Cour d'appel de Metz, 3e chambre, 14 décembre 2023, n° 22/01890

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Sur la décision

Référence :
CA Metz, 3e ch., 14 déc. 2023, n° 22/01890
Juridiction : Cour d'appel de Metz
Numéro(s) : 22/01890
Importance : Inédit
Dispositif : Autre
Date de dernière mise à jour : 24 décembre 2023
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Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 22/01890 – N° Portalis DBVS-V-B7G-FZFY

Minute n° 23/00326

[P]

C/

S.A. HLM BATIGERE GRAND EST

Jugement Au fond, origine Juge des contentieux de la protection de METZ, décision attaquée en date du 01 Juillet 2022, enregistrée sous le n° 11-21-1261

COUR D’APPEL DE METZ

3ème CHAMBRE – TI

ARRÊT DU 14 DECEMBRE 2023

APPELANTE :

Madame [V] [P] née [Y].

[Adresse 2]

Représentée par Me Philippe KAZMIERCZAK, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/4132 du 27/09/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de METZ)

INTIMÉE :

S.A. D’HLM BATIGERE GRAND EST

[Adresse 1]

Représentée par Me Séréna KASTLER, avocat au barreau de THIONVILLE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Octobre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés devant Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries.

A l’issue des débats, les parties ont été informées que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 14 Décembre 2023, en application du deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

PRÉSIDENT : Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre

ASSESSEURS : M. MICHEL, Conseiller

M. KOEHL, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme Hélène BAJEUX, Greffier

ARRÊT :

Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Mme Hélène BAJEUX, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE':

La SA D’HLM Batigère Grand Est a consenti un bail verbal à Mme [V] [Y] épouse [P] portant sur un appartement et un garage situés à Metz 5 rue de la Patrotte.

Par acte d’huissier du 29 novembre 2021, la SA D’HLM Batigère Grand Est a fait assigner Mme [Y] devant le juge des contentieux de la protection de Metz aux fins de prononcer la résiliation du bail compte tenu des manquements grave et répétés de la locataire, ordonner son expulsion et la condamner à lui payer la somme de 980,88 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté au 5 octobre 2021, une indemnité d’occupation de 568,80 euros par mois jusqu’à libération effective des lieux avec revalorisation selon la règlementation propre aux loyers d’HLM devenues ESH et une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [Y] s’est opposée aux demandes et a demandé au juge de lui accorder les plus larges délais de paiement et l’aide juridictionnelle provisoire, ordonner à la SA D’HLM Batigère Grand Est de lui permettre de jouir sereinement de son logement compte tenu du comportement du locataire du dessus M. [X] et l’enjoindre de justifier des démarches réalisées vis-à-vis de celui-ci.

Par jugement du 1er juillet 2022, le juge des contentieux de la protection de Metz a :

— déclaré l’action recevable

— prononcé la résiliation du contrat de bail passé entre les parties et portant sur l’appartement et le garage sis [Adresse 2] à [Localité 3] à compter du jugement

— ordonné à Mme [Y] de libérer les locaux de sa personne, de ses biens et de tous occupants de son chef, à défaut autorisé son expulsion tant de sa personne, de ses biens, que de tous occupants de son chef, de l’appartement et du garage et ce, au besoin avec le concours de la force publique et l’assistance d’un serrurier

— condamné Mme [Y] à payer à la SA D’HLM Batigère Grand Est une indemnité d’occupation mensuelle de 568,80 euros à compter du jugement et jusqu’à la libération effective définitive des lieux et dit que cette indemnité est revalorisée selon la réglementation propre aux loyers d’HLM devenues ESH

— condamné Mme [Y] à payer à la SA D’HLM Batigère Grand Est la somme de 1.429,34 euros correspondant aux loyers et charges arrêtés au 3 mai 2022, avec intérêts au taux légal à compter du 29 novembre 2021 sur 980,88 euros et à compter du 5 mai 2022 sur le solde

— débouté Mme [Y] de sa demande en paiement et d’aide juridictionnelle provisoire

— débouté les parties de toute autre demande

— condamné Mme [Y] à payer à la SA D’HLM Batigère Grand Est la somme de 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par déclaration d’appel déposée au greffe de la cour le 22 juillet 2022, Mme [Y] a interjeté appel du jugement en toutes ses dispositions sauf celles ayant débouté la SA D’HLM Batigère de ses autres demandes.

