Cour d'appel de Nancy, 29 juin 2012, n° 11/02458

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nancy, 29 juin 2012, n° 11/02458
Juridiction : Cour d'appel de Nancy
Numéro(s) : 11/02458
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Nancy, 5 septembre 2011, N° F11/0101

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N° PH

DU 29 JUIN 2012

R.G : 11/02458

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANCY

F11/0101

06 septembre 2011

COUR D’APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE

APPELANT :

Monsieur D A

XXX

XXX

Comparant en personne

Assisté de Me Hervé BROSSEAU, avocat au barreau de NANCY, substitué par Me Nathalie MASSART, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

Société MB FINANCES, ayant pour nom commercial 'PARTNERS FINANCES', prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

XXX

XXX

Représentée par Me Vincent LOQUET, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : Madame SCHMEITZKY,

Conseillers : Madame GUIOT-MLYNARCZYK,

Monsieur B,

Greffier lors des débats : Mme Y

DÉBATS :

En audience publique du 10 Mai 2012 ;

L’affaire a été mise en délibéré pour l’arrêt être rendu le 29 Juin 2012 ;

Le 29 Juin 2012, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

M. A, né le XXX, a été engagé à compter du 16 mars 2007 par la société MB Finances en qualité de directeur commercial pôle financier, statut cadre. Sa rémunération était composée d’une partie variable et d’une partie fixe.

Son salaire mensuel brut s’élevait en dernier lieu à 4.757,28 €.

La société employait plus de onze salariés.

Ayant décidé de fermer le pôle de financement immobilier, la société MB Finances a proposé le 9 novembre 2009 au salarié cinq postes de chargé de clientèle et quatre postes de négociateur immobilier que l’intéressé a refusés.

Par courrier du 2 décembre 2009, six postes de chargé de clientèle ont été proposés à M. A sans que ce dernier y donne suite.

L’intéressé a été convoqué le 15 décembre 2009 à un entretien préalable à une mesure de licenciement fixé au 29 décembre suivant.

Il a été licencié par lettre du 18 janvier 2010 pour motif économique.

Soutenant devoir bénéficier d’une reprise d’ ancienneté de treize années et contestant la légitimité de son licenciement, M. A a saisi le 11 février 2010 le Conseil de prud’hommes de Nancy de demandes aux fins de compléments d’indemnité de licenciement, de congés payés et d’ancienneté et de dommages et intérêts pour licenciement abusif et subsidiairement de dommages et intérêts pour non-respect de l’ordre des licenciements et plus subsidiairement de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement économique.

Par décision du 6 septembre 2011, le Conseil de prud’hommes a débouté M. A de l’intégralité de ses demandes.

Ce dernier a régulièrement interjeté appel ; il conclut à l’infirmation du jugement et sollicite la condamnation de son employeur à lui payer :

—  150.000 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à titre subsidiaire pour non-respect des critères de l’ordre des licenciements,

— à titre subsidiaire, 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement économique,

—  16.365 € de solde d’indemnité de licenciement,

—  854 € de solde de congés payés,

—  1.249 € de solde sur ancienneté,

—  5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il sollicite en outre que l’ensemble des sommes portent intérêts à compter de la saisine du Conseil de prud’hommes et la capitalisation des intérêts.

La société MB Finances conclut à la confirmation du jugement et au rejet de l’intégralité des réclamations de M. A à l’encontre duquel elle réclame 2.500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

La Cour se réfère aux conclusions des parties, visées par le greffier, du 10 mai 2012, dont elles ont maintenu les termes lors de l’audience.

MOTIVATION

— Sur l’ancienneté

M. A affirme avoir bénéficié lors de son embauche d’une promesse de reprise d’ancienneté dans le cadre de son départ sur instance de M. Z, dirigeant de la société MB Finances, de l’ancien poste qu’il occupait depuis 13 ans au sein de la société Crédit immobilier de France Alsace Lorraine, ce qui est établi par le versement de sa prime d’ancienneté telle que stipulée dans son contrat de travail et mentionnée sur ses bulletins de paye.

La société MB Finances s’oppose à cette demande au motif que le versement de la prime d’ancienneté ne correspond qu’à un élément du salaire sans aucune reprise d’ancienneté ainsi que cela ressort des bulletins de paye fixant le point de départ de l’ancienneté au 16 février 2007.

