Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 8 novembre 2023, n° 22/07972

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, ch. soc. a, 8 nov. 2023, n° 22/07972
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 22/07972
Importance : Inédit
Sur renvoi de : Cour de cassation, 25 octobre 2022, N° 17/00001
Dispositif : Autre
Date de dernière mise à jour : 14 novembre 2023
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Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 22/07972 – N° Portalis DBVX-V-B7G-OUNT

Société OXYRIA

C/

[Y]

Saisine sur renvoi de la cour de cassation

Jugement du Conseil de Prud’hommes de ROANNE

du 17 mai 2018

RG : 17/00001

Arrêt de la Cour d’Appel de LYON section C

du 12 mars 2020

RG :18/04405

Arrêt de la Cour de Cassation

du 26 Octobre 2022

Arrêt n°1120 FS-B

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 08 NOVEMBRE 2023

DEMANDERESSE A LA SAISINE :

Société OXYRIA

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Pierre- yves LUCCHIARI de la SAS SAS LUCCHIARI, avocat au barreau de ROANNE

DÉFENDERESSE À LA SAISINE :

[P] [Y]

né le 19 Décembre 1966 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Henri CHRISTOPHE de la SELARL HENRI CHRISTOPHE, avocat au barreau de ROANNE

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 05 Septembre 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Catherine MAILHES, Présidente

Nathalie ROCCI, Conseiller

Anne BRUNNER, Conseiller

Assistés pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 08 Novembre 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine MAILHES, Présidente, et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Suivant contrat à durée indéterminée, la société Oxyria (la société) a engagé M. [Y] (le salarié) en qualité de chargé de mission à compter du 5 novembre 2012, moyennant une rémunération mensuelle nette de 2 400 euros.

La relation de travail était régie par la convention collective des Bureaux d’études techniques,

cabinets d’ingénieurs-conseils et sociétés de conseils (SYNTEC).

Les attributions du salarié étaient les suivantes: Formations, expertises, études, diagnostic, conception et réalisation, coordination SPS.

L’article 4bis du contrat de travail relatif à la rémunération des expertises judiciaires est ainsi libellé :

'La rémunération directe ou indirecte des expertises judiciaires qui seraient versées à [P] [Y] devront être intégralement reversées à la SARL Oxyria.'

Le 7 mai 2014, les parties sont convenues d’une rupture conventionnelle de la relation contractuelle.

Par lettre remise en main propre du 30 juin 2014, la société a adressé au salarié un état des affaires qu’il s’était engagé à terminer ainsi que la liste du matériel cédé par la société sans dédommagement.

Par assignation du 18 novembre 2015, la société a saisi le tribunal de grande instance de Villefranche-Sur-Saône afin de voir le salarié condamner à lui payer la somme de 45 910,58 euros TTC à titre de remboursement des frais et honoraires qu’il a perçus au titre des missions d’expertises judiciaires exécutées en sa qualité de salarié de la société, ainsi que la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive et 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 25 avril 2016, le juge de la mise en état a déclaré le tribunal de grande instance de Villefranche-Sur-Saône incompétent au profit du conseil de prud’hommes de Roanne.

Par jugement du 17 mai 2018, le conseil de prud’hommes de Roanne a :

— Dit que l’article 4 bis du contrat de travail du salarié n’est entaché d’aucune illégalité,

— Débouté M. [Y] de sa demande de nullité de cet article

— Dit que le protocole d’accord signé le 30 juin 2014 engage les deux parties

— Débouté M.[Y] de sa demande de dommages-intérêts au titre du travail dissimulé

— Condamné M. [Y] à payer à la société Oxyria la somme de 24 271,44 euros TTC au titre du solde des affaires Mutuelles de l’Est, Lloyd’s de Londres et M. [E],

— Débouté la société Oxyria de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive

— Condamné M. [Y] à payer à la société la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure pénale,

— Débouté la société Oxyria de ses autres demandes

— Laissé à la charge de chacune des parties le surplus des éventuels dépens.

Le salarié a interjeté appel de cette décision le 15 juin 2018.

