Cour d'appel de Metz, 3ème chambre, 7 juillet 2020, n° 16/03603

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Metz, 3e ch., 7 juill. 2020, n° 16/03603
Juridiction : Cour d'appel de Metz
Numéro(s) : 16/03603
Décision précédente : Tribunal d'instance de Saint-Avold, 13 septembre 2016, N° 16/00025
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 16/03603 – N° Portalis DBVS-V-B7A-EJA4

Minute n° 20/00282

S.A.R.L. MESNA

C/

X

Jugement Au fond, origine Tribunal d’Instance de SAINT-AVOLD, décision attaquée en date du 14

Septembre 2016, enregistrée sous le n° 16/00025

COUR D’APPEL DE METZ

3e CHAMBRE – TI

ARRÊT DU 07 JUILLET 2020

APPELANTE :

SARL MESNA Représentée par son représentant légal

[…]

[…]

Représentée par Me Philippe KAZMIERCZAK, avocat au barreau de METZ

INTIMÉ :

Monsieur D X

[…]

[…]

Représenté par Me Yves ROULLEAUX, avocat au barreau de METZ

A la date du 5 mai 2020, l’affaire a été fixée par le président de la chambre en application des dispositions de l’article 8 de l’ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020, les parties ayant expressément accepté le recours à ces dispositions par formulaire joint au dossier.

L’affaire a été mise en délibéré au 7 juillet 2020 par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, les parties en ayant été avisées.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Madame Sandrine GUIOT-MLYNARCZYK, Président de chambre

ASSESSEURS : M. Eric LAMBERT, Conseiller

M. Olivier MICHEL, Conseiller

GREFFIER présent au prononcé du délibéré : Nejoua TRAD-KHODJA

Arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE':

Suivant facture datée du 20 mai 2008, la Sarl Mesna a réalisé des travaux de ravalement des façades de l’immeuble situé […] à Carling, propriété de M. D X, pour un montant de 10.550 euros comprenant le montage et le démontage de l’échafaudage, le lavage au karcher et l’application d’un fixateur et d’un enduit traditionnel de finition talochée.

Par acte introductif d’instance enregistrée au greffe le 12 janvier 2016, M. D X a fait citer la Sarl Mesna devant le tribunal d’instance de Saint-Avold aux fins de l’entendre condamner à reprendre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, les malfaçons affectant les travaux, telles qu’elles résultent du procès-verbal de constat dressé par Maître Y, huissier de justice. A l’audience du 25 mai 2016, indiquant que la défenderesse, malgré ses engagements, n’est pas intervenue pour remédier aux désordres, il a sollicité sa condamnation à lui payer la somme de 10.000,00 euros à titre de dommages-intérêts, outre celle de 515,20 euros correspondant au coût du constat d’huissier et des frais de photocopies qu’il a engagés.

La Sarl Mesna, mettant en cause la nature du crépi brut appliqué, qui ne résiste pas aux intempéries, a conclu au rejet des demandes.

Par jugement en date du 14 septembre 2016, le tribunal a condamné la Sarl Mesna à payer à M. E X la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts, majorée des intérêts au taux légal ainsi que celle de 450 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Le premier juge a relevé qu’il résulte du procès-verbal de constat dressé par Maître Y, huissier de justice, le 30 juin 2015, que les façades ravalées par la Sarl Mesna présentent de nombreux désordres qu’il a précisément décrits, essentiellement caractérisés par la présence de fissures et de traces grossières de reprise de crépi, qui n’apparaissent pas cependant de nature à porter atteinte à la solidité de l’immeuble. Il a ajouté que la Sarl Mesna, qui n’a pas contesté la réalité de ces malfaçons qu’elle impute à la nature du crépi, était tenue, en sa qualité de professionnelle et en vertu de l’article 1147 du code civil, de s’assurer de l’adéquation du matériau utilisé à l’opération de ravalement et qu’elle engage sa responsabilité contractuelle à l’égard du maître de l’ouvrage du fait des désordres dus aux défectuosité du matériau employé dès lors qu’elle ne rapporte pas la preuve d’une cause étrangère, précisant qu’elle ne justifie pas au surplus avoir attiré l’attention de M. X concernant la prétendue fragilité du revêtement mural face aux intempéries et que l’importance des désordres justifie une reprise intégrale des travaux de ravalement.

