Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 10 décembre 2019, n° 18/03372

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 8e ch., 10 déc. 2019, n° 18/03372
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 18/03372
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Lyon, 13 décembre 2017, N° 13/12476
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 18/03372 – N° Portalis DBVX-V-B7C-LWAQ

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 14 décembre 2017

RG : 13/12476

SASU BORDAS INDUSTRIAL GROUP

C/

SCI JULIA

Société MJ ALPES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

8e chambre

ARRET DU 10 Décembre 2019

APPELANTE :

SASU BORDAS INDUSTRIAL GROUP

anciennement dénommée SIB BORDAS

représentée par son représentant légal en exercice

[…]

[…]

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES – LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938

Ayant pour avocat plaidant Me DESSEIGNE Jean-Claude, avocat au barreau de LYON, substitué par Me SOALLA, avocat au barreau de LYON

INTIMEES :

SCI JULIA

Centre d’affaires Regus

[…]

[…]

défaillante

Société MJ ALPES

prise en la personne de Me Jean BLANCHARD, ès qualité de liquidateur judiciaire de A X, demeurant […]

9 Boulevard E Mendès France

[…]

défaillante

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 12 Novembre 2018

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 29 Octobre 2019

Date de mise à disposition : 26 novembre 2019, prorogé au 10 décembre 2019, les avocats ayant été avisés

Audience tenue par Agnès CHAUVE, président, et C D, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de Clémentine HERBIN, greffier placé

A l’audience, C D a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

— Agnès CHAUVE, président

— C D, conseiller

— Dominique DEFRASNE, conseiller

Arrêt Réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Agnès CHAUVE, président, et par Clémentine HERBIN, greffier placé, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

La SCI Julia, propriétaire d’un tènement immobilier à E F (69310), a procédé en 2006 à l’extension de ses locaux à la demande de son locataire, la société Epiflore, exerçant une activité de

boulangerie industrielle.

Elle a confié une mission de maîtrise d''uvre complète à M. X, assuré auprès de la société Gan Assurances.

Une étude de sol a été confiée à la société Fondaconseil, laquelle a émis une préconisation de dallage porté pour l’exécution des sols en béton.

La pré-étude béton et les plans d’exécution ont été réalisés par le bureau d’études techniques RBS et le contrôle de l’exécution a été confié au Bureau Alpes Contrôle.

Le lot n°6, comprenant la réalisation du dallage béton et la rénovation des sols en résine existants, a été confié à la société SIB Bordas, selon devis accepté le 23 février 2006 par le maître d’oeuvre.

La réception est intervenue le 16 octobre 2006 avec réserves relatives à un phénomène de fissuration du dallage béton et au caractère glissant des sols en résine.

Se plaignant de l’absence de levée de ces réserves, la SCI Julia a procédé à des paiements partiels en retenant une partie du prix des prestations de la société SIB Bordas.

Par acte du 20 février 2008, la société SIB Bordas a assigné la SCI Julia devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon aux fins de constitution d’une garantie de paiement et d’une expertise judiciaire.

Par ordonnance du 1er avril 2008, M. Y a été désigné en qualité d’expert. Sa mission a été étendue à M. X, à la société RBS, au Bureau Alpes Contrôle, à la société Socotra, et à la société Gan Assurances.

Le rapport d’expertise a été déposé le 29 novembre 2012.

La SCI Julia a assigné M. X, la SA Gan Assurances et la société SIB Bordas devant le tribunal de grande instance de Lyon.

Par jugement en date du 14 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Lyon a:

' Déclaré les prétentions de la SCI Julia recevables et rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de sa demande,

' Condamné M. A X et la SA SIB Bordas in solidum à payer à la SCI Julia la somme de 35.000 euros au titre de la reprise des désordres, avec intérêts au taux légal à compter du 22 octobre 2013,

' Condamné M. A X et la SA SIB Bordas in solidum à payer à la SCI Julia la somme de 1.000 euros en indemnisation de son préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

' Fixé la part de responsabilité de M. A X dans la survenance des désordres à 65 % et celle de la société SIB Bordas à 35 %,

' Condamné M A X à relever et garantir la société SIB Bordas de toute somme qu’elle serait amenée à régler, fût-ce par compensation, en exécution des condamnations prononcées au profit de la SCI Julia et au titre des dépens, au-delà de sa part de responsabilité de 35 %,

' Jugé que les garanties souscrites par M. A X auprès de la société Gan Assurances n’ont pas

vocation à jouer en l’espèce, et rejeté l’intégralité des prétentions dirigées contre celle-ci,

