Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre sociale, 2 décembre 2020, n° 20/00865

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 3e ch. soc., 2 déc. 2020, n° 20/00865
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 20/00865
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Montpellier, 13 janvier 2020
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

SD/KC

Grosse + copie

délivrées le

à

3e chambre sociale

ARRÊT DU 02 Décembre 2020

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/00865 – N° Portalis DBVK-V-B7E-OQNA

ARRÊT n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 JANVIER 2020 POLE SOCIAL DU TJ DE MONTPELLIER

N° RG19/01235

APPELANT :

Monsieur B X

[…]

[…]

Représentant : Me Nathalie TRAGUET de la SELARL NATHALIE TRAGUET, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEES :

CPAM DE L’HERAULT

[…]

CS49001

[…]

Mme C D (Représentante de la CPAM) en vertu d’un pouvoir du 09/10/2020

SARL SOUND LIGHT SYSTEMS

[…]

30340 MEJANNES-LES-ALES

Représentant : Me Emmanuelle BALOUIN (postulant)

Représentant : Me Marie-christine MANTE-SAROLI de la SELARL MANTE SAROLI & COULOMBEAU, avocat plaidant au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 15 OCTOBRE 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur A BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet

Madame Karine CLARAMUNT, Conseillère

Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mademoiselle F DAHURON

ARRÊT :

— Contradictoire;

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

— signé par Monsieur A BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet, et par Mademoiselle F DAHURON, greffier.

*

* *

M. B X, intermittent du spectacle, était embauché par la SARL SOUND LIGHT SYSTEM SLS, le 15 août 2009, en qualité de technicien lumière.

Le 15 août 2009, M. X chutait d’une échelle alors qu’il se trouvait sur le chantier du Pont du Gard. Cet accident était pris en charge par la CPAM de l’Hérault au titre de la législation sur les risques professionnels.

Suivant jugement en date du 19 octobre 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale de l’Hérault :

— reconnaissait la faute inexcusable de l’employeur;

— fixait à son taux maximum la majoration du capital ou de la rente versée à M. X;

— ordonnait un sursis à statuer sur l’évaluation des préjudices dans l’attente de la consolidation de l’état de santé de M. X;

— fixait à 15 000 euros l’indemnité provisionnelle à verser par la CPAM.

Suivant jugement avant dire droit du 6 mars 2007, le tribunal de grande instance de Montpellier ordonnait une expertise médicale aux fins d’évaluation du préjudice corporel subi par M. X. Un complément d’expertise était ordonné par ce même tribunal le 11 juin 2008.

Le rapport d’expertise judiciaire était déposé au greffe du tribunal de grande instance de Montpellier le 28 février 2019.

Suivant jugement en date du 14 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Montpellier fixait ainsi qu’il suit l’indemnisation des préjudices subis :

* au titre du déficit fonctionnel temporaire : 20 423 euros;

* au titre de l’assistance par tierce personne : 12 252 euros;

* au titre des souffrances endurées : 25 000 euros;

* au titre du préjudice d’agrément : 8000 euros;

* au titre du préjudice esthétique permanent : 4000 euros;

* au titre du préjudice sexuel : 5000 euros;

* au titre de la perte de chance de promotion : 50 000 euros;

* au titre de l’aménagement du véhicule : 32 540 euros.

M. X relevait appel de ce jugement par voie de déclaration électronique du 12 février 2020.

Lors de l’audience du 15 octobre 2020, M. X sollicite la réformation du jugement entrepris dans toutes ses dispositions sauf celles relatives à l’aménagement du véhicule et aux frais irrépétibles.

Il réclame paiement des sommes suivantes au titre de son indemnisation :

* 1320 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire total ;

* 44 520 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel;

* 13 572 euros au titre de la tierce personne avant consolidation;

* 45 000 euros au titre des souffrances endurées;

* 30 000 euros au titre du préjudice d’agrément;

* 8000 euros au titre du préjudice esthétique;

* 15 000 euros au titre du préjudice sexuel;

* 302 715 euros au titre de la perte de chance de promotion professionnelle;

* 50 000 euros au titre de la dévalorisation sur le marche du travail;

* 32 540 euros au titre de l’aménagement du véhicule.

