Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 31 mars 2011, n° 10/03140

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 1re ch. civ. a, 31 mars 2011, n° 10/03140
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 10/03140
Sur renvoi de : Cour de cassation, 12 avril 2010

Texte intégral

R.G : 10/03140

Décisions

du tribunal de commerce de

Bourg-en-Bresse

Référé du 03 novembre 2008

RG : 08/012564

— arrêt de la Cour d’appel de Lyon – 8e chambre civile -

du 10 mars 2009

RG : 08/08169

— arrêt de la Cour de Cassation du 13 avril 2010

COUR D’APPEL DE LYON

1re chambre civile A

ARRET DU 31 Mars 2011

APPELANTE :

Société CARREFOUR PROXIMITE FRANCE – SAS -

anciennement dénommée PRODIM

XXX

XXX

XXX

représentée par Maître Annick DE FOURCROY, avoué à la Cour

assistée de la SCP BEDNARSKI – CHARLET & ASSOCIES, avocats au barreau de LILLE

INTIMEE :

Société RAPSODIS – SARL -

représentée par son gérant, Monsieur Y X

XXX

01190 PONT-DE-VAUX

représentée par Maître Christian MOREL, avoué à la Cour

assistée de la SCP TEILLOT ET ASSOCIES, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 17 Février 2011

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 17 Février 2011

Date de mise à disposition : 31 Mars 2011

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— Y Z, président

— Christine DEVALETTE, conseiller

— Philippe SEMERIVA, conseiller

assistés pendant les débats de Frédérique JANKOV, greffier

A l’audience, Y Z a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Y Z, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Vu l’ordonnance de référé rendue le 03 novembre 2008 par le Président du tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse déclarant mal fondé l’ensemble des demandes de la société Prodim à l’encontre de la société Rapsodis aux motifs que l’appréciation des agissements reprochés à la société Rapsodis et faits en violation des dispositions du contrat de franchise, ne relève de la compétence du juge des référés et que la preuve d’un dommages imminent ou d’un trouble manifestement illicite n’est pas établie ;

Vu l’arrêt de la cour de cassation en date du 13 avril 2010, cassant, sauf en ce qu’il a déclaré irrecevable la note en délibéré déposée le 26 février 2009, l’arrêt rendu le 10 mars 2009 par cette cour qui avait confirmé la décision du 03 novembre 2008 en retenant qu’il n’y avait pas lieu à référé ;

Vu les conclusions en date du 16 février 2011 de la société Carrefour Proximité France anciennement dénommée Prodim qui soutient la réformation de la décision querellée et qui conclut qu’à la date de saisine du premier juge, les agissements de la société Rapsodis constituaient un trouble manifestement illicite et un dommage imminent, par violation des articles 333 et 334 du contrat de franchise liant les deux sociétés de sorte qu’il convient de:

1 – ordonner à la société Rapsodis, au regard de l’article 8 du contrat de franchise, de portée post contractuelle, de s’abstenir pour l’avenir de toute déclaration publique, quel qu’en soit le support, ou en présence de tiers (à l’exception toutefois à la demande ou en présence des autorités publiques), portant sur le fonctionnement de la franchise et de nature à porter atteinte à l’image de l’enseigne.

2 – donner acte à la société Carrefour Proximité France de ce qu’elle prend connaissance de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Lyon dans l’affaire ayant opposé la société Soval à la société Rapsodis, versé aux débats par cette dernière, et qu’en voie de conséquence, le contrat de franchise liant les parties se trouve donc résilié.

3 – donner acte à la société Carrefour Proximité France de ce qu’elle se réserve de saisir la juridiction du fond pour voir statuer sur sa demande de dommages et intérêts pour le préjudice qui lui a été causé du fait du comportement du dirigeant de la société Rapsodis portant atteinte à son image, en violation de ses obligations contractuelles.

4 – donner acte à la société Carrefour Proximité France de ce qu’elle se réserve la possibilité de publier l’arrêt à intervenir en quelque endroit de son choix afin de faire cesser le trouble manifestement illicite pouvant subsister du fait du maintien sur internet des déclarations litigieuses.

