Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 29 mars 2010, n° 09/02325

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, ch. soc., 29 mars 2010, n° 09/02325
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 09/02325
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Valence, 12 mai 2009, N° 09/00247

Sur les parties

Texte intégral

RG N° 09/02325

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU LUNDI 29 MARS 2010

Appel d’une décision (N° RG 09/00247)

rendue par le Tribunal de Grande Instance de VALENCE

en date du 13 mai 2009

suivant déclaration d’appel du 02 Juin 2009

APPELANTE :

Le CHSCT DE L’ETABLISSEMENT DE PIERRELATTE DE LA SOCIETE AREVA NC, pris en la personne de son secrétaire M. Z B, domicilié en cette qualité audit siège

XXX

XXX

Représenté par la SCP GRIMAUD (avoués à la Cour) – et représenté par Me Justine BISTOLFI (avocat au barreau de VALENCE)

INTIMES :

La S.A AREVA NC poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

XXX

XXX

Représentée par Monsieur CHIVOT et assisté par la SCP Jean & Charles CALAS (avoués à la Cour) et représenté par la SCP AGUERA & ASSOCIES (avocats au barreau de LYON)

Monsieur Y, pris en sa qualité de Président du CHSCT et de la S.A. ARENA ARNAUD

XXX

XXX

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre,

Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Simone VERDAN, Greffier.

DEBATS :

A l’audience publique du 22 Février 2010,

Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie(s).

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 29 Mars 2010.

L’arrêt a été rendu le 29 Mars 2010.

RG 0902325 DD

Le Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail de l’établissement de Pierrelate (le CHSCT) de la société AREVA NC a fait appel du jugement rendu le 13 mai 2009 par le tribunal de grande instance de Valence statuant en la forme des référés sur la demande de la société Areva NC et du président du CHSCT du site de Pierrelatte visant à voir jugé que la réflexion menée à échéance de 2015 ne constitue pas un projet, que le « projet de valorisation du service de la Formation Locale de Sécurité (FLS) » n’est pas un projet important au sens de l’article L 4612-8 du code du travail et en conséquence à voir annulée la délibération du CHSCT du 31 mai 2009 et jugé que cette délibération constitue un abus de droit qui justifie que la société Areva NC ne prenne pas en charge les éventuels frais d’avocat que le CHSCT pourrait être amené à exposer dans le cadre de la présente procédure.

Ce jugement a rejeté le moyen d’irrecevabilité soulevé par le CHSCT et annulé la désignation d’expert effectuée le 31 mars 2009, condamné la société Areva NC à payer la somme de 2 900 euros TTC sur le fondement des articles 700 du code de procédure civile et L 4614-9 du code du travail au CHSCT et condamné la société Areva NC aux dépens.

L’ordonnance de clôture rendue le 27/01/2010 a été révoquée et rendue à nouveau ce 22 février 2010.

Demandes et moyens des parties

Le CHSCT, appelant, demande à la cour de réformer l’ordonnance de référé entreprise, de juger que l’action intentée par la société Areva NC est nulle puisqu’entachée d’une irrégularité de fond,

Au cas où l’ordonnance rendue le 13/05/2009 serait confirmée en ce qu’elle a rejeté l’exception d’irrecevabilité, de confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a jugé que le projet FLS 2009 est un projet au sens de l’article L 4614-12 du code du travail, de l’infirmer en ce qu’elle a jugé que ce projet n’est pas important au sens de l’article L 1644-12 du code du travail, de juger qu’il s’agit d’un projet important au sens de cet article et en conséquence de juger qu’il n’y a pas lieu à annulation de la délibération du CHSCT du 31 mars 2009,

En tout état de cause, confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a condamné la société Areva NC à payer la somme de 2 900 euros TTC sur le fondement des articles 700 du code de procédure civile et L 4614-9 du code du travail au CHSCT et condamné la société Areva NC au paiement de la somme de 3 588 euros TTC des mêmes chefs dans le cadre de cette procédure et aux dépens, d’autoriser la SCP Grimaud, avoués, à les recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le CHSCT expose par conclusions régulièrement communiquées, déposées et développées oralement à l’audience que :

1) le défaut de pouvoir d’une partie ou d’une personne figurant au procès constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l’acte et l’article L 2325-1 du code du travail dispose que le comité d’entreprise ou ici le CHSCT doit désigner un représentant s’il veut assurer sa défense devant une juridiction alors que la société Areva NC a assigné le CHSCT pris en la personne de son secrétaire, M. Z, alors que celui-ci n’est pas investi de plein droit de la capacité de représenter le CHSCT en l’absence de mandat spécialement donné puisque la société Areva NC n’a pas provoqué de délibération du CHSCT dans ce sens,

