Cour d'appel de Nîmes, 23 novembre 2016, n° 15/04353

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nîmes, 23 nov. 2016, n° 15/04353
Juridiction : Cour d'appel de Nîmes
Numéro(s) : 15/04353
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Mende, JAF, 1er juillet 2015, N° 13/00369

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N°

R.G : 15/04353

CLM

JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES DE MENDE

02 juillet 2015

RG:13/00369

X

C/

Y

Grosse + copie

délivrées le 23/11/16

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

3e chambre famille

ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 2016

APPELANT :

Monsieur Z X

né le XXX à XXX)

XXX

XXX

Représenté par Me Philippe POUGET,
Plaidant/Postulant, avocat au barreau de LOZERE

INTIMÉE :

Madame A Y

née le XXX à XXX)

XXX

XXX

XXX

Représentée par Me Carine REDARES de la SELARL RS
AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D’AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 27 Septembre 2016

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme B C, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 786 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme D E, Présidente

Mme B C, Conseillère

Madame Mireille VALLEIX, Conseiller

GREFFIER :

Mme Véronique VILLALBA, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique, le 05 Octobre 2016, où l’affaire a été mise en délibéré au 23
Novembre 2016

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé et signé par Mme D E, Présidente, publiquement, le 23 Novembre 2016,

EXPOSE DU LITIGE :

Le divorce de M. X et Mme Y, qui s’étaient mariés le 27 février 1999 avec contrat préalable de séparation des biens, a été prononcé par jugement en date du 27 janvier 2011, désignant le président de la chambre des notaires, avec faculté de délégation, pour procéder aux opérations de liquidation du régime matrimonial.

Le notaire en charge des opérations de liquidation,
Maître F, a établi un procès-verbal de difficultés le 14 janvier 2013.

Par acte d’huissier en date du 9 septembre 2013, M. X a fait assigner Mme Y devant le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Mende.

Par jugement contradictoire en date du 2 juillet 2015, le juge aux affaires familiales a :

— dit que les comptes entre M. X et Mme Y dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial s’établissent comme suit :

— créance de M. X sur Mme Y :

373,50 + 82.500 = 82.873,50 euros,

— créance de Mme Y sur M. X :

16.733,4 + 60.804,26 + 3.000 + 1.500 + 1.774,50 = 83.812,16 euros,

— fixé, après compensation, la créance de Mme Y au titre de la liquidation du régime matrimonial et des comptes entre les parties à la somme de 938,66 euros,

— condamné en tant que de besoin M. X à payer cette somme de 938,66 euros à Mme Y,

— renvoyé les parties devant le notaire pour établir un acte conformément aux présentes,

— débouté les parties du surplus de leurs demandes,

— dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.

Par déclaration en date du 16 septembre 2015, M. X a formé appel total de ce jugement. Mme Y a constitué avocat.

Par ordonnance rendue le 13 mai 2016, le magistrat chargé de la mise en état a fixé l’affaire à l’audience de plaidoiries du 5 octobre 2016, avec clôture de la procédure à effet au 27 septembre.

Par conclusions du 22 avril 2016, M. X demande à la cour de :

— déclarer recevable et bien fondé son appel,

— réformer le jugement querellé,

— dire que M. X bénéficie d’une créance sur Mme Y de 145.374,17 euros dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial,

— fixer l’éventuelle créance de Mme Y sur M. X à 8.757,90 euros à titre principal, et à 39.857,90 euros à titre subsidiaire,

— condamner en conséquence Mme Y à payer à M. X la somme de 136.116,27 euros à titre principal, et 105.516,27 euros à titre subsidiaire,

— dire que cette somme produira intérêts à compter du jour d’ouverture des opérations de liquidation, soit le 9 septembre 2011,

— condamner Mme Y à payer à M. X la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens d’appel,

— débouter Mme Y de son appel incident et demandes plus amples ou contraires.

Exposant liminairement que l’épouse a tout au long du mariage détourné à l’insu du concluant les revenus de celui-ci pour se constituer une importante épargne alors qu’elle n’avait pratiquement aucun patrimoine lors de la célébration du mariage, M. X indique qu’il souhaite que la procédure de partage permette un tant soit peu de rééquilibrer les choses.

M. X soutient qu’il dispose de plusieurs créances à l’encontre de Mme Y, ci-après détaillées, dont le montant total s’élève à 145.374,17 euros.

— sur la créance au titre du financement du terrain et de la construction de la maison :

M. X revendique une créance d’un montant de 129.138,20 euros, soit 27.412,73 euros au titre du terrain et 101.725,47 euros au titre de la construction de la maison.

À cet égard, il précise qu’il a financé le prix du terrain à hauteur de 91,38 %, et que ledit terrain a été évalué par l’expert judiciaire nommé préalablement au prononcé du divorce à 30.000 euros.

Il reproche au premier juge d’avoir estimé qu’il ne rapportait pas la preuve de son apport dans l’acquisition de la parcelle, alors qu’il avait produit le cahier tenu par Mme Y, portant l’ensemble des dépenses exposées par chaque membre du couple, y compris pour l’acquisition du terrain, et alors que Mme Y n’avait précédemment jamais contesté, y compris devant le notaire, le principe de la créance de l’époux, ce qui constitue un aveu extrajudiciaire au sens de l’article 1355 du code civil.

L’appelant fait de la même façon valoir que le cahier de dépenses permet de constater qu’il a financé la construction de la villa en très grande partie.

