Cour d'appel de Grenoble, Chambre des affaires familiales, 6 mars 2012, n° 11/03038

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, ch. des affaires familiales, 6 mars 2012, n° 11/03038
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 11/03038
Sur renvoi de : Cour de cassation, 31 mai 2011

Sur les parties

Texte intégral

RG N° 11/03038

XXX

N° Minute :

Copie Exécutoire délivrée

le :

à

la SELARL DAUPHIN MIHAJLOVIC

Me TIXIER

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

AUDIENCE SUR RENVOI DE CASSATION

CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES

ARRET DU MARDI 06 MARS 2012

APPEL

Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de CHAMBERY, décision attaquée en date du 11 Septembre 2008, enregistrée sous le n° 07/00197

suivant déclaration d’appel du 29 Juin 2011

ayant fait l’objet d’un arrêt rendu le 24 novembre 2009 par la Cour d’Appel de CHAMBERY (Chambre des Affaires Familiales – 3e chambre)

et suite à un arrêt de cassation du 1er juin 2011

APPELANTE :

Madame F C

née le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

XXX

représentée par la SELARL DAUPHIN MIHAJLOVIC, avoués jusqu’au 31 décembre 2011, avocats postulants au barreau de GRENOBLE, Me Vincent DURAND, avocat plaidant au barreau de LYON

INTIME :

Monsieur D Z

né le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

XXX

représenté par Me Gérard TIXIER, avocat postulant au barreau de GRENOBLE, Me DUBOUCHET, avocat au barreau de CHAMBERY

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur André ROGIER, Président,

Monsieur Angelo CALANDRA, Conseiller,

Monsieur Alain LACOUR, Conseiller,

Assistés lors des débats de Céline DURAFFOURG, Greffier

DEBATS :

A l’audience publique du 17 Janvier 2012 et sur renvoi de cassation,

les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l’affaire a été mise en délibéré pour être rendu à l’audience de ce jour, après prorogation du délibéré.

Exposé du litige :

Monsieur Z et Madame C se sont mariés le XXX par devant l’officier d’état civil d’Albigny-sur-Saône (Rhône) sans contrat préalable. Le 28 mai 2001, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Chambéry a rendu une ordonnance de non-conciliation. Par acte authentique instrumenté le 2 août 2002 par Maître B, notaire à Aix-les-Bains (Savoie), ils sont parvenus à un accord sur le versement d’une prestation compensatoire à la charge de Monsieur Z et sur la liquidation du régime matrimonial sous condition suspensive du prononcé du divorce.

Par jugement rendu le 8 novembre 2002, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Chambéry a prononcé leur divorce sur demande conjointe, sur le fondement des dispositions de l’article 248 du Code civil, et homologué la convention définitive portant règlement des effets du divorce.

Par acte authentique reçu le 31 janvier 2003 par Maître B, la réalisation de la condition suspensive prévue à l’acte du 2 août 2002 a été constatée et le partage réalisé.

Au cours de l’année 2005, l’administration fiscale s’est adressée à Madame C afin de lui réclamer des éléments d’information concernant la cession d’actions de la société anonyme MAUI intervenue le 1er mars 2002 et a procédé à un redressement en raison de la sous-évaluation de ces valeurs mobilières figurant dans l’acte de partage.

Ensuite d’une assignation délivrée par Madame C à Monsieur Z le 29 décembre 2006, le tribunal de grande instance de Chambéry a notamment :

' déclaré irrecevable l’action de Madame C en rescision pour lésion ;

' débouté Madame C de ses demandes en paiement fondées sur l’existence d’un recel successoral ou d’une faute commise par Monsieur Z ;

' condamné Madame C à verser à Monsieur Z la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

' condamné Madame C à verser à Monsieur Z la somme de 7 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

' condamné Madame C à supporter la charge des entiers dépens avec distraction au profit de l’avocat de Monsieur Z ;

' dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Ensuite de l’appel interjeté contre cette décision par Madame C, la Cour de Chambéry a, par arrêt rendu le 24 novembre 2009 :

' confirmé en toutes ses dispositions le jugement déféré à l’exception du montant de la somme mise à la charge de Madame C au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

' condamné Madame C à payer une somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile pour les frais engagés en première instance et celle de 2 000 euros du même chef pour les frais engagés en cause d’appel ;

' condamné Madame C aux dépens d’appel avec distraction au profit de l’avoué de Monsieur Z.