M. X demande à la cour de surseoir à statuer sur le retentissement psychologique et d’ordonner une expertise complémentaire aux fins de déterminer son taux d’incapacité permanente , son taux d’incapacité au titre du poignet, son taux d’incapacité au titre de la cheville gauche et celui au titre des séquelles psychologiques.

M. X sollicite la condamnation de la CPAM de l’Hérault à lui verser les sommes allouées en réparation des préjudices subis à charge pour elle d’en récupérer le montant auprès de l’employeur.

M. X réclame remboursement de ses frais irrépétibles à hauteur de 3000 euros.

Au soutien de son appel, M. X expose avoir subi un grave traumatisme sur le poignet gauche et la cheville gauche, avoir été immobilisé totalement puis partiellement pendant des mois, avoir subi de nombreuses interventions chirurgicales . Ses conditions de vie étaient très pénibles pendant toute sa convalescence. Il devait intégrer un centre anti douleur. Son état de santé n’était consolidé qu’à compter du 29 février 2016.

S’agissant de l’indemnisation au titre de l’assistance par une tierce personne avant consolidation, M. X considère que nonobstant une assistance familiale, ce poste doit inclure les charges patronales et congés payés.

Concernant l’indemnisation au titre des souffrances endurées, M. X demande que ses souffrances physiques et morales soient prises en compte.

S’agissant de l’indemnisation du préjudice d’agrément, M. X fait valoir que son ancien poste de responsable technique lumière à l’international impliquait de réelles aptitudes physiques dont il est aujourd’hui privé. Avant son accident, il était une personne très active, aimant la pratique du sport ( judo, escalade, jogging, randonnées, ski). Il aimait également les voyages.

Concernant l’indemnisation de son préjudice esthétique, M. X rappelle qu’il ne peut se déplacer qu’avec le soutien d’une béquille.

S’agissant de l’indemnisation de son préjudice sexuel, M. X invoque la perte de sa libido.

M. X réclame l’indemnisation de sa perte de chance d’accéder à un poste de directeur technique. Il explique qu’il avait entrepris avant son accident une formation qui devait se dérouler en trois modules . Il précise que les séquelles physiques de l’accident l’empêchent d’effectuer un travail de terrain indissociable des fonctions de directeur technique.

Ainsi, M. X subissait une perte de chance sérieuse d’obtenir un emploi mieux rémunéré et donc par voie de conséquence une pension de retraite plus importante.

M. X sollicite réparation de sa dévalorisation sur le marché du travail. Il fait valoir qu’alors qu’il disposait d’une solide expérience dans son domaine, il est obligé , à 54 ans, de se reconvertir totalement.

M. X réclame réparation du préjudice subi du fait du retentissement psychologique de l’accident. Le taux d’incapacité permanente de 25 % retenu par le médecin conseil de la CPAM et l’expert judiciaire prendrait exclusivement en compte les séquelles physiques. M. X précise bénéficier, suite à l’interruption de son activité professionnelle, de ses activités sportives et de loisirs d’un suivi psychiatrique avec prescription médicamenteuse. Il indique avoir été traumatisé par les circonstances de l’accident.

Lors de l’audience du 15 octobre 2020, la société SOUND LIGHT SYSTEMS sollicite la réformation du jugement de première instance en ce qu’il a alloué à M. Y la somme de 20 423 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire et la somme de 50 000 euros au titre de la perte de chance de promotion professionnelle. Elle propose une indemnisation à hauteur de 18 066, 50 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire et au maximum de 10 000 euros au titre de la perte de chance de promotion professionnelle.

Elle demande à la cour de confirmer le jugement entrepris sur les autres chefs de préjudices.