Suivant déclaration reçue au greffe le 26 septembre 2016, la Sarl Mesna a relevé appel total de ce jugement.

Par ordonnance en date du 8 mars 2018, le conseiller de la mise en état, relevant que les conclusions du rapport d’expertise déposé le 4 septembre 2016 par la société Saretec à la demande de la société Mesna et le constat sur site réalisé les 30 janvier 2017 et 23 février 2017 par M. A, expert mandaté par M. X, sont contradictoires quant à l’origine des désordres constatés dont dépend la solution du litige, a ordonné une mesure d’expertise des travaux de ravalement des façades et de la clôture latérale gauche de l’immeuble de M. X, et désigné pour y procéder M. B avec mission de vérifier les travaux effectués par la Sarl Mesna, leur coût, leur mise en 'uvre et leur conformité aux règles de l’art, dire si des travaux préalables au ravalement auraient dû être réalisés, en préciser la nature, décrire toutes malfaçons, désordres, non façons et vices affectant l’immeuble, déterminer leurs conséquences, se prononcer notamment sur l’existence de

remontées capillaires, décrire et chiffrer les travaux de réfection nécessaires, et chiffrer tout préjudice en découlant.

M. B a déposé son rapport le 4 mars 2019.

Par conclusions du 7 février 2020, la Sarl Mesna a conclu à l’infirmation du jugement entrepris et au rejet de l’ensemble des demandes de M. X, subsidiairement à la limitation de l’indemnisation réclamée à la perte d’une chance et sa réduction à de plus justes proportions. Elle a sollicité la condamnation de M. X aux dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La Sarl Mesna expose que contrairement à ce qu’a soutenu M. X en première instance, elle a effectué une déclaration de sinistre, à titre conservatoire, au titre de la garantie décennale souscrite auprès de son assureur, lequel a mandaté la société d’expertise Saretec qui a réalisé ses opérations d’expertise le 1er septembre 2016 en présence du maître de l’ouvrage, et qu’il résulte du rapport déposé par cet expert que les travaux qu’elle a réalisés sont totalement étrangers aux désordres constatés, lesquels proviennent de remontées capillaires sans doute dues aux fondations de la construction elle-même, les microfissures constatées résultant pour leur part de mouvements structurels normaux et ne causant qu’une gêne esthétique.

Elle conteste formellement les conclusions de l’expert judiciaire, contredites par celles du rapport Saretec et les photographies actuelles de l’état du chantier qui ne font apparaître que quelques microfissures, et fait valoir qu’en tout état de cause, le préjudice résultant du manquement au devoir de conseil relevé par M. B s’analyse comme une perte de chance de contracter à des conditions différentes ou ne pas contracter. Elle précise à cet égard que M. X, dans le souci d’effectuer les travaux à un moindre coût, a souhaité que soit uniquement appliquée une couche d’enduit taloché en embellissement des façades, raison pour laquelle à sa demande, la solution de recouvrement des enduits existants avec un enduit minéral tramé a été retenue pour un coût de 10.550 euros, sans commune mesure avec le montant de 37.278,95 euros réclamé par M. X et celui de 35.006,24 euros chiffré par l’expert. Elle ajoute qu’il n’y a guère de doute que M. X n’aurait pas contracté à ce prix, de sorte que son préjudice est inexistant et qu’il ne saurait, à tout le moins, excéder 10 % du coût des travaux de remise en état.