Par arrêt du 12 mars 2020, cette cour a :

— Confirmé la décision du conseil de prud’hommes de Roanne en toutes ses dispositions, sauf concernant le montant des frais et honoraires perçus pour les missions d’expertise judiciaire et devant être reversés par M. [Y] à la société

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant :

— Condamné M. [Y] à payer à la société la somme de 40 219,20 euros TTC au titre du remboursement des frais et honoraires qu’il a perçus pour ses missions d’expertise judiciaire dans les 4 dossiers visés au protocole du 30 juin 2014,

— L’a condamné au paiement à la société de la somme de 8 207,04 euros TTC en remboursement des frais réglés à la société IC2000, sapiteur choisi par lui dans ses missions d’expertise

— Débouté la société Oxyria de sa demande de dommages-intérêts concernant les expertises Dreveton et Robinetterie Industrielle

— Débouté M. [Y] de sa demande formée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

— Condamné M. [Y] à payer à la société la somme de 1 500 euros

— Condamné M. [Y] aux dépens d’appel.

Par chèque encaissé le 29 juillet 2020, le salarié a payé à la Selarl d’huissiers de justice Rajon, la somme de 50 450,96 euros en exécution de l’arrêt de cette cour du 12 mars 2020.

M. [Y] a formé un pourvoi en cassation.

Par arrêt du 26 octobre 2022, la Cour de cassation a :

— Cassé et annulé, sauf en ce qu’il déboute la société de ses demandes en dommages-intérêts concernant les expertises Dreveton et Robinetterie Industrielle et pour résistance abusive et en ce qu’il déboute le salarié de sa demande de dommages-intérêts de 500 euros pour le travail dissimulé, l’arrêt rendu le 12 mars 2020, entre les parties par la cour d’appel de Lyon

— Remis, sauf sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyés devant la même cour autrement composée

— Condamné la société aux dépens

— En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejeté la demande formée par la société et l’a condamnée à payer au salarié la somme de 3 000 euros.

L’affaire a été ré-enrôlée par déclaration de saisine du 24 novembre 2022.

Par ses dernières conclusions notifiées le 21 juin 2023, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé, la société Oxyria demande à la cour de :

— Débouter M. [Y] de son appel principal ;

Sur son appel incident,

— Réformant partiellement le jugement déféré et statuant à nouveau,

— Confirmer la validité de l’article 4bis du contrat de travail consenti par elle ,

— Pour le surplus réformer le jugement déféré,

— Condamner M. [Y] à lui payer la somme de 40 219,20 Euros TTC au titre du remboursement des frais et honoraires qu’il a perçus pour ses missions d’expertise judiciaire dans les 4 dossiers visés au protocole du 30 juin 2014,

— Condamner M. [Y] à lui payer la somme de 8 207,04 Euros HT en remboursement des frais réglés à la société IC2000, sapiteur choisi par M. [Y] dans ses missions expertales,

— Enfin, le condamner également à la somme de 10.000,00 euros en application de l’article

700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire,

— Juger que M. [Y] ne peut cumuler des honoraires d’expert judiciaire et un salaire au sein de la société dès lors que l’article 4 bis du contrat de travail serait déclaré nul

— Le condamner en conséquence à lui payer la somme de 97 326 euros, au titre d’un enrichissement injustifié,

— Le condamner également à la somme de 10 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamner M. [Y] en tous les dépens.

Par ses dernières conclusions notifiées le 16 juin 2023, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé, M. [Y] demande à la cour de :

— Prononcer la nullité de l’article 4bis du contrat de travail et ainsi confirmer l’arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation rendu le 26 octobre 2022 (N°20-17.105),

— Condamner la société Oxyria à lui payer la somme de 95 940,93 euros à titre de remboursement des honoraires d’expertises judiciaires,

— Débouter la société de l’intégralité de ses demandes,

— Condamner la société Oxyria à lui rembourser la somme de 50 450,96 euros réglée en exécution de l’arrêt rendu le 12 mars 2020 par la cour d’appel de Lyon, outre intérêts calculés aux taux légal à compter du 26 octobre 2022

— Condamner la société Oxyria à lui payer une indemnité de 15 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

— Condamner la société Oxyria aux entiers dépens de l’instance.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 22 juin 2023.

MOTIFS

— Sur l’article 4bis du contrat de travail :

La société maintient sa position quant à la validité de l’article 4bis du contrat de travail en exposant que ses dispositions ont été négociées et respectées loyalement et de bonne foi par les parties durant l’exécution du contrat et en soulignant que le salarié a soulevé l’invalidité de cet article, pour la première fois, devant le conseil de prud’hommes.

