Cour d'appel d'Orléans, Chambre sécurité sociale, 15 février 2022, n° 18/03580

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Orléans, ch. sécurité soc., 15 févr. 2022, n° 18/03580
Juridiction : Cour d'appel d'Orléans
Numéro(s) : 18/03580
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Tours, 25 novembre 2018
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE

GROSSE à :

REED SMITH LLP

CPAM D’INDRE ET LOIRE

EXPÉDITIONS à :

S.A. EVERITE

MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de TOURS

ARRÊT du : 15 FEVRIER 2022

Minute n°72/2022

N° RG 18/03580 – N° Portalis DBVN-V-B7C-F26A

Décision de première instance : Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de TOURS en date du 26 Novembre 2018

ENTRE

APPELANTE :

S.A. EVERITE

[…]

[…]


Représentée par Me Benoît CHAROT du cabinet REED SMITH LLP, avocat au barreau de PARIS

D’UNE PART,

ET

INTIMÉE :

CPAM D’INDRE ET LOIRE

[…]

[…]


Représentée par Mme Pauline QUENTIN, en vertu d’un pouvoir spécial

PARTIE AVISÉE : MONSIEUR LE MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

[…]

[…]


Non comparant, ni représenté

D’AUTRE PART,

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats et du délibéré :

Madame Sophie GRALL, Président de chambre,

Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, Conseiller,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller,

Greffier :

Monsieur Alexis DOUET, Greffier lors des débats et du prononcé de l’arrêt.

DÉBATS :


A l’audience publique le 28 SEPTEMBRE 2021.

ARRÊT :


- Contradictoire, en dernier ressort.


- Prononcé le 15 FEVRIER 2022, après prorogation du délibéré, par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.


- signé par Madame Sophie GRALL, Président de chambre, et Monsieur Alexis DOUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

M. Y X a travaillé au sein de la société Everite du 21 janvier 1991 au 30 juin 1997, sur le site de l’usine de Descartes (Indre et Loire) en qualité d’agent de production.


La caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire a été destinataire d’une déclaration de maladie professionnelle établie le 13 mai 2015 par M. Y X, accompagnée d’un certificat médical daté du 21avril 2015, faisant état de plaques pleurales, maladie inscrite au tableau n° 30 B des maladies professionnelles.


Selon notification du 17 août 2015, la caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire a reconnu le caractère professionnel de la maladie déclarée par M. Y X.

M. Y X s’est vu attribuer un taux d’incapacité permanente partielle de 4 % correspondant à une indemnité en capital d’un montant de 1 538,07 euros.
Saisi d’une contestation par M. Y X, le tribunal du contentieux de l’incapacité d’Orléans a fixé ce taux à 5 % par jugement du 15 juin 2016.


L’exposition à l’amiante à l’origine de la maladie professionnelle s’étant produite dans plusieurs entreprises, la CARSAT a imputé les coûts afférents à cette maladie au compte spécial.


Le 29 août 2016, M. Y X a saisi le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) d’une demande d’indemnisation, puis a accepté l’offre qui lui a été faite par ce dernier.


Par requête du 11 août 2017, le FIVA a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Tours en sa qualité de subrogé dans les droits de M. Y X, d’une demande tendant à voir reconnaître la faute inexcusable de la société Everite.


Par jugement du 26 novembre 2018, notifié par lettre du 3 décembre 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Tours a:


- reçu le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante en son action en reconnaissance de la faute inexcusable de la société Everite,


- jugé que la maladie professionnelle dont est atteint M. Y X est due à la faute inexcusable de la société Everite,


- fixé au maximum prévu par la loi la majoration du capital dû à M. Y X par la caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire,


- dit que la majoration de ce capital (et éventuellement de la rente) suivra l’évolution du taux d’IPP alloué au demandeur en cas d’aggravation de son état de santé,


- dit qu’en cas de décès de M. Y X résultant des conséquences de sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de retard de rente ou du capital restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant,


- fixé à 19 600 euros l’indemnisation du préjudice moral subi par M. Y X du fait de la maladie,


- rejeté le surplus des demandes d’indemnisation,


- dit qu’en application des dispositions des articles L. 452-2 et L. 452-3 du Code de la sécurité sociale, la caisse primaire d’assurance maladie de l’Indre et Loire devra verser au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante la somme de 19 600 euros en réparation des préjudices subis par M. Y X,


- condamné la société Everite à rembourser la caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire du montant des sommes qu’elle aura versées au FIVA, au titre des préjudices personnels et de la majoration du capital ou de la rente,


- dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de procédure civile.