' Condamné la SCI Julia à payer à la SA SIB Bordas la somme de 12 459,18 euros avec intérêts taux légal, à compter du 24 juillet 2006 sur la somme de 2 010,09 euros, pour la période du 24 juillet 2006 au 1er septembre 2006, sur la somme de 31 761,30 euros du 1er septembre 2006 au 20 avril 2007 puis sur la somme de 12 459,18 euros passé le 20 avril 2007,

' Ordonné la capitalisation par années entières des intérêts dus en vertu de la condamnation immédiatement précédente,

' Rappelé que la compensation légale s’opère de plein droit entre les créances respectives de la SCI Julia et de la société SIB Bordas,

' Condamné M. A X et la SA SIB Bordas in solidum à payer à la SCI JULIA la somme de 5 500 euros en indemnisation des frais non répétibles du procès,

' Condamné la SCI Julia à payer à la SA Gan Assurances la somme de 1 500 euros en indemnisation des frais non répétibles du procès,

' Rejeté le surplus des prétentions des parties,

' Ordonné l’exécution provisoire du jugement,

' Condamné M. A X et la SA SIB Bordas in solidum aux dépens de l’instance, en ce inclus les frais d’expertise et les dépens de la procédure de référé expertise, avec distraction au profit de Me Parado, avocat, sur son affirmation de droit.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 3 mai 2018, la société Bordas Industrial Group, anciennement dénommée SIB Bordas, a formé appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions, la société Bordas Industrial Group demande à la cour, infirmant le jugement déféré et statuant à nouveau, de:

' Dire prescrite l’action de la société Julia fondée sur l’article 1134 du code civil et donc irrecevable,

Au surplus,

' Dire qu’aucune responsabilité ne peut être retenue à son encontre pour les désordres allégués par la société Julia, et que ceux-ci relèvent de la responsabilité exclusive de M. A X,

' Prononcer sa mise hors de cause,

' Débouter la société Julia de toutes ses demandes à son encontre,

Sur sa créance à l’encontre de la société Julia :

' Condamner la société Julia à lui payer la somme de 42 632,69 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 2006 sur la somme de 2 010,09 euros, du 1er septembre 2006 sur la somme de 31 761,30 euros, et du 30 juin 2006 sur la somme de 42.632,69 euros,

' Dire que les intérêts dus pour plus d’une année entière seront capitalisés,

' Condamner la société Julia à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

' Rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires,

' Condamner la société Julia ou qui mieux le devra aux dépens de première instance et d’appel, lesquels comprendront les frais de la procédure de référé et les frais d’expertise, les dépens d’appel distraits au profit de Me Laffly, Avocat sur son affirmation de droit.

La SCI Julia et la société MJ Alpes en qualité de liquidateur judiciaire de M. X n’ont pas constitué avocat.

Il est expressément renvoyé aux dernières conclusions déposées par les parties pour l’exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la demande de la SCI Julia :

La société Bordas Industrial Group soutient que l’action de la SCI Julia est prescrite puisque le délai de 5 ans courait à compter du 18 juin 2008 jusqu’au 19 juin 2013, alors que son assignation au fond est intervenue le 23 novembre 2013,

L’article 2224 du code civil dans sa rédaction issue de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 entrée en vigueur le 19 juin 2008 dispose en effet : 'Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer' .

L’article 1792-4-3 du même code et issue de la même loi du 17 juin 2008 dispose cependant :

'En dehors des actions régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux'

Alors que la responsabilité contractuelle de droit commun de l’entrepreneur subsiste concurremment avec la garantie de parfait achèvement due par celui-ci, et ce même si la mise en oeuvre de la responsabilité n’est pas intervenue dans le délai de l’article 1792-6 du code civil, la fin de non recevoir tirée de la prescription sera rejetée dès lors que l’action de la SCI Julia sur les désordres réservés le 16 octobre 2006 a été intentée dans le délai de l’article 1792-4-3 du code civil dans sa rédaction issue de la loi 17 juin 2008 applicable, l’assignation au fond étant du 23 novembre 2013.

La décision doit être confirmée sur ce point.