M. X soutient que doit être écartée l’argumentation adverse selon laquelle le fait qu’une grande partie de la construction ait été réalisée avant mariage empêcherait l’application des dispositions des articles 1543 et 1469 alinéa 3 du code civil.
Il allègue que les dispositions en question visent les créances entre époux sans distinguer celles qui auraient une origine antérieure au mariage de celles qui seraient nées au cours du mariage. Il ajoute que la jurisprudence enseigne que l’époux qui revendique une créance contre son conjoint peut exercer son action lors de l’établissement des comptes de liquidation, même si la créance est antérieure au mariage, de sorte que le juge du partage est bien compétent pour apprécier l’existence et le montant de la créance litigieuse. Enfin il précise que, dans l’hypothèse où la
Cour estimerait les dispositions de l’article 1469 alinéa 3 non applicables, il conviendrait de statuer par application de la théorie de l’enrichissement sans cause, et d’écarter tout autant le moyen développé par l’intimée selon lequel la créance devrait être évaluée à sa valeur nominale.

Par ailleurs, l’appelant conteste l’argumentation de l’intimée aux termes de laquelle d’une part la participation plus importante du concluant au financement du domicile conjugal n’était que la simple exécution de sa contribution aux charges du mariage, et d’autre part il appartiendrait au concluant d’établir l’absence d’intention libérale attachée au financement des travaux.

Il fait enfin valoir que la Cour pourra, au besoin, dissocier dans la fixation du montant de sa créance, la part antérieure au mariage fixée à 23.391,59 euros sur le fondement de l’enrichissement sans cause de la part postérieure au mariage pour 105.746,61 euros.

— sur les rétablissements :

M. X revendique une créance de 6.000 euros, compte tenu du prélèvement de 12.000 euros effectué par Mme Y sur le compte bancaire commun à des fins purement personnelles, s’agissant d’effectuer un don à ses enfants. Il conteste que ce don ait été fait par l’épouse en utilisant le prétendu prix d’une vente d’un bien immobilier propre de celle-ci.

Il estime aussi disposer d’une créance de 9.862,47 euros, provenant d’un placement du

concluant et détourné par Mme Y.

— sur le paiement des taxes foncières :

L’appelant fait valoir que le couple a réglé les taxes foncières 2006 et 2007 pour le bien immobilier détenu en propre par l’épouse, de sorte que cette dernière doit lui rembourser la moitié de ces taxes, à savoir la somme de 373,50 euros.

M. X estime par ailleurs que la créance de Mme Y à son encontre doit être arbitrée à un total de 8.757,90 euros et se décompose comme suit :

—  2.483,40 euros au titre des échéances du crédit de 30.000 euros (camping-car) sur la période courant de mai 2006 jusqu’à l’ordonnance de non-conciliation,

—  3.000 euros au titre de l’occupation de l’immeuble propre de Mme Y par le concluant,

—  1.500 euros au titre de diverse meubles meublants,

—  1.774,50 euros au titre des véhicules automobiles
Vitera et Clio.

Il fait valoir que l’intimée doit être déboutée de sa demande de fixation de créance au titre de la valeur du camping-car comme au titre du prétendu apport lors de l’acquisition du deuxième camping-car, dans la mesure où les deux véhicules sont des biens propres du concluant.

Il conclut également au rejet de la demande de l’intimée au titre d’une prétendue créance de 59.408,53 euros qui proviendrait d’un de ses placements et aurait alimenté un deuxième placement du concluant, reprochant à cet égard au premier juge d’avoir accueilli cette prétention en inversant la charge de la preuve et d’avoir estimé que la preuve de l’intention libérale n’était pas rapportée.

Subsidiairement sur ce dernier point, M. X demande à la Cour de considérer que la revendication de Mme Y doit être limitée à 31.100 euros, la somme de 62.200 euros étant devenue indivise du fait de son versement sur le compte joint.

Enfin l’appelant s’oppose à la demande d’octroi de larges délais de paiement présentée subsidiairement par l’intimée, en soutenant qu’elle dispose d’une épargne suffisante pour faire face à ses obligations.

Par conclusions du 14 septembre 2016, Mme Y demande à la cour de :

— à titre principal,

— réformer le jugement entrepris,

— fixer la créance due par M. X à Mme Y à la somme de 100.312,16 euros,

— condamner M. X en conséquence au paiement de ladite somme,

— à titre subsidiaire,

— réformer le jugement entrepris,

— fixer la créance due par Mme Y à M. X à la somme de 23.391,59 euros,

— fixer la créance due par M. X à Mme Y à la somme de 100.312,16 euros,

— ordonner la compensation entre les deux sommes,

— condamner en conséquence M. X au paiement de la somme de 76.920,57 euros,

— à titre infiniment subsidiaire,

— réformer le jugement entrepris,

— fixer la créance due par Mme Y à M. X à la somme de 82.500 euros,

— fixer la créance due par M. X à Mme Y à la somme de 100.312,16 euros,

— ordonner la compensation entre les deux sommes,

— condamner en conséquence M. X au paiement de la somme de 17.812,16 euros,

— en tout état de cause,

— accorder à Mme Y les plus larges délais de paiement, si elle venait à être condamnée,

— renvoyer les parties devant le notaire afin qu’il soit établi un acte conforme à ce qui sera jugé,

— condamner M. X au paiement de la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles de justice,

— condamner M. X au paiement des entiers dépens d’appel.

Contestant d’abord les propos de l’appelant selon lesquels elle n’aurait disposé d’aucun patrimoine lors du mariage et aurait dépouillé son mari par jeu d’écritures bancaires à son insu, Mme Y demande confirmation du jugement en ce qu’il a retenu ses prétentions mais infirmation en ce qu’il a à tort retenu certaines demandes de M. X.

