avec E B et la société MMA IARD justifient qu’ils soient tous trois condamnés in solidum aux dépens d’appel ;

Qu’il n’apparait pas opportun de faire masse des dépens, eu égard à la garantie prononcée, mais de dire que les dépens de première instance seront mis à la charge de XXX, de E B, et de la société MMA IARD ;

Qu’il apparait équitable de condamner encore in solidum XXX, E B et la société MMA IARD à verser à C D la somme de 4.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel ;

Que XXX est bien fondée à obtenir la condamnation de E B à lui verser une somme de 4.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel ;

Qu’en revanche la société MMA IARD et E B, parties succombantes, seront déboutés de leurs demandes au titre de leurs frais irrépétibles d’appel ;

Que les dispositions relatives à l’indemnité procédurale allouée à C D et à XXX en première instance méritent d’être confirmées ;

PAR CES MOTIFS :

Vu les irrecevabilités et le désistement des appels formés contre L’EURL I J ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris à l’exception des dispositions:

— condamnant XXX, E B et la société MMA IARD à payer à C D la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts,

— concernant la date de revalorisation du montant de l’indemnité due au titre des travaux de reconstruction,

— limitant la garantie de la SCI par E B,

— concernant la condamnation aux dépens

Le réforme de ces chefs, et, statuant à nouveau ;

Condamne in solidum XXX, E B et la société MMA IARD à payer à C D la somme de 13.000 euros à titre de dommages et intérêts outre les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Dit que l’indemnité de 181.443,47 euros H.T. due au titre des travaux de reconstructions sera revalorisée en fonction de l’évolution de l’indice du coût de la construction en vigueur de la date du rapport du 5 janvier 2009 à la date du jugement entrepris ;

Condamne G B à garantir entièrement XXX des condamnations prononcées à son encontre au profit de Laruence D en principal, intérêts et frais;

Y ajoutant:

Condamne in solidum XXX sous la même garantie, E B et la société MMA IARD à payer à C D la somme de 147,11 euros au titre de l’indemnisation de ses frais matériels.

Déboute la société MMA IARD et E B de leurs demandes au titre de leurs frais irrépétibles d’appel

Condamne in solidum XXX sous la même garantie, E B et la société MMA IARD à verser à C D la somme de 4.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel ;

Condamne E B à verser à XXX une somme de 4.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel ;

Condame in solidum XXX sous la même garantie, E B et la société MMA IARD aux dépens d’appel ;

Dit que les dépens de première instance seront mis à la charge de XXX sous la même garantie, de E B et de la société MMA IARD.

Le Greffier, Le Président,

F. DUFOSSE F. GIROT

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Douai, 5 février 2015, n° 13/02145