Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 2, 7 septembre 2017, n° 15/06160

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, ch. 2 sect. 2, 7 sept. 2017, n° 15/06160
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 15/06160
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Lille, 28 juin 2015, N° 13/00015
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

[…]

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 07/09/2017

***

N° de MINUTE : 17/

N° RG : 15/06160

Jugement (N° 13/00015) rendu le 29 juin 2015

par le tribunal de grande instance de Lille

APPELANTES

SARL E F prise en la personne de son représentant légal , domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social 48, place de la Gare

[…]

représentée par Me Marie -R S, exerçant à titre individuel et constitué aux lieu et place de Me Marie-R S, membre de la SELARL Adekwa, avocat au barreau de Douai

assistée de Me Jean-François Perreau, avocat au barreau de Lille

INTERVENANTE VOLONTAIRE

G H et I D, représentée par Me I D ès qualités de mandataire judiciaire de la SARL E F

ayant son siège social […]

[…]

représentée par Me Marie -R S, exerçant à titre individuel et constitué aux lieu et place de Me Marie-R S, membre de la SELARL Adekwa, avocat au barreau de Douai

assistée de Me Jean-François Perreau, avocat au barreau de Lille

INTIMÉE

[…]

ayant son […]

[…]

représentée et assistée par Me Philippe Talleux, avocat au barreau de Lille, substitué à l’audience par Me Benoit Bailleul

DÉBATS à l’audience publique du 09 mai 2017 tenue par L M magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : J K

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Marie-Laure Dallery, président de chambre

L M, conseiller

N O, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 07 septembre 2017 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Marie-Laure Dallery, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 26 avril 2017

***

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte authentique en date du 27 février 1989, M. et Mme X, aux droits desquels vient la […], ont donné à bail à M. Y un immeuble à usage commercial sis 48 place de la gare à Lille, pour une durée de 9 années moyennant un loyer annuel de 69 320 francs (10 567,77 euros).

Par acte en date du 2 février 2000, M. Y a cédé son fonds de commerce à M. Z. Dans le cadre de cette cession, le bail a été renouvelé du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2008.

Suite à la liquidation judiciaire de M. Z, le fonds de commerce a été cédé à la SARL E F en 2008. Elle y exerce une activité de café-sandwicherie.

Le bail s’est poursuivi par tacite reconduction après le 31 décembre 2008.

Par acte extrajudiciaire du 25 février 2013, le bailleur a fait notifier un congé pour le 30 septembre 2013 avec offre de renouvellement moyennant un loyer annuel déplafonné de 40 000 euros HT. Le preneur a donné son accord sur le principe de renouvellement mais s’est opposé au déplafonnement.

Suivant acte d’huissier délivré le 23 avril 2013, la […] a assigné la société E F devant le juge des loyers commerciaux aux fins, notamment, de voir juger le déplafonnement du loyer et fixer le loyer annuel à la somme de 40 000 euros HT HC..

Par jugement avant dire droit en date du 7 avril 2014, le juge des loyers commerciaux de Lille a constaté que le prix du loyer renouvelé à la date du 30 septembre 2013 devait être fixé à la valeur locative et a ordonné une expertise confiée à M. P.

L’expert a déposé son rapport le 29 octobre 2014 et a proposé la fixation du loyer à 34 500 euros/an.

Par jugement du 29 juin 2015, le juge des loyers commerciaux a, sous le bénéfice de l’exécution provisoire:

— fixé le loyer annuel du bail renouvelé à compter du 30 septembre 2013 à la somme de

34 500 euros/an/ hors taxes et hors charges;

— condamné la société E F à payer à la […] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens,

— débouté les parties pour les surplus.

La SARL E F a interjeté appel par déclaration du 29 juin 2015.

La société E F a été placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Lille Métropole le 30 novembre 2015. La G D a été désigné en qualité de mandataire judiciaire.

