Cour d'appel de Montpellier, 19 février 2013, n° 12/00017

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 19 févr. 2013, n° 12/00017
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 12/00017

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

Expropriations

ARRET DU 19 FEVRIER 2013

Débats du 15 Janvier 2013

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/00017

Minute n° :

Ce jour, DIX NEUF FEVRIER DEUX MILLE TREIZE,

A l’audience publique de la Chambre des Expropriations de la Cour d’Appel de MONTPELLIER , Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Conseiller assisté de M. Philippe CLUZEL, Greffier a prononcé l’arrêt suivant dans l’instance opposant :

d’une part :

L’ETAT – AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE (CONCESSIONNAIRE) représenté par M Charles HAASE, directeur adjoint

XXX

XXX

XXX

Représentant : Me Fabienne BEUGNOT (avocat au barreau de MARSEILLE)

APPELANTE

et

d’autre part :

Monsieur C J K Y

XXX

XXX

XXX

Représentant : Me HEMEURY de la SCP SCHEUER, VERNHET ET ASSOCIES (avocats au barreau de MONTPELLIER)

Madame Z A épouse Y

XXX

XXX

XXX

Représentant : Me HEMEURY de la SCP SCHEUER, VERNHET ET ASSOCIES (avocats au barreau de MONTPELLIER)

INTIMES

en présence de

Madame le Commissaire du Gouvernement du département de l’Hérault

XXX

XXX

XXX

Les parties ont été régulièrement convoquées par lettres recommandées avec accusés de réception.

Statuant sur l’appel d’un jugement du Juge de l’Expropriation du Département de l’Hérault en date du

15 Mai 2012

Après que les débats aient eu lieu à l’audience publique du 15 Janvier 2013 où siégeaient :

— Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Conseiller de Chambre, Président suppléant, désigné par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d’Appel de MONTPELLIER, en remplacement de M. BACHASSON, Président empêché,

— Monsieur Jean-Jacques SAINTE-CLUQUE, Vice-Président au Tribunal de Grande Instance de Perpignan, juge de l’Expropriation du Département des Pyrénées Orientales, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président,

— Madame Nathalie MATELLY, Vice-Présidente du Tribunal de Grande Instance de CARCASSONNE, Juge suppléant de l’Expropriation du Département de l’Aude, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président,

En présence de M. B, délégué par le Trésorier Payeur Général de la Région Languedoc Roussillon, Commissaire du Gouvernement,

assistés de M. Philippe CLUZEL, Greffier,

Monsieur le Président entendu en son rapport, les conseils des parties et le Commissaire du Gouvernement entendus en leurs observations,

Après avoir mis l’affaire en délibéré au 19/02/2013 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, les magistrats du siège ont délibéré en secret, conformément à la loi.

FAITS et PROCEDURE – MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES :

Par décret du Premier ministre en date du 30 avril 2007, ont été déclarés d’utilité publique et urgents les travaux de construction du dédoublement de l’autoroute A 9 au droit de Montpellier, compris entre Lunel-Viel, à l’est, et Fabrègues, à l’ouest, et sur le territoire des communes de Baillargues, Castries, Fabrègues, Lattes, Lunel-Viel, Mauguio, Montpellier, Saint-Aunès, Saint-Brès, Saint-Geniès-des-Mourgues, Saint-Jean-de-Védas, Valergues et Vendargues dans le département de l’Hérault.

Après avoir notifié une offre d’indemnisation à C X et Z Moléro épouse X, pour l’expropriation partielle ou totale des parcelles cadastrées à Maugio, section DE n° 71 (vigne), section DI n° 42 (terre) et section DI n° 43 (mazet), la société des Autoroutes du Sud de la France, concessionnaire de l’Etat, a, à défaut d’accord amiable, saisi, le 20 avril 2012, selon la procédure d’urgence, le juge de l’expropriation du département de l’Hérault aux fins de fixation des indemnités revenant aux intéressés.

La visite des lieux a été fixée, par ordonnance, au 15 mai 2012.

Le 11 mai 2012, M. et Mme X ont déposé des conclusions tendant à voir déclarer irrégulière la saisine du juge de l’expropriation.

Par jugement qualifié « en dernier ressort » rendu le 15 mai 2012, le juge de l’expropriation a déclaré la saisine irrecevable au motif de la notification irrégulière des offres aux expropriés, au regard des dispositions de l’article R. 13-17 du code de l’expropriation ; il a ainsi retenu que si deux AR distincts établis, l’un au nom de l’époux et l’autre de l’épouse, sont produits, le fait que le courrier soit indistinctement libellé au nom de Mme et M. C X et que la signature portée sur chacun des AR soit identique, n’établit pas que l’offre ait été effectivement faite à chacun des époux.