Elle s’oppose à la demande de nouvelle expertise.

Elle demande à la cour de déduire des indemnités allouées la provision de 15 000 euros déjà versée à M. X.

Elle demande que la CPAM de l’Hérault soit condamnée à faire l’avance des indemnités allouées.

La société SOUND LIGHT SYSTEMS fonde ses prétentions sur les conclusions du rapport d’expertise judiciaire.

S’agissant du besoin en tierce personne temporaire, l’employeur relève que M. X bénéficiait de l’aide de son entourage et n’a donc pas eu à régler de charges sociales.

Concernant l’indemnisation des souffrances endurées, la société SOUND LIGHT SYSTEMS fait valoir que l’expert judiciaire prenait bien en compte les souffrances morales endurées.

S’agissant du préjudice d’agrément, M. X ne rapporterait pas la preuve des pratiques sportives ou de loisirs alléguées.

L 'intimée soutient que la somme allouée par la juridiction de première instance en réparation du préjudice sexuel subi réparé la gêne éprouvée par l’appelant dans certaines positions mais également la perte de libido.

Sur la perte de chance de promotion professionnelle , la société SOUND LIGHT SYSTEMS soutient que conformément aux dispositions de l’article L 452-3 du code de la sécurité sociale, le déclassement professionnel, la perte de gains, la perte des droits à la retraite sont déjà compensés par l’attribution d’un capital ou d’une rente majorée. Seul un préjudice distinct, la perte de chance d’une promotion professionnelle stricto sensu peut être indemnisée. L’employeur considère que la preuve d’un processus de promotion professionnelle en cours au jour de l’accident n’est pas rapportée.

A titre subsidiaire, la société SOUND LIGHT SYSTEMS évalue ce chef de préjudice à la somme de 10 000 euros.

La société SOUND LIGHT SYSTEMS soutient que la dévalorisation sur le marché du travail est déjà indemnisée au titre de l’incidence professionnelle et donc par le versement d’une rente majorée.

S’agissant du retentissement psychologique, la société SOUND LIGHT SYSTEMS considère que ce poste de préjudice est une composante du déficit fonctionnel permanent fixé à 25% par l’expert judiciaire et définitivement par la CPAM.

Et, le déficit fonctionnel permanent constitue un préjudice couvert par le livre IV du code de la sécurité sociale déjà indemnisé par l’attribution de la rente. Par ailleurs, le retentissement psychologique invoqué par M. X était également indemnisé au titre des souffrances endurées avant consolidation de l’état de santé.

Lors de l’audience du 15 octobre 2020, la CPAM de l’Hérault demande à la cour de rejeter les demandes d’indemnisation formulées au titre de la perte de chance de promotion professionnelle, de la dévalorisation sur le marché du travail, du retentissement psychologique. Elle s’en remet sur l’évaluation des autres chefs de préjudices.

Elle demande à la cour de déduire des sommes allouées le montant de la provision ainsi que la somme de 142 215 euros déjà versée.

Elle réclame la condamnation de l’employeur à lui rembourser toutes les sommes dont elle a fait l’avance.

Au soutien de ses prétentions, la CPAM de l’Hérault rappelle que conformément aux dispositions des articles L 443-1 et L 434-2 du code de la sécurité sociale, la perte de gains professionnels futurs est déjà réparée par l’attribution d’une rente et la majoration de celle-ci. Elle souligne l’absence de preuve d’une perte de chance de promotion professionnelle.

La CPAM de l’Hérault soutient que la dévalorisation sur le marché du travail est également indemnisée, au titre de l’incidence professionnelle, par l’attribution de la rente majorée.

Concernant le retentissement psychologique, la CPAM de l’Hérault soutient que les souffrances morales avant consolidation étaient incluses dans l’évaluation du préjudice fonctionnel temporaire. Et les souffrances morales endurées après consolidation sont à rattacher aux troubles dans l’existence donc au préjudice fonctionnel permanent égalemennt indemisé par l’allocation de la rente majorée.