La Sarl Mesna soutient que le coût de réfection a été largement surévalué par l’expert judiciaire alors, d’une part, que les murets de soutènement n’ont pas été traités par ses soins mais par M. X lui-même avec le reste de l’enduit utilisé pour les façades et qu’ils n’ont fait l’objet d’aucune facturation, d’autre part, que le devis des établissements Plâtrerie F G, non spécialisée dans les travaux de façade, est manifestement inadéquat et disproportionné comme représentant trois fois le montant initial des travaux qu’elle a engagés. Elle indique produire un devis comparatif établi par une entreprise de ravalement de façade chiffrant le montant des travaux à 21.752,50 euros, sur lequel il conviendra le cas échéant, d’appliquer le pourcentage de perte de chance.

M. X a conclu, par dernières écritures en date du 5 mars 2020, à la confirmation du jugement entrepris en son principe mais à son infirmation quant au montant des dommages-intérêts alloués, demandant à la cour, au vu du rapport d’expertise de M. B, de rejeter les moyens et prétentions de la Sarl Mesna, dire n’y avoir lieu de limiter son préjudice à une perte de chance et de réduire son indemnisation et de condamner la Sarl Mesna à lui payer, au titre des travaux de reprise des désordres, la somme de 37.278,95 euros, subsidiairement celle de 35.006,24 euros, valeur septembre 2018 avec indexation sur l’indice BT01 du coût de la construction, et au titre de son préjudice moral, la somme de 4000 euros, le tout avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir.

Il a sollicité en outre, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, les sommes de 450 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel, ainsi que la condamnation de l’appelante aux entiers dépens de première instance et d’appel, comprenant les frais d’expertise.

M. X expose que les travaux de ravalement de façades ne relèvent pas de la garantie décennale mais de la seule responsabilité contractuelle de droit commun édictée par l’article 1147 du code civil. Il précise qu’au titre du contrat d’entreprise les liant, la Sarl Mesna était tenue d’une obligation de résultat qui lui imposait de livrer un ouvrage exempt de vices et dont elle ne peut se dégager qu’en rapportant la preuve d’une cause étrangère ou un cas de force majeure et qu’elle doit répondre de l’ensemble des désordres, y compris ceux qui ne relèveraient que du domaine purement esthétique. Il fait valoir que les conclusions de l’expert Saretec qui s’est contenté de relever une fissuration de l’enduit des murs d’enceinte et des traces d’humidité au niveau du pignon droit, alors que les enduits des façades réalisés par la Sarl Mesna présentent des fissures généralisées, sont contredites tant par celles de M. C qu’il avait mandaté que par celles de l’expert judiciaire, M. B, qui a conclu que l’entreprise, en non-conformité avec les normes en vigueur et les règles de l’art, a mis en 'uvre un produit d’imperméabilisation qui n’était pas approprié pour une application sur des supports anciens peu résistants, exclus par le fabricant du produit dans sa notice technique et dont la mise en 'uvre a provoqué au surplus une saturation d’humidité dans les murs supports qui ne pouvait plus s’échapper au contact de l’air ambiant.

L’intimé conteste ne pouvoir prétendre qu’à l’indemnisation d’une perte de change, ainsi que le soutient la Sarl Mesna, alors que le manquement à l’obligation de conseil est sanctionné au titre de la responsabilité contractuelle de droit commun et que ce manquement est en lui-même constitutif de la faute, de la même façon que le mauvais choix des matériaux, l’utilisation de produits inadaptés, l’insuffisance des travaux préparatoires notamment du support et/ou encore la pose d’un matériau non-conforme. Il ajoute que conformément à la jurisprudence constante, en sa qualité de maître de l’ouvrage, il doit être indemnisé du préjudice qu’il subit à raison des désordres affectant l’ouvrage, l’indemnisation, qui doit le replacer dans l’état où il se serait trouvé en l’absence de désordres, devant comprendre l’ensemble des coûts nécessaires à la réalisation des travaux de reprise.