Aux termes de ses dernières conclusions du 24 octobre 2022, l’appelante demande à la cour d’infirmer le jugement et de :

— dire irrecevables, en tous les cas mal fondées, les demandes de la SA D’HLM Batigère Grand Est et les rejeter

— lui accorder l’aide juridictionnelle provisoire pour la procédure de première instance

— condamner la SA D’HLM Batigère Grand Est aux entiers dépens de première instance et d’appel

— subsidiairement, lui accorder les plus larges délais de paiement.

Sur l’irrecevabilité des demandes, elle expose que la SA D’HLM Batigère Grand Est ne justifie pas avoir régulièrement procédé à la saisine de la CCAPEX et à la notification de l’assignation au préfet en violation de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, de sorte que la demande est irrecevable.

Subsidiairement, elle soutient qu’il n’est pas justifié de manquements suffisamment graves de sa part, que l’intimée n’établit pas la dette locative réclamée, qu’en tout état de cause l’existence d’une dette de 1.429,34 euros ne peut justifier la résiliation du bail alors qu’elle rencontrait des difficultés professionnelles et familiales, qu’elle a subi un trouble de jouissance au regard du comportement intolérable d’un voisin et que la bailleresse doit justifier des diligences entreprises pour y mettre fin.

Plus subsidiairement, elle sollicite les plus larges délais de paiement et indique qu’elle a retrouvé un emploi et paye régulièrement ses loyers, ajoutant que que sa demande d’aide juridictionnelle provisoire a été rejetée à tort.

Aux termes de ses dernières conclusions du 23 janvier 2023, la SA D’HLM Batigère Grand Est demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et condamner Mme [Y] au paiement de la somme de 900 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens.

Sur la recevabilité de la procédure, elle expose que le premier juge a procédé aux vérifications nécessaires et indique produire la saisine CCAPEX et la notification à la préfecture précisant pour les locataires bénéficiaires de l’APL la saisine se fait auprès de la CAF.

Sur les délais de paiement, elle soutient que la dette continue de s’accroître puisque l’appelante n’a pas repris le paiement des loyers et n’a procédé à aucun paiement depuis le 5 mai 2022 alors qu’elle précise avoir retrouvé un emploi, qu’elle est de mauvaise foi et que l’arriéré locatif s’élève à 4.613,49 euros au 2 janvier 2023. Elle ajoute que l’appelante a quitté les lieux le 3 octobre 2022 et signé un nouveau bail avec un autre bailleur le 30 août 2022 au vu des éléments indiqués sur le site de la CAF.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 octobre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la recevabilité des demandes

Selon l’article 24 II de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, dans sa version applicable au litige, les bailleurs personnes morales autres qu’une société civile constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu’au quatrième degré inclus ne peuvent faire délivrer, sous peine d’irrecevabilité de la demande, une assignation aux fins de constat de résiliation du bail avant l’expiration d’un délai de deux mois suivant la saisine de la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives prévue à l’article 7-2 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990. Cette saisine est réputée constituée lorsque persiste une situation d’impayés, préalablement signalée dans les conditions réglementaires aux organismes payeurs des aides au logement en vue d’assurer le maintien du versement des aides mentionnées à l’article L. 351-2 du code de la construction et de l’habitation et aux articles L. 542-1 et L. 831-1 du code de la sécurité sociale. Cette saisine s’effectue par voie électronique par l’intermédiaire du système d’information prévu au dernier alinéa de l’article 7-2 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990.

En vertu de l’article 24 III de la loi du 6 juillet 1989, à peine d’irrecevabilité de la demande, l’assignation aux fins de constat de résiliation est notifiée à la diligence de l’huissier de justice au représentant de l’Etat dans le département au moins deux mois avant l’audience, afin qu’il saisisse l’organisme compétent désigné par le plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées. Selon l’article 24 IV de la loi du 6 juillet 1989, les II et III sont également applicables aux assignations tendant au prononcé de la résiliation du bail lorsqu’elle est motivée par l’existence d’une dette locative du preneur.

En l’espèce, la SA D’HLM Batigère Grand Est justifie avoir signalé à la CAF de la Moselle, qui est l’organisme payeur des aides au logement, la situation d’impayé de Mme [Y] par courrier recommandé avec accusé de réception le 5 août 2021, soit plus de deux mois avant la délivrance de l’assignation du 29 novembre 2021 (pièce 1). La situation d’impayé ayant persisté depuis le signalement effectué à la CAF, la saisine de la CCAPEX est réputée constituée conformément aux dispositions de l’article 24 II de la loi du 6 juillet 1989. Par ailleurs, la SA D’HLM BATIGERE établit avoir régulièrement notifié l’assignation à M. le Préfet de la Moselle par voie électronique le 30 novembre 2021 (pièce n°2), soit plus de deux mois avant la première audience.