Elle fait observer que le jugement de divorce l’a déboutée de sa demande de prestation compensatoire, motifs pris de l’absence de preuve de la disparité requise par l’article 270 du code civil malgré la différence de revenus, tenant compte ainsi du patrimoine qui était le sien, à savoir l’appartement de Cavaillon alors évalué à 109.000 euros et les placements à hauteur de 137.205 euros provenant notamment de la vente de l’ancien domicile conjugal.

Concernant l’acquisition du terrain, bien propre de la concluante, et l’édification de la maison sur ce terrain, également bien propre, elle fait d’abord valoir qu’elle n’a jamais contesté que son époux avait participé matériellement et financièrement à la construction alors que le couple n’était pas encore marié.

L’intimée soutient que l’acquisition du terrain comme la construction de la maison ont été faites avant le mariage intervenu en 1999, de sorte que M. X ne peut se prévaloir des dispositions de l’article 1469 du code civil, lequel ne s’applique qu’aux créances entre époux, et qu’il ne peut fonder sa demande que sur le prêt à usage, voire l’enrichissement sans cause.
Elle prétend qu’une éventuelle indemnisation ne pourrait se faire que de façon nominale, eu égard aux dépenses engagées, dont l’éventuelle preuve serait rapportée.

Mme Y allègue que l’appelant ne rapporte pas la preuve des prétendues dépenses qu’il

invoque, et fait valoir que l’application du cahier de comptes reviendrait à omettre la situation usuellement admise par laquelle un époux finance les travaux, tandis que l’autre finance les dépenses courantes du ménage. Elle soutient qu’après le mariage, l’éventuelle participation plus importante de l’époux quant au financement de la maison n’était que la simple exécution de sa contribution aux charges du mariage.

Elle fait également observer que l’appelant n’a pas entendu faire valoir de créance à ce titre lors des opérations d’expertise.

Enfin Mme Y précise que si elle a proposé que la part de M. X soit fixée à la somme de 97.250 euros, soit la moitié du prix de vente de la maison déduction faite des frais de diagnostics, ce n’était que pour autant que soient retenues les dettes du mari à son endroit.

Subsidiairement, si la preuve résultant du cahier est admise, Mme Y estime que la créance de M. X doit être arrêtée à la somme de 23.391,59 euros. Encore plus subsidiairement, si la Cour devait estimer que le financement de la construction est intervenu après le mariage, le jugement rendu devrait, selon l’intimée, être confirmé en ce qu’il a fixé la créance de l’appelant à la somme de 82.500 euros.

Par ailleurs, soutenant apporter la preuve de ce qu’elle a alimenté le compte joint de la somme de 15.245 euros trois mois avant l’émission des dons manuels de 12.000 euros à ses enfants, elle reproche au premier juge d’avoir retenu une créance de 6.000 euros à ce titre au profit de M. X. Elle allègue qu’en tout état de cause, il ressort de l’émission des deux chèques que l’époux a accepté la donation querellée au profit des enfants de la concluante, tiers à la procédure.

Elle lui reproche encore d’avoir retenu une créance au profit de M. X relativement au paiement des taxes foncières, lesdites taxes ayant été acquittées par prélèvements sur le compte joint, lequel était alimenté par les pensions de retraite des deux époux. De plus, Mme Y fait observer qu’il était normal que M. X participât à ce paiement au titre de sa contribution aux charges du mariage.

En revanche, Mme Y approuve le premier juge d’avoir rejeté la demande de M. X au titre de la somme de 9.862,47 euros que la concluante aurait prélevée sur le compte joint, provenant d’un rachat de placement dont disposait le mari. Elle souligne la contrariété des moyens invoqués par l’appelant.

L’intimée approuve également le jugement querellé en ce qu’il lui a alloué la somme de 14.250 euros, correspondant à la moitié de la valeur d’apport du premier camping-car, mais le conteste en ce qu’il a refusé de lui allouer la somme de 5.000 euros alors qu’elle démontre qu’elle a fourni cette somme par clôture d’un PEA. Elle demande aussi remboursement des échéances de prêts prélevés sur le compte joint, pour moitié, de mai 2006 jusqu’à l’ordonnance de non-conciliation.

Par ailleurs, l’intimée conteste toute donation au profit de son époux de la somme de 62.200 euros.

Au titre de l’indemnité d’occupation, Mme Y réclame une somme de 6.000 euros, soit 750 euros sur huit mois.

Quant à la créance au titre des meubles meublants, elle soutient qu’elle doit être évaluée à 10.000 euros, l’époux ayant vidé la maison de tout son mobilier.

Enfin, Mme Y estime sa créance au titre des deux véhicules acquis indivisément à la

somme de 1.774,50 euros.

MOTIFS :

Les seules dispositions du jugement frappé d’appel qui ne sont pas discutées par les parties sont la fixation de la créance de Mme Y à l’égard de M. X à la somme de 1.774,50 euros au titre des véhicules automobiles dont les époux étaient propriétaires indivis et le renvoi des parties devant le notaire sur la base de l’arrêt à intervenir. Elles sont donc confirmées.

Il est rappelé liminairement que les parties ont opté, par contrat de mariage du 13 février 1999, pour le régime de la séparation des biens, préalablement à la célébration de leur union le 27 février 1999.

— Sur les demandes de M. X :

— Sur l’ensemble immobilier sis à Brenoux (Lozère) :

— sur l’achat du terrain :

Il est constant que, le 29 décembre 1992, Mme Y a fait l’acquisition à Langlade, sur la commune de Brenoux, d’un terrain à bâtir, au prix de 9.146,94 euros (60.000 francs), lequel constitue donc un bien propre de l’épouse. L’acte notarié précise que le prix a été payé comptant.