La G D est intervenue volontairement à la procédure.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de leurs conclusions signifiées par voie électronique le 27 mars 2017, la G D et la SARL E F demandent à la cour d’appel de réformer le jugement entrepris et:

Statuant à nouveau:

— fixer le loyer du bail renouvelé à la somme de 16 000 euros HT et HC par an,

— condamner la […] à lui payer la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, et les entiers dépens de première instance et d’appel.

Après avoir indiqué qu’elle n’avait pas été informée du renouvellement du bail au 1er janvier 2000, la SARL E F critique l’expertise judiciaire et soutient que:

— la surface pondérée doit être retenue à 58 m², comme l’admet le bailleur lui-même, et non à 69 m2 comme le retient l’expert, compte tenu de la grande vétusté et du caractère inexploitable des étages,

— il doit être tenu compte, pour fixer la valeur locative, du mauvais état du local et des travaux extrêmement importants auxquels a du procéder le preneur, ce que n’a pas fait l’expert en retenant une valeur de 500 euros le m2,

— la valeur locative doit être minorée en application de l’article R 145-8 du code de commerce dès lors que le preneur prend en charge la taxe foncière et la prime d’assurance, charges qui incombent en principe au bailleur, toute référence à un usage en la matière devant être exclue,

— au regard de ces éléments, la valeur locative ne peut excéder 300 euros le m2, montant duquel il convient de déduire le montant de l’impôt foncier,

— le loyer de comparaison, repris par l’expert, concernant le bail 'Le Pelican’ situé 12 place de la gare (45 000 euros) n’est pas celui effectivement payé, le locataire bénéficiant d’une franchise de loyer de 8 400 euros, non limitée dans le temps ainsi que l’a relevé un expert, M. A, en 2007.

Aux termes de ses conclusions signifiées par voie électronique le 30 novembre 2016, la […] demande à la cour d’appel, au visa des articles L 145 et suivants du code de commerce et du rapport d’expertise judiciaire du 29 octobre 2014, de:

— confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

En conséquence,

— dire et juger renouvelé le bail commercial à compter du 30 septembre 2013 pour une durée de neuf années,

— fixer le montant du loyer renouvelé à la valeur locative, à compter du 30 septembre 2013, à la somme de 34 500 euros HT et HC par an,

— dire et juger que toutes les autres clauses et conditions du bail seront maintenues,

— condamner la SARL E F à payer à la […] une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers frais et dépens.

Après avoir rappelé que la cour n’était plus saisie que de la fixation de la valeur locative, le principe du déplafonnement étant acquis aux termes du jugement du 7 avril 2014, et indiqué que la société E F était informée du renouvellement du bail intervenu en 2000, la […] expose que la valeur locative doit être retenue à 34 500 euros par an HT aux motifs que:

— l’expert a déterminé la valeur locative selon les critères de l’article L 135-33 du code de commerce et a calculé à juste titre la surface pondérée à 69 m², le preneur la contestant sans apporter de justification,

— le bailleur ne s’est pas prévalu, dans son dernier mémoire, d’une surface pondérée de 58 m2, la pondération qui doit être retenue étant celle de l’expert,

— l’expert avait déjà relevé l’état de l’étage antérieurement à la date d’effet du bail commercial et à la prise de jouissance par le preneur, de sorte que le loyer avait été fixé en considération des étages,

— le preneur ne prouve pas avoir fait des travaux importants; ceux réalisés ne sauraient être pris en compte pour l’évaluation de la valeur locative, l’expert ayant relevé qu’ils constituaient un choix du locataire sans incidence sur la valeur locative,

— la prise en charge des taxes foncières et assurances par le preneur est d’usage et a déjà été prise en compte par l’expert pour fixer la valeur locative, les références de loyers dans le voisinage incluant ces charges,

— ces charges ne représentant qu’environ 5 % du loyer, il est disproportionné de demander une minoration de 15 à 20 %,

— le local bénéficie de facteurs locaux de commercialité de 1er ordre pour ce type de commerce,

— l’expert retient une valeur locative raisonnable de 500 euros/m2 en tenant compte de valeurs de référence cohérentes, correspondant à la période de référence,

— le loyer pour le local situé au 12 place de la gare est bien fixé à la somme de 45 000 euros, le montant retenu par l’expert M. A n’étant pas justifié.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la fixation du loyer du bail renouvelé

A titre liminaire, la cour observe que le principe du déplafonnement et de la fixation du loyer à sa valeur locative est acquis, aux termes du jugement mixte du 7 avril 2014, dont il n’a pas été interjeté appel.