MOTIFS :

Aux termes des dispositions de l’article L 452-3 du code de la sécurité sociale, indépendamment de la majoration de la rente qu’elle perçoit en vertu de l’article L 452-2 du même code, la victime d’un accident du travail a le droit de demander à l’employeur dont la faute inexcusable a été reconnue, la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales endurées, de ses préjudices esthétiques temporaires et / ou définitifs et d 'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.

En application de cette disposition telle qu’interprétée par le conseil constitutionnel et la cour de cassation , peuvent également être indemnisés le déficit fonctionnel temporaire, l’assistance par tierce personne avant consolidation, les frais d’aménagement du véhicule et du logement, le préjudice sexuel, le préjudice permanent exceptionnel, le préjudice d’établissement, le préjudice scolaire, les dépenses de santé non prises en charge et les frais divers, postes de préjudice non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.

Les autres chefs de préjudice couverts par les dispositions du code de la sécurité sociale même partiellement ne peuvent faire l’objet d’une indemnisation complémentaire devant le tribunal judiciaire.

Le 15 août 2009, M. X, âgé de 47 ans, régisseur lumières, préparant un spectacle chutait de cinq ou six mètres de haut. Il ne perdait pas connaissance. Il était immédiatement hospitalisé. Il présentait un traumatisme du poignet et de la cheville gauche. Il s’agissait d’une fracture de la malléole interne de la cheville gauche et d’une fracture de l’extrémité distale du radius gauche. Le jour même, il subissait un intervention chirurgicale, sous anesthésie générale, en vue de la réduction par ostéosynthèse de la fracture de la cheville gauche et dans le même temps d’une stabilisation de la fracture du poignet gauche ( broches). M. X restait hospitalisé jusqu’au 18 août 2009.

A sa sortie, il se déplaçait en fauteuil roulant avec appui jambier. L’immobilisation totale de la cheville et du poignet était initialement prévue pour un mois et demi. M. X nécessitait les soins d’une infirmière deux fois par jour pendant quatre mois ( toilette, pansements, traitement médical). Etaient prescrits un traitement par doliprane et un traitement par HPBM avec contrôles hématologiques réguliers.

L’ablation totale du matériel d’ostéosynthèse du poignet gauche s’effectuait le 16 octobre 2009 dans le cadre d’une chirurgie ambulatoire.

Le 9 novembre 2009, le fauteuil roulant était prescrit pour une nouvelle période de six semaines. Le 7 décembre 2009, la prescription des soins infirmiers deux fois par jour était renouvelée pendant deux mois pour l’aide à la toilette.

M. X E des séances de kinésithérapie de façon intensive pour le poignet et la cheville.

Il était hospitalisé du 23 au 26 mars 2010 et opéré du poignet par arthrolyse pour ablation de la calcification dorsale.

Le 1er juin 2010, il présentait toujours des douleurs et une raideur au niveau du poignet. Etait pratiquée une injection d’anti inflammatoires par infiltration. Les douleurs persistaient avec une limitation des amplitudes articulaires.

M. X était hospitalisé du 29 septembre 2010 au 1er octobre 2010 pour un nettoyage articulaire de la cheville gauche avec synovectomie tibio -italienne.

A la sortie de la clinique, il ne pouvait se déplacer qu’avec deux béquilles.

Une nouvelle période d’hospitalisation intervenait du 3 au 6 novembre 2010 ( arthrodèse sur poignet gauche).

L’état de M. X nécessitait encore la prise d’antalgiques et de nombreuses séances de rééducation pour le poignet et la cheville. En l’absence d’amélioration, plusieurs infiltrations étaient réalisées sur la cheville et le poignet.

Le 1er décembre 2011, le médecin traitant de M. X lui prescrivait un traitement anxiolytique en raison de troubles du sommeil.