Il sera d’abord relevé, puisque M. X argumente sur la compétence du juge de la liquidation pour statuer sur la créance qu’il invoque au titre du financement du terrain en question, que Mme Y ne discute pas de cette compétence. Celle-ci est donc acquise.

En revanche, Mme Y discute à bon droit des règles permettant de fixer la créance de M. X à ce titre, à supposer qu’il rapporte la preuve du financement, puisque les dispositions de l’article 1469 du code civil, par renvoi de l’article 1543 du même code, ne peuvent fonder une telle demande, ne concernant que les créances entre époux et non les créances nées avant le mariage. C’est donc sur le fondement de l’enrichissement sans cause que la demande de M. X doit être examinée, ainsi que le soutient l’intimée et que l’admet l’appelant à titre subsidiaire.

Il appartient à M. X de rapporter la preuve de sa participation au financement de l’achat du terrain, ce qu’il fait en produisant un cahier à spirale qui porte en page 1 trois colonnes, la première mentionnant des dépenses, la deuxième recensant les dépenses de Z (l’appelant), et la troisième les dépenses de A (l’intimée). Mme Y ne conteste pas que ce cahier était tenu par elle et qu’elle y a apposé les diverses mentions.

Or sur la première page, apparaît l’acquisition du terrain avec la date, ainsi détaillée :

terrain notaire 70.400 francs, paiement Z de 62.000 francs, paiement A de 8.400 francs, ainsi que terrain à Mme G (qui n’est autre que la venderesse) 27.000 francs, paiement Z de 27.000 francs. Dans la colonne Z, à côté des deux dépenses en question, est porté le total par lui réglé, à savoir 89.000 francs.

Mme Y n’explique pas en quoi ce cahier ne pourrait être retenu comme preuve. Il importe peu que M. X ne justifie pas de l’origine des fonds tout comme il importe peu qu’à l’époque de l’acquisition, il fût encore dans les liens d’un précédent mariage, Mme Y l’étant d’ailleurs tout autant de son côté selon la mention portée sur l’acte

d’acquisition. Il est tout aussi inopérant pour Mme Y d’invoquer le fait que l’acte porte la mention d’un paiement comptant, ladite mention ne donnant aucune indication quant à l’origine des fonds.

Encore est-il sans intérêt de savoir si M. X a ou non produit au cours de l’expertise le cahier à spirale pour démontrer l’existence de sa créance, dans la mesure où rien n’interdit de fournir en justice une pièce qui n’avait pas été communiquée en cours d’expertise et où Mme Y ne conteste pas la véracité de cette pièce.

Quant au moyen encore opposé par Mme Y à la demande de M. X, consistant à dire que faire application des mentions du cahier à spirale reviendrait à omettre la situation usuellement admise par laquelle l’une des parties finance les travaux tandis que l’autre finance les dépenses courantes, il ne saurait plus être admis, les parties n’étant pas mariées au jour de l’acquisition et la contribution aux charges du mariage étant à l’époque naturellement hors de propos.

Au surplus, il sera observé que Mme Y ne donne aucune indication quant aux fonds avec lesquels elle aurait réglé le prix d’acquisition du terrain.

Dans ces conditions, le jugement querellé doit être réformé en ce qu’il a estimé que M. X ne rapportait pas la preuve de son apport dans l’acquisition de la parcelle et en conséquence rejeté sa demande de fixation de créance à ce titre.

De jurisprudence constante, l’indemnité due à l’appauvri est égale à la moins élevée des deux sommes représentatives, l’une de l’enrichissement, l’autre de l’appauvrissement. M. X ne peut donc réclamer davantage que la perte subie. Alors que l’enrichissement s’apprécie au jour de la demande en justice, l’appauvrissement s’apprécie au jour de sa réalisation, sans réévaluation possible.

En conséquence de cette règle, c’est à bon droit que l’intimée prétend que la créance de M. X au titre de l’acquisition du terrain s’élève à la somme de 13.567,96 euros (89.000 francs).

— sur le financement de la construction de la maison :

En juin 1994, Mme Y a obtenu le permis de construire, et la maison qui a ensuite constitué le domicile conjugal a été édifiée sur le terrain propre de Madame. L’immeuble constitue donc un propre de celle-ci. Il a été vendu le 31 octobre 2008, moyennant le prix de 195.000 euros.

Les mêmes règles que celles précédemment énoncées s’appliquent pour toutes les dépenses que M. X justifie avoir effectuées pour financer les travaux d’édification de la maison, jusqu’au jour du mariage, intervenu le 27 février 1999.

Le carnet de dépenses tenu par l’épouse enseigne que d’avril 1993 à septembre 1997, M. X a financé l’achats de nombreux matériaux ainsi que des travaux de terrassement et goudronnage. Le montant total de ces dépenses représente la somme de 9.823,63 euros (64.438,82 francs), et non la somme de 154.253 francs alléguée par l’appelant, dans laquelle il inclut les sommes versées pour l’achat du terrain.

Également sur le fondement de l’enrichissement sans cause et du fait des règles d’évaluation de l’indemnité déjà rappelées en la matière, la créance de M. X à l’encontre de Mme Y au titre des matériaux et travaux sur le bien propre de celle-ci doit être fixée à cette somme de 9.823,63 euros.

Pour la période postérieure au mariage, la construction a été financée conjointement.

Selon l’appelant, l’intimée n’a pas contesté le principe de la créance qu’il réclame à ce titre devant le notaire, et cette reconnaissance constitue un aveu extrajudiciaire au sens de l’article 1355 du code civil.