La cour n’est donc saisie que de la fixation de la valeur locative après retour d’expertise, de sorte qu’il n’y a pas lieu de répondre aux arguments des parties relatifs à l’ignorance ou non par la société E F d’un renouvellement du bail au 1er janvier 2 000, l’appelante ne tirant au demeurant aucune conséquence juridique de cet élément de fait.

* * *

Aux termes de l’article L 145-33 du code de commerce, « le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative. A défaut d’accord, cette valeur est déterminée d’après: 1° les caractéristiques du local considéré;

2° la destination des lieux;

3° les obligations respectives des parties;

4° les facteurs locaux de commercialité;

5° les prix couramment pratiqués dans le voisinage ['] . »

Selon l’article R 145-3 du même code, « les caractéristiques propres au local s’apprécient en considération:

1° de sa situation dans l’immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité d’accès pour le public;

2° de l’importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l’exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux;

3° de ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d’activité qui y est exercée;

4° de l’état d’entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail;

5° de la nature et de l’état des équipements et des moyens d’exploitation mis à la disposition du locataire . »

Il résulte de l’article R 145-6 que « les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l’intérêt que présente, pour le commerce considéré, l’importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités pour le voisinage, des moyens de transport, de l’attrait ou des sujétions que peut présenter l’emplacement pour l’activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d’une manière durable ou provisoire ».

Enfin, l’article R 145-7 dispose que « les prix couramment pratiqués dans le voisinage, par unité de surface, concernent des locaux équivalents eu égard à l’ensemble des éléments mentionnés aux articles R 145-3 à R 145-6. A défaut d’équivalence, ils peuvent, à titre indicatif, être utilisés pour la détermination des prix de base, sauf à être corrigés en considération des différences constatées entre le local loué et les locaux de référence. Les références proposées de part et d’autre portent sur plusieurs locaux et comportent, pour chaque local, son adresse et sa description succincte. Elles sont corrigées à raison des différences qui peuvent exister entre les dates de fixation des prix et les modalités de cette fixation. »

* * *

En l’espèce, le loyer initial annuel (bail du 27 février 1989), était fixé à la somme de 69 320 francs (10 567, 77 euros). Il s’élevait à la somme de 19 259, 52 euros HT HC au 1er mars 2013.

Le juge des loyers du tribunal de grande instance de Lille a fixé le loyer renouvelé à une valeur locative de 34 500 euros/an HT et HC, soit 500 euros/m2.

La société E F et son mandataire judiciaire sollicitent la fixation du loyer renouvelé à un montant de 16 000 euros HT HC/an, tandis que la société bailleresse réclame la somme de 34 500 euros par an.

Sur les caractéristiques du local loué

L’immeuble donné à bail est situé 48 place de la gare à Lille.

Il résulte de la description qui en est donnée par M. P qu’il est composé d’un sous-sol, occupé par la cuisine et les chambres froides, un rez-de-chaussée, qui comporte la salle de brasserie, un premier étage accessible par un petit escalier qui s’ouvre sur une salle de café brasserie, et de quatre autres étages, inutilisés et inexploitables commercialement en l’état.

L’expert retient une surface totale de 295 m2 pour une surface pondérée de 68, 80 m2 arrondie à 69 m2. Il affecte notamment un coefficient de pondération de 0, 4 à la salle du 1er étage, soit une surface pondérée de 5, 20 m2, et de 0, 05 pour les 2e, 3e, 4e et 5e étage, soit une surface pondérée de 7, 40 m2. Ces pondérations sont contestées par le preneur.

