Cour d'appel de Grenoble, Service des référés, 23 décembre 2020, n° 20/00091

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, service des réf., 23 déc. 2020, n° 20/00091
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 20/00091
Dispositif : Suspend l'exécution provisoire

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 20/00091 – N° Portalis DBVM-V-B7E-KS3C

N° Minute :

Copies délivrées le

Copie exécutoire

délivrée le

à

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

C O U R D ' A P P E L D E G R E N O B L E

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DE REFERE DU 23 DECEMBRE 2020

ENTRE :

DEMANDERESSE suivant assignation du 19 octobre 2020

Madame Z A X

née le […] à […]

de nationalité française

[…]

[…]

représentée par Me Laurence BORDES-MONNIER de la SELARL MONNIER-BORDES, avocat au barreau de GRENOBLE

ET :

DEFENDERESSE

S.C.I. ACCROISSANCE représentée par son gérant en exercice

[…]

[…]

représentée par Me Jean-christophe BOBANT de la SELARL LGB-BOBANT, avocat au barreau de GRENOBLE

DEBATS : A l’audience publique du 02 décembre 2020 tenue par Pascale VERNAY, première présidente, assistée de A-Ange BARTHALAY, greffier, en présence de Manon BOURDARIAS, greffier stagiaire

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée publiquement le 23 DECEMBRE 2020 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

signée par Pascale VERNAY, première présidente et par A-Ange BARTHALAY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par acte du 19 octobre 2020, Madame Z X a fait assigner en référé la Sci Accroissance pour que soit ordonné le sursis à exécution du jugement rendu le 29 septembre 2020 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Grenoble.

Elle offre de consigner la somme réclamée dans le commandement de payer du 13 décembre 2019 dans l’attente de l’issue de la procédure d’appel.

Mme X expose :

— que par acte authentique du 22 juillet 2015, la Sci Accroissance a donné à bail à Mme Y des locaux à usage commercial, et qu’elle s’est portée caution solidaire des engagements de Mme Y pour une durée de 12 ans

— que Mme Y ayant cessé de payer ses loyers, la société bailleresse a mis la caution en demeure de payer la somme de 6.206 €, puis le 13 novembre 2019, la Sci lui a fait délivrer un commandement de payer avant saisie-vente ;

— qu’elle a saisi le juge de l’exécution pour obtenir l’annulation du commandement ;

— que par jugement du 29 septembre 2020, le juge de l’exécution a dit que la Sci Accroissance disposait d’un titre exécutoire et s’est déclaré incompétent pour connaître de la demande d’annulation du commandement.

Elle fait valoir :

— que le juge de l’exécution était bien compétent pour prononcer la nullité du commandement de payer notifié le 13 décembre 2019 ; qu’en application des articles R. 221-1 et R. 221-23 du code des procédures civiles d’exécution, le commandement est la première étape de la mesure d’exécution qu’est la saisie-vente ; que le commandement de payer engage la saisie-vente selon la Cour de cassation ;

— que l’engagement de caution figurant dans le bail lui est inopposable ; que l’acte ne lui permet pas de connaître l’étendue de son engagement ; que la somme pour laquelle elle se porte caution est indéterminée ;

— qu’en outre, le montant de la créance est erroné ;

— qu’enfin, Mme Y a engagé une action en résiliation du bail en raison de la défaillance du bailleur dans son obligation de délivrance du bien et de fautes contractuelles ; que la question du bien fondé de la créance réclamée dépend de l’issue de cette procédure pendante devant le tribunal judiciaire de Grenoble ;

— qu’il existe en l’espèce des moyens sérieux d’annulation ou de réformation du jugement frappé d’appel ;

Elle propose de consigner la somme réclamée.