La société souligne en outre que lors de la rupture conventionnelle, les parties ont établi conjointement une annexe comportant un état précis des dossiers d’expertise en cours et devant être menés à leur terme avant le départ du salarié à la date du 30 juin 2014.

La société fait valoir que le salarié a bénéficié d’une rémunération non négligeable et de tous les moyens nécessaires à l’exercice de ses missions d’expert judiciaire, lesquelles ont été exécutées pendant son temps de travail et l’ont occupé à plein temps dés lors qu’il n’avait qu’une seule mission hors expertise judiciaire pour le compte de la société, à savoir une mission de coordination SPS.

La société soutient en conséquence que c’est illégitimement que le salarié pourrait percevoir des honoraires pour ses missions d’expertise dés lors qu’il percevait une rémunération pour exécuter les dites missions et disposait de tous les moyens pour ce faire.

La société demande par conséquent la condamnation du salarié à lui payer la somme de 40 219,20 euros TTC au titre du remboursement des frais et honoraires perçus pour ses missions d’expertise dans les 4 dossiers visés au protocole du 30 juin 2014, outre la somme de 8 207,04 euros HT en remboursement des frais réglés à la société IC2000, sapiteur choisi par le salarié dans ses missions expertales.

Le salarié soutient à titre principal que :

— les demandes de la société ne reposent plus sur aucun fondement juridique, compte tenu de l’invalidation de l’article 4bis du contrat de travail par l’arrêt de la cour de cassation,

— la nullité de la clause contractuelle emporte la nullité des reversements à la société laquelle n’a jamais eu la qualité d’expert judiciaire et n’a jamais accompli aucune expertise judiciaire,

— il est dés lors fondé à solliciter le remboursement des sommes encaissées par la société au titre de ses missions d’expertise.

A titre subsidiaire, le salarié soutient que :

— le litige porte sur le reversement à la société des honoraires générés par son travail, après la rupture du contrat de travail ;

— le solde de tout compte établi par la société au mois de juin 2014 lui est opposable en l’absence de toute réserve de sa part ;

— en cours de procédure, la société a ajouté une demande forfaitaire de 3 000 euros concernant les expertises Dreveton et 'la robinetterie industrielle’qui ont été achevées en novembre 2015 ;

— la société ne saurait réclamer des frais de sapiteur pour de opérations d’expertise exécutées après la rupture du contrat de travail.

****

Aux termes de l’article 233 du code de procédure civile, le technicien, investi de ses pouvoirs par le juge en raison de sa qualification, doit remplir personnellement la mission qui lui est confiée.

L’article 1er de la loi n°71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires énonce :

'Sous les seules restrictions prévues par la loi ou les règlements, les juges peuvent désigner pour procéder à des constatations, leur fournir une consultation ou réaliser une expertise, une personne figurant sur l’une des listes établies en application de l’article 2. Ils peuvent, le cas échéant, désigner toute autre personne de leur choix.'

Par ailleurs, si le code civil consacre le principe de la liberté contractuelle, qui permet aux parties au contrat de travail, d’y insérer des clauses visant à imposer au salarié des obligations spécifiques, compte tenu de la nature des fonctions et responsabilités qui lui sont confiées, ce principe est mis en oeuvre dans les limites fixées par les règles impératives de l’ordre public de protection. En effet, l’article 1162 du code civil énonce que le contrat ne peut déroger à l’ordre public ni par ses stipulations, ni par son but, que ce dernier ait été connu ou non par toutes les parties.

Le règlement d’honoraires à l’expert désigné par le juge, constitue la seule garantie du respect de l’intuitu personae lié au mandat de justice, ainsi que la seule garantie de l’indépendance de l’expert dans l’exécution de sa mission.

Dés lors, l’expert, investi de ses pouvoirs par le juge, exécute un mandat de justice et doit remplir personnellement la mission qui lui est confiée, ce dont il résulte que la clause du contrat de travail par laquelle l’expert, également salarié, s’engage à reverser à son employeur les rémunérations qui lui ont été versées pour des missions pour lesquelles il a été désigné expert personnellement, porte atteinte à l’ordre public social de protection. La cour déclare donc illégal l’article 4 du contrat de travail.