M. X était à nouveau hospitalisé du 19 au 21 septembre 2011 pour l’ablation du matériel d’ostéosynthèse du poignet.

Le 12 décembre 2011, le médecin traitant prescrivait une canne de préhension à gauche.

Le 13 décembre 2011, le kinésithérapeute conseillait le port d’une atèle ligamentaire de la cheville gauche.

Compte tenu de la persistance de phénomènes douloureux invalidants, M. X connaissait une nouvelle période d’hospitalisation du 19 au 24 septembre 2012 pour réalisation d’une arthrodèse sur la cheville gauche.

A la sortie de la clinique, il bénéficiait d’un traitement prévention phlébite et reprenait les séances de rééducation. Il devait porter des chaussures orthopédiques.

Le matériel d’ostéosynthèse de la cheville était retiré lors d’une nouvelle hospitalisation du 30 septembre 2013 au 2 octobre 2013.

Etait recommandée l’utilisation d’une canne pour la marche afin d’alléger la charge au niveau de la cheville et le port d’une talonnette de 5mm à gauche.

Le 28 juillet 2014, était prescrit un traitement antidépresseur léger. M. X était hospitalisé du 4 au 7 juillet 2014 pour une prise en charge de la douleur. Il observait un traitement médicamenteux par laroxyl. En avril 2015, une importante carence en vitamine D nécessitait une hospitalisation de jour pour des injections.

M. X était à nouveau hospitalisé du 21 au 24 avril 2015 et du 10 au 11 novembre 2015.

M. X était examiné par le médecin conseil de la CPAM qui déclarait son état consolidé à compter du 29 février 2016 en retenant un taux d’incapacité permanente de 25%.

Lors de l’examen clinique, l’expert judiciaire relevait les séquelles suivantes :

— une déambulation assistée par une béquille tenue à droite , sans appui monopodal gauche possible, un appui monopodal gauche instable;

— une immobilisation de la cheville gauche bloquée à 90°;

— une limitation du poignet gauche dans les mouvements de flexion extension, inclinaisons et supinations chez un patient droitier.

Sur lé déficit fonctionnel temporaire :

Ce poste de préjudice indemnise, pour la période antérieure à la date de consolidation, l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d’hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique.

Compte tenu des périodes d’hospitalisation sus énoncées, du nombre d’interventions chirurgicales, de la période d’utilisation d’un fauteuil roulant, de la période d’usage de deux béquilles puis d’une béquille, de la limitation de l’usage de la cheville et du poignet, de leur enraidissement, de la nature des lésions la cour fixe à la somme de 30 euros la base de l’indemnisation et alloue à M. X au titre du déficit fonctionnel temporaire la somme de 24877, 50 euros. Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a alloué à ce titre à M. X la somme de 20 423 euros.

Sur les souffrances endurées :

Il s’agit d’indemniser toutes les souffrances tant physiques que morales subies par la victime pendant la maladie traumatique et jusqu’à la consolidation.

L’expert judiciaire évalue les souffrances endurées à 5/7.

Compte tenu des circonstances de l’accident, des lésions subies, des multiples chirurgies, des nombreuses séances de rééducation, de la persistance de douleurs invalidantes durant toute la période de convalescence qui durait plusieurs années , il y a lieu d’allouer la somme de 30 000 euros au titre des souffrances endurées. Le jugement dont appel sera infirmé en ce qu’il a alloué à ce titre à M. X la somme de 25 000 euros.

Sur l’assistance par tierce personne temporaire :

La tierce personne est la personne qui apporte de l’aide à la victime incapable d’accomplir seule certains actes essentiels de la vie courante.

L’indemnité allouée au titre de l’assistance d’une tierce personne ne saurait être réduite en cas d’assistance bénévole par un proche de la victime.

