Cour d'appel de Lyon, 21 février 2013, n° 11/03682

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 21 févr. 2013, n° 11/03682
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 11/03682
Décision précédente : Tribunal de commerce de Saint-Étienne, 9 mai 2011, N° 2009/1337

Texte intégral

R.G : 11/03682

Décision du

Tribunal de Commerce de SAINT-ETIENNE

Au fond

du 10 mai 2011

RG : 2009/1337

XXX

SARL D R

C/

SARL A

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3e chambre A

ARRET DU 21 Février 2013

APPELANTE :

SARL D R

XXX

42000 SAINT-ETIENNE

représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocats au barreau de LYON

assistée de la SCP BES SAUVAIGO ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

INTIMEE :

SARL A

XXX

XXX

XXX

représentée par la SCP LAFFLY – WICKY, avocats au barreau de LYON

assistée de la SCP MADAR – DANGUY – SUISSA, avocats au barreau de PAU

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 22 Novembre 2012

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 Janvier 2013

Date de mise à disposition : 21 Février 2013

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— CB-CC CD, président

— Hélène HOMS, conseiller

— CL BARDOUX, conseiller

assistés pendant les débats de Jocelyne PITIOT, greffier

A l’audience, CB-CC CD a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par CB-CC CD, président, et par Jocelyne PITIOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS DES PARTIES:

RI IG a travaillé de 2002 à début 2008 pour la société C FRANCE, dont les associés étaient monsieur et madame Z, société qui commercialisait des produits d’assurance santé. Il s’est fait notifier un licenciement pour faute grave. Il a signé un accord transactionnel le 11 mars 2008 aux termes duquel, il pouvait s’installer à son compte pour exercer une activité de vente de produits d’assurance santé. Le 18 novembre 2008 la société C a fait l’objet d’une liquidation judiciaire.

Le 28 mars 2008 RI IG a créé la société D R, qui a pour activité le courtage en assurance et réassurance et dont il est devenu le gérant.

Monsieur et madame Z ont une deuxième société, la A, qui a pour activité celle d’agent et de courtier d’assurance, dont M. Z est le gérant. Cette société, qui est propriétaire exclusif de son portefeuille santé, a racheté à la société C FRANCE le portefeuille clients santé SMAM en janvier 2007 pour 1 400 000 € et en mai 2008 le portefeuille IARD pour 500 000€.

Cette société a constaté, à partir de mai 2008, que des clients résiliaient leurs contrats d’assurance après le passage à leur domicile de la société D R. Ses mises en demeure étant restées vaines, elle assignait le 17 mars 2009 la société D R pour concurrence déloyale sur le portefeuille de clients « santé SMAM », considérant que D procédait à du dénigrement et du démarchage déloyal, ainsi qu’à du débauchage de personnel.

Le Tribunal de Commerce de SAINT-ETIENNE a, le 10 mai 2011:

— dit la A recevable à agir,

— dit que la société D R avait commis des actes de concurrence déloyale à l’encontre de la A,

— l’a condamnée à payer à la A la somme de 58 000 € à titre de dommages et intérêts pour détournement déloyal de clientèle et dénigrement,

— a ordonné la publication du dispositif du jugement dans un journal local et un journal national, aux frais exclusifs de D R,

— a condamné la société D R à payer à la société A la somme de 5 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux dépens.

Par déclaration enregistrée le 23 mai 2011, la SARL D R a fait appel de cette décision.

L’ordonnance de clôture est du 22 novembre 2012.

Dans ses dernières écritures, du 20 juin 2012, la SARL D R demande:

— de dire son appel recevable,

— d’infirmer le jugement entrepris,

— de dire que les attestations produites par A pour seules preuves d’un dénigrement ou d’un comportement déloyal sont dénuées de force probante en raison:

>des attestations contraires versées aux débats par D R par lesquelles ces personnes sont revenues sur leurs attestations initiales,

>des conditions d’obtention par A de ses attestations en se prévalant d’une fausse qualité et par intimidation,

>des nombreuses irrégularités de fond et de forme,

— de dire que A ne démontre ni dénigrement ni comportement ou démarchage déloyal, ni acte de concurrence déloyale, ni préjudice, ni lien de causalité,

— de débouter A de ses demandes,

— reconventionnellement de condamner A à lui payer la somme de:

> 30 000 € à titre de dommages et intérêts,

> 6 000 € au titre des frais irrépétibles,

ainsi qu’aux dépens.

