Cour d'appel d'Orléans, Chambre des urgences, 8 décembre 2021, n° 21/00317

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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Me Benoît Berger · consultation.avocat.fr · 23 juin 2022

La loi n° 2012-325 du 7 mars 2012 a consacré un principe général de prise en charge, par les Fédérations (inter)départementales des Chasseurs, des mesures de prévention des dégâts causés par le grand gibier. L'article L.426-5 du Code de l'environnement dispose notamment à ce titre que, par principe, la Fédération départementale des Chasseurs prend à sa charge les dépenses liées à l'indemnisation et à la prévention des dégâts de grand gibier. Mais aucune disposition ne prévoit un droit à la prise en charge par ces fédérations du coût de mesures de prévention de dommages susceptibles …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Orléans, ch. des urgences, 8 déc. 2021, n° 21/00317
Juridiction : Cour d'appel d'Orléans
Numéro(s) : 21/00317
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Montargis, 4 janvier 2021, N° 20/00587
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE DES URGENCES

COPIES EXECUTOIRES + EXPÉDITIONS :

Me Alexis DEVAUCHELLE

Me B C

ARRÊT du 08 DECEMBRE 2021

n° : 298/21 RG 21/00317

n° Portalis DBVN-V-B7F-GJFR

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Jugement, Tribunal Judiciaire de MONTARGIS en date du 5 janvier 2021, RG 20/00587, n° Portalis DBYU-W-B7E-CHRH, minute 2/2021 ;

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE : timbre fiscal dématérialisé n°: 1265 2634 5915 4812

Madame X Y

[…]

représentée par Me Christian VIGNET, avocat plaidant, SCP D’AVOCATS VIGNET du barreau d’AUXERRE en présence de Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat postulant du barreau d’ORLÉANS

INTIMÉE : timbre fiscal dématérialisé n°: 1265 2631 6673 2889

FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DU LOIRET (FDC 45), prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités audit siège

[…]

représentée par Me B C, avocat au barreau d’ORLÉANS

' Déclaration d’appel en date du 29 janvier 2021

' Ordonnance de clôture du 25 mai 2021

Lors des débats, à l’audience publique du 20 octobre 2021, Monsieur Michel Louis BLANC, Président de Chambre, a entendu les avocats des parties, avec leur accord, par application des articles 786 et 910 du code de procédure civile ;

Lors du délibéré :

Monsieur Michel BLANC, président de chambre,

Monsieur Eric BAZIN, conseiller,

Madame Laure Aimée GRUA, conseiller,

Greffier : Madame Mireille LAVRUT, faisant fonction de greffier lors des débats et du prononcé par mise à disposition au greffe ;

Arrêt : prononcé le 08 decembre 2021 par mise à la disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

X Y est détentrice d’un droit de chasse sur un territoire situé sur les communes de Briare et Ouzouer sur Trézée.

Trois entreprises agricoles voisines de ce fonds, SCEA Frissard, l’EARL de Garnus et la SCA de la Tortillerie étaient indemnisées par la Fédération des chasseurs du Loiret à hauteur de 17'415,51 € pour des dégâts de gibier causés à leur culture au cours de la saison 2018/2019.

Imputant ces dommages à X Y, et n’étant pas parvenue à une résolution amiable de leur litige, la Fédération des chasseurs du Loiret saisissait le tribunal judiciaire de Montargis, par une requête en date du 2 juin 2020, aux fins de solliciter sa condamnation au paiement des sommes versées au titre des indemnisations.

Par jugement en date du 5 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Montargis déclarait recevable la demande de la Fédération des chasseurs du Loiret, condamnait X Y à lui payer la somme de 17'415,51 € au titre du remboursement des sommes versées pour l’indemnisation des exploitants agricoles, rejetait la demande reconventionnelle en dommages-intérêts de X Y et la condamnait à payer à la Fédération des Chasseurs du Loiret la somme de 1000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par une déclaration déposée au greffe le 29 janvier 2021, X Y interjetait appel de ce jugement.

Par ses dernières conclusions, elle en sollicite la réformation, demandant à la cour, statuant à nouveau, de débouter la Fédération des chasseurs du Loiret de l’ensemble de ses demandes, de la condamner à lui restituer la somme de 18'460,51 € correspondant à l’exécution provisoire prononcée par le jugement entrepris et actuellement exécuté, et à lui payer la somme de 5000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile concernant tant la procédure de première instance que celles devant la cour.

Par ses dernières conclusions, la Fédération des chasseurs du Loiret sollicite la confirmation du jugement querellé en toutes ses dispositions et l’allocation de la somme de 4500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en remboursement des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.

L’ordonnance de clôture était rendue le 25 mai 2021.