Or, le notaire a consigné dans le procès-verbal de difficultés visé par M. X comme fondant l’aveu extrajudiciare, en page 5, que 'S’agissant de la créance sollicitée par l’époux au titre de la maison de BRENOUX, l’épouse n’en conteste pas le principe, mais le montant, estimant avoir financé et participé à la construction de cette maison dans des proportions équivalentes à celle de son époux.'

Etant précisé qu’il n’a nullement été distingué dans les dires des parties consignés par le notaire entre les périodes antérieure et postérieure à la célébration du mariage, il ne peut être tiré de cette mention un quelconque aveu extrajudiciare de Mme Y quant à l’admission de la créance réclamée en justice par l’époux.

Par ailleurs, nonobstant l’allégation de Mme Y, le silence du contrat de mariage à cet égard (construction de la maison) n’empêche nullement M. X de réclamer une créance.

Pour autant, la prétention de l’époux revendiquant doit être examinée à l’aune de son obligation de contribution aux charges du mariage, ainsi que le soutient à juste titre l’intimée.
Le contrat de mariage renvoie aux dispositions de l’article 214 du code civil, soit à une participation des époux à ces charges à proportion de leurs facultés respectives.

L’époux qui fait réaliser à ses frais des travaux sur le bien propre de son conjoint, logement de la famille, ne fait par principe que contribuer aux charges du mariage, de sorte qu’il ne peut revendiquer aucune créance à l’égard de son conjoint de ce chef, sauf à démontrer que son financement a excédé sa contribution. Il est constant que toutes les dépenses relatives au logement de la famille, qu’il s’agisse ou non d’un propre, tombent sous le coup de l’article 214 du code civil.

En conséquence, il appartient à M. X de démontrer que sa participation aux frais de construction de la maison durant le mariage a excédé sa contribution aux charges du mariage au regard des capacités financières respectives des époux.

L’appelant ne peut tenter d’échapper à cette obligation de preuve en soutenant que la clause du contrat de mariage relative aux créances entre époux prévoit qu’elles seront évaluées conformément aux dispositions de l’article 1469 alinéa 3 du code civil indépendamment de la contribution aux charges du mariage. En effet, ladite clause dispose d’abord que 'le montant et les conditions de remboursement des créances qui naîtront entre les époux au cours du régime résulteront du droit commun des obligations ou des conventions des époux', et précise ensuite qu’elles seront toutefois évaluées selon les règles de l’article 1469 alinéa 3 dans les cas prévus par ce texte. Elle n’empêche ainsi en rien d’examiner si, conformément au droit commun, la créance revendiquée est ou non neutralisée par l’obligation légale de contribuer aux charges du mariage, d’ailleurs rappelée dans une autre clause du contrat.

Or M. X affirme que sa participation aux travaux a excédé la simple exécution de sa contribution aux charges du mariage, mais il ne l’établit pas.

Les avis d’imposition du couple produits par Mme Y de 2003 à 2007 démontrent que les revenus de Monsieur ont toujours été beaucoup plus élevés que ceux de son épouse.
Tandis que le revenu annuel de Mme Y était de l’ordre de 8.800 euros, celui de l’époux était de l’ordre de 15.745 euros en 2003 pour atteindre 23.519 euros en 2006.

En conséquence, M. X sera débouté de sa demande de fixation d’une créance au titre de sa participation à la construction de la maison pour la période postérieure à la célébration du mariage, et le jugement déféré sera réformé sur ce point.

— Sur les demandes de rétablissement :

— sur la créance alléguée de 6.000 euros :

Il est constant que, le 25 décembre 2005, Mme Y a établi deux chèques au profit de ses enfants, pour un montant total de 12.000 euros, tirés sur le compte joint ouvert au Crédit agricole sous le numéro 63462478000.

Pour contester la créance revendiquée par M. X à cet égard, elle fait valoir que, le 27 septembre 2005, elle a alimenté le compte joint de fonds personnels à hauteur de 15.245 euros, de sorte que les fonds donnés à ses enfants ne peuvent être considérés comme indivis même s’ils ont été prélevés sur le compte joint. Effectivement, l’intimée justifie de ce que, ayant vendu par acte du 24 septembre 2005 l’appartement dont elle était propriétaire à
Cavaillon au prix de 59.500 euros, elle a versé sur le compte joint des époux la somme de 15.245 euros le 27 septembre 2005.

Conformément aux dispositions de l’article 1538 alinéa 3 du code civil, les fonds déposés sur un compte joint sont présumés indivis. Cette présomption peut être combattue par l’époux qui prétend que les fonds lui sont en réalité personnels notamment lorsqu’il utilise les fonds en question peu de temps après les avoir déposés sur le compte joint, à charge de rapporter la preuve de la traçabilité des fonds en cas de contestation.

En l’espèce, les relevés bancaires du compte joint ouvert au Crédit agricole sur lequel a été déposée par Mme Y la somme de 15.245 euros, produits par l’intimée (pièces 24 et 25), couvrant les périodes du 11 au 28 octobre 2005 et du 2 au 15 novembre 2005, permettent d’établir que ce compte était alimenté par des fonds provenant des deux époux, élément non contesté par les parties. Mais surtout ces relevés font apparaître que de nombreuses opérations ont été effectuées sur ce compte, et particulièrement de nombreux débits postérieurement au versement effectué par Mme Y le 27 septembre 2015. Ainsi, dès le 12 octobre suivant, la somme totale de 15.244,72 euros a été débitée sur le compte, par virement à parts pratiquement égales effectués sur des comptes personnels de chaque époux.
Le montant total de ces virements identique au montant de la somme versée quelques jours auparavant par Madame démontre que la somme a été utilisée à d’autres fins qu’un don à ses enfants.