Compte tenu de la gravité du handicap présenté pat M. X avant la consolidation de son état de santé, l’expert judiciaire a fixé à trois heures par jour l’aide humaine nécessaire

du 19 août 2009 au 16 décembre 2009 et à 1 heure par jour l’aide humaine nécessaire du 17 décembre 2009 au 22 mars 2010 ; du 27 mars 2010 au 28 septembre 2010 ; du 2 octobre 2010 au 2 novembre 2010; du 7 novembre 2010 au 18 septembre 2011; du 25 septembre 2012 au 25 octobre 2012.

M. X nécessitait une aide pour les courses, les transports, l’entretien du domicile.

Au vu de ces éléments, il convient d’indemniser ce chef de préjudice sur la base 18 euros par jour et d’allouer à M. X l’indemnité requise de 13 572 euros. Le jugement critiqué sera infirmé en ce qu’il a alloué à l’appelant la somme de 12 252 euros au titre de l’assistance par tierce personne.

Sur le préjudice d’agrément :

Il s’agit de réparer le préjudice lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer une activité spécifique sportive ou de loisirs. Ce chef de préjudice concerne les activités ludiques ou culturelles devenues impossibles ou limitées en raison des séquelles de l’accident. Ce poste de préjudice inclut la limitation de la pratique antérieure. Il appartient à la victime de justifier de la pratique de ces activités avant l’accident.

L’expert judiciaire indique que le préjudice est certain avec impossibilité de pratiquer les activités antérieures à l’accident.

A l’appui de sa demande d’indemnisation, M. X verse aux débats les attestations suivantes conformes aux exigences édictées par l’article 202 du code de procédure civile:

— attestations rédigées par son oncle et Mme F G affirmant qu’ils effectuaient des randonnées en montagne et forêts avant l’accident;

— attestation rédigée par M. H I rapportant qu’ils faisaient du footing ensemble avant l’accident;

— attestation rédigée par M. Z certifiant avoir fait de l’escalade en sa compagnie courant 2008;

— attestations rédigées par M. B J et M K L indiquant qu’ils pratiquaient le ski alpin de 2004 à 2008.

M. X était affilié à la fédération française de tir.

Il y a lieu de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a alloué à ce titre à la victime une indemnité de 8000 euros.

Sur le préjudice sexuel :

Ce préjudice recouvre trois aspects pouvant être altérés séparément ou cumulativement, partiellement ou totalement : l’aspect morpholgique lié à l’atteinte aux organes sexuels, le préjudice lié à l’acte sexuel ( libido, perte de capacité physique, frigidité).

L’évaluation de ce préjudice doit être modulée en fonction du retentissement subjectif de la fonction sexuelle selon l’âge et la situation familiale de la victime.

L’expert judiciaire retient une gêne dans certaines positions.

Est produite aux débats l’attestation de l’ancienne épouse de M. X expliquant que le couple ne surmontait pas l’absence de libido éprouvée par la victime depuis son accident.

Il y a lieu de confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a indemnisé ce poste de préjudice à hauteur de 5000 euros.

Sur le préjudice esthétique :

Il s’agit de réparer l’altération de l’apparence physique.

L’expert judiciaire prenant en compte les cicatrices et la modification du schéma de marche avec béquille a retenu un préjudice esthétique permanent de 2/7 .

Il y a lieu de confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a alloué à la victime en réparation du préjudice esthétique la somme de 4000 euros.

Sur la perte ou la diminution des possibilités de promotion professionnelle :

Il appartient à celui qui entend obtenir réparation au titre de la perte de chance de démontrer la réalité et le sérieux de la chance perdue en établissant que la survenance de l’événement dont il a été privé était certaine avant la survenance du fait dommageable. La salarié qui ne peut justifier ni d’un processus scolaire ni d’un processus quelconque de chance de promotion professionnelle échoue dans cette démonstration.

La victime ne peut prétendre à une indemnisation du fait de la perte ou de la diminution de ses possibilités professionnelles dès lors qu’elle ne justifie pas d’un préjudice certain, distinct de celui résultant de son déclassement professionnel qui est réparé par la rente.