1-2) le secrétaire du CHSCT ne peut en cette seule qualité représenter juridiquement celui-ci et il doit donc justifier d’un mandat spécial,

1-3) s’agissant d’une irrégularité de fond, il n’est pas nécessaire de justifier d’un grief,

2) l’importance du site tant par le nombre des salariés concernés que par la nature des matériaux traités qui justifie le classement SEVESO seuil haut, qui fait que la société Areva NC est soumise aux dispositions de l’arrêté du 31 décembre 1999 modifié par celui du 31 janvier 2006, lui impose de disposer d’une FLS (136 personnes dont 102 agents assurant les interventions) ayant vocation à concerner près de 6300 personnes présentes sur le site,

2-2) la réorganisation de la FLS rendue nécessaire par la modification de la réglementation et les carences de l’organisation actuelle relevée par le bilan effectué justifie la demande de désignation d’un expert,

2-2) le projet de réorganisation de la FLS relève de l’article L 4614-12 du code du travail (Article L4614-12

— Le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agréé :

1º Lorsqu’un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement ;

2º En cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, prévu à l’Article L4612-8.

Article L4612-8

— Le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail est consulté avant toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et, notamment, avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l’outillage, d’un changement de produit ou de l’organisation du travail, avant toute modification des cadences et des normes de productivité liées ou non à la rémunération du travail.)

dès lors qu’après caractérisation des lacunes du système pour lequel des exigences de résultat sont requises, la direction à défini les mesures à prendre ce que confirment les énonciations du document remis au CHSCT pour consultation,

2-3) le projet présenté n’est pas une simple étude préalable mais d’un projet qui a été mis en place le 29/01/2010

2-4) l’existence d’un projet ne se définit pas parla mission confiée à l’expert mais par les éléments existant dans le cadre de l’action de la direction (audit commandé par l’entreprise suite aux dysfonctionnements connus, bilan suite à cet audit, objectif à atteindre et mesures mises en place)

3) il s’agit bien d’un projet important qui aura des incidences sur le contenu du travail des agents suite à la réaffectation de trois agents à l’encadrement, la réduction de l’effectif des brigades dont 3 perdront un agent, ce qui remet en cause le dimensionnement de ces brigades au regard des missions à remplir ce qui est démontré par les conséquences des incidents des 8 et 11 juillet 2008 chez X (fuite de solution uranifère) d’abord puis chez COMURHEX ensuite (fuite de fuel lourd) pour lequel la FLs n’a pu intervenir faute de moyens disponibles,

3-2) la critique ne porte pas que sur le projet de réorganisation mais aussi sur les limites de l’organisation au regard des besoins en sécurité et l’adéquation des effectifs proposés à ces besoins en terme d’effectifs (besoin de 20 postes et non de 17 minimum) mais aussi des matériels mobilisables pour respecter le cahier des charges (2 véhicules de lutte contre l’incendie et un véhicule d’assistance aux victimes, les 3 ne pouvant être mobilisés en même temps si le besoin apparaît),

3-3) des tâches considérées comme non prioritaires doivent être supprimées à la FLS ce qui aura des incidences sur la sécurité des personnels de la FLS sauf embauche des nouvelles équipes (dégrillages du bassin tampon, modifications structurelles de certains dispositifs de protection physique, etc.)

4) l’enjeu technique est important étant rappelé que la direction qui refuse la désignation d’un expert CHSCT a elle-même eu recours à un tel expert et que le CHSCT s’il a vocation à intervenir sur les problèmes de sécurité n’est pas un spécialiste,

4-2) cette réorganisation s’inscrit dans le contexte plus global constitué par une modification du schéma industriel du site et son évolution vers une dimension plus importante,

5) l’action du CHSCT n’est pas abusive

La société Areva NC, intimée, demande à la cour de confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a dit que la réflexion menée à échéance 2015 n’est pas un projet en cet état et que le projet de valorisation de la FLS n’est pas un projet important au sens de l’article L 4612-8 du code du travail et en ce qu’elle a annulé la délibération du 31/03/2009, de réformer l’ordonnance en jugeant que la délibération annulée constitue un abus de droit qui justifie que la société Areva NC ne prenne pas en charge les éventuels frais d’avocats et d’avoués que le CHSCT a été amené à exposer dans le cadre de cette procédure et de condamner le CHSCT aux dépens.