C’est à juste titre, et par des motifs pertinents que la Cour adopte, que les premiers juges ont rejeté les demandes afférentes à la reprise d’ancienneté de M. A alors qu’il ressort de l’ensemble des pièces du dossier, soit du contrat de travail et des bulletins de paye, que les parties n’ont convenu que du versement sur les quinze premières années du paiement d’une prime d’ancienneté de 13 années, sans pour autant prévoir expressément de reprise d’ancienneté qui aurait nécessairement figuré en tant que telle sur le contrat de travail et les bulletins de paye qui font mention d’une date d’entrée dans l’entreprise au 16 mars 2007. Il doit au surplus être relevé que le montant invariable de cette prime atteste de son caractère figé contraire à la prise en compte d’une ancienneté nécessairement évolutive.

Le jugement ayant débouté M. A de ses demandes de solde d’indemnité de licenciement, de solde de congés payés et de solde sur ancienneté sera donc confirmé.

— Sur le licenciement

M. A conteste le bien-fondé de son licenciement en excipant successivement de l’absence de motif économique, du défaut de suppression de son poste et du non-respect par l’employeur de son obligation de reclassement, tous moyens et arguments réfutés par la société MB Finances.

S’agissant du motif économique, M. A soutient que la société ne se trouvait pas en situation déficitaire à l’examen des pièces comptables, alors que de son côté, la société MB Finances argue de difficultés financières et de la situation particulièrement obérée du secteur d’activité du pôle immobilier.

L’examen attentif des pièces comptables au 31 décembre 2009 fait apparaître au compte de résultat de l’exercice de la société MB Finances qu’à un chiffre d’affaires passé de 26.502.868 K€ à 17.537.865 K€ entre le 31 décembre 2008 et le 31 décembre 2009, correspond un résultat courant avant impôts respectif de 1.356.666 K€ et de 1.193.575 K€ caractéristique d’un ratio favorable en 2009 entre le chiffre d’affaires réalisé et le résultat financier. Par ailleurs, aucune explication n’est fournie sur l’accroissement significatif au 31 décembre 2009 des charges exceptionnelles augmentées de 377.921 K€ à 1.011.737 K€ entre 2008 et 2009 ayant nécessairement une répercussion négative sur le bénéfice passé de 1.029.402 K€ à 208.922 K€ entre 2008 et 2009 et demeurant néanmoins positif à cette date. La pièce intitulée comptes annuels au 31 décembre 2009 fait de plus apparaître un accroissement de l’actif passé de 11.163.718,89 K€ en 2008 à 11.530.461,25 en 2009, dont un montant de 4.650.447,07 K€ au titre des valeurs mobilières de placement et de 656.380,83 K€ au titre de disponibilités, toutes données réfutant l’existence de difficultés financières telles que mentionnées dans la lettre de licenciement faisant état de la nécessité d’adapter notre stratégie aux nouvelles réalités économiques.

S’agissant plus précisément de l’activité spécifique de l’activité de courtage en crédits immobiliers dont la lettre de licenciement souligne que le résultat reste déficitaire depuis son lancement en mars 2007, la société MB Finances produit des tableaux dressés unilatéralement faisant certes état d’une baisse de résultats entre 2008 et 2009, sans cependant produire de pièces comptables distinctes sur l’évolution précise de ce secteur d’activité, alors que par ailleurs il ressort de l’attestation de Mlle X qu’après deux années d’exploitation de portefeuille général au sein du département Géomarketing, elle a été affectée fin 2009 sur le secteur du rachat des crédits hypothécaires correspondant nécessairement aux crédits immobiliers.

De même, la convention de partenariat signée le 8 janvier 2011 entre la société Negocial Finance immatriculée le 8 décembre 2010 et la SAS Mentor, groupe auquel appartient la société MB Finances, fait apparaître que la société Mentor en sa qualité d’apporteur d’affaires s’est engagée à promouvoir les prestations de financement immobilier proposées par Négocial Finance auprès de ses clients ayant besoin d’un financement pour l’acquisition, la construction ou l’amélioration de leur résidence principale, secondaire ou locative, tous éléments démontrant que, contrairement à ce qu’elle prétend, la société MB Finances n’a pas renoncé à l’activité de courtage en matière de crédits immobiliers.

Il résulte de l’ensemble de ces données que la preuve n’est pas démontrée par la société MB Finances de l’existence de difficultés financières et d’une situation économique dégradée telle qu’elle ait justifié la mise en 'uvre de la procédure de licenciement.