' S’agissant du 1er étage, le preneur n’explique cependant pas pour quels motifs devrait être retenue une pondération à 0, 20, alors que l’expert indique que la salle de café-brasserie, accessible et équipée de tables et de chaises est parfaitement exploitable. La pondération de 0, 40 pour le 1er étage, justifiée par l’expert, sera donc retenue.

' En revanche, M. P indique que les quatre autres étages sont totalement inexploitables commercialement, avec des installations hors services et diverses traces de fuites en plafond, les deux derniers étages étant même occupés par des volatiles. Pour retenir néanmoins un coefficient de 0, 05 et une surface pondérée de 7, 40 m, l’expert note que le preneur pourrait l’utiliser en réserve, bureau… avec quelques travaux.

Ainsi que le reconnaît le bailleur, l’état des étages est bien antérieur à la date d’effet du bail commercial. L’impossibilité d’exploiter étant manifestement imputable à la vétusté et à une absence de travaux sur le clos et le couvert, à la charge du bailleur, les étages supérieurs doivent être exclus de la surface utile.

La cour observe d’ailleurs, à l’instar des appelants, que dans son mémoire introductif d’instance, le bailleur se prévalait une surface pondérée de 58 m2.

Il convient dès lors de retenir une surface utile pondérée de 61, 40 m2 (68, 80 m2 – 7, 40 m2) arrondie à 62 m2.

Sur la destination des lieux

Le bail précise que les lieux loués sont à usage de 'café et hôtel'. L’acte de cession du fonds de commerce mentionne l’activité de café, débit de boissons, hôtel, friterie, sandwicherie. Cependant, il est constant que l’activité hôtel n’est plus exercée depuis longtemps et qu’elle a été exclue de la cession du fonds.

L’expert note que l’activité exercée est conforme à la destination des lieux et ce point ne suscite aucune contestation.

Sur les facteurs locaux de commercialisation

L’expert souligne le développement important de la ville de Lille, l’essor du tourisme, et particulièrement de la fréquentation des gares SNCF. Le local donné à bail est situé quasiment face à l’un des trois accès à la gare Lille-Flandres, sur une place qui connaît un flux de population important. Il s’agit d’un bon emplacement commercial avec une concentration sur ce secteur de cafés, brasseries et restaurants qui crée une bonne synergie. Il est relevé que la friterie en façade de l’établissement attire de nombreux passants et voyageurs

Les parties ne contestent pas la qualité des facteurs de commercialité tels que relevés par M. P.

Sur les prix couramment pratiqués dans le voisinage

Pour que ces éléments de comparaison soient utiles, encore est-il nécessaire, ainsi que le rappelle l’article R 145-7 du code de commerce, qu’ils soient suffisamment nombreux, qu’ils concernent des locaux équivalents et qu’ils soient le cas échéant corrigés en fonction de la date de fixation des loyers et des modalités de leur fixation.

En l’espèce, M. P fournit neuf références se rapportant à des commerces situés sur la même place ou à proximité immédiate. Ces références montrent des écarts avec des valeurs unitaires de 335 euros/m2/SUP/an HT à 1 000 euros/m2/SUP/an/HT. Après avoir écarté les deux références extrêmes, les sept autres références font ressortir une valeur moyenne de 520, 83 euros/m2/SUP/an/HT et une valeur médiane à 500 euros/m2/SUP/an/HT.

L’expert conclut qu’en fonction des valeurs locatives couramment pratiquées dans le voisinage immédiat de la place de la gare et de la distribution des locaux relativement étroits avec accès sur rue rétréci par le 'box’ friterie, il convient de retenir la valeur médiane, soit 500 euros/m2/SUP/an HT.