Madame C ayant formé un pourvoi, la première chambre civile de la Cour de Cassation a, par arrêt en date du 1er juin 2011 :

' cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 24 novembre 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Chambéry ;

' remis, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la Cour d’appel de Grenoble ;

' condamné Monsieur Z aux dépens ;

' vu l’article 700 du Code de procédure civile, rejeté la demande présentée par Monsieur Z et l’a condamné à payer à Madame C la somme de 3 000 euros.

Madame C a saisi la Cour d’appel de Grenoble le 29 juin 2011.

Par conclusions déposées le 14 décembre 2011, elle demande à la Cour, au visa des articles 887 et 888, 1382, 1476 et 1477 du Code civil, de :

' réformer le jugement du tribunal de grande instance de Chambéry en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

' constater que les 14 993 actions détenues dans la société MAUI par les époux Z/C mentionnées pour une valeur de 2 667 856,80 euros dans l’acte de liquidation-partage de la communauté ont été cédées antérieurement à l’établissement dudit acte par Monsieur Z le 1er mars 2002 pour un montant de 4 518 550 euros ;

' constater que les actions de la société Y ont été évaluées par Monsieur Z à la somme de 150,77 euros alors que leur valeur était de 220 euros en février 2003 ;

' donner acte à Madame C de ce qu’elle conteste l’absence de placements mobiliers dont disposait le couple ;

' dire que le montant de la part de Madame C devait s’élever à 3 387 865,80 euros, alors qu’elle n’a été fixée qu’à 2 305 029,15 euros dans l’acte de partage ;

En conséquence,

À titre principal,

' dire que Monsieur Z a recélé les biens de la communauté à son profit ;

' constater que le montant du recel s’élève à 2 165 673,60 euros ;

' condamner Monsieur Z à payer à Madame C la somme de 2 165 673,60 euros outre intérêts au taux légal à compter du 1er mars 2002 ;

À titre subsidiaire,

' prononcer la rescision pour lésion de l’acte de partage établi le 31 janvier 2003 par Maître B, notaire à Aix-les-Bains ;

' ordonner le partage judiciaire et fixer les nouvelles valeurs des actions des sociétés Y et MAUI ;

' condamner Monsieur Z à payer à Madame C la somme de 1 082 836,65 euros, à parfaire, correspondant à la différence entre l’actif net qui lui a été attribué aux termes de l’acte de partage et l’actif net qu’elle aurait dû recevoir ;

À titre infiniment subsidiaire,

' constater que les man’uvres frauduleuses pratiquées par Monsieur Z ont causé un préjudice financier direct à Madame C ;

En conséquence,

' condamner Monsieur Z à payer à Madame C la somme de 1 082 836,65 euros à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice subi ;

En tout état de cause,

' condamner Monsieur Z à payer à Madame C la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi, sur le fondement de l’article 1382 du Code civil ;

' «ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant appel et sans caution [sic]» ;

' condamner Monsieur Z à payer à Madame C une indemnité de 20 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

' le condamner également aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de son avoué.

Elle fait valoir au soutien que Monsieur Z et elle-même possédaient des actions dans deux sociétés, la société anonyme MAUI et la société anonyme Y, que lors de leur divorce, ils ont procédé, par acte authentique du 2 août 2002, à la liquidation et au partage de leur régime matrimonial, que Monsieur Z s’est fait attribuer les actions des deux sociétés anonymes évaluées à 2 667 856,80 euros pour celles de la société anonyme MAUI (alors qu’il les avait déjà revendues à son insu pour un prix très supérieur) et à 686 019,58 euros pour celles de la société Y et qu’elle a découvert par la suite, à l’occasion d’un contrôle fiscal, que ces titres avaient été sous-évalués. Elle reproche à Monsieur Z de ne pas l’avoir informée de leur valeur réelle, ce qui a conduit à un partage de communauté inégalitaire.

