Cour d'appel de Montpellier, 19 décembre 2013, n° 12/08708

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 19 déc. 2013, n° 12/08708
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 12/08708

Sur les parties

Texte intégral

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1° Chambre Section AO1

ARRÊT DU 19 DECEMBRE 2013

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/08708

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 26 SEPTEMBRE 2012

COUR DE CASSATION DE PARIS

N° RG 1058-fs-d

qui casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel de MONTPELLIER en date du 29 juin 2010, sur appel du jugement rendu par le Tribunal de grande instance de MONTPELLIER le 12 mai 2009

APPELANTE :

Société FRANCE INVEST ANS

société de droit norvégien immatriculée au RCS deBronnoysund sous le n°988 063 118prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au dit siège social

XXX

XXX

représentée par Me Joséphine HAMMAR, avocat postulant au barreau de MONTPELLIER,

assistée de Me Gunnar NERDRUM, avocat norvégien

INTIMEE :

XXX

Société de droit luxembourgeois

XXX

XXX

représentée par Me Pierre André MERLIN de la SELARL SOFIDOC, avocat postulant au barreau de MONTPELLIER

assistée de Me Gérard ABITBOL, avocat plaidant au barreau de MARSEILLE

ORDONNANCE de CLOTURE du 30 OCTOBRE 2013

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le MERCREDI 20 NOVEMBRE 2013 à 8H45 en audience publique, Madame Caroline CHICLET, Conseiller ayant fait le rapport prescrit par l’article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

Madame Anne BESSON, Président de Chambre

Madame Caroline CHICLET, Conseiller

Monsieur Claude ANDRIEUX, Vice-président placé

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Marie-Françoise COMTE

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE,

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ;

— signé par Madame Anne BESSON, Président de Chambre, et par Marie-Françoise COMTE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 4 avril 2007, la Sarl DR Cap Corniche a signé avec la société France Invest Ans une promesse unilatérale de vente portant sur 24 lots de copropriété d’un immeuble sis à Sète (34) moyennant le prix de 2.145.000 € expirant le 15 juillet 2007 à 17h.

Le bénéficiaire, la société France Invest Ans, a remis à titre d’indemnité d’immobilisation la somme de 214.500 € par virement en la comptabilité de Maître Séguie, notaire à Sète.

La société France Invest Ans n’a pas signé l’acte authentique dans le délai de la promesse et la Sarl DR Cap Corniche l’a assignée le 16 janvier 2008 devant le tribunal de grande instance de Montpellier en paiement de l’indemnité d’immobilisation et en réparation de son préjudice.

Par jugement contradictoire en date du 12 mai 2009, ce tribunal a :

rejeté les conclusions et pièces communiquées par la société France Invest Ans le 3 février 2009,

condamné la société France Invest Ans à payer à la Sarl DR Cap Corniche la somme de 214.350 € détenue en l’étude de Maître Séguie, notaire à Sète,

débouté la Sarl DR Cap Corniche de sa demande de dommages-intérêts,

débouté la société France Invest Ans de l’ensemble de ses demandes,

condamné la société France Invest Ans à payer à la Sarl DR Cap Corniche la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

condamné la société France Invest Ans aux dépens.

La société France Invest Ans a interjeté appel de ce jugement le 2 septembre 2009.

Par arrêt contradictoire en date du 29 juin 2010, la cour d’appel de Montpellier a :

confirmé la décision en ce qu’elle a débouté la Sarl DR Cap Corniche de sa demande de dommages-intérêts,

l’a infirmée pour le surplus et statuant à nouveau :

débouté la Sarl DR Cap Corniche de ses demandes,

condamné la Sarl DR Cap Corniche à restituer à la société France Invest Ans la somme de 214.500 € correspondant à l’indemnité d’immobilisation actuellement en séquestre chez Maître Siguie majorée des intérêts accumulés lors du séquestre depuis le 15 juillet 2007,

Y ajoutant,

condamné la Sarl DR Cap Corniche à payer à la société France Invest Ans la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné la Sarl DR Cap Corniche aux dépens.

Sur pourvoi de la Sarl DR Cap Corniche, la Cour de cassation par arrêt en date du 26 septembre 2012, a cassé et annulé l’arrêt précité sauf en ce qu’il a rejeté la demande de dommages-intérêts de la Sarl DR Cap Corniche et a renvoyé la cause et les parties devant la même cour d’appel autrement composée.