La Sci Accroissance conclut au débouté de la demande présentée par Mme X ; elle sollicite la condamnation de celle-ci au paiement d’une amende civile de 2.000 € et à lui payer la somme de 2.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle répond :

— que le premier président n’est pas compétent pour ordonner une consignation ; que l’article R. 121-22 du code des procédures civiles d’exécution qui donne compétence au premier président, ne prévoit pas la possibilité de suspendre l’exécution provisoire pour la remplacer par une consignation ;

— que Mme X n’invoque aucun moyen sérieux d’appel ; qu’en outre, l’appel est caduc, Mme X n’ayant pas signifié sa déclaration d’appel dans les 10 jours de l’avis de fixation à bref délai ;

— que le juge de l’exécution n’est pas matériellement compétent pour juger des demandes de Mme X ; qu’elle confond le commandement avant saisie-vente et le commandement aux fins de saisie-vente ; que la jurisprudence considère que le commandement de payer avant saisie-vente n’est pas un acte d’exécution à la différence du commandement de payer aux fins de saisie-vente, acte préparatoire obligatoire à la saisie-vente, donnant compétence au juge de l’exécution ; que le moyen d’appel n’est pas sérieux ;

— que l’acte notarié valant bail commercial, qui intègre l’engagement de caution de Mme X, est opposable à celle-ci ; que la jurisprudence écarte le formalisme de l’article 1326 du code civil (devenu 1376) pour les cautionnements passés par acte authentique ; que Mme X ne peut sérieusement prétendre que le bail du 22 juillet 2015 dressé par acte authentique ne lui permettait pas de connaître la nature et l’étendue de son engagement ; que cet acte précisait la durée du cautionnement, le montant du loyer et de l’appel de provision, et le remboursement des taxes foncière ; que ce moyen d’appel n’est pas sérieux;

— que Mme X croit pouvoir contester la validité du commandement, estimant que la somme réclamée est erronée ; que le commandement, qui intègre copie de la lettre recommandée avec avis de réception adressée à la caution le 4 novembre 2019, détaille parfaitement les loyers impayés ;

— que Mme X soutient enfin que le juge de l’exécution doit ordonner un sursis à statuer dans l’attente de l’issue de la procédure au fond engagée par la débitrice principale devant le tribunal judiciaire de Grenoble ; que cette demande, qui n’a pas été soulevée in limine litis devant le juge de l’exécution, est irrecevable ; que le fait pour le preneur d’engager une action en justice pour demander la résiliation judiciaire du bail ne doit pas exonérer la caution de sa garantie ; que la demande de sursis à statuer n’a qu’un but dilatoire ; qu’elle n’est pas un moyen sérieux d’appel.

Madame Z X réplique :

— que la déclaration d’appel ne sera pas déclarée caduque ; que l’avis de fixation à plaider a été notifié par le greffe le 22 octobre 2020; que la signification de l’avis et de la déclaration d’appel a été effectuée le 30 octobre, soit dans le délai de 10 jours de la réception de l’avis ;

— que le commandement qui lui a été délivré n’est pas un simple commandement de payer ; qu’il est bien un acte préparatoire à la saisie-vente ; que ce commandement constitue la première étape de la mesure d’exécution et non un simple acte préparatoire ; que le commandement qui lui a été signifié vise notamment le délai de 8 jours pour payer la dette faute de quoi, le redevable pourra y être contraint par la vente forcée de ses biens meubles, et la mention du titre exécutoire en vertu duquel les poursuites sont exercées, avec le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ; que ces mentions figurent dans les articles R. 221-1 et suivants du code des procédures

civiles d’exécution relatifs à la saisie-vente ; que le juge de l’exécution de Grenoble aurait dû se déclarer compétent ; qu’il existe donc un moyen sérieux d’appel ;

— que la procédure pendante devant le tribunal judiciaire de Grenoble devra statuer sur la qualité ou non de créancier du bailleur à l’égard du débiteur principal ainsi que sur le quantum de l’éventuelle créance ; que l’issue de cette procédure aura une incidence sur les obligations de la caution ;

— qu’elle n’a pas eu une connaissance précise à la date de la signature du bail de la nature et de l’étendue de l’obligation cautionnée ; qu’elle n’a pas eu d’explications sur les conséquences de sa renonciation aux bénéfices de discussion et de division;que la bail commercial établi le 22 juillet 2015 ne peut en conséquence servir de fondement aux voies d’exécution forcée à son encontre ;

— qu’il n’y a en l’espèce aucune intention dilatoire de sa part ; qu’elle dispose des fonds qui lui sont réclamés ; qu’elle a consigné la somme de 7.000 € dans l’attente de l’issue de la procédure d’appel ;

— que sa demande n’est pas abusive ; qu’il n’y a pas lieu à la condamner au paiement d’une amende civile.