SUR QUOI :

Attendu que la Fédération des chasseurs du Loiret, citant les dispositions de l’article 954 du code civil, prétend que les demandes de X Y tendant simplement et notamment à voir 'dire et juger' ne constituent pas des demandes en justice visant à ce qu’il soit tranché un point litigieux, mais des

prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert, expliquant qu’il ne s’agit selon elle que du rappel des moyens invoqués ;

Que la lecture du dispositif des conclusions de X Y fait apparaître qu’elle sollicite la réformation du jugement et le rejet des prétentions adverses, les paragraphes commençant par la formule « dire et juger » ne faisant que rappeler l’argumentation figurant dans le développements desdites conclusions, de sorte que, même si les rappels figurant dans un dispositif peuvent être qualifiés de redondants, ils n’ôtent rien aux prétentions de la partie appelante ;

Attendu que pour prononcer comme il l’a fait, le tribunal, citant les dispositions des articles L.426'1, L.426-4 du code de l’environnement, et l’article 1240 du code civil, se fondant sur les expertises menées par un estimateur de façon contradictoire, a considéré que les parcelles concernées étaient identifiées, de même que la nature des cultures, l’étendue des surfaces détruites et le type des dégâts causés ainsi que la date d’ apparition des premiers dégâts, les expertises se trouvant corroborées par un courrier du 13 novembre 2018 émanant de la Fédération des chasseurs du Loiret, signé par l’agent du secteur et le responsable du service agents qui relève que les sangliers viennent chaque nuit causer davantage de dégâts, soulignant le caractère alarmant de la situation sur une dizaine d’hectares, que l’étendue des dégâts ressort des pièces produites par les parties et que les dommages causés aux cultures et récoltes des exploitants agricoles indemnisés sont caractérisés ;

Que X Y conteste les expertises comme ayant été mal instruites, insuffisamment renseignées et incomplètes, prétendant qu’elles ne permettent pas de connaître avec précision l’étendue des dégâts ;

Attendu que le responsable du dommage à l’encontre duquel doit être relevé une faute ou une négligence de nature à engager sa responsabilité n’est pas forcément le propriétaire du fonds mais le titulaire du droit de chasse, ce qui est le cas de X Y, l’article L.426-4 du code de l’environnement prévoyant que la possibilité d’une indemnisation par la Fédération départementale des chasseurs laisse subsister le droit d’exercer contre le responsable des dommages une action fondée sur l’article 1240 du code civil, la fédération ayant toujours la possibilité de demander elle-même au responsable, par voie judiciaire ou à l’amiable, de lui verser le montant de l’indemnité qu’elle a elle-même accordée ;

Attendu que X Y prétend que sa responsabilité ne pourrait être acquise que s’il était prouvé de manière incontestable que le gibier se développe de façon excessive sur son fonds et que, si les animaux ayant causé des dommages provenaient exclusivement et de manière certaine de son fonds, que les dégâts alors occasionnés seraient la conséquence directe de sa faute, étant observé qu’elle ne conteste aucunement être titulaire du droit de chasse sur les fonds dont s’agit ;

Attendu que la Fédération des chasseurs du Loiret déclare avoir multiplié les démarches, et avoir agi dans son rôle de prévention après avoir observé une arrivée importante de suidés depuis la saison cynégétique 2017/2018 ;

Que la configuration des lieux est telle, l’autoroute A 77 longeant une grande partie de la propriété de X Y, constituant par là même un obstacle empêchant le passage des animaux, que ces animaux ne peuvent se rendre que sur les terres des trois propriétaires indemnisés par la fédération, et ce alors que l’appelante n’a pas donné suite en temps utile aux recommandations de la fédération des chasseurs alors que les dégâts se multipliaient sur les propriétés voisines ;

Attendu que le rapport d’expertise (pièce 8), établi par un agent assermenté, mentionne l’existence d’importants dégâts, faisant même état d’une évolution fulgurante de ceux-ci, et dont il est formellement établi qu’ils ont été causés par du gibier provenant du fonds sur lequel X Y est titulaire du droit de chasse, ce qui est corroboré par une attestation dont la sincérité n’est pas à mettre en cause (pièce 8 ter) ;

Que le préfet du Loiret a autorisé l’organisation d’une battue administrative pour la destruction des sangliers présents sur le territoire, battue dont l’organisation a été perturbée à l’initiative de X Y puisque l’agent assermenté qui s’était rendu sur le site a été prié de quitter les lieux par le

garde de l’appelante ;

Que le procès-verbal (pièce 11) confirme les agissements de X Y, laquelle, invitée à une réunion qui devait se tenir contradictoirement dans le but de faire un point sur la situation, a répondu le 19 novembre 2018 qu’elle n’avait absolument pas l’intention d’y participer (pièce 14) ;