M. X, qui conteste par ailleurs avoir exprimé le souhait de réaliser les travaux à un moindre coût, ce que la Sarl Mesna ne démontre pas, rappelle que l’expert judiciaire a chiffré le coût de reprise sur la base du devis de l’Eurl Plâtrerie G qu’il a vérifié et dont il a indiqué qu’il est tout à fait conforme aux travaux nécessaires et obligatoires à mettre en 'uvre pour remédier et mettre fin aux désordres contradictoirement constatés, que la somme de 37.278,95 euros comprend la reprise des enduits sur les murets que la société Mesna ne justifie pas ne pas avoir traités, que le devis produit par la société Mesna, non détaillé, doit être écarté et qu’enfin, le litige a été source pour lui d’un préjudice moral, relevé par l’expert B.

MOTIFS DE LA DECISION :

Vu les dernières conclusions déposées par la Sarl Mesna le 7 février 2020 et par M. X le 5 mars 2020, auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens ;

Vu l’ordonnance de clôture en date du 12 mars 2020 ;

Sur la demande principale

Il est constant que la Sarl Mesna a été chargée par M. X des travaux de réfection des enduits de façades de son pavillon situé à Carling, […], et que ces travaux qui n’ont donné lieu à aucun devis, ont été facturés le 20 mai 2008 au prix de 10.550 euros TTC, comprenant le montage et le démontage de l’échafaudage, un lavage haute pression, l’application d’un fixateur et l’application d’un enduit traditionnel de finition taloché, sans autres précisions concernant la quantité et la nature des matériaux utilisés.

Des micro-fissures sont rapidement apparues, auxquelles les travaux de reprise effectués par la Sarl Mesna, que l’expert judiciaire a qualifié de grossiers, n’ont pas remédié.

L’enduit mis en 'uvre par la Sarl Mesna, qui, appliqué directement sur l’enduit existant sans reprise du support, n’a pas pour objet d’assurer l’étanchéité des murs de façade même si sa composition lui confère un rôle d’imperméabilisation, ne constitue pas un élément constitutif de l’ouvrage ni un élément d’équipement,

susceptible d’ouvrir droit à la garantie décennale instituée par l’article 1792 du code civil en raison de la gravité des désordres, de sorte que seule la responsabilité contractuelle, édictée par l’article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, a vocation à s’appliquer.

En sa qualité de professionnelle du bâtiment, l’appelante tenue d’une obligation de résultat, devait fournir à M. X un ouvrage exempt de tout vice et conforme aux règles de l’art. Elle ne peut se décharger de sa responsabilité qu’en rapportant la preuve que les désordres sont dus à une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, fait d’un tiers ou du maître de l’ouvrage, ou d’un cas de force majeure.

Or, il résulte du rapport d’expertise judiciaire déposé le 4 mars 2009 par M. B, que l’ensemble des façades traitées par la Sarl Mesna présente de multiples microfissures et traces d’humidité trouvant leur origine dans l’absence d’adhérence de l’enduit appliqué sur l’ancien enduit composé de matériaux hétéroclites. L’expert précise que les sondages qu’il a effectués au droit des microfissures sur la façade droite abritée qui ne reçoit que très rarement de l’eau de pluie, ainsi que sur le pignon droit orienté nord-est, ont révélé que le support est saturé d’humidité du fait de l’application de l’enduit imperméabilisant qui ne permet plus sa respiration, l’humidité comprise dans les murs les faisant gonfler de façon millimétrique mais suffisante pour décoller l’enduit mis en 'uvre par l’entreprise Mesna et le fissurer.

M. B explique que le produit Parmurex utilisé par la Sarl Mesna, sous-enduit et enduit monocouche d’imperméabilisation des parois verticales extérieures et intérieures, était totalement inapproprié au support existant, ainsi que le stipule la fiche technique du fabricant qui précise que sont exclus les supports anciens peu résistants et les supports exposés horizontaux et inclinés de plus de 10° par rapport à la verticale. Il ajoute que si des remontées d’humidité par capillarité existaient assurément avant l’application de l’enduit par la société Mesna, comme dans toutes les maisons anciennes construites avec des matériaux hétéroclites hourdés à la chaux ou à la terre, directement posés sur le sol argilo-calcaire à cet endroit, cette humidité s’échappait par l’enduit existant à la chaux ou mélange de chaux au contact de l’air extérieur, et que l’enduit d’imperméabilisation mis en oeuvre par la société Mesna a emprisonné les remontées de cette humidité qui se situent jusqu’à une hauteur d’environ 1,20 à 1,50 mètre du sol et ne feront que croître s’il reste en place.