La Cour de cassation énonce que « pour débouter la société DR Cap Corniche de sa demande en paiement de l’indemnité d’immobilisation, l’arrêt retient qu’au vu de l’importance de cette indemnité, les articles 1.3 et 1.6 du contrat créent une véritable obligation d’acquérir à la charge du bénéficiaire, transformant la promesse unilatérale de vente en contrat synallagmatique ;

Qu’en statuant ainsi, sans relever que la promesse de vente était assortie d’une indemnité si importante par rapport au prix de vente qu’elle privait la société France Invest de sa liberté d’acheter ou de ne pas acheter, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. »

La cour de céans a été régulièrement saisie par la société France Invest Ans.

Vu les conclusions de la société France Invest Ans remises au greffe le 14 octobre 2013 ;

Vu les conclusions de la Sarl DR Cap Corniche remises au greffe le 7 juin 2013 ;

Vu l’ordonnance de clôture en date du 30 octobre 2013 ;

M O T I F S

' Sur la recevabilité de la demande de dommages-intérêts :

La Sarl DR Cap Corniche demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris et de condamner la société France Invest Ans à lui payer la somme de 64.051,88 € au titre des frais de remise en vente d’urgence.

La société France Invest Ans s’oppose à cette demande de dommages-intérêts en l’état du caractère définitif de l’arrêt de la cour d’appel, non cassé sur ce point, qui a débouté Cap Corniche de ses demandes de ce chef.

L’arrêt de la cour d’appel de Montpellier du 29 juin 2010 n’a pas été cassé ni annulé dans ses dispositions confirmatives ayant débouté la Sarl DR Cap Corniche de sa demande de dommages-intérêts.

La Sarl DR Cap Corniche, qui a été définitivement déboutée de ses prétentions accessoires, n’est donc plus recevable à en solliciter le bénéfice.

' Sur l’indemnité d’immobilisation :

La promesse signée entre les parties contient, en son article I.5, quatre conditions suspensives relatives aux servitudes ( I.5.1), à l’origine de propriété, aux privilèges et hypothèques (I.5.2), au droit de préemption urbain (I.5.3) et à l’état parasitaire (I.5.4).

L’article I.6 du contrat prévoit que l’indemnité d’immobilisation versée par le bénéficiaire (214.500 €) doit rester acquise au promettant en cas de non levée de l’option ou doit être restituée au bénéficiaire au cas où l’une des conditions suspensives ne serait pas réalisée dans les délais à savoir avant le 15 juillet 2007 à 17h, date de l’expiration de la promesse.

La société France Invest Ans, sans contester la réalisation des quatre conditions suspensives précitées, conclut à l’infirmation du jugement entrepris en faisant valoir que la promesse signée le 4 avril 2007 contenait une autre condition suspensive, certes non retranscrite dans le contrat mais énoncée par écrit le 30 mars 2007 et reprise oralement le jour de la signature, qui portait sur la remise en état des appartements vendus par la Sarl DR Cap Corniche.

La Sarl DR Cap Corniche demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, de condamner la société France Invest Ans à lui payer la somme de 214.500 € avec intérêts au taux légal et anotocisme depuis la signification de l’assignation le 16 janvier 2008 et d’ordonner la levée du séquestre.

La Sarl DR Cap Corniche s’est engagée par courrier du 30 mars 2007 à remettre en état « les parties privatives dégradées dans les lots 419, 429, 430, 431, 461 et 462 » représentant 6 des 24 lots vendus et ce, « avant la réitération de la promesse par acte authentique ». Cette remise en état a ensuite été étendue oralement, ainsi que l’admet l’intimée, à trois lots supplémentaires.

Cette promesse de la venderesse de procéder à la remise en état des parties privatives dégradées de quelques lots n’a pas été incluse sous la forme d’une condition suspensive dans le contrat signé cinq jours plus tard puisque la question de ces travaux n’y est pas évoquée.

La société France Invest Ans n’a pas exprimé son intention de subordonner la signature de la promesse unilatérale à l’ajout d’une condition suspensive de réalisation des travaux, alors qu’elle en avait la possibilité.

L’engagement précité de la Sarl DR Cap Corniche doit donc être interprété comme un geste purement commercial à l’endroit du candidat acquéreur.

La société France Invest Ans conclut à la mauvaise foi de la Sarl DR Cap Corniche qui, sciemment, n’aurait pas exécuté les travaux nécessaires à la commercialisation des appartements alors que l’état des lieux du 28 juin 2007 montre des appartements en mauvais état d’entretien et affectés par l’humidité.

Mais la société France Invest Ans, société de droit norvégien qui comptait effectuer une opération immobilière en France en acquérant pour les revendre 24 appartements situés sur la corniche de Sète, dans un lieu fortement recherché, ne peut raisonnablement soutenir qu’elle ignorait l’état des appartements convoités au jour de la signature de la promesse alors qu’elle a déclaré dans le contrat les acquérir dans leur état existant et « bien les connaître pour les avoir visités dès avant ce jour ».