Selon déclaration d’appel du 21 décembre 2018, la société Everite a interjeté un appel limité de ce jugement, à l’encontre de la caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire, en ce qu’il a dit qu’elle devra rembourser à la caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire le montant des sommes que celle-ci aura versées au FIVA au titre des préjudices personnels et de la majoration du capital ou de la rente due à M. Y X.
La société Everite demande à la Cour de:


- faire droit à l’intégralité de ses demandes.


- infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a condamnée à rembourser à la caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire le montant des sommes que celle-ci aura versées au FIVA, au titre des préjudices personnels et de la majoration du capital ou de la rente.


- dire et juger que la caisse primaire d’assurance maladie, faute d’avoir établi dans ses relations avec elle le caractère professionnel de la maladie de M. Y X le 17 août 2015, ne pourra pas exercer son action récursoire son encontre.


En conséquence,


- dire et juger que la caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire ne pourra pas récupérer sur elle les sommes allouées au FIVA, subrogé dans les droits de M. Y X au titre du recours en faute inexcusable.


En tout état de cause,


- débouter la caisse primaire d’assurance maladie de son action récursoire à son encontre concernant la majoration du capital due à M. Y X.


La société Everite fait valoir principalement ce qui suit:


- si l’article L. 452-3-1 du Code de la sécurité sociale, introduit par la loi de finance de la sécurité sociale du 17 décembre 2012, est venu préciser que l’inefficience de la décision reconnaissant le caractère professionnel d’un accident ou d’une maladie ne prive pas la caisse primaire d’assurance maladie de son action récursoire à l’encontre de l’employeur dont la faute inexcusable est à l’origine de l’accident ou de la maladie lorsque l’inopposabilité résulte d’un défaut d’information, la caisse primaire d’assurance maladie est a contrario privée de son action récursoire contre l’employeur lorsque l’inopposabilité résulte de toute autre cause, dont le non-respect par celle-ci de ses obligations légales et réglementaires.


- le caractère professionnel de la maladie n’a pas été établi, en l’espèce, dans les rapports entre la caisse primaire d’assurance maladie et l’employeur.


- la décision de la caisse primaire d’assurance maladie ayant reconnu le caractère professionnel de la maladie de M. Y X est inopposable à l’employeur, celui-ci n’ayant jamais été informé ni de la maladie de M. X, ni de la procédure ayant conduit à sa prise en charge au titre de la législation professionnelle.


- la caisse primaire d’assurance maladie n’a pas davantage établi à l’égard de l’employeur que les conditions du tableau n°30 des maladies professionnelles étaient réunies et qu’elles justifiaient la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie de M. Y X.


- la caisse primaire d’assurance maladie n’a justifié de la réalisation de l’examen tomodensitométrique que dans le cadre de la procédure de première instance.


- lorsque la décision fixant le taux d’incapacité permanente d’un salarié n’a pas été notifié à l’employeur, ce taux ne lui est pas opposable.


La caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire demande à la Cour de:
- dire l’appel de la société Everite mal fondé.


- confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions.


- dire qu’elle est fondée à exercer son action récursoire à l’encontre à l’encontre de la société Everite en vue de récupérer les sommes qu’elle aura versées au FIVA en suite de la reconnaissance de sa faute inexcusable.


- condamner la société Everite à lui régler la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.


La caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire fait principalement valoir ce qui suit:


- selon l’article L. 452-3-1 du Code de la sécurité sociale, quelles que soient les conditions d’information de l’employeur par la Caisse au cours de la procédure d’admission du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie, la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur par une décision de justice emporte l’obligation pour celui-ci de s’acquitter des sommes dont il est redevable. – dès lors que par décision rendue le 26 novembre 2018, le tribunal a jugé que la maladie professionnelle dont est atteint M. Y X est due à la faute inexcusable de la société Everite, laquelle n’a pas relevé appel de ce chef du dispositif du jugement les dispositions de l’article L. 452-3-1 du Code de la sécurité sociale ont vocation à s’appliquer.


- le moyen tiré des conditions de reconnaissance de la maladie est inopérant et ne saurait priver la Caisse du droit à récupérer auprès de l’employeur après reconnaissance de sa faute inexcusable les sommes versées au FIVA.


Il est renvoyé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs écritures respectives.

SUR CE, LA COUR:


L’article L. 452-3-1 du Code de la sécurité sociale, applicable aux actions en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur introduites à compter du 1er janvier 2013, dispose que: 'Quelles que soient les conditions d’information de l’employeur par la caisse au cours de la procédure d’admission du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie, la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur par une décision de justice passée en force de chose jugée emporte l’obligation pour celui-ci de s’acquitter des sommes dont il est redevable à raison des articles L. 452-1 à L. 452-3".


Au cas présent, l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de la société Everite a été introduite le 11 août 2017.


La société Everite, qui a formé un appel limité, n’a pas déféré à la Cour le chef du jugement rendu le 26 novembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Tours qui a jugé que la maladie professionnelle dont est atteint M. Y X est due à sa faute inexcusable.


La faute inexcusable de la société Everite ayant, dès lors, été reconnue par une décision de justice passée en force de chose jugée, ses demandes tendant à voir dire que la caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire ne pourra pas exercer son action récursoire à son encontre et qu’elle ne pourra pas récupérer auprès d’elle les sommes allouées au FIVA, subrogé dans les droits de M. Y X ne sauraient être accueillies.


Le jugement entrepris sera, en conséquence, confirmé en ce qu’il a dit condamné la société Everite à rembourser la caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire le montant des sommes qu’elle aura versées au FIVA, au titre des préjudices personnels.


Si la caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire est fondée, en application de l’article L. 452-2 du Code de la sécurité sociale, à récupérer auprès de l’employeur le montant de la majoration attribué à la victime en raison de la faute inexcusable de l’employeur, son action ne peut s’exercer, dans le cas où la décision prise par la caisse dans les conditions prévues par l’article R. 434-32 du Code de la sécurité sociale, sur le taux d’incapacité permanente de la victime, est devenue définitive à l’égard de l’employeur, que dans les limites découlant de l’application de ce dernier, peu important qu’il ait été augmenté, dans les rapports entre la caisse et la victime, par une décision de justice.


Il y a lieu, dès lors, de prévoir que l’action récursoire de la caisse à l’encontre de la société Everite s’agissant de la récupération de la majoration du capital (ou de la rente), s’exercera dans la limite du taux d’incapacité permanente partielle qui lui est opposable.


Compte tenu de la solution donnée au présent litige, il convient de condamner la société Everite aux dépens d’appel.


Il n’y a pas lieu, par ailleurs, en l’espèce, de faire application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.


La demande de la caisse primaire d’assurance maladie d’Indre et Loire à ce titre sera, en conséquence, rejetée.

PAR CES MOTIFS:


Vu l’appel limité formé par la société Everite;


Confirme le jugement rendu le 26 novembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Tours en ce qu’il a condamné la société Everite à rembourser à la caisse primaire d’assurance maladie d’indre et Loire le montant des sommes qu’elle aura versées au Fiva au titre des préjudices personnels et de la majoration du capital ou de la rente sauf à préciser que l’action récursoire de la caisse à l’encontre de la société Everite s’agissant de la récupération de la majoration du capital (ou de la rente), s’exercera dans la limite du taux d’incapacité permanente partielle qui lui est opposable;


Dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile;


Condamne la société Everite aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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