' Seule la référence suivante fait l’objet de critique de la part du preneur au motif que le loyer facial est en réalité moindre de 8 400 euros compte tenu de la franchise non limitée dans le temps accordée au locataire:

—  12 place de la Gare 'Le Pelican’ Brasserie- restaurant, locaux repris par Gur Kebab depuis le 1er mai 2014

108 m2- bail du 1er juin 2007

loyer initial de 45 000 euros/an HT, actualisé à 52 457, 37 euros/an HT soit 485,72 euros/m2/SUP/an HT

Cependant, le bail en question (pièce 11 de l’intimée) fixe bien un loyer annuel de 45 000 euros. Ce n’est qu''à titre exceptionnel' qu''il est prévu une franchise forfaitaire et non indexée annuelle de 8 400 euros accordée au profit exclusif de M. Q C de B, es qualité d’associé unique de l’EURL 'Le Pelican d’Or’sur le loyer contractuel et ce jusque cession du fonds de commerce au prochain repreneur dûment agrée'. Il est ajouté que tout successeur de l’EURL perdrait immédiatement le bénéfice de cette franchise, accordée intuitue personae à M. C de B.

Ainsi il ressort des termes du bail, dépourvus de toute ambivalence, que la franchise n’a été accordée qu’à raison de la personne même de l’associé de l’EURL gérant le commerce, et qu’elle constitue une faveur à son égard, ce qui explique que le loyer actuellement payé par le successeur, le commerce Gur Kebab, expressément exclu du bénéfice de la franchise, soit différent de celui retenu par M. A dans son expertise de 2009 et qu’il s’élève désormais à la somme de 52 457, 37 euros, soit 485,72 euros/m2.

Dès lors, seul le loyer contractuellement fixé, censé représenter la valeur locative, qui n’a été que temporairement et limitativement exclu par les parties, actualisé à la somme de 52 457,37 euros doit être retenu comme référence servant de base à la fixation de la valeur locative du local litigieux.

' Pour contester la valeur retenue par M. P et solliciter la fixation de la valeur locative à 300 euros/m2, les appelants se réfèrent au rapport d’expertise de M. A réalisé dans le cadre de la fixation du loyer du local (Brasserie de Paris), situé 8/10 place de la gare et qui avait retenu une valeur locative de 286,78 euros/m2 à la date du 1er juillet 2008.

Cependant, ce rapport ne saurait constituer une référence pertinente faute de toute correspondance avec la période de référence (septembre 2013) de la présente espèce. En effet, les termes de comparaison transmis par M. A ne sont qu’au nombre de trois, ils se rapportent à une valeur locative à fixer au 1er juillet 2008 et sont eux-même issus d’un précédent rapport dont la date est inconnue. En outre, la date des baux.n’est pas mentionnée.

' Ainsi que le relève le premier juge, les références proposées par M. P, au demeurant non remises en cause par les parties, sont cohérentes. Elles portent sur des locaux équivalents, situés sur la place de la gare ou à proximité immédiate, exerçant une activité similaire (à l’exception du 40 place de la gare qui est un commerce de détail spécialisé), et sur des baux postérieurs, pour 7 d’entre eux, à mars 2012, soit une date proche de la date de renouvellement du présent bail.

' Enfin, l’expert tient compte de la spécificité du local (locaux étroits) pour retenir la valeur médiane (500 euros/m2) et non la valeur moyenne (520, 83 euros/m2) comme valeur locative.

Cette valeur médiane de 500 euros sera retenue au titre des prix couramment pratiqués dans le voisinage.

Sur les obligations respectives des parties

Il résulte de l’article R 145-8 du code de commerce, que les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur le locataire sans contrepartie constituent un facteur de diminution de la valeur locative. Il en est de même des obligations imposées au locataire au delà de celles qui découlent de la loi ou des usages. Les améliorations apportées au lieux loués au cours du bail à renouveler ne sont prises en considération que si, indirectement ou directement, notamment par l’acceptation d’un loyer réduit, le bailleur en a assumé la charge.

' La société E F et Me D se réfèrent à la dernière phrase de ce texte pour conclure que les travaux réalisés par le preneur doivent minorer la valeur locative.

Les appelants procèdent ainsi à une interprétation erronée de ce texte, lequel signifie que le bailleur ne peut se prévaloir, comme élément de majoration de la valeur locative, de travaux dont il n’a pas assumé la charge, comme des travaux d’amélioration réalisés par le locataire et de nature à valoriser son commerce.