S’agissant de l’obligation de reclassement, M. A soutient que la société MB Finances n’a pas procédé à une recherche complète de reclassement à son profit au sein du groupe, la société MB Finances affirmant pour sa part avoir rempli ses obligations en présentant au salarié des offres précises et individualisées de reclassement relevant des activités du groupe auxquelles il a choisi de ne pas donner suite.

Il est constant que conformément aux dispositions de l’article L.1233-4 du Code du travail, l’employeur est tenu à une obligation de reclassement au profit du salarié devant s’effectuer sur un poste relevant de la même catégorie que celui précédemment occupé, et à défaut sur un poste d’une catégorie inférieure, l’employeur devant en tout état de cause justifier d’offres écrites et précises.

En outre, si l’entreprise appartient à un groupe, c’est dans le cadre du groupe dont les activités, l’organisation ou le lieu de travail permettent la permutation de tout ou partie du personnel qu’il convient de raisonner.

Or, en l’espèce, il apparaît que si des offres de reclassement ont été proposées à M. A, il s’agissait d’offres unilatérales à des fonctions de chargé de clientèle et de négociateur immobilier emportant une rétrogradation du salarié, passant du statut de cadre à celui d’agent de maîtrise, ce qui a d’ailleurs été relevé par les membres du comité d’entreprise ayant émis un avis défavorable lors de la réunion du 11 décembre 2009 sur les projets de licenciement qui lui étaient soumis, dont celui de M. A.

En tout état de cause, la société MB Finances ne produit aucune pièce sur les recherches actives de reclassement de M. A au sein de l’ensemble du groupe Mentor incluant pas moins de 3.000 produits et 28 filiales dans trois métiers l’immobilier, la finance et l’assurance tel que spécifié par M. C, l’un des représentants du groupe Mentor, dans un article de presse en date du 10 septembre 2011, l’organigramme versé aux débats confirmant l’ampleur des activités de ce groupe.

Il ressort par ailleurs de l’extrait de registre du personnel de la société MB Finances produit aux débats que plusieurs analystes financiers ont été engagés entre le 1er décembre 2009 et le 6 avril 2010, soit sur la base d’un emploi distinct de ceux de négociateurs immobiliers ou chargés de clientèle tels que proposés à M. A, le plan de sauvegarde de l’emploi soumis au comité d’entreprise le 6 avril 2009 distinguant bien entre les emplois de chargé de clientèle et ceux d’analyste financier ainsi qu’il ressort de la liste des postes supprimés.

Dès lors, à défaut de preuve rapportée par la société MB Finances sur la réalité de recherches effectives et complètes auprès de l’ensemble des sociétés et filiales composant ce groupe, il doit être considéré qu’elle n’a pas rempli parfaitement son obligation de reclassement.

Pour l’ensemble de ces raisons, et à supposer même que la société MB Finances justifie de difficultés économiques sérieuses, le licenciement de M. A doit être tenu pour dénué de cause réelle et sérieuse pour manquement de l’employeur à son obligation de reclassement.

Le préjudice subi de ce fait par l’intéressé, compte tenu de son âge, de son ancienneté mais aussi du fait qu’il a créé une société dès le 15 février 2010, sera réparé par l’allocation d’une somme que la Cour est en mesure de fixer à 30.000 €.

Les conditions d’application de l’article L.1235-4 du Code du travail étant remplies, il y a lieu d’ordonner le remboursement par l’employeur à l’organisme concerné des indemnités de chômage effectivement payées au salarié à la suite de son licenciement, dans la limite de trois mois.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

— Sur l’article 700 du Code de procédure civile

Il sera alloué une somme de 1.200 € à M. A au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire,

INFIRME PARTIELLEMENT le jugement déféré et statuant à nouveau,

DIT que le licenciement de M. A est dénué de cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la société MB Finances à lui payer :

—  30.000 € (TRENTE-MILLE EUROS) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

—  1.200 € (MILLE DEUX CENTS EUROS) au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

ORDONNE le remboursement par la société MB Finances à l’organisme concerné des indemnités de chômage versées à M. A par suite de son licenciement dans la limite de trois mois ;

CONFIRME pour le surplus le jugement déféré ;

CONDAMNE la société MB Finances aux entiers dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile,

Et signé par Madame SCHMEITZKY, président, et par Madame Y, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Minute en six pages.

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Textes cités dans la décision

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  2. Code du travail
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Cour d'appel de Nancy, 29 juin 2012, n° 11/02458