Subsidiairement, elle soutient qu’ensuite de la sous-estimation des valeurs mobilières, elle a été lésée de plus du quart, ce qui l’autorise à solliciter la rescision de la convention du 2 août 2002 :

À défaut, elle sollicite des dommages-intérêts en raison de la violation par Monsieur Z de son obligation de loyauté et de bonne foi, constitutive d’une faute à l’origine de son préjudice financier. Elle réclame en outre l’indemnisation de son préjudice moral.

* * *

Par conclusions déposées le 27 octobre 2011, Monsieur Z demande à la Cour, au visa des articles 1477 et 887 du Code civil et 32-1 du Code de procédure civile de :

À titre principal,

' confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Chambéry du 11 septembre 2008 dans toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

' condamner Madame C à régler à Monsieur Z :

— la somme de 10 000 euros pour procédure abusive ;

— la somme de 15 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

À titre subsidiaire,

' retenir, tout au plus, au titre du prix de cession des actions MAUI, la somme nette d’impôt de 3 403 160 euros et non celle de 4 518 550 euros ;

' dire et juger que le montant du recel des actions MAUI et Y s’élève à une somme maximale de 1 050 283,62 euros outre intérêts au taux légal à compter seulement de la décision à intervenir ;

En tout état de cause,

' condamner Madame C à régler à Monsieur Z la somme de 15 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

' condamner Madame C aux entiers dépens comprenant ceux exposés devant le tribunal de grande instance de Chambéry, la Cour d’appel du même siège et celle de Grenoble.

Il conteste tout recel de communauté en objectant que Madame C avait connaissance de la cession des actions de la société anonyme MAUI et qu’il n’y avait aucune volonté de dissimulation de sa part, ni d’élément intentionnel. Il soutient que Madame C l’a, de sa propre initiative, dispensé de l’informer du prix de cession de ces actions.

S’agissant des actions de la société anonyme Y, il indique qu’elles n’ont pas été sous-évaluées, le fait qu’elles aient ensuite été revendues à un prix supérieur à l’estimation s’expliquant par les modifications intervenues dans le périmètre de cette société.

Il ajoute que l’action en rescision est irrecevable puisque le partage a été homologué par le juge du divorce.

Enfin, il conteste toute spoliation à l’origine d’un préjudice ouvrant droit à indemnisation.

Subsidiairement, il demande que le prix de cession des actions MAUI soit pris en compte pour sa valeur nette d’impôt.

Sur ce :

Sur le recel :

Attendu que selon les dispositions de l’article 1477 du Code civil dans sa rédaction applicable aux faits de l’espèce, celui des époux qui aurait diverti ou recelé quelques effets de la communauté, est privé de sa portion dans lesdits effets ;

Attendu en l’espèce que Madame C et Monsieur Z possédaient 14 993 actions de la société anonyme MAUI (société holding détenant une participation majoritaire dans le capital de la société « Châtillon Distribution » exploitant un supermarché à l’enseigne « Intermarché » à Bellegarde-sur-Valserine – Châtillon-en-Michaille – Ain – pièce numéro 14 de Monsieur Z) et 4 550 actions dans la société anonyme Y ; que dans le cadre de l’instance en divorce, ils ont procédé à la liquidation et au partage de leur régime matrimonial, sous la condition suspensive du prononcé du divorce, selon acte authentique instrumenté le 2 août 2002 par Maître B, notaire, ledit partage retenant les valeurs de 2 667 856,80 euros pour les actions de la société anonyme MAUI et 686 019,58 euros pour celles de la société anonyme Y, toutes attribuées à Monsieur Z lors du partage ; que le divorce a été prononcé sur leur demande conjointe par jugement rendu le 8 novembre 2002, qui a homologué la convention portant règlement de ses effets ; que par acte authentique du 31 janvier 2003, la réalisation de la condition suspensive a été constatée et le partage effectué, aux conditions fixées par la convention homologuée par le juge aux affaires familiales ;

Or attendu qu’il est constant que dès le 1er mars 2002, Monsieur Z avait cédé à un tiers les actions de la société anonyme MAUI pour le prix de 4 518 550 euros, qui a été payé en deux versements, l’un de 2 828 000 euros le 28 février 2002 et l’autre de 1 690 550 euros le 5 août 2002 ;