' Seule serait susceptible de minorer la valeur locative, sur le fondement de la première phrase de l’article R 145-8, la prise en charge par le locataire de travaux incombant au bailleur, tels les travaux de l’article 606 du code civil, puisqu’il s’agirait alors d’un transfert, au locataire, d’obligations devant normalement être supportées par le bailleur.

Or, il ressort des factures produites à l’expert que les travaux engagés par la société E F sont afférents à la rénovation de la cuisine (34% des justificatifs) ou constituent des travaux d’aménagement et de décoration courants (décoration toile tissus marbrerie, caisson lumineux, enseigne, store, video-surveillance, carrelage…) ainsi que des travaux d’entretien et de maintien en l’état de l’existant relevant de son obligation contractuelle d’entretenir le local en bon état d’usage et d’entretien.

La société E F ne justifie aucunement avoir exécuté des travaux qui auraient dû être normalement assumés par le bailleur. Elle ne peut donc se prévaloir d’une minoration de la valeur locative sur ce motif.

' En revanche, le contrat de bail transfère au locataire le paiement de la taxe foncière, charge incombant normalement au bailleur. Cette clause, exorbitante du droit commun, constitue un facteur de minoration de la valeur locative.

Pour s’opposer à cette minoration, la SCI Flandres fait valoir que la déduction de l’impôt foncier de la valeur locative n’est pas justifiée car la valeur fixée par l’expert prend déjà en considération ces charges, dès lors que les loyers de référence ont été fixés en tenant compte de ces charges exorbitantes du droit commun, de sorte qu’opérer une minoration reviendrait à le déduire deux fois.

Contrairement à ce qui est indiqué, il ne ressort aucunement de son rapport que l’expert a procédé à une minoration de la valeur locative, celui-ci se contentant au contraire de prendre acte du caractère usuel dans le Nord du transfert de la taxe foncière au locataire et d’en déduire l’absence de déséquilibre entre les obligations des parties.

Il n’est pas plus établit que les loyers de référence aient été aussi fixés en tenant compte de ces charges.

Or, il importe de relever que les usages invoqués, selon lesquels la taxe foncière serait constamment et usuellement transférée au locataire, ne peut faire échec aux dispositions particulièrement claires de l’article R 145-8 du code de commerce précité.

En conséquence, il convient de déduire cette charge assumée par la société E F, d’un montant de 2 238 euros en 2013 (pièce 18 des appelants), du montant du loyer renouvelé au 30 septembre 2013.

* * *

En conclusion, au regard des caractéristiques du local considéré, des facteurs locaux de commercialité, des prix pratiqués dans le voisinage et de la destination contractuelle, il convient de fixer la valeur locative du mètre carré, avant déduction de l’impôt foncier, à la somme de 500 euros.

Le loyer annuel du bail renouvelé sera donc fixé, sur la base d’une surface utile pondérée de 62 m2, à la somme de 28 762 euros hors taxes et hors charges [(62 m2 x 500 euros) ' 2 238 euros].

Sur les frais et dépens

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

En l’espèce, le jugement est partiellement réformé dans un sens favorable au preneur mais il est fait droit, dans une large mesure, à la demande du bailleur. En, outre, le preneur, placé en redressement judiciaire, est en difficulté économique.

Il apparaît équitable dans ces conditions de laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens et de les débouter de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

INFIRME le jugement entrepris,

STATUANT à nouveau et Y AJOUTANT:

FIXE à la somme de 28 762 euros par an, hors taxes et hors charges euros par an, le montant du loyer du bail renouvelé à effet au 30 septembre 2013, entre la […] et la SARL E F pour le local sis 48 place de la Gare à Lille.

DIT que toutes les autres clauses et conditions du bail sont maintenues.

DEBOUTE la […] de sa demande formée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

DEBOUTE la SARL E F et Me D, ès qualités de mandataire judiciaire de la SARL E F, de leur demande formée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

DIT que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.

Le Greffier Le Président

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