L’expert, qui précise que l’enduit finira par ses décoller complètement en ruinant les façades, étant précisé que la façade droite jouxte un parking public et qu’il existe un risque de chute de matériaux sur domaine public, relève que la Sarl Mesna a manqué à son devoir de conseil en proposant et en mettant en 'uvre un enduit inadapté. Il fait également état de l’absence de joint de dilatation qui aurait dû être mis en place à la jonction du pignon avec le mur de soutènement, ces deux parties ne réagissant pas de la même manière aux aléas climatiques.

Au vu de ces constatations et conclusions parfaitement claires et circonstanciées, l’appelante ne peut opposer l’expertise Saretec, non contradictoire, qui se borne à constater l’existence de microfissures ainsi que des traces de remontées capillaires en préconisant que soient effectuées des investigations pour en déterminer l’origine.

La Sarl Mesna, à qui il appartenait de faire toutes réserves si elle estimait ne pas être en mesure de réaliser sa prestation dans les meilleures conditions, ne peut prétendre être déchargée de sa responsabilité au motif de la mauvaise qualité du support qu’elle a accepté, alors au surplus qu’elle ne démontre pas que M. X qu’elle aurait averti du problème, aurait fait le choix de l’enduit litigieux pour des raisons d’économie.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a déclaré la Sarl Mesna, qui a appliqué sur les façades de l’immeuble un enduit non approprié au support ancien peu résistant malgré les préconisations du fabricant, entièrement responsable des désordres et tenue à indemniser le maître de l’ouvrage des conséquences dommageables de l’exécution défectueuse des travaux de ravalement des façades de l’immeuble.

Concernant les murs de clôture, qui constituent des murs de soutènement et présentent les mêmes désordres dus au décollement de l’enduit non adapté au support existant qui empêche toute migration d’humidité ainsi que spécifié dans la notice technique du fabricant, la Sarl Mesna indique que l’enduit a été posé par M. X

lui-même avec les restes du matériau. Si celui-ci le conteste, il résulte de la facture éditée par la Sarl Mesna qu’elle a réalisé les travaux de ravalement des façades de l’immeuble pour le prix de 10.550 euros, sans aucune mention des murs de clôture, de sorte qu’il y a lieu d’exclure de l’obligation de réparation les désordres affectant lesdits murs.

S’agissant de la réparation du dommage, contrairement à ce que soutient la Sarl Mesna, le préjudice subi par M. X du fait des désordres affectant les enduits non appropriés qu’elle a appliqués, ne peut en aucun cas s’analyser en la perte d’une chance de ne pas contracter ou de contracter selon des modalités différentes. Il sera rappelé que l’indemnisation doit permettre la réparation intégrale du dommage subi par le maître de l’ouvrage, qui est en droit d’exiger de l’entreprise un ouvrage exempt de toute malfaçon et qui doit être replacé dans la situation où il se serait trouvé si les désordres ne s’étaient pas produits. La charge des améliorations apportées par les travaux de réfection pèse sur le constructeur responsable si elles sont indispensables à la réparation des désordres et la suppression du dommage, quand bien même les travaux complémentaires sortiraient du champ contractuel initial.