Le jugement du 17 mai 2018 du conseil de prud’hommes de Roanne est par conséquent infirmé en ce qu’il a dit que l’article 4 bis du contrat de travail du salarié n’est entaché d’aucune illégalité, et en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande de nullité de cet article.

Le protocole d’accord signé le 30 juin 2014, lequel est destiné à mettre en oeuvre le principe de rétrocession de ses honoraires d’expert par le salarié à la société, est par conséquent également entaché de nullité.

La société est déboutée de sa demande tendant à la condamnation du salarié à lui payer la somme de 40 219,20 euros TTC au titre du remboursement des frais et honoraires perçus pour ses missions d’expertise dans les 4 dossiers visés au protocole du 30 juin 2014, outre la somme de 8 207,04 euros HT en remboursement des frais réglés à la société IC2000, sapiteur choisi par le salarié dans ses missions expertales.

— Sur la demande en paiement pour enrichissement sans cause :

La société expose que la nullité de l’article 4bis du contrat de travail bouleverse l’économie du contrat et que si elle ne peut prétendre aux honoraires versés au salarié au titre de ses expertises, elle n’est pas tenue à assumer le coût total du salariat de ce dernier, ni l’ensemble des charges afférentes à l’exercice de la fonction d’expert judiciaire dés lors qu’il a bénéficié de salaires pour des tâches salariales qu’il n’a jamais effectuées pour le compte de la société , ainsi que de moyens matériels et financiers affectés exclusivement à son activité d’expert judiciaire, soit un secrétariat, un véhicule de fonction et des locaux situés à [Localité 4].

La société soutient que l’activité du salarié a généré, pour la période du 5 novembre 2012 au 17 juin 2014 un coût financier total de 193 267,29 euros. Elle demande par conséquent la condamnation du salarié à lui payer la somme de 97 326,36 euros (193 267,29 euros – 95 940,93 euros) au titre d’un enrichissement injustifié.

Le salarié s’oppose à cette demande en faisant valoir que :

— le paiement des salaires fixés par le contrat de travail est dû quelle que soit la réalité du travail exécuté,

— la cour ne pourra en aucun cas le condamner à rembourser des salaires perçus, il y a 10 ans,

— la totalité du coût du salariat ne saurait lui être réclamé, dés lors qu’il n’a perçu que ses salaires nets et non les charges salariales et patronales qui lui sont réclamées par la société,

— le postulat de la demande est celui de son occupation quasiment à temps plein, à des missions d’expertise judiciaire, ce qui ne correspond pas à la réalité,

— aucune des parties n’est en mesure de quantifier les parts exactes prises respectivement par les expertises judiciaires et d’autre missions dans son emploi du temps et il est faux de soutenir que le contrat de travail liant les parties était enfermé dans une stricte application de l’article 4bis relatif aux expertises judiciaires.

****

La société produit en pièce n°21, un tableau des dépenses relatives à l’activité du salarié pour l’exécution de ses missions d’expertise judiciaire.

Ce tableau comprend :

— les salaires du salarié de novembre 2012 à juillet 2014, le coût de la modification des statuts et de la rupture conventionnelle, le salaires de secrétaires, pour un sous-total de 103 750,73 euros ;

— des relevés de carte bancaire pour un sous-total de 8 473,79 euros ;

— des frais de déplacements et de restaurants pour un sous-total de 1 119,90 euros ;

— des fournitures de bureau et frais d’impressions pour un sous-total de 4 357,4 euros ;

— des factures FACSI pour un sous-total de 15 260,96 euros ;

— des cotisations d’assurances pour un sous-total de 1 520,46 euros ;

— des frais divers pour un sous-total de 5 139,71 euros ;

— des loyers pour un sous-total de 2 693,49 euros ;

— des frais d’entretien de véhicule pour un sous-total de 2 124,69 euros ;

— des factures d’eau et d’électricité pour un sous-total de 1 466,57 euros ;

— des frais de sous-traitance à hauteur de 44 360,64 euros ;

— des frais de téléphonie pour un sous-total de 2 999,12 euros.

Il en résulte que la société évalue le coût du salariat en cause, non seulement aux salaires qui ont été versés au salarié en exécution du contrat de travail, mais aussi aux salaires de collaborateurs, ainsi qu’aux charges de fonctionnement du cabinet d'[Localité 4], frais de déplacements, de téléphonies, notamment.