Elle fait notamment valoir:

>concernant la concurrence déloyale que:

— dans 23 cas les auteurs des attestations sur lesquelles se sont fondés les premiers juges ont contredit ces premières attestations

— selon certains des nouveaux témoignages les commerciaux de A auraient usé de la qualité de contrôleur judiciaire et auraient prétendu que les commerciaux de D travaillaient au noir pour impressionner les auteurs d’attestation,

>concernant le débauchage que:

— plus de 174 commerciaux ont été embauchés par D et pour 3 d’entre eux, qui avaient travaillé pour C, cette société les avait dégagé de leur clause de non concurrence,

— la A ne démontre pas le débauchage, alléguant que 13 personnes employées par D l’avaient préalablement été par C mais n’en rapportant la preuve que pour 7 d’entre eux et encore sans préciser la date de leur départ d’C (Cf. délai de 2 ans visé par l’article 24 du code moral du courtage).

Pour sa part, la Société A, dans ses dernières conclusions du 7 octobre 2011, demande de:

— déclarer l’appel infondé,

— débouter D R de ses prétentions,

— confirmer la décision entreprise,

— y ajoutant, condamner D R à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens avec distraction.

Elle expose notamment que :

— Elle a reçu plus d’une centaine de lettres de résiliations, ce qui ne pourrait s’expliquer que par un détournement de fichier clients,

— de nombreuses attestations démontrent le dénigrement systématique des commerciaux de D,

-13 des salariés figurant sur le registre du personnel de D R sont d’anciens commerciaux d’C et 7 d’entre eux ont fait du démarchage à domicile pour le compte de D,

— Mlles KHENCHOUL et POUPIN figurent sur le registre du personnel de D à compter du 20 mai 2008 alors qu’elles n’ont quitté la société C que les 14 juin et 19 juin 2009.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures devant la cour ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé pour répondre aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION:

Sur le dénigrement et démarchage déloyal allégués:

Attendu que si le démarchage de la clientèle d’un concurrent est une pratique commerciale licite et normale qui ne constitue pas en soi un acte de concurrence déloyale, et si une critique du concurrent peut être opérée, l’article 23 du code moral du courtage précise que c’est sous réserve que ces critiques demeurent « courtoises » et « fondées » et que le courtier ne dénigre pas son confrère;

Qu’en l’espèce la société A a produit de nombreuses attestations d’assurés dénonçant des faits commis par des agents de la société D R qui, à les supposer établis, seraient caractéristiques d’un démarchage déloyal dénigrant gravement, et souvent injurieusement, la concurrence; Que cependant la plupart de ces attestations sont aujourd’hui contredites par d’autres attestations des mêmes assurés versées aux débats par la société D R; Que le tableau suivant permet de se faire une idée de l’ampleur du phénomène:

Nom de l’assuré

Date attestation N°1

Date attestation N°2

CE-CI CJ

12/11/08

02/06/10

CE-Christine BASTIDE

01/12/08

20/12/08

XXX

04/12/08

31/12/08

AF AW

11/12/08

10/07/09

AB AC

12/11/09

03/06/10

XXX

04/02/09

12/03/09

AP AQ

14/11/08

24/12/08

XXX

28/11/08

Non datée

AZ BA

10/11/08

17/12/08

XXX

Non daté

16/12/08

I J

29/01/09

U V

18/11/08

17/12/08

CB-CL CM

10/11/08

18/12/08 et 02/06/10

E F

18/11/08

18/12/08

XXX

21/11/08

15/12/08

XXX

11/11/09

20/12/08

BV BW

29/12/09

03/06/10

XXX

09/11/09

13/05/10

AJ AK

02/01/10

03/06/10

XXX

28/12/09

07/06/10

Que le comportement pour le moins désinvolte de ces « témoins » qui, à quelques mois, voire à quelques jours d’intervalle, et bien qu’ayant connaissance des dispositions de l’article 441-7 du code pénal, s’autorisent à rédiger ou à faire rédiger sous leur signature des attestations faisant état de faits contraires, dénie toute force probatoire à l’ensemble de leurs écrits; Que la cour rejettera donc ces attestations tant anciennes que nouvelles dépourvues de tout caractère probant;