Sur la nature des désordres et les responsabilités :

Par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge, s’appuyant notamment sur les constatations et les conclusions de l’expert a mis en évidence :

Sur les sols en résine:

— que la réserve relative au caractère glissant des sols en résine n’a pas été levée par la société SIB Bordas, et que la persistance du désordre constatée en cours d’expertise judiciaire engage la responsabilité de celle-ci, par son manquement à son obligation de résultat,

— que l’absence de définition technique du marché par M. X, qui n’a ni préconisé l’emploi de méthode et matériaux limitant le caractère glissant des sols, ni fixé de résultat à atteindre en la matière, est constitutive d’une faute puisqu’elle a contribué à la mise en oeuvre de techniques

inappropriées par la société SIB Bordas, ainsi qu’à la survenance du dommage,

Sur les sols en béton :

— que les fissures affectant les sols en béton n’ont pas de caractère décennal mais dépassent les tolérances admissibles en la matière, de sorte qu’elles sont constitutives d’un désordre préjudiciable,

— que l’absence de définition technique du marché par M. X, qui n’a ni préconisé l’emploi de méthode et matériaux limitant la fissuration des sols en béton, ni pris en compte le phénomène de retrait thermique, ni fixé de résultat à atteindre en la matière, est constitutive d’une faute puisqu’elle a contribué à la mise en oeuvre de techniques inappropriées par la société SIB Bordas, ainsi qu’à la survenance du dommage,

— que la société Bordas Industrial Group aurait dû anticiper, en raison de son expérience, la survenance du phénomène de fissuration et qu’en s’abstenant d’en informer le maître d’oeuvre et le maître de l’ouvrage, elle avait commis une faute ayant contribué à la survenance du désordre

Dans les rapports entre la société Bordas Industrial Group et M. X:

Le premier juge a justement retenu que s’ils devaient être condamnés in solidum à réparer l’entier préjudice subi par la SCI Julia, il convenait, compte-tenu de leurs manquements respectifs à l’origine des deux types de désordres, de fixer la part de responsabilité de M. Z à 65 % et celle de la société Bordas Industrial Group à 35 %, y compris sur les dépens et les frais irrépétibles.

Sur l’indemnisation de la SCI Julia :

La cour n’est saisie d’aucune contestation sur les dispositions du jugement ayant fixé à la somme de 35.000 euros le montant de la reprise des désordres et à celle de 1.000 euros le montant de l’indemnisation du préjudice moral subi par la SCI Julia. Ces dispositions sont en conséquence confirmées comme n’étant pas discutées.

La décision déférée doit donc être confirmée en ce qu’elle a condamné M. A X et la SA SIB Bordas in solidum à payer à la SCI Julia la somme de 35 000 euros au titre de la reprise des désordres, avec intérêts au taux légal à compter du 22 octobre 2013, et celle de 1.000 euros en indemnisation de son préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, et ordonné la capitalisation des intérêts.

Sur la créance de la société Bordas Industrial Group :

Il résulte des documents produits par la société Bordas Industrial Group et du compte effectué par l’expert que la SCI Julia s’est abstenue de payer la somme de 42 632,69 euros TTC sur le solde du marché conclu avec la société Bordas Industrial Group.

Si la société Bordas Industrial Group a fait une déclaration de sinistre auprès de son assureur, la société Atradius qui lui a versé dans un premier temps la somme de 30.607,82 euros, elle justifie avoir dû restituer en mars 2009 cette somme auprès de la société Atradius, la créance de la société Bordas Industrial Group envers la SCI Julia ne pouvant finalement bénéficier de l’assurance ainsi souscrite.

Cette déduction n’ayant pas été opérée par la société Bordas Industrial Group devant le premier juge, il convient, compte-tenu de l’évolution du litige, de réformer le jugement déféré sur ce point et de condamner la SCI Julia à payer à la société Bordas Industrial Group la somme de 42.632,69 euros TTC outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er septembre 2006 sur la somme de 31.761,30 euros et à compter du 11 juillet 2018, date de la signification des conclusions

d’appel pour le surplus.

Sur les dépens et les frais irrépétibles:

Il convient de confirmer la décision déférée.

La société Bordas Industrial Group qui a fait appel compte-tenu de l’erreur qu’elle a commise dans sa demande en paiement devant le premier juge doit garder à sa charge les dépens qu’elle a engagés devant la cour.

Il n’y a pas lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Confirme le jugement entrepris, sauf sur le montant de la créance de la société Bordas Industrial Group,

Et statuant à nouveau sur ce chef, compte tenu de l’évolution du litige :

Condamne la SCI Julia à payer à la société Bordas Industrial Group la somme de 42.632,69 euros TTC outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er septembre 2006 sur la somme de 31 761,30 euros et à compter du 11 juillet 2018, date de la signification des conclusions d’appel pour le surplus, et capitalisation des intérêts,

Ordonne la compensation entre les créances respectives de la société Bordas Industrial Group et de la SCI Julia.

Dit que la société Bordas Industrial Group conservera la charge des frais et dépens par elle engagés,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés devant la cour.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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