Attendu qu’il appartenait à Monsieur Z d’informer Madame C de la vente de ces titres comme des conditions de celle-ci et, spécialement, du prix auquel il les avait cédés ;

Attendu que Monsieur Z soutient d’une part que Madame C avait connaissance dès le mois de mars 2002, de la cession des actions MAUI et d’autre part qu’elle l’a, de sa propre initiative, dispensé de porter le prix de cession de ces valeurs mobilières à sa connaissance ;

Attendu, sur le premier point, que Monsieur Z invoque une lettre en date du 5 mars 2002 adressée par son expert-comptable, Monsieur X, au conseil de Madame C ; que cette correspondance est ainsi rédigée : « ['] Je vous informe que la sortie du contrat Intermarché pour D Z (contrat de franchise) ne pourra être effectuée qu’au terme du contrat de 10 ans signé pour le magasin de VULBENS (SA DORINE) soit en mai 2008.

Je vous précise également que les négociations actuelles pour le rachat de supermarché dans le cadre d’acquisition d’actions de sociétés libres de contrat d’enseigne, se font essentiellement sur la base de la rentabilité représentant sept à huit fois le résultat net après impôt courant » ;

Attendu que ce dernier paragraphe, dont se prévaut Monsieur Z pour prétendre que Madame C avait connaissance de la cession des actions de la société anonyme MAUI était en réalité relatif à une autre société, la SA DORINE, qui exploitait un second supermarché sis à Vulbens (Haute-Savoie) à l’enseigne « Intermarché » ainsi qu’il ressort des pièces numéro 20 à 23 de l’intimée ; qu’il ne résulte donc pas de cette lettre que l’expert-comptable de Monsieur Z aurait informé le conseil de Madame C de la cession des actions de la société anonyme MAUI ; que le fait que le conseil de Madame C ait écrit à l’expert-comptable de Monsieur Z le 27 mars 2002 pour lui indiquer : « En effet, bien que personne ne nous en ait averti, nous avons appris que l’Intermarché de Châtillon en Michaille a été vendu à Monsieur A, cette information résulte notamment des vérifications que j’ai dû effectuer depuis la réception de votre courrier du 5 mars dernier », ne fait pas davantage la preuve de ce que Monsieur Z aurait informé Madame C de la cession des actions litigieuses puisque la lettre pré-citée ne mentionne que la vente d’un supermarché et non celle de valeurs mobilières ; qu’enfin, le siège de cette information ne réside pas davantage dans la « convention de garantie d’actif et passif » régularisée le 1er mars 2002 entre Monsieur Z et la SA ITM Centre-Est, acquéreur des actions dont s’agit, ni dans la « déclaration de cession d’actions non constatée par un acte », enregistrée à la recette principale de Bellegarde le 1er mars 2002, dont Monsieur Z ne justifie ni même n’allègue les avoir communiquées à Madame C au temps du partage ;

Attendu, sur le second point, que pour prétendre qu’il aurait été dispensé par Madame C de l’informer du prix de vente des actions litigieuses, Monsieur Z excipe de la lettre précitée du conseil de celle-ci, en date du 27 mars 2002, par laquelle il indiquait notamment « ['] De deux choses l’une, soit Madame C perçoit ce qu’elle réclame, soit aucun accord amiable n’est trouvé, auquel cas votre client se doit de s’expliquer sur les modalités de cette cession [i. e. la vente du supermarché de Châtillon-en-Michaille] » ;

Or attendu qu’il ne résulte pas de ce courrier que Madame C aurait entendu dispenser Monsieur Z de l’informer du prix de cession des actions de la société anonyme MAUI, information dont il a été débiteur et qu’il ne justifie pas avoir communiquée à son épouse ;

Et attendu qu’en celant à Madame C l’existence et les conditions de la cession d’actions de la société anonyme MAUI à laquelle il avait consenti seul cinq mois avant la signature de l’acte authentique du 2 août 2002 portant liquidation de la communauté sous condition suspensive du prononcé du divorce, Monsieur Z a manifesté son intention de porter atteinte à l’égalité du partage auquel il a été procédé en retenant une valeur, pour lesdites actions, de 2 667 856,80 euros alors qu’elles venaient d’être vendues pour 4 518 550 euros ;