Que AL AM, après avoir voulu résilier son contrat le 5 décembre 2008 ne veut plus le résilier le 17 du même mois; Qu’elle ne revient pas pour autant sur son attestation du 5 décembre 2008 laquelle ne démontre cependant pas que les préposés de D aient procédé à un quelconque dénigrement de la société A;

Que d’autres attestations produites par la société A (celles de Loïc BIHIN en date du 18 novembre 2008, de Latifa TENNI en date du 18 novembre 2008, de BR BS en date du 19 novembre 2009, de BT BU en date du 18 novembre 2009, de CE-CF CG en date du 28 décembre 2009, de AR AS en date du 18 novembre 2009 et de AB AI du 23 novembre 2009), en décrivant le passage des préposés de la société D R à leur domicile, même s’il est parfois indiqué qu’ils ont fait croire à leurs interlocuteurs qu’ils travaillaient pour la SMAM, ne mettent pas en exergue de faits de dénigrement ;

Attendu que seules les trois dernières attestations produites par la société A (celles de M BG en date du 10 janvier 2009, d’K L en date du 18 juin 2009, de BB BC en date du 2 janvier 2010) démontrent que les préposés de la société D ont dénigré non pas la société A mais la mutuelle SMAM dont le portefeuille est géré par A; Que la première de ces attestations précise qu’il lui a été dit que « la SMAM était des voleurs » (sic), la deuxième que « cette mutuelle était en procès » et que l’assuré prenait « d’énormes risques » en gardant son contrat SMAM et la troisième que « la SMAM avait coulé », proposant un autre contrat « étant donné qu’il avait pris la relève de la SMAM »;

Que cependant plusieurs attestations d’assurés produites par la société D R (notamment celles de Sonia BZ CA, W AY, BP BQ, M N, S T ou Levent ORBAY) démontrent que les mêmes pratiques de dénigrement ont été employées par les préposés de la société A; Que ces attestations font en effet apparaître que les représentants de la société D étaient présentés par eux comme des « voleurs » et des « imposteurs », les produits présentés par D étant également dénigrés (Y « un groupe d’arnaqueurs », ASSUREMA « des voleurs ») ;

Qu’ainsi, si des propos tendant à jeter le discrédit sur un concurrent en répandant à son propos des informations malveillantes, outrancières, injurieuses ou diffamatoires constituent indéniablement un dénigrement, il est manifeste que de telles pratiques sont sinon habituelles, du moins fréquentes ou, à tout le moins, partagées par les sociétés A et D;

Que la société A est donc malvenue à fonder une partie de sa demande sur un dénigrement orchestré par la société D;

Sur le débauchage de personnel et le détournement de fichiers allégués:

Attendu que la société A reproche à la société D R de s’être adjointe les services d’un certain nombre d’anciens salariés de la société C, salariés qui auraient conservé les fichiers clients ainsi que la documentation commerciale de prospection;

Que, si l’on fait abstraction des témoignages qui ont été écartés des débats pour leur absence de fiabilité (ceux qui s’étaient rétracté), il ressort des attestations:

— de Loïc BIHIN et de Latifa TENNI qu’ils ont été démarchés par BX BY qui leur avait précédemment fait souscrire un contrat SMAM,

— de BR BS et de BT BU qu’ils ont été visités par mademoiselle BI,

— de BB BC qu’elle a reçu la visite de monsieur B,

— de CE-CF CG que c’est mademoiselle CARDOSA qui l’a démarchée « sachant que j’étais cliente à la SMAM »,

— de AR AS que c’est monsieur X dont elle a reçu la visite, ajoutant « il savait que j’étais à la SMAM »;

Qu’il résulte en outre du registre du personnel de la société D R que 13 personnes qui y sont inscrites sont d’anciens salariés d’C, notamment BX BY, BH BI, G X et O B;

Attendu que l’article 24 du code moral du courtage stipule: « Le courtier ayant embauché un salarié ou un mandataire non salarié ayant quitté un confrère depuis moins de deux ans doit veiller particulièrement à ce qu’il n’en résulte pas d’activités exercées à l’encontre de ce confrère dans des conditions déloyales ou contraires aux obligations résultant du droit du travail, de la convention collective ou du contrat de travail »;

Attendu qu’ainsi un débauchage important ou massif peut caractériser une concurrence déloyale;

Qu’en l’espèce, cependant, aucune preuve n’est apportée sur les conditions de rupture de contrat des anciens salariés d’C, et, la plupart du temps, sur les dates de cette rupture, de sorte que la matérialité du débauchage n’est pas établie; Que les dates de réembauche sont en outre difficile à déterminer du fait des incohérences existant entre certains contrats de travail et le registre du personnel de la société D R;