En conséquence, Mme Y ne combat pas utilement la présomption d’indivision.

Le moyen par lequel l’intimée soutient que la simple émission des deux chèques démontre l’acceptation par l’époux de la donation ainsi querellée au profit des enfants de la concluante, tiers à la procédure, et en conséquence l’impossibilité pour celui-ci de revendiquer aujourd’hui une créance à ce titre doit être rejeté. En effet, dans un régime séparatiste, compte tenu de l’exception que constitue le compte joint dans le cloisonnement des patrimoines, une dépense personnelle d’importance faite à partir de fonds indivis, et ce dans le seul intérêt de l’un des conjoints, peu important la finalité de l’opération personnelle, du moment qu’il ne s’agit pas d’une dépense ayant profité au ménage ou à l’autre conjoint, est susceptible de d’ouvrir droit à un principe de créance.

Le fait que M. X n’ait pas protesté en son temps contre cette dépense ne le prive pas de revendiquer une créance dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial.

Le jugement frappé d’appel doit être confirmé en ce qu’il a fixé la créance de M. X à l’encontre de Mme Y à la somme de 6.000 euros correspondant à la moitié de la somme prélevée par celle-ci le 25 décembre 2005 sur les fonds indivis à des fins personnelles.

— sur la créance alléguée de 9.862,47 euros :

Le compte joint des époux a été crédité le 18 novembre 2003 de la somme de 50.198,72 euros.

L’intimée conteste en vain l’affirmation de l’appelant selon laquelle cette somme correspondait à un placement de M. X, auprès de la Banque San Paolo, qu’il avait alors clôturé.

En effet, non seulement elle ne donne, à l’appui de sa contestation, aucune indication sur l’origine de cette somme qui représente pourtant un montant conséquent et dont elle ne peut en conséquence ignorer l’origine, mais encore M. X produit un document manuscrit dont elle ne conteste pas la véracité, de la même écriture que celle du cahier à spirale, qui liste différents placements et porte la mention San Paolo, placement Capi 3, et le montant de 320.100 francs, soit 48.798,93 euros, avec la précision qu’il est disponible le 1er septembre 2003.

Le relevé du compte joint démontre que ces fonds propres de M. X, déposés sur le compte joint, ont fait l’objet d’une utilisation dès le 25 novembre 2003, à hauteur d’une part de 27.598,69 euros pour le remboursement anticipé du prêt ayant permis l’acquisition du 2e camping-car, et d’autre part de 10.090,19 euros virés sur les comptes personnels du mari et de 9.862,47 euros virés sur les comptes personnels de l’épouse.

En conséquence la présomption du caractère indivis des fonds figurant sur le compte commun est, pour ces opérations, combattue avec succès par M. X.

Par ailleurs, contrairement à ce qu’affirme Mme Y, l’appelant ne soutient pas que les virements ont été exécutés sur les comptes personnels de chacun d’un commun accord, mais indique au contraire qu’ils ont été faits par l’épouse à son insu.

Mme Y ne démontrant aucune intention libérale de la part de l’époux, il sera fait droit à la demande de fixation de créance présentée par ce dernier à hauteur de 9.862,47 euros.

— Sur les taxes foncières 2006 et 2007 :

S’agissant des charges relatives au domicile conjugal, et bien qu’il s’agisse d’un immeuble propre de l’épouse, les taxes foncières 2006 et 2007, réglées par des fonds indivis à partir du compte joint à propos duquel il est à nouveau rappelé qu’il était alimenté par les deux époux, ont participé de la contribution aux charges du mariage de chacun des époux.

M. X ne peut se prévaloir d’une créance à ce titre.

Il sera donc débouté de sa demande, et le jugement querellé sera infirmé en ce qu’il lui avait alloué à ce titre la somme de 373,50 euros.

Au vu des éléments qui précèdent, la créance totale de M. X à l’encontre de Mme Y est arrêtée à la somme de 39.254,06 euros (13.567,96 + 9.823,63 + 6.000 + 9.862,47).

— Sur les demandes de Mme Y :

— Sur les camping-cars :

— Sur la créance alléguée au titre de l’acquisition en 2006 du camping-car de marque
CITROEN, modèle RAPIDO :

Le contrat de mariage dispose que 'chacun des époux établira la propriété de ses biens par tous les moyens de preuve prévus par la loi', avant d’énumérer un certain nombre de présomptions.

Mme Y soutient détenir une créance de 21.733,40 euros, se décomposant comme suit :

— la moitié de la valeur du véhicule d’occasion repris par la société EVASION 63, soit 14.250 euros,

— l’apport de la somme de 5.000 euros lors de l’acquisition du camping-car en 2006,

— le remboursement des échéances de prêts prélevés sur le compte joint de mai 2006 à l’ordonnance de non-conciliation, soit 4.966,80 euros / 2 = 2.483,40 euros.

M. X soutient au contraire que Mme Y ne peut prétendre à ce titre qu’à la somme de 2.483,40 euros.

Il est constant et non discuté par les parties que :

— le 18 avril 2006, M. X s’est porté acquéreur d’un camping-car de marque RAPIDO, moyennant le versement de la somme de 50.900 euros,

— la facture établie par la société EVASION 63 est au seul nom de Monsieur,

— le prix a été financé à hauteur de 28.500 euros grâce à la reprise d’un précédent camping-car de marque CITROEN, modèle PILOTE, qui avait été acquis en 2003 au prix de 42.685,72 euros, à hauteur de 5.000 euros par chèque tiré sur le compte joint et par un prêt de 17.400 euros remboursé par mensualités prélevées sur le compte joint.