La société des Autoroutes du Sud de la France a relevé appel de ce jugement par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressé le 25 mai 2012 au greffe de la cour, reçue le 30 mai 2012.

Elle a déposé, le 20 juin 2012, son mémoire d’appelante accompagné de sept pièces, lequel a été notifié le 26 juin 2012 à M. et Mme X et le 25 juin 2012 au commissaire du gouvernement.

M. et Mme X ont déposé leur mémoire d’intimés avec trois pièces, le 20 juillet 2012.

Le commissaire du gouvernement a déposé des conclusions, le 10 janvier 2013.

Le 14 janvier 2013, la société des Autoroutes du Sud de la France a déposé un mémoire récapitulatif et en réplique.

* *

*

La société des Autoroutes du Sud de la France demande à la cour de réformer le jugement, de déclarer la saisine du juge de l’expropriation recevable et de lui donner acte que celui-ci a rendu un jugement en date du 19 septembre 2012 fixant l’indemnité provisionnelle due aux expropriés ; elle demande également que les conclusions du commissaire du gouvernement, déposées après l’expiration du délai d’un mois prévu à l’article R. 13-49 du code de l’expropriation, soient déclarées irrecevables ; enfin, elle sollicite la condamnation de M. et Mme X à lui payer la somme de 2000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait essentiellement valoir que :

— les conclusions de M. et Mme X du 11 mai 2012 ne lui ont pas été communiquées avant la visite des lieux, en sorte que le premier juge aurait dû les écarter ou renvoyer les parties à une audience ultérieure,

— il résulte des avis de réception des lettres recommandées que l’offre d’indemnisation a été adressée distinctement à M. X et à Mme X,

— la circonstance que les deux courriers aient été rédigés à l’attention de « M. et Mme X » est sans incidence, une telle mention ne faisant que traduire le statut juridique du bien exproprié, qui est un bien commun acquis par les époux durant le mariage,

— cette mention indifférenciée « M. et Mme X » constitue tout au plus un simple vice de forme non substantiel, qui n’a causé aux intéressés aucun grief.

M. et Mme X demandent à la cour de se déclarer incompétente et, subsidiairement, de confirmer le jugement ; ils réclament en outre la condamnation de la société des Autoroutes du Sud de la France à leur payer la somme de 2500 € en remboursement de leurs frais irrépétibles.

Ils soutiennent que :

— le jugement entrepris ne pouvait faire l’objet que d’un pourvoi en cassation par une interprétation a contrario de l’article L. 15-5 du code de l’expropriation,

— alors même que l’article R.15-6 du code de l’expropriation permet de déroger au principe du caractère écrit de la procédure posé à l’article R. 13-31, ils ont adressé leurs conclusions par télécopie, le 11 mai 2012, soit quatre jours avant la visite des lieux, au conseil de la société des Autoroutes du Sud de la France, ainsi qu’au commissaire du gouvernement,

— si les recommandés avec AR ont bien été rédigés distinctement, le courrier de notification des offres a été libellé à l’attention de « M. et Mme X » c’est-à-dire sous une forme indistincte en violation de l’article R. 13-17, la signature identique, apposée sur les deux AR, confirmant l’absence d’une notification individuelle des offres,

— le fait que les courriers de notification des offres aient été rédigés indistinctement ne constitue pas un vice de forme, mais un vice de fond, l’irrégularité étant relative au contenu même des offres, ce dont il résulte que conformément à l’article 119 du code de procédure civile, ils n’ont pas à justifier du grief que leur cause l’irrégularité.

MOTIFS de la DECISION :

Sauf le cas prévu à l’article L. 15-5 du code de l’expropriation, où est fixé, dans la procédure d’urgence, le montant de l’indemnité provisionnelle, les jugements du juge de l’expropriation fixant une indemnité définitive sont rendus à charge d’appel et il en est de même lorsqu’il statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident mettant fin à l’instance, conformément à l’article 544, alinéa 2, du code de procédure civile ; en l’espèce, le jugement entrepris, qui, en déclarant la saisine irrecevable, a mis fin à l’instance, a donc été improprement qualifié en dernier ressort ; l’appel de la société des Autoroutes du Sud de la France, formé dans les conditions et délai de l’article R. 13-47 du code de l’expropriation, doit ainsi être déclaré recevable.

* *

*

Il résulte de l’article R. 13-49, alinéa 3, du code de l’expropriation qu’à peine d’irrecevabilité, le commissaire du gouvernement doit déposer ses conclusions et l’ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation au greffe de la chambre dans le mois de la notification du mémoire de l’appelant.