Attendu en conséquence que Monsieur Z s’est rendu auteur d’un recel de ces actions communes ;

Attendu que Madame C soutient que Monsieur Z a en outre commis un second recel, portant sur les actions de la société anonyme Y, en exposant que leur valeur a été retenue pour 686 019,58 euros (soit une valeur unitaire de 150,77 euros) dans l’acte de partage alors que Monsieur Z en a acheté d’autres à sa fille au prix de 220 euros par action et qu’il les a revendues le 1er juin 2005 au prix unitaire de 584,70 euros ;

Mais attendu, s’agissant de l’achat de nouvelles actions de la société anonyme Y, que leur prix peut s’expliquer par les relations familiales entre acheteur et vendeur et, en ce qui concerne la revente de ces titres, qu’entre 2002 et 2005, la société anonyme Y a fusionné avec la société anonyme DORINE, le 27 novembre 2003, laquelle a vu son résultat après impôt s’accroître de 46,9 % entre 2001 et 2005, a fait l’acquisition d’un terrain en 2004 valant 142 532 euros, figurant à son actif, et a obtenu le 14 juin 2005 une autorisation administrative d’agrandissement de sa surface de vente ;

Attendu qu’il résulte de ces circonstances qui n’est pas établi que les actions de la société anonyme Y aient été sous-évaluées lors de partage, en sorte qu’aucun recel ne peut être reproché à Monsieur Z de ce chef ;

Attendu, en définitive, que le recel a porté sur la somme de 1 850 693,20 euros (4 518 550 – 2 667 856,80) ;

Attendu que Madame C, qui a droit non seulement à la valeur des biens recélés mais encore à la moitié de la communauté déterminée en incluant dans l’actif la valeur de ces biens, a limité sa demande à la valeur des biens recélés ; qu’il convient par suite de condamner Monsieur Z à lui payer la somme de 1 850 693,20 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2002, date du divorce et de la dissolution de la communauté, par application des dispositions des articles 549, 1378 et 1477 du Code civil ;

Attendu en effet, de première part, que Monsieur Z ne peut utilement se prévaloir des clauses insérées à l’acte du 2 août 2002, par lesquelles les parties se sont consenties réciproquement tout abandon et décharge et ont renoncé à élever dans l’avenir une quelconque réclamation ou une quelconque contestation relativement au règlement de la communauté, dès lors qu’elles sont sans application en vertu de l’adage « fraus omnia corrumpit » et que, de seconde part, c’est vainement que Monsieur Z soutient à titre subsidiaire que le recel n’aurait porté que sur la valeur des actions de la société anonyme MAUI déduction faite des impôts qu’il a acquittés, dès lors que la somme de 1 850 693,20 euros ayant été divertie, Madame C en est devenue propriétaire dès la dissolution de la communauté ;

Sur les autres demandes :

Attendu que Madame C ne justifie d’aucun préjudice indemnisable à l’appui de sa demande de dommages-intérêts fondée sur l’article 1382 du Code civil ;

Attendu qu’il n’y a pas lieu à exécution provisoire ;

Attendu que Madame C a été contrainte d’exposer des frais non répétibles d’instance qu’il serait inéquitable de laisser intégralement à sa charge ; que Monsieur Z devra l’en indemniser à hauteur de 3 500 euros ;

Attendu que Monsieur Z supportera les dépens de première instance et d’appel avec distraction au profit de l’avocat de Madame C ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 11 septembre 2008 par le tribunal de grande instance de Chambéry ;

Statuant à nouveau,

Dit que Monsieur Z a recelé des biens de la communauté à son profit ;

Condamne Monsieur Z à payer à Madame C la somme de 1 850 693,20 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2002 ;

Déboute Madame Z de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral fondée sur l’article 1382 du Code civil ;

Déboute Madame Z de sa demande tendant à voir ordonner l’exécution provisoire ;

Condamne Monsieur Z à payer à Madame C la somme de 3 500 euros pour frais non répétibles d’instance ;

Condamne Monsieur Z aux dépens de première instance et d’appel avec distraction au profit de la SELARL DAUPHIN-MIHAJLOVIC, avocats.

PRONONCE par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

SIGNE par Monsieur A. ROGIER, Président, et par Madame M. GEORGES, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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