Il convient d’abord de déterminer le financement de la première acquisition du camping-car
PILOTE, puisque Mme Y revendique la moitié du prix de revente de ce véhicule, soutenant qu’il s’agissait d’un bien indivis tandis qu’au contraire M. X prétend qu’il s’agissait d’un bien propre.

La facture de ce camping-car, émise par la société EVASION 63 le 17 avril 2003, est au seul nom de Monsieur. Sur le bon de commande, a été rajoutée devant les seuls nom et prénom de Monsieur la mention 'Mr et Mme', ladite mention, portée sur le document dans des conditions ignorées, ne pouvant démontrer que le bien est indivis, d’autant qu’elle est en contradiction avec la facture établie au seul nom de Monsieur.

Ce camping-car doit donc être regardé comme bien propre de M. X, le titre l’emportant sur la finance. Il n’en reste pas moins que, pour évaluer la demande de créance de Mme Y, il convient d’examiner par quels fonds il a été financé.

Il résulte des conclusions de M. X, approuvées sur ce point par Mme Y, que les fonds ayant permis l’acquisition de ce bien étaient des fonds communs, puisque les deux chèques de 1.600 et 41.085,72 euros ont été tirés sur le compte joint. Les époux avaient, dans

ce but, souscrit un prêt de 30.000 euros le 17 avril 2003.

Mais comme déjà dit plus haut, la réalisation du placement propre du mari auprès de la
Banque San Paolo a permis de rembourser le prêt en question à hauteur de 27.598,69 euros (opération du 25 novembre 2003).

En conséquence, la créance de Mme Y s’élève à 5.036,57 euros. Le jugement querellé doit être infirmé de ce chef.

En effet, 42.685,72 – 27.598,69 = 15.087,03 euros, soit le solde du prix après remboursement du prêt, ayant étant financé par les fonds indivis, la participation de Mme Y est égale à la moitié, soit 15.087,03 / 2 = 7.543,51 euros. Le véhicule ayant été revendu pour un montant de 28.500 euros, il convient d’opérer une règle de 3 pour obtenir le montant de la créance, selon le mode de calcul suivant : (contribution du patrimoine prêteur 7.543,51 / coût global d’acquisition du bien 42.685,72 ) X valeur du bien acquis au jour de sa vente 28.500.

Par ailleurs, comme déjà précisé, les parties s’accordent sur la créance de Mme Y au titre du remboursement des échéances de prêts prélevés sur le compte joint de mai 2006 à l’ordonnance de non-conciliation, soit 4.966,80 euros / 2 = 2.483,40 euros. Le jugement entrepris doit être confirmé sur ce point.

Enfin, il est constant que, le 4 avril 2006, le compte joint a été alimenté par la somme de 5.021,67 euros provenant de la clôture d’un PEA, et que dès le 6 avril suivant, un chèque de 5.000 euros a été tiré sur le compte afin de régler un acompte sur le prix du camping-car
RAPIDO.

Or M. X reste taisant sur ce
PEA, ne contestant donc pas qu’il s’agissait bien d’un placement personnel de l’épouse. Il se contente d’indiquer que Mme Y n’a pas prouvé que le chèque de 5.000 euros avait servi à l’acquisition du camping-car. La concomitance de la clôture du PEA et de l’achat du camping-car avec remise d’un acompte de 5.000 euros comme détaillé sur la facture produite par M. X ne laisse cependant pas de doute sur l’origine des fonds.

Dans ces conditions, Mme Y réclame à bon droit que soit fixée à son profit une créance de 5.000 euros. Le jugement sera réformé de ce chef.

— Sur le placement Confluence et la demande à hauteur de 60.804,26 :

Il n’est pas discuté que le 24 octobre 2005, Mme Y a déposé sur le compte commun la somme de 59.408,53 euros, correspondant au prix de vente d’un appartement sis à Cavaillon qui était un bien propre.

Il n’est pas discuté non plus que, le 8 novembre 2005, la somme de 62.000 euros a été prélevée sur le compte commun pour alimenter une assurance-vie, dite PREDICA
CONFLUENCE 3, au profit du mari, seul titulaire de ce compte épargne.

Le relevé de compte sur lequel figure l’opération porte des mentions manuscrites de calcul qui sont de la main de Mme Y, ce qu’elle ne conteste pas. Elle prétend que l’époux a prélevé de son propre chef cette somme sur le compte joint et qu’il ne s’agit nullement d’une donation.

Cette argumentation ne saurait convaincre. En effet, la proximité des dates entre les deux opérations et le commentaire par Mme Y de cette opération par la conversion en francs de la somme de 62.000 euros outre des calculs d’intérêts au-dessous démontrent qu’à

l’évidence, Mme Y a entendu faire donation à M. X de cette somme. Il importe peu de savoir qui a donné l’ordre du transfert de fonds, étant précisé que ce compte était déjà actif dès 2003 (page 3 de la pièce 24 de l’appelant, prélèvement sur ce compte le du 14 mars 2003), de sorte que Mme Y ne peut soutenir que l’époux a ouvert ledit compte pour pouvoir prélever des fonds. Le transfert du prix de vente de son bien propre sur un compte personnel du mari, du fait de la séparation de biens, avait pour effet de lui en transférer la propriété, ce que Mme Y ne pouvait ignorer. Le contrat de mariage rappelle d’ailleurs que les titres et valeurs nominatives, tout comme les espèces en dépôt sont présumés appartenir au titulaire du compte ou dépôt.