En outre, la Sarl DR Cap Corniche, qui ne s’était engagée commercialement qu’à reprendre « les parties dégradées » de certains lots, justifie avoir fait procéder au grattage et à l’application d’un anti-salpêtre avec pose de dalles polystyrène au plafond de sept lots atteints par de l’humidité et avoir fait reprendre la peinture des murs salis côté cuisine dans trois lots pour un coût de 2.808,20 €, suivant facture du 22 août 2007.

Aucun élément ne permet d’affirmer, contrairement à ce que soutient la société France Invest Ans, que la Sarl DR Cap Corniche aurait agi de mauvaise foi.

Par conséquent les moyens opposés par la société France Invest Ans doivent être rejetés.

L’appelante conclut également à l’ambiguïté du contrat en soutenant que les clauses relatives à l’indemnité d’immobilisation se contredisent et demande à la cour de l’interpréter suivant les prescriptions de 1162 du code civil.

Les clauses d’un contrat doivent s’analyser les unes par rapport aux autres en donnant à chacune le sens qui résulte de l’acte entier.

En l’espèce, l’article I.6 précité relatif à l’indemnité d’immobilisation stipule clairement que cette indemnité peut rester acquise au promettant en cas de non-levée de l’option par le bénéficiaire.

Cette clause est confortée par les termes de l’article I.3 relatif à la réalisation de la promesse selon lesquels le contrat deviendra caduc en cas de non-levée de l’option par le bénéficiaire, « sauf les effets de l’indemnité forfaitaire d’immobilisation ci-après stipulée ».

Il résulte de la combinaison de ces clauses qu’il a été dans la commune intention des parties de prévoir que l’indemnité d’immobilisation prévue à l’article I.6 resterait acquise au promettant en cas de non-levée de l’option.

A la lumière de ce qui précède, l’article I.2 consacré à la durée de la promesse et selon lequel la caducité de la promesse aura un effet libératoire entre les parties « sans indemnité de part et d’autre » procède d’une simple erreur de rédaction.

Cette erreur isolée n’est pas de nature à remettre en cause l’intention des parties qui ressort clairement de l’articulation des articles spécifiques I.3 et I.6 du contrat.

L’indemnité d’immobilisation de 214.500 € versée par la société France Invest Ans le jour de la promesse correspond à 10% du prix de vente ; ce montant, destiné à indemniser le promettant de l’immobilisation de son bien pendant plus de trois mois et de l’exclusivité consentie au bénéficiaire, n’a pu avoir pour effet de priver ce dernier de sa liberté d’option.

Il n’est pas discuté par les parties que les quatre conditions suspensives prévues dans la promesse unilatérale signée le 4 avril 2007, et énoncées plus haut, ont été réalisées.

La société France Invest Ans a refusé de lever l’option d’achat avant le terme prévu.

L’indemnité d’immobilisation doit donc rester acquise au promettant ainsi que le prévoit l’article I.6 du contrat.

Le jugement sera confirmé sur ce point sauf à :

préciser que le montant de l’indemnité en principal s’élève à 214.500 € et non 214.350 € comme indiqué par erreur dans le dispositif du jugement entrepris,

ordonner la mainlevée du séquestre de la somme détenue par Monsieur la Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Montpellier,

dire que la somme produira intérêts au taux légal à compter du 16 janvier 2008, date de l’assignation,

ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil à compter de la première demande qui en aura été faite judiciairement dans la présente instance.

P A R C E S M O T I F S :

La cour, statuant sur renvoi de cassation et dans les limites de sa saisine ;

Déclare irrecevable la demande de dommages-intérêts formée par la Sarl DR Cap Corniche ;

Confirme le jugement entrepris sauf à préciser que le montant de l’indemnité s’élève à 214.500 € et non 214.350 € comme indiqué par erreur dans le dispositif du jugement entrepris ;

Y ajoutant ;

Ordonne la mainlevée de la somme détenue sur le compte séquestre CARPA par Monsieur le Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Montpellier ;

Dit que la somme de 214.500 € produira intérêts au taux légal à compter du 16 janvier 2008, date de l’assignation ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil à compter de la première demande qui en aura été faite judiciairement dans le cadre du présent litige ;

Condamne la société France Invest Ans, société de droit norvégien, aux dépens de l’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

Condamne la société France Invest Ans, société de droit norvégien, à payer à la Sarl DR Cap Corniche la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour ses frais engagés en cause d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

CC

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