Qu’en outre le caractère massif de ce débauchage, à le supposer établi, n’est pas démontré; Qu’en effet c’est à tort que les juges de première instance ont comparé ce nombre de 13 aux effectifs « permanents » de la société D R (25 salariés) alors qu’il est justifié que cette société, depuis septembre 2009, a embauché au moins 174 commerciaux ce qui s’explique par le type d’activité que constitue le démarchage à domicile et le profil des personnes l’exerçant lesquels suscitent inévitablement une rotation importante des personnels;

Que, par ailleurs, si la société C mettait systématiquement une clause de non concurrence dans ses contrats de travail, elle a pris l’initiative d’en dégager O B, BH BI et AD AE; Que, pour autant, ces trois salariés n’étaient pas dégagés de leur clause de confidentialité ni de leur obligation de loyauté;

Attendu que si le débauchage déloyal n’est donc pas démontré, il est clairement établi que la société D R a procédé à l’embauche d’anciens préposés d’C ;

Attendu que les attestations précédemment citées démontrent que des anciens d’C, comme BX BY, n’ont pas hésité à démarcher leur clientèle antérieure, que d’autres savaient, puisqu’ils l’ont dit aux assurés, que ceux-ci étaient des clients SMAM, ce qui démontre une connaissance des fichiers SMAM par ces démarcheurs de la société D R, alors que ce portefeuille client avait été cédé par la société C à la société A pour le prix de 1 400 000 € depuis janvier 2007 ; Que AL AM indique que les personnes qui l’ont démarché avaient avec elles son dossier santé à la SMAM;

Que le fait que d’autres attestations (celles de la pièce 11 de D) démontrent que certains commerciaux de la société D R n’aient pas usé de tels procédés ou que BH BI n’ait pas usé en toutes circonstances des mêmes méthodes, n’entache en rien la fiabilité de ces témoignages;

Que le fait que tous les anciens salariés de la société C n’aient pas eu accès aux dossiers (Cf. attestations de BD BE, AF AG, AT AU, AN AO) ne change rien à ces attestations de clients qui établissent sans ambiguïté l’utilisation, par des personnes ayant précédemment travaillé pour le cédant, de fichiers clients cédés, ce qui est indéniablement constitutif de faits de concurrence déloyale;

Attendu qu’en outre plusieurs de ces attestations font apparaître des faits de parasitisme;

Qu’ainsi AL AM, après avoir indiqué « Ils avaient déjà mon dossier santé à la SMAM avec eux », ajoute « Ils m’ont fait croire qu’ils étaient mon assureur »;

Que Loïc BIHIN indique que BX BY, qui lui avait précédemment fait souscrire un contrat SMAM, l’a démarché le 12 juillet 2008 « se faisant passer pour la SMAM »;

Que BB BC, indique qu’après lui avoir dit que « la SMAM avait coulé », O B lui a indiqué qu'« il avait pris la relève de la SMAM »;

Que ce parasitisme, c’est à dire cette volonté de se faire passer pour des personnes représentant des contrats SMAM ou prenant leur suite, alors que l’on représente la concurrence, constitue indéniablement une forme de démarchage déloyal;

Sur le préjudice:

Attendu que l’utilisation de fichiers cédés et le parasitisme développés par la société D ont, d’évidence, créé une rupture de l’égalité entre concurrents constitutive d’un préjudice pour la société A; Que ce préjudice est d’abord économique et financier, les pratiques anticoncurrentielles de la société D R ayant amené bon nombre de clients à résilier leurs contrats, d’où une perte de clientèle et un coût lié au traitement des nombreuses demandes de résiliations, ensuite commercial, ces pratiques ayant altéré l’image de la société A et/ou des produits qu’elle proposait et nécessitant un travail de reconquête; Qu’enfin la simple utilisation par la société D R de fichiers du portefeuille clients santé SMAM acquis pour 1 400 000 € en janvier 2007 est aussi constitutive, en soi, d’un préjudice pour la société A;

Qu’au regard de ces éléments il n’est pas excessif de chiffrer l’ensemble ce préjudice à la somme de 50 000 €;

Sur la demande reconventionnelle de la société D R:

