Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 20 février 1998

  • Déclaration au concedant d'une partie du chiffre d'affaires·
  • Préjudice distinct du fait des importations paralleles·
  • Articles 455 et 458 nouveau code de procédure civile·
  • Actionnaire majoritaire dans le capital du licencie·
  • Obligation d'acquerir les vignettes pour apposition·
  • Ventes hors territoire et ventes non declarees·
  • Nullité du rapport complementaire des experts·
  • Préjudice directement lie au fait dommageable·
  • Contradiction entre motifs et dispositif·
  • Intervention dans la gestion du licencie

Résumé de la juridiction

Manquement aux obligations contractuelles du licencie et aide du fabricant-tiers au contrat dans la violation de ces obligations

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch., 20 févr. 1998
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : RENOMA
Liste des produits ou services désignés : Textiles
Référence INPI : M19980095
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE La société TEXTILE DES ARTICLES RENOMA (ci-après RENOMA) crée et commercialise des vêtements sous la marque RENOMA. Pour la fabrication et la distribution de ses produits, elle consent des contrats de licence à des sociétés différentes suivant les territoires. Elle a conclu le 25 janvier 1990 avec la société ISIDE représentée alors par M. Diego MOCELLINI un contrat de licence pour la fabrication et commercialisation de cravates, écharpes pour hommes, pochettes-ascott et noeuds papillons qui excluait certains territoires dont le JAPON, moyennant un taux de redevance de 9% sur le chiffre d’affaires encaissé. Par un avenant de même date, ISIDE s’était engagée à porter sur tous ses bons de commande et factures RENOMA, la mention : « revente directe ou indirecte formellement interdite au JAPON, en COREE et en AUSTRALIE ». Au cours de l’année 1992, plusieurs lettres ont été envoyées par RENOMA à ISIDE (lettres des 5 février, 12 mars et 15 décembre 1992) invitant cette dernière à respecter l’inscription de la mention, lui rappelant ses autres obligations (apposer sur les produits des vignettes fournies par RENOMA et ne pas proposer à la vente des produits RENOMA en solde). En 1993, les parties ont convenu de signer de nouveaux contrats en étendant les produits donnés en licence. Ont été ainsi conclus : 1 – avec la société de droit italien, ISIDE SRL représentée par Diego MOCELLINI (ci- après ISIDE), le 2 janvier 1993 un contrat à titre exclusif pour une durée de cinq ans sur le monde entier, à l’exception du Japon, de la Corée du sud, de Taiwan et de l’Australie pour les cravates, pochettes-ascott, noeuds papillon et ceintures de smoking, et non exclusif pour les écharpes pour hommes,

2 – avec la société de droit italien, ISIDE SRL représentée par Alessandro BERTOLOTTI, le 19 octobre 1993 les trois contrats suivants :

* à titre exclusif pour une durée de cinq ans sur six territoires (Italie, Espagne, Suisse, Autriche, Allemagne et Grèce) portant sur des ceintures pour hommes, * à titre exclusif pour une durée de cinq ans sur les six territoires ci-dessus cités portant sur les produits en maille, polo, tee-shirts pour hommes, * jusqu’au 31 décembre 1994, à titre non exclusif, portant sur les produits de la ligne spécifique RENOMA GOLF sur les mêmes territoires. Ces contrats comportaient des dispositions communes :

- une clause de résiliation de plein droit, "si bon semblait à RENOMA, aux torts et griefs d’ISIDE un mois après une simple lettre recommandée avec A.R. d’avoir à payer ou