En l’espèce, le devis produit par M. X établi par l’Eurl Plâtrerie G le 25 septembre 2018 chiffre le coût des travaux de ravalement des façades de l’immeuble, à l’exclusion des murs de soutènement, à la somme TTC de 35.006,24 euros, comprenant, outre le montage et le démontage d’un échafaudage, pour chaque façade : les travaux de dépiquage partiel des enduits creux, les travaux de tronçonnage et décrépissage du soubassement, la fourniture et l’application d’un nettoyant alcalin HP Clean de Labo France, le nettoyage des supports au moyen d’un procédé haute pression, la fourniture et la mise en oeuvre d’un enduit hydrofuge à base de ciment et sable en partie basse soubassement, la fourniture et la mise en 'uvre d’un enduit imperméabilisant aux droits des enduits dépiqués, la fourniture et la pose de baguettes d’angle et profilés de raccord aux huisseries en toile de verre, la fourniture et la pose d’un tissu d’armature en fibre de verre entre les deux couches d’enduit fibré, la fourniture et la mise en 'uvre d’un produit d’étanchéité en soubassement, la fourniture et l’application d’un primaire d’accrochage, la fourniture et la mise en 'uvre d’un crépi minéral à base de résine silicone pour l’extérieur, hydrofuge, protection contre la pluie battante.

La Sarl Mesna qui estime que ce devis est totalement disproportionné au regard du prix réglé par M. X, se prévaut devant la cour d’un devis établi par la Sarl Se Gunay, d’un montant TTC de 21.752,50 euros comprenant la mise en place d’un échafaudage et la pose de protections au sol (2.275 euros), ainsi que pour une surface totale de 350 m² le piquage complet des enduits existants et le nettoyage haute pression du support (5.250 euros), l’application d’une sous-couche d’enduit à la chaux Renopass (5.250 euros) et l’application d’une couche de finition d’enduit à la chaux Renopass, finition talochée (7.000 euros).

S’il apparaît que le devis de l’entreprise G prévoit d’autres prestations que celles réalisées par la Sarl Mesna pour le prix de 10.550 euros, valeur mai 2008, il sera toutefois observé que l’appelante ne précise pas en quoi ces prestations excéderaient la seule réparation des désordres et de leurs conséquences, alors que l’expert judiciaire indique, en réponse au dire qu’elle a déposé suite au pré-rapport, que l’offre G, qui correspond à une reprise totale des enduits sur façades, est tout à fait conforme aux travaux nécessaires et obligatoires à mettre en 'uvre pour remédier et mettre fin aux désordres contradictoirement constatés, les prix pratiqués étant ceux de la profession sur le secteur. La Sarl Mesna ne produit par ailleurs aucun avis technique susceptible de démontrer que les prestations prévues au devis de la société Se Gunay, qu’elle n’a pas soumis à l’examen de l’expert judiciaire à l’appui de son dire, sont de nature à permettre une réparation intégrale des désordres dont elle est totalement responsable du fait de ses manquements fautifs.

Il y a lieu en conséquence d’infirmer le jugement et de condamner la Sarl Mesna à payer à M. X la somme de 35.006,24 euros, valeur septembre 2018, avec indexation sur l’indice BT01 du coût de la construction.

En revanche, M. X ne caractérise en aucune manière le préjudice moral dont il fait état de sorte qu’il sera débouté de sa demande de dommages-intérêts de ce chef.

Sur les demandes accessoires

La Sarl Mesna qui succombe en son appel sera déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et supportera les entiers dépens de première instance et d’appel.

L’équité commande par ailleurs qu’elle soit condamnée à verser à M. X, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, une indemnité de 1.200 euros du chef des frais irrépétibles exposés en appel, qui s’ajoutera à celle allouée par le premier juge.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement rendu le 14 septembre 2016 par le tribunal d’instance de Saint-Avold en ce qu’il a déclaré la Sarl Mesna responsable des désordres affectant les enduits de façade de l’immeuble situé et l’a condamnée à payer à M. D X la somme de 450 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;

L’INFIRME pour le surplus et statuant à nouveau,

CONDAMNE la Sarl Mesna à payer à M. X la somme de 35.000,24 euros, valeur septembre 2018, avec indexation sur l’indice BT01 du coût de la construction ;

Y ajoutant,

DEBOUTE M. D X de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral ;

CONDAMNE la Sarl Mesna à payer à M. X la somme de 1.200 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la Sarl Mesna aux dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de chambre à la Cour d’Appel de METZ et par Madame TRAD-KHODJA, Greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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