Attendu que la société D R reproche à la société A d’avoir fait revenir certains clients sur leurs engagements, de les avoir impressionné ou d’avoir poussé certains d’entre eux à se plaindre auprès de l’ACAM, ainsi que de la dénigrer et demande, à ce titre, la condamnation de la société A à lui payer une somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts;

Qu’en premier lieu il n’y a rien d’anormal à ce qu’une société qui est subitement destinataire d’un grand nombre de demandes de résiliation de contrats s’interroge sur leur cause et se retourne vers ses clients pour obtenir des informations;

Qu’en second lieu les premières attestations qui sont produites par D R (ses pièces 6-1 à 6-6 ) pour tenter d’établir des comportements fautifs de la société A émanent toutes, à l’exception de celle d’O P, d’assurés qui se sont rétractés de leurs attestations antérieures ; Que, comme il l’a déjà été dit, ces attestations émanant de personnes qui, bien que sachant qu’elles encourent un an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende en cas de fausse attestation, sont capable d’écrire tout et son contraire à quelques jours d’intervalle, sont dépourvues de toute fiabilité et n’ont donc aucun caractère probant; Que le seul élément qui peut être utilisé est donc l’attestation du commercial O P qui dit avoir suivi trois jours de formation, mais on ne sait de qui, au cours desquels on lui aurait dit de faire signer des attestations à ses clients à l’encontre de D R; Qu’O P, qui a rédigé son attestation dans un français très approximatif, ne précise pas quelle personne ou quelle société lui a donné ces instructions de sorte qu’il est impossible d’en faire porter la responsabilité à la société A;

Que la société D R verse aussi aux débats quarante cinq attestations figurant à sa pièce N°11; Que plusieurs d’entre elles (11-3, 11-5, 11-8, 11-9, 11-41, XXX émanent de personne ayant établi des attestations contradictoires, qu’elles seront donc écartées des débats;

Que les autres attestations n’établissent ni des pressions ni des appels à porter plainte;

Que sept d’entre elles (celles de Sonia BZ CA, W AA, S BM, BP BQ, Levent ORBAY, BN BO et M N) font état de ce qu’un représentant de la société A aurait dit que ceux de la société D étaient des « voleurs »; Que ces attestations sont à rapprocher de celle d’O P qui indiquait qu’il fallait dire aux clients que la société D R avait dérobé le fichier client; Que, si dans la forme le qualificatif de « voleur » de fichier clients, appliqué à la société D R, est excessif et injurieux, au fond, il n’est pas très éloigné de la vérité puisqu’il est établi par le dossier que cette société utilisait des fichiers clients précédemment cédés à la société A;

Qu’enfin si ces attestations font apparaître un dénigrement des produits présentés par D (Y étant présenté comme « un groupe d’arnaqueurs » et ASSUREMA comme « des voleurs ») ce dénigrement doit être apprécié dans le contexte, déjà évoqué, de malveillance, d’outrances, d’injures ou de diffamation réciproques partagé par les sociétés A et D;

Qu’au regard de ce qui précède si une faute a pu être commise par des préposés de A, elle est à prendre en compte à l’aune du contexte, et surtout il n’est en rien prouvé qu’il en soit résulté un quelconque préjudice pour la société D R, préjudice qu’elle ne caractérise d’ailleurs pas; Que sa demande sera donc rejetée;

Sur la demande de publication:

Attendu qu’au regard du contexte très conflictuel de cette affaire il n’y a pas lieu d’ordonner la publication de la décision;

Sur l’article 700:

Attendu qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de la société A les frais irrépétibles engagés par elle;

Qu’il convient donc de condamner la société D R à lui payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement par arrêt contradictoire,

INFIRME la décision entreprise,

STATUANT A NOUVEAU,

DEBOUTE la société A de ses demandes fondées sur le dénigrement déloyal ou le débauchage de personnel,

DIT que la société D CONSEIL, en utilisant des fichiers clients cédés et en usant de pratiques de parasitisme, a commis des actes de concurrence déloyale à l’encontre de la société A,

CONDAMNE la société D R à payer à la société A la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts,

DIT n’y avoir lieu à publication de la décision,

DEBOUTE la société D R de sa demande reconventionnelle,

CONDAMNE la société D R à payer à la société A la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

REJETTE toute autre demande plus ample ou contraire des parties,

CONDAMNE la société D aux dépens de l’instance, ceux d’appel pouvant être distraits conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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