5 – dire que cette insertion pourra se faire aux frais avancés de la société Rapsodis.

condamner la société Rapsodis au paiement de la somme de 10.000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions de la SARL Rapsodis en date du 16 février 2011 qui soutient le mal fondé de toutes les prétentions de la SAS Carrefour Proximité France et qui réclame le paiement de la somme de 5.000 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile aux motifs, d’une part, que la SAS Carrefour Proximité France n’a pas d’intérêt à agir, le contrat de franchise ayant pris fin le 1er octobre 2009, et, d’autre part, que les conditions de l’article 873 du code de procédure civile ne sont pas établies : il n’a ni dommage imminent, ni trouble manifestement illicite, alors que les mesures sollicitées excèdent les pouvoirs conférés au juge des référés.

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 17 février 2011 ;

Les conseils des parties ont donné leurs explications orales à l’audience du 17 février 2011 après le rapport de Monsieur le Président Y Z.

DECISION

Devant le juge des référés, la société Prodim (le franchiseur) a fait assigner la société Rapsodis (le franchisé), aux fins de constater le trouble manifestement illicite constitué par ses agissements en violation des prescriptions des articles 333 et 334 du contrat de franchise, d’ordonner sous astreinte au franchisé de respecter le contrat de franchise dans les conditions prévues dans la sentence arbitrale opposant les parties et, en particulier, les articles 333 et 334 précités et de s’abstenir pour l’avenir de toute déclaration publique, quel qu’en soit le support ou en présence de tiers, portant sur le fonctionnement de la franchise et de nature à porter atteinte à l’image de l’enseigne.

Les faits reprochés concernent une émission télévisée intitulée 'pièces à conviction’ diffusée le 08 octobre 2008 dans laquelle le gérant de la société Rapsodis a émis selon elle, des propos dénigrants, et la société Carrefour Proximité considère que c’est à la date où le premier juge a été saisi que doit s’apprécier l’existence d’un trouble manifestement illicite, seul visé par l’article 873 du code de procédure civile pour lequel il était saisi, hors de toute considération sur une contestation sérieuse.

Elle considère que les propos tenus lors de cette émission, tels que relevés par un huissier, constituent une violation par le franchisé de ses obligations contractuelles à la suite desquelles elle demande qu’il lui soit donné acte qu’elle se réserve de demander au fond la réparation.

L’assignation devant le juge des référés de première instance a été délivrée le 28 octobre 2008.

Et le juge a statué par ordonnance du 03 novembre 2008.

Sur l’intérêt à agir de la société Carrefour Proximité France

Contrairement à ce que soutient la SARL Rapsodis, cette société qui est la même que la société Prodim avec laquelle le contrat de franchise avait été conclu avant d’être résilié est recevable à agir dans la mesure où la personne morale est la même, seul le nom ayant changé ainsi que cela résulte des documents provenant du registre du commerce et des sociétés.

Elle a aussi intérêt à agir dans la mesure où le trouble manifestement illicite dont elle se plaint doit être apprécié au jour où le premier juge statue en référé.

La société Rapsodis n’est donc pas fondée en son argumentation tenant à la résiliation au 1er octobre 2009 de son contrat de franchise, et ce, en toutes ses branches.

Sur l’application de l’article 873 du code de procédure civile alinéa premier

Il convient d’apprécier si les propos tenus par le dirigeant de la société Rapsolis le 08 octobre 2008 constitue un trouble manifestement illicite et si des mesures conservatoires ou de remise en état sont nécessaires pour faire cesser ce trouble ou pour prévenir un dommage imminent qui se produira sûrement si la situation constatée doit se perpétuer.

La société Carrefour Proximité France reproche à la société Rapsodis les faits suivants:

Dans le cadre d’une émission télévisée intitulée 'pièces à conviction’ diffusée sur la chaîne publique FR3 le mercredi 08 octobre 2008 à 20 heures 50, la SARL Rapsodis, par la voie de son dirigeant, Monsieur X, est intervenue pour prétendre, tel que cela sera relaté par constat d’huissier en date du 13 octobre 2008.