La société Areva NC expose par conclusions régulièrement communiquées, déposées, et développées oralement à l’audience que :

La recevabilité de son action n’est pas contestable, le président du comité n’étant pas tenu auparavant de provoquer une délibération du comité,

1) le fondement juridique de la mission de l’expert n’est pas défini, la réflexion mise en 'uvre pour s’adapter à une situation à venir (2015) ne constituant pas un projet,

1-2) le projet FLS 2009 remplit les conditions légales (4 brigades assurant la sécurité du site 24h/24, 17 postes par brigades (minimum requis par l’ASN et le haut fonctionnaire de défense) soit 25 agents auxquels s’ajoute l’état major de 9 agents, 7 agents de sécurité, 5 contrats de travail à durée déterminée, 1 salarié mis à disposition et 11 salariés accueil non concernés par le projet présenté,

1-3) le nouveau chef de la FLS a pris en compte certaines nécessités de répartition des personnels, avec un nouvel organigramme soumis au CHSCT (réaffectation de 3 agents (1 sur les 3 brigades de 26) à l’état major, réaffectations selon les spécialités dans les brigades, recomposition de la chaine hiérarchique dans les brigades, maintien de l’effectif global à 136 personnes,

1-4) il ne s’agit donc pas d’un projet important au sens de L 4612-8 du code du travail mais d’une réorganisation restructuration de l’encadrement,

2) ce projet n’a pas provoqué de réaction de l’autorité de tutelle,

2-2) le chef de l’ FLS a répondu aux critiques du CHSCT tant au niveau global qu’au niveau de la réaffectation de 3 personnels des brigades à l’état major et à celui de l’utilisation des matériels disponibles, le tout étant conforme aux préconisations des guides nationaux disponibles,

2-3) l’expert consulté par la société Areva NC n’était pas un expert sécurité mais un conseiller en méthodologie et organisations nouvelles,

MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l’audience ;

Attendu que c’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a déclaré la société Areva NC recevable en son recours dès lors que la recevabilité de son action contre le CHSCT ne peut être subordonnée à la désignation de la personne qui doit le représenter en justice et a annulé la délibération contestée par la société Areva NC après avoir exactement retenu que si c’est bien un projet qui a été soumis au CHSCT ce projet ne revêt pas le caractère important visé par l’article L 4614-12 du code du travail ;

Qu’en effet la mission d’expertise adoptée par le CHSCT ne concerne qu’indirectement le projet de valorisation de la FLS puisqu’elle vise uniquement à une appréciation des besoins en terme de dimensionnement des hommes et des moyens pour la période 2009/2015 sur le périmètre d’intervention actuel et n’interroge pas le projet de valorisation de la FLS tel qu’il a été présenté sinon dans la perspective du plan de charge pour la période considérée ;

Que le projet de valorisation du service de la FLS n’entre pas dans le cadre d’un projet important au sens de l’article L 4612-12 du code du travail c’est-à-dire modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ; que si le nombre de salariés concerné par cette réorganisation n’est pas un critère déterminant, le projet en cause n’a pas un impact important en ce qu’il n’implique pas une transformation des postes de travail, un changement de métier, de nouveaux outils ou une modification des cadences ou des normes de productivité ; que la réaffectation de deux salariés issus de deux brigades disposant d’un effectif de 26 personnes à des fonctions d’encadrement, la troisième brigade disposant déjà d’un effectif de 25 personnes, n’implique pas de tels changements, pas plus qu’une meilleure répartition des compétences entre les brigades ;

Attendu que les explications fournies dans le cadre des réunions du CHSCT permettent à ses membres de faire toutes observations utiles sur les conséquences de cette réorganisation quand bien même les membres du CHSCT ne sont pas des experts et de ce point de vue les observations faites dans le cadre de cette procédure démontrent leurs compétences et leurs connaissances approfondies des règles qui régissent leurs différents métiers et les exigences des autorités de sureté ;

Attendu que les observations faites par les défendeurs démontrent que ce recours n’était et n’est ni abusif ni téméraire au regard des prescriptions en cause qui touchent à la sureté dans un tel site et au regard du nécessaire respect des exigences des autorités de sureté même si la demande d’expertise telle qu’elle a été formulée n’entre pas dans le cadre des dispositions de l’article L 4612-12 du code du travail ; que l’ordonnance sera donc confirmée en ce qu’elle a condamné la société Areva NC à verser la somme de 2990,00 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que devant la cour chaque partie gardera la charge de ses frais et de ses dépens ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour après en avoir délibéré conformément à la loi, contradictoirement,

Confirme l’ordonnance rendue le 13 mai 2009 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Valence en toutes ses dispositions ;

Dit n’y avoir lieu application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Laisse chaque partie supporter les dépens qu’elle a exposés.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du nouveau Code de procédure civile.

Signé par Monsieur DELPEUCH, Président, et par Madame VERDAN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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