En l’occurrence, le commissaire du gouvernement s’est vu notifier par le greffe, suivant lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 21 juin 2012 reçue le 25 juin 2012, le mémoire et les pièces de la société des Autoroutes du Sud de la France, appelante, déposées le 20 juin 2012 ; or, il n’a déposé au greffe de la cour ses conclusions, que le 10 janvier 2013, soit plus d’un mois après la notification, qui lui avait été faite, bien qu’aient été reproduites, dans la lettre de notification, les dispositions de l’article R. 13-49 susvisé ; il convient dés lors de déclarer irrecevables les conclusions du commissaire du gouvernement.

* *

*

Contrairement à ce que soutient la société des Autoroutes du Sud de la France, les conclusions aux fins d’annulation de la saisine prises par M. et Mme X, en vue de l’audience prévue à l’issue du transport sur les lieux du 15 mai 2012, ont été adressées, préalablement, à son conseil, par télécopie reçue le 11 mai 2012 à 16 heures 54, en même temps qu’elles étaient envoyées au greffe du juge de l’expropriation et au commissaire du gouvernement, sachant que dans le cadre d’une procédure d’urgence, l’article R. 15-6 prévoit qu’à l’issue du transport sur les lieux, le juge tient une audience au cours de laquelle les parties ou leurs représentants peuvent, par dérogation aux dispositions de l’article R. 13-31, développer tous moyens et conclusions ; l’appelante n’est donc pas fondée à soutenir que le principe du contradictoire a été transgressé.

La saisine du juge de l’expropriation suppose que, préalablement, l’expropriant ait notifié le montant de ses offres ; dans le cadre de la procédure d’urgence, la notification des offres doit, en application de l’article R. 15-2-1 du code de l’expropriation, intervenir quinze jours au moins avant la saisine du juge ; cette notification doit être faite selon les formes prévues à l’article R. 13-41, à chacun des intéressés susceptibles d’obtenir une indemnisation, ainsi qu’il ressort du 1er alinéa de l’article R. 13-17.

L’absence d’une notification préalable des offres ou une notification incomplète doit être regardée comme une fin de non-recevoir au sens de l’article 122 du code de procédure civile, de nature à rendre l’acte de saisine du juge de l’expropriation irrecevable, sans que celui qui l’invoque ait à justifier d’un grief.

Au cas d’espèce, dès lors que les parcelles expropriées, que les époux X, mariés le XXX sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, ont acheté respectivement en 1961 et 1972, soit durant le mariage, constituent juridiquement des biens communs, la société des Autoroutes du Sud de la France a pu notifier valablement, à chacun d’eux, une offre d’indemnisation libellée au nom de M. et Mme X C par deux lettres recommandées adressées, le 22 mars 2002, l’une à M. X C, l’autre à Mme X Z ; la notification des offres a bien été faite distinctement à chacun des époux X, lesquels sont susceptibles d’obtenir ensemble une indemnisation, compte tenu de la nature de biens communs des parcelles expropriées, peu important que les accusés de réception soient revêtus de la même signature.

Il résulte de ce qui précède qu’aucune irrégularité n’affecte la notification préalable des offres, assimilable à une absence de notification, de nature à rendre irrecevable la saisine du juge de l’expropriation ; le jugement entrepris doit en conséquence être infirmé.

Il n’y a pas lieu toutefois à ordonner le renvoi du dossier de la procédure au juge de l’expropriation, dès lors qu’il est constant que sur nouvelle saisine de celui-ci, un jugement a été rendu, le 19 septembre 2012, fixant, après transport sur les lieux, l’indemnité provisionnelle due aux expropriés.

* *

*

Au regard de la solution apportée au règlement du litige, M. et Mme X doivent être condamnés aux dépens d’appel, ainsi qu’à payer à la société des Autoroutes du Sud de la France la somme de 500 € au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Déclare l’appel recevable,

Déclare irrecevables les conclusions du commissaire du gouvernement, déposées le 10 janvier 2013,

Au fond, infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau,

Rejette la fin de non-recevoir tirée de l’irrégularité de la notification préalable des offres, assimilable à une absence de notification,

Dit n’y avoir lieu à renvoyer le dossier de la procédure au juge de l’expropriation du département de l’Hérault,

Constate que sur nouvelle saisine du juge de l’expropriation, un jugement a été rendu par celui-ci, le 19 septembre 2012, fixant, après transport sur les lieux, l’indemnité provisionnelle due aux expropriés,

Condamne M. et Mme X aux dépens d’appel, ainsi qu’à payer à la société des Autoroutes du Sud de la France la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Cour d'appel de Montpellier, 19 février 2013, n° 12/00017