— 'les prix d’achat sont imposés par le groupe. Nos prix de vente sont des prix conseilles'

— 'si on calcule tous les frais que l’on a, les frais fixes, les frais de personnel, mêle les cotisations, c’est de la vente à perte…'

— 'le problème c’est que le franchiseur ne joue pas la transparence ; on ne sait pas justement à quel prix il achète ce produit : on a demandé les conditions générales de vente… qui n’existaient pas. Notre franchiseur s’est refusé à nous les transmettre…'

Le tout en faisant usage du logiciel mis à sa disposition par le franchiseur :

— 'et pour le prouver, direction le petit bureau du patron sur l’ordinateur relié directement à la centrale d’achat du groupe…'

— 'notre prix d’achat est à 11,91 et on vend 15,84. Ca nous fait une marge de 0,32 % marge brut'.

— 'à cet instant du reportage, je note qu’apparaît l’image d’un écran d’ordinateur sur lequel je peux lire notamment les indications suivantes 'gestion des prix’ et TAREP: 15,84".

Et alors même qu’à plusieurs reprises, l’enseigne 'SHOPI’ sous laquelle est exploité son fonds apparaît, permettant ainsi de faire directement le lien entre cet exploitant et le réseau concerné.

'Je note que pendant cette présentation, plusieurs enseignes de supermarchés sont présentées à l’écran, dont celle de SHOPI (au moins trois fois)'.

Il est, par ailleurs, établi que cette émission a été enregistrée et mise en ligne sur le site du SEFAG.

Cependant la société Carrefour ne prouve pas, par les pièces qu’elle donne au débat actuel, face aux deux attestations que la société Rapsodis apporte, celle de C D, administrateur du SEFAG et celle d’Anaïs Guiraud, que cette émission est encore aujourd’hui visible alors qu’il est vraisemblable que l’émission ait été retirée en avril 2009 du site comme en témoigne C D.

Il ressort de ces éléments de fait qu’au jour où le premier juge a été saisi et a statué, la société Rapsodis a manifestement violé les obligations de son contrat de franchise qui n’était pas résilié et qui lui interdisait de porter à la connaissance des tiers des éléments de la franchise, comme elle l’a fait, dans l’émission du 08 octobre 2010 en se servant des écrans de la centrale d’achat du groupe et des indications y figurant.

Contrairement à ce que soutient la société Rapsodis, et conformément à la thèse de la société Carrefour, il y a bien une atteinte au devoir de confidentialité et une atteinte à l’obligation de loyauté du franchisé, dans l’attitude, le comportement, les gestes, et les déclarations du dirigeant de la SARL Rapsodis, rapportés dans l’émission du 08 octobre 2008. Le trouble manifestement illicite existait et a perduré jusqu’en avril 2009, caractérisant, par la même , le dommage imminent que la société Carrefour voulait, en agissant en justice, éviter.

Son action était donc fondée en fait et en droit.

Quant aux mesures à prendre aujourd’hui, la cour constate que ce dommage n’existe plus et qu’aucune mesure ne doit, aujourd’hui être ordonnée en application de l’article 873 du code de procédure civile.

Il n’y a pas, non plus lieu, à publication de l’arrêt.

En revanche l’équité commande d’allouer à la société Carrefour la somme de 3.000 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile et au détriment de la SARL Rapsodis.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant en référé :

— réforme l’ordonnance du 03 novembre 2008 ;

— statuant à nouveau ;

— dit que l’action de la société Prodim devenue Carrefour Proximité France était au jour où le premier juge a statué recevable et fondée ;

— constate, en effet, que la SARL Rapsodis avait le 08 octobre 2008 créé un trouble manifestement illicite en ne respectant pas ses obligations de franchisé et que la société Carrefour était fondée à réclamer la cessation d’un dommage imminent en sollicitant des mesures d’interdiction ;

— constate qu’aujourd’hui, ce trouble manifeste et illicite et le dommage n’existent plus;

— dit n’y avoir lieu à faire droit aux mesures sollicitées par la société Carrefour, et aux donnés acte qu’elle sollicite ;

— condamne la SARL Rapsodis à verser à la SAC Carrefour Proximité France la somme de TROIS MILLE EUROS (3.000 EUROS) en vertu de l’article 700 du code de procédure civile;

— condamne la SARL Rapsodis aux dépens de première instance et aux dépens d’appel, y compris ceux de l’arrêt cassé ;

— autorisé Maître de Fourcroy, avoué, à recouvrer ces derniers aux formes et conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Joëlle POITOUX Y Z

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