Or, d’une part, la société ne démontre pas que les salaires versés au salarié l’auraient été sans contre partie autre que la réalisation d’expertises judiciaires, dés lors que si les expertises relevaient des attributions du salarié, la formation, les études et diagnostics ainsi que la coordination SPS faisaient également partie des dites attributions et la société ne démontre pas que ces différentes missions, qu’elle a rémunérées, n’auraient pas été remplies.

Le salarié verse au contraire, aux débats, des échanges de mails et courriers relatifs à des missions de coordination en matière de sécurité et de protection de la santé des travailleurs, ainsi que des comptes rendus de réunions de chantiers dont le maître d’oeuvre était la société Oxyria et auxquelles le salarié a participé.

D’autre part, la société ne saurait réclamer le remboursement des charges liées au fonctionnement du bureau d'[Localité 4] dont elle ne démontre pas que les moyens auraient été mis en oeuvre de façon exclusive pour la réalisation des expertises judiciaires du salarié. Il résulte d’ailleurs des termes mêmes du contrat de travail que le salarié a exercé ses fonctions tant au sein de l’établissement secondaire situé à [Localité 4] qu’au siège de la société à [Adresse 5] à [Localité 3].

Le salarié souligne à toutes fins utiles et sans être démenti, que le bureau d'[Localité 4] fonctionne toujours.

Dés lors, la société n’est pas fondée à exiger le paiement du coût d’une relation contractuelle dont une partie de l’objet était la réalisation de missions qui lui étaient propres.

En revanche, il est constant que la société a mis à la disposition du salarié , des outils de travail, ainsi qu’un véhicule de société tant pour la réalisation de ses missions d’études et de coordination SPS, que pour la réalisation de ses missions d’expertise judiciaire.

Ainsi, la restitution au salarié de l’intégralité de ses honoraires d’expert judiciaire, sans déduction des charges de fonctionnement que cette activité génère, serait à l’origine d’une situation d’enrichissement sans cause.

Compte tenu des éléments produits aux débats, la cour évalue les frais pris en charge par la société pour la réalisation des missions d’expertise judiciaire, à la somme totale de 10 000 euros et rejette la demande pour le surplus.

Il en résulte que la société doit être condamnée à rembourser à M. [Y] la somme de

85 940,93 euros (95 940,93 euros – 10 000,00 euros) au titre des honoraires d’expertises judiciaires irrégulièrement rétrocédés pendant la relation contractuelle.

La société est déboutée de sa demande pour le surplus.

— Sur les demandes accessoires :

Le salarié demande la condamnation de la société à lui rembourser la somme totale de 50 450,96 euros réglée le 29 juillet 2020 en exécution de l’arrêt rendu le 12 mars 2020 par cette cour d’appel.

Au terme des débats, cette condamnation exécutée par le salarié est sans objet, de sorte que la restitution s’impose sans qu’il y ait lieu à la prononcer dans le présent arrêt.

Les dépens de première instance et d’appel, suivant le principal, seront supportés par la société, partie perdante.

L’équité et la situation économique respective des parties justifient qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance et en cause d’appel dans la mesure énoncée au dispositif.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement,

Dans la limite de la dévolution,

INFIRME le jugement du conseil de prud’hommes de Roanne du 17 mai 2018 en ce qu’il a débouté M. [Y] de sa demande de nullité de l’article 4bis de son contrat de travail, en ce qu’il a condamné M. [Y] à payer à la société Oxyria la somme de 24 271,44 euros TTC pour le solde des affaires Mutuelles de l’Est, Lloyd’s de Londres et M. [E], ainsi que sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile et sur les dépens

STATUANT à nouveau sur ces chefs

DÉCLARE illégal l’article 4 bis du contrat de travail liant M. [Y] à la société Oxyria

DÉBOUTE la société Oxyria de sa demande au titre du remboursement des frais et honoraires perçus par M. [Y] pour ses missions d’expertise judiciaire dans les 4 dossiers visés au protocole du 30 juin 2014 et de sa demande en remboursement des frais de sapiteur ;

CONDAMNE la société Oxyria à restituer à M. [Y] la somme de 85 940,93 euros au titre des honoraires d’expertises judiciaires irrégulièrement rétrocédés pendant la relation contractuelle ;

CONDAMNE la société Oxyria à payer à M. [Y] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en cause d’appel ;

CONDAMNE la société Oxyria aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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