Attendu que c’est donc à juste titre que la partie intimée rappelle qu’elle a multiplié les démarches auprès d’elle depuis 2017 en l’état des dégâts occasionnés par les sangliers aux propriétés limitrophes de son domaine, qu’elle s’est opposée à la mise en place de la battue administrative instaurée par le préfet du Loiret, que la nécessité de faire pratiquer la chasse sur ses terres lui a été rappelée à plusieurs reprises et que différents rapports démontrant sans ambiguïté que les sangliers ayant causé des dégâts de gibier proviennent du fonds sur lequel elle est titulaire du droit de chasse, alors qu’elle n’avait pas prélevé suffisamment de sangliers compte tenu de la population de ces animaux et que les dégâts deviennent chaque année plus importants ;

Que, s’il est exact que X A a obtenu le prélèvement de 83 sangliers entre le 1er juin 2018 et le 30 mars 2019, ce nombre étant insuffisant, la population a continué de croître ;

Que la critique émise par l’appelante relativement à la pièce 8, critique selon laquelle le président, le responsable du service agents et l’agent de secteur témoignerait d’un « parti pris surprenant » au profit de l’agriculteur, puisqu’il est écrit que « la situation n’est plus supportable à l’heure actuelle pour l’agriculteur », laquelle ne constitue en réalité qu’une description, une constatation de faits, mais certainement pas la marque d’un défaut d’objectivité de la part des auteurs de ce document qui ont agi dans le cadre de la loi, en respectant les formalités imposées par les articles R.426'13 et suivants du code de l’environnement, ne peut être regardée comme pertinente ;

Attendu que c’est à juste titre que le jugement querellé relève qu’il ressortait des documents intitulés

« expertise définitive 'grandes cultures’ ressemis et/ou pertes de récolte » que les expertises ont été menées par un estimateur figurant sur la liste prévue à cet effet et de manière contradictoire, et qu’ils sont opposables à X Y ;

Attendu que c’est également à juste titre que la fédération des chasseurs déclare que ce n’est qu’après les actions de sensibilisation, d’organisation de la battue entravée le 20 novembre 2018, laquelle avait été engagée à la suite de l’arrêté préfectoral du 15 novembre 2018, et postérieurement à la survenance des dégâts pour laquelle X Y savait que sa responsabilité risque de s’engager, qu’elle se serait décidée à chasser enfin sur son fonds, entraînant le prélèvement de 78 sangliers entre décembre 2018 et mars 2019 alors que les dommages étaient déjà causés ;

Attendu que l’appelante invoque une faute des agriculteurs, qui n’aurait pas dû ouvrir droit à leur indemnisation par la fédération des chasseurs, reprochant auxdits agriculteurs de n’avoir pas fait la

demande de clôtures électriques, et même d’avoir sciemment semé du maïs de façon à attirer les sangliers, friands de cette céréale, en vue d’obtenir des indemnisations ;

Qu’il est pourtant évident que la pose de clôtures électriques n’empêche pas la prolifération des sangliers mais seulement leurs déplacements, puisqu’en réalité seuls des prélèvements importants de ces animaux peuvent être de nature à éviter les dégâts ;

Que l’accusation selon laquelle des agriculteurs provoqueraient eux-mêmes l’aggravation des dégâts ne repose sur aucun élément tangible, étant observé que le titulaire d’un droit de culture est libre d’ensemencer ses terres comme il l’entend, étant observé au surplus que les dégâts litigieux concernent principalement des parcelles ensemencées de blé tendre, d’orge, de colza et de seigle ;

Attendu que X Y apporte à la procédure les témoignages de 26 personnes attestant de la réalité de diligences par elle accomplies, ce qui d’ailleurs n’est pas contesté, la fédération des chasseurs ne lui reprochant pas de n’avoir jamais fait de prélèvement, mais seulement d’avoir fait des prélèvements insuffisants pour éviter les dégâts sur les parcelles voisines ;

Attendu qu’il y a lieu de confirmer le jugement entrepris ;

Attendu qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de la Fédération des chasseurs du Loiret intégralité des sommes qu’elle a dû exposer du fait de la présente procédure ;

Qu’il y a lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de lui allouer à ce titre la somme de 3000 € ;

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Y ajoutant,

Condamne X Y à payer à la Fédération des chasseurs du Loiret la somme de 3000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne X Y aux dépens et autorise Maître B C à se prévaloir des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Monsieur Michel Louis BLANC, président de chambre, et Madame Mireille LAVRUT, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire ;

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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Cour d'appel d'Orléans, Chambre des urgences, 8 décembre 2021, n° 21/00317