Il s’ensuit que la demande en résiliation du bail est régulière et recevable, le jugement étant confirmé.

Sur la résiliation du bail

Selon les articles 1728 du code civil et 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est tenu de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus. Selon l’article 1741 du code civil, le contrat de location se résout par le défaut respectif du bailleur et du preneur de remplir leurs engagements. Par ailleurs, il résulte de l’article 1224 du code civil que la résolution résulte, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.

En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats, notamment des relevés de compte produits par le bailleur, que l’appelante ne s’est plus acquittée régulièrement de ses loyers depuis janvier 2019 et que sa dette locative n’a cessé d’augmenter pour s’élever à la somme de 3.476,07 euros selon le décompte arrêté au 6 avril 2023 (honoraires d’avocats et frais de procédure d’huissier déduits). Il résulte du jugement du 18 décembre 2020 rendu par le tribunal judicaire de Metz que l’appelante a fait l’objet d’une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire à l’issue de laquelle sa dette locative à l’égard de l’intimée d’un montant de 5.075,71 euros a été effacée (pièce 6), de sorte qu’il est démontré qu’elle est en situation d’impayé depuis de nombreuses années. Elle ne justifie pas avoir réglé d’autres sommes que celles figurant sur le décompte de l’intimée et ne peut valablement soutenir qu’il n’est pas justifié du montant du loyer lequel est fixé par le contrat de bail. Enfin, si Mme [Y] soutient avoir subi des troubles du voisinage, elle n’en justifie pas et l’éventuel trouble subi n’est pas de nature à la dispenser de respecter ses obligations contractuelles et légales de paiement du loyer.

En conséquence, c’est à juste titre et par des motifs pertinents que la cour adopte, que le premier juge a considéré que le manquement réitéré et prolongé de Mme [Y] à son obligation légale et contractuelle de régler son loyer à terme échu constitue un motif suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de bail, le jugement étant confirmé sur la résiliation du bail et l’expulsion de la locataire.

Sur l’arriéré locatif

En application de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est tenu de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.

En l’espèce, il est relevé que l’intimée, qui conclut à la confirmation du jugement, produit un décompte actualisé au 2 janvier 2023 à la somme de 4.613,49 euros, détaillant les sommes dues mensuellement au titre des loyers et charges et celles réglées notamment par la CAF, Mme [Y] n’apportant aucune pièce de nature à remettre en cause les sommes portées en compte et ne justifiant d’aucun règlement qui n’aurait pas été pris en compte.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné Mme [Y] à payer à la SA D’HLM Batigère Grand Est la somme de 1.429,34 euros correspondant aux loyers et charges arrêtés au 3 mai 2022, avec intérêts au taux légal à compter du 29 novembre 2021 sur 980,88 euros et à compter du 5 mai 2022 sur le solde.

Sur l’indemnité d’occupation

En raison de la résiliation judiciaire du contrat de bail, Mme [Y] occupe les lieux loués sans droit ni titre et reste débitrice d’une indemnité mensuelle d’occupation, de sorte qu’il convient de confirmer le jugement l’ayant condamnée à verser à la SA D’HLM Batigère Grand Est une indemnité d’occupation de 568,80 euros par mois à compter du 1er juillet 2022 jusqu’à libération des lieux loués, cette indemnité étant revalorisée selon la réglementation propre aux loyers d’HLM devenues ESH.

Sur les délais de paiement

Aux termes de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 applicable aux contrats de location en cours le juge peut, même d’office accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu par l’article 1244-1 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative, étant précisé que les délais accordés ne peuvent affecter l’exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges.

En l’espèce, il résulte de ce qui précède que l’appelante est en situation d’impayés depuis de nombreuses années, qu’elle a déjà bénéficié d’un effacement de sa dette locative à hauteur de 5.075,71 euros en 2020, que sa dette locative ne cesse d’augmenter et qu’elle ne justifie pas de sa situation financière. En conséquence elle doit être déboutée de sa demande de délais de paiement, le jugement étant confirmé.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.

Selon l’article 62 du décret du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relatif à l’aide juridictionnelle, la décision statuant sur la demande d’admission provisoire n’est pas susceptible de recours, de sorte que la cour n’a pas à statuer sur la demande d’aide juridictionnelle provisoire rejetée par le premier juge.

Mme [Y] devra supporter les dépens d’appel et il convient de la condamner à verser à la SA D’HLM Batigère Grand Est la somme de 900 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions';

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme [V] [Y] épouse [P] à verser à la SA D’HLM Batigère Grand Est la somme de 900 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [V] [Y] épouse [P] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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