S’agissant d’un mouvement de valeur postérieur au 1er janvier 2005, la loi du 26 mai 2004 est applicable. L’article 1096 du code civil dispose en son alinéa 2 que la donation de biens présents faite entre époux n’est révocable que dans les conditions prévues par les articles 953 à 958 du même code. Mme Y ne soutient pas que ces conditions soient remplies.

Enfin, pour soutenir que M. X prétend à tort que cette donation serait intervenue dans un but de rééquilibrage des fonds placés au bénéfice des époux, l’intimée indique que, si rééquilibrage il y avait, il s’agissait essentiellement de compenser la situation immobilière, ayant conduit à ce qu’elle seule soit propriétaire de la maison de Brenoux. Il est manifeste que cette donation avait effectivement pour but de rééquilibrer les situations patrimoniales des parties compte tenu de la participation de M. X au financement du patrimoine propre de l’épouse.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu’il a considéré que la donation n’était pas établie et en ce qu’il a fixé à ce titre au bénéfice de Mme Y une créance.

— Sur l’indemnité d’occupation :

L’ordonnance de non-conciliation rendue le 28 novembre 2007 a attribué au mari la jouissance du domicile conjugal, bien propre de l’épouse, à titre onéreux. Il n’est pas discuté par les parties que M. X a occupé l’immeuble durant 8 mois.

L’expert judiciaire a évalué la valeur locative du bien à 750 euros par mois. Cette évaluation n’est pas contestée par les parties.

S’agissant d’un bien propre de l’épouse, le montant de l’indemnité d’occupation ne constitue pas une créance sur l’indivision mais une créance de Mme Y à l’égard de M. X, et le montant de 6.000 euros n’a donc pas à être divisée par deux.

Le jugement frappé d’appel sera donc infirmé, le montant dû par M. X au titre de l’indemnité d’occupation étant fixé à 6.000 euros, et non 3.000 euros.

— Sur les meubles meublants :

S’il est constant que lors du constat d’huissier réalisé le 28 juillet 2008, jour du départ du domicile conjugal de M. X, aucun meuble ne se trouvait plus dans les lieux, il n’est pas pour autant démontré qu’il se soit accaparé le mobilier comme le soutient Mme Y.

Une longue liste de mobiliers, ustensiles de cuisine, vaisselles, et équipements de maison a été établie par Mme Y, correspondant aux objets divers qu’elle a conservés. Elle ne s’explique pas sur l’existence de cette liste, M. X soutenant pourtant qu’elle correspondait au partage du mobilier opéré par l’épouse elle-même.

Par ailleurs, tandis que M. X soutient que la plupart des meubles lui appartenaient en

propre comme étant sa propriété avant le mariage et qu’il a financé ceux acquis postérieurement, Mme Y soutient au contraire que les meubles ont été acquis grâce à des fonds indivis.

Une seule des deux factures produites par Mme Y est au nom des époux pour un montant de 3.000 euros, la seconde étant au seul nom de M. X.

Dans ces conditions, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a fixé la créance de Mme Y à l’encontre de M. X au titre des meubles meublants à la somme de 1.500 euros.

Au vu des éléments qui précèdent, la créance totale de Mme Y à l’encontre de M. X est arrêtée à la somme de 21.794,47 euros (5.036,57 + 2.483,40 + 5.000 + 6.000 + 1.500 + 1.774,50).

— Sur la compensation :

Compensation doit être opérée entre les créances respectives. En conséquence, Mme Y sera condamnée à payer à M. X la somme de 17.459,59 euros (39.254,06 – 21.794,47).

La demande de l’appelant tendant à ce que la somme fixée après compensation produise intérêts à compter du jour d’ouverture des opérations de liquidation, soit le 9 septembre 2011, ne saurait être admise.

En effet, par application des dispositions de l’article 1479 du code civil, auquel renvoie expressément l’article 1543 du même code, les créances personnelles que les époux détiennent l’un contre l’autre ne portent intérêt que du jour de la sommation, et les intérêts courent du jour de la liquidation lorsqu’elles sont évaluées selon les règles de l’article 1469 troisième alinéa.

En conséquence, les intérêts sur la somme due par Mme Y courent à compter de la liquidation, laquelle s’entend comme le jour de la fin des opérations de liquidation et non comme le jour d’ouverture desdites opérations.

— Sur la demande de délais de grâce :

Mme Y ne justifiant pas de sa situation financière à ce jour et de son incapacité à s’acquitter d’un capital, sa demande tendant à se voir accorder des délais de paiement sera rejetée.

— Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Il est équitable que chaque partie supporte la charge des frais irrépétibles par elle exposés.
Les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile seront donc rejetées.

Enfin, toujours en équité, chaque partie supportera la charge de ses dépens.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Pour permettre une meilleure lisibilité du dispositif du présent arrêt, infirme le jugement rendu le 2 juillet 2015 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de
Mende en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Fixe le montant de la créance de M. X à l’égard de Mme Y à la somme de 39.254,06 euros,

Fixe le montant de la créance de Mme Y à l’égard de M. X à la somme de 21.794,47 euros,

Fixe, après compensation, la créance de M. X à l’égard de Mme Y à la somme de 17.459,59 euros,

Condamne Mme Y à payer cette somme à M. X,

Renvoie les parties devant Maître F, notaire à Mende, pour établir un acte conforme au présent arrêt,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Dit que chaque partie supportera la charge des dépens par elle exposés, tant en première instance qu’en appel,

Arrêt signé par Mme E, Présidente et par Mme VILLALBA,
Greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Nîmes, 23 novembre 2016, n° 15/04353