M. X est né en 1962. Lors de l’accident, il était intermittent du spectacle exerçant la profession de technicien spécialisé en éclairage et montage depuis 1988.

Pour l’année 2008, les époux X déclaraient un revenu annuel imposable de 28 867 euros.

M. X verse aux débats un contrat de formation professionnelle signé le 29 septembre 2008 avec l’institut supérieur des techniques du spectacle. La formation suivie est intitulée : ' directeur technique des entreprises de spectacle vivant'. M. X a suivi le premier module.

Est produite aux débats l’attestation établie par M. B J ayant reçu M. X plusieurs fois au cours de l’année 2008 en vue de son embauche en qualité de directeur technique au sein de l’entreprise PANPOT SARL pour un salaire mensuel de base compris enter 3700 et 3800 euros net. Ce projet n’avait plus cours suite à l’accident.

Au vu de ces éléments, il convient de confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a alloué à la victime en réparation de ce chef de préjudice la somme de 50 000 euros.

Sur la dévalorisation sur le marche du travail :

La dévalorisation sur le marche du travail est indemnisée au titre de l incidence professionnelle laquelle fait l’objet d une réparation par la rente majorée versée à M. X. La prétention émise de ce chef doit être rejetée et le jugement entrepris confirmé sur ce point.

Sur le retentissement psychologique et la demande d’expertise complémentaire:

Les souffrances physiques et morales visées par les dispositions de l’article L 452-3 du code de la sécurité sociale s’entendent des souffrances non indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent c’est à dire avant consolidation.

Les souffrances englobées dans le déficit fonctionnel permanent ne peuvent faire l’objet d’une réparation complémentaire dans la mesure où ce préjudice est indemnisé au titre du livre IV du code de la sécurité sociale. La rente versée à la victime d’un accident du travail indemnise la perte de gains professionnels, l’incidence professionnelle mais également le déficit fonctionnel permanent.

Il ressort du rapport d’expertise judiciaire que pour évaluer le déficit fonctionnel permanent à 25%, le docteur A tenait bien compte de l’entier dossier médical de M. X et de l’ensemble de ses doléances dont un état d’anxiété et nerveux nécessitant un traitement médicamenteux anti dépressif.

Il n’y a pas lieu d’ordonner une expertise complémentaire;

Il convient de rejeter la demande d’indemnisation au titre du préjudice psychologique et de confirmer sur ce point le jugement entrepris.

Sur les autres demandes :

Aux termes des dispositions de l’article L 452-3 alinéa 3 du code de la sécurité sociale, la réparation des préjudices subis par la victime est versée directement aux bénéficiaires par la caisse d’assurance maladie qui en récupère le montant auprès de l’employeur. La caisse est donc tenue de faire l’avance des indemnités allouées.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire :

Vu le rapport d 'expertise du docteur A;

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Montpellier du 14 janvier 2020 dans toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a alloué les sommes suivantes à M. X :

* 20 423 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire;

* 12 252 euros au titre de l’assistance par tierce personne;

*25 000 euros au titre des souffrances endurées;

statuant à nouveau et y ajoutant :

Fixe de la façon suivante les postes de préjudices énoncés ci dessous :

—  24 877, 50 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire;

—  13 572 euros au titre de l’assistance par tierce personne;

—  25 000 euros au titre des souffrances endurées;

Rappelle que la CPAM de l’Hérault versement directement les sommes allouées à M. X, sauf à déduire l’indemnité provisionnelle et les sommes déjà versées dans le cadre de l’exécution provisoire du jugement;

Rappelle que la société SOUND LIGHT SYSTEM remboursera ces sommes à la caisse primaire d’assurance maladie et en tant que de besoin la condamne à payer ces sommes à la caisse;

Dit n’y avoir lieu à allocation de sommes sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;

Rejette le surplus des demandes;

Condamne la société SOUND LIGHT SYSTEMS aux dépens du présent recours.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre sociale, 2 décembre 2020, n° 20/00865