Mme X sollicite la somme de 2.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Motifs de l’ ordonnance :

Par jugement du 29 septembre 2020, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Grenoble, saisi par Mme X d’une demande en annulation d’un commandement de payer, a dit que la Sci Accroissance disposait d’un titre exécutoire et s’est déclaré incompétent pour connaître de la demande d’annulation du commandement au motif que ce commandement de payer avant saisie-vente ne constituait pas une mesure d’exécution forcée.

Sur le fondement d’un acte notarié valant bail commercial, intégrant l’engagement de caution de Mme X, la Sci Accroissance a fait signifier à Mme X le 13 décembre 2019 un « commandement avant saisie-vente ».

Aux termes de l’article L 221-1du code des procédures civiles d’exécution, « tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après signification d’un commandement, faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur…… ».

L’article R. 221-1 de ce code précise que ce commandement contient à peine de nullité :

— mention du titre exécutoire en vertu duquel les poursuites sont exercées avec le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l’indication du taux des intérêts ;

— commandement d’avoir à payer la dette dans un délai de 8 jours faute de quoi il peut y être contraint par la vente forcée de ses biens meubles.

Le « commandement avant saisie-vente » signifié à Mme X le 13 décembre 2019 mentionne le titre exécutoire, en l’espèce l’expédition exécutoire d’un bail commercial et d’un engagement de caution reçus en la forme authentique le 22 juillet 2015, la somme réclamée en principal, en l’espèce, l’arriéré de loyers, le coût de l’acte, ainsi que la formule aux termes de laquelle, « faute par vous de vous acquitter des sommes ci-dessus, sauf à parfaire ou à diminuer, vous pourrez y être contraint par la saisie de vos biens meubles corporels à l’expiration d’un délai de huit jours à compter de la date du présent acte ».

La Cour de cassation, depuis un avis du 14 juin 1993, considère que la signification d’un commandement répondant aux conditions de forme exigées par le décret du 31 juillet 1992, pris pour l’application de la loi du 9 juillet 1991, peut engager la nouvelle procédure d’exécution de la saisie-vente. Ces textes ont été codifiés dans le code des procédures civiles d’exécution.

Il résulte de l’article L. 213-6, alinéa 1, du code de l’organisation judiciaire que le juge de l’exécution est compétent pour statuer sur les difficultés relatives aux titres exécutoires et les contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée.

Dès lors, le moyen invoqué par Mme X sur la compétence du juge de l’exécution pour statuer sur la régularité du commandement avant saisie, constitue un moyen sérieux d’annulation ou de réformation du jugement frappé d’appel.

En conséquence, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens, il sera sursis à l’exécution du jugement du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Grenoble du 29 septembre 2020.

Il sera donné acte à Mme X de son offre de consigner la somme de 7.000€ dans l’attente de la décision d’appel.

Enfin, l’équité ne justifie pas qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le sursis à exécution étant prononcé dans le seul intérêt de Mme X, elle supportera les dépens.

Par ces motifs :

Nous Pascale Vernay, première présidente de la cour d’appel de Grenoble, statuant en référé, publiquement et contradictoirement,

Ordonnons le sursis à exécution du jugement rendu par le juge de l’exécution du tribunal

judiciaire de Grenoble le 29 septembre 2020,

Donnons acte à Mme X de son offre de consigner la somme de 7.000€ dans l’attente de la

décision d’appel,

Disons n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile et rejetons les

demandes à ce titre,

Condamnons Mme Z X aux dépens.

Le greffier, La première présidente,

M.[…]

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Cour d'appel de Grenoble, Service des référés, 23 décembre 2020, n° 20/00091