d’exécuter restée sans effet malgré toute offre de conciliation ultérieure, dans tous les cas d’inexécution de l’une quelconque des clauses et notamment en cas de non-paiement à leur échéance exacte de toutes sommes exigibles",
- l’obligation pour ISIDE de s’approvisionner exclusivement auprès de, RENOMA « seule habilitée à fournir les vignettes RENOMA » qui les facturait au prix coûtant,
- le versement trimestriel d’une redevance assise sur le chiffre d’affaires encaissé ainsi que, pour les trois premiers contrats, le paiement d’un minimum garanti annuel, le taux de redevance étant différent suivant les contrats (celui du 2 janvier 1993, 13%, celui sur les ceintures, 10%, et les deux derniers, 7%),
- la communication, à la fin de chaque trimestre civil de la copie de toutes les factures de vente des produits consentis en licence. Les contrats en date du 19 octobre 1993 précisaient que « le contrat sera immédiatement résilié dans tous les cas de vente des articles, objet des contrats, hors des territoires concédés ». Aucun de ces nouveaux contrats ne prévoyait l’obligation d’apposer sur les factures que toute vente était interdite au JAPON. L’annexe A du contrat du 2 janvier 1993 stipulait toutefois qu’ISIDE s’engageait « formellement à ne pas vendre directement ou indirectement aucun des articles concédés, objet du présent contrat, sur les territoires précités (JAPON, COREE du Sud (marché local), TAIWAN, AUSTRALIE). Toute dérogation à cette clause ferait l’objet d’un accord écrit préalable de RENOMA STAR ». Les tissus utilisés pour la fabrication des vêtements RENOMA sont fabriqués notamment par la société de droit italien TESSITURA SERICA GIOVANNI CANEPA (ci-après TSGC. Cette société détient depuis le mois de mai 1993, indirectement par l’intermédiaire de la société VERGOSA FINANZIARA (filiale à 100% de TSGC la majorité du capital social d’ISIDE. Cette prise de participation est intervenue en raison de la créance importante de TSGC à l’encontre d’ISIDE. Par suite de ces changements, les membres de la famille MOCELLINI qui étaient précédemment actionnaires d’ISIDE n’en n’ont plus été administrateurs. Ils ont créé, en 1993, la société RODIER, société panaméenne qui a en réalité une boîte postale en SUISSE. Ayant appris la commercialisation de cravates au JAPON qui auraient été fabriquées par ISIDE dans un tissu exclusif RENOMA sans apposition d’une vignette correspondant à celles fournies par RENOMA, cette dernière a envoyé à ISIDE une lettre recommandée avec A.R. le 4 janvier 1994 lui rappelant l’interdiction de vente au JAPON et l’obligation d’exercer un contrôle rigoureux sur l’ensemble de ses revendeurs. Exposant que des produits identiques aux siens et revêtus d’une vignette RENOMA qui n’aurait pas été fournie par elle, auraient continué à être commercialisés au JAPON, RENOMA a déposé une plainte pour contrefaçon en ITALIE, à l’encontre des « dirigeants d’ISIDE », Messieurs Diego et Roberto M, Alessandro BERTOLOTTI et Michele C, ce

qui a donné lieu à des perquisitions en date des 8 et 9 juillet 1994. Cette procédure pénale est actuellement pendante devant le tribunal correctionnel de MODENE. Invoquant les actes de contrefaçon, RENOMA a par lettre recommandée avec avis de réception du 20 juillet 1994 résilié immédiatement et sans préavis les contrats des 2 janvier 1993 et 19 octobre 1993. Par lettre du 22 juillet 1994, sur papier à en tête de la société TSGC, M. Michele C protestait et déclarait qu’il n’existait aucune contrefaçon dont ISIDE puisse être à l’origine, en expliquant que cette société était reprise en main depuis mai 1993 et en mentionnant encore que la famille MOCELLINI continuait à participer et collaborer activement dans la société ; Par lettre du 25 juillet 1994, un avocat agissant pour le compte d’ISIDE contestait la résiliation notifiée brutalement et sans motif et exigeait la livraison d’étiquettes ainsi que le respect par RENOMA de ses obligations. C’est dans ces circonstances que RENOMA a fait assigner en référé devant le président du tribunal de commerce de PARIS, ISIDE et son fournisseur de tissus, la société TSGC (qui aurait les mêmes dirigeants et qui serait intervenue dans la gestion d’ISIDE) pour rechercher notamment le préjudice résultant des manquements invoqués. Par une ordonnance de référé du 2 novembre 1994, Mme B et M. L ont été désignés en qualité d’experts pour déterminer l’entier préjudice de RENOMA. ISIDE ainsi que TSGC ont été condamnés in solidum à payer la somme provisionnelle de 9 millions de francs. L’ordonnance de référé frappée d’appel a été réformée par arrêt du 1er décembre 1995. ISIDE soutenant que la résiliation, notifiée le 20 juillet 1994, était abusive, comme elle l’avait déjà exposé dans la lettre de protestation du 25 juillet 1994, a assigné RENOMA devant le tribunal de commerce de PARIS par acte du 23 janvier 1995 pour que soit constatée la résiliation des contrats de licence des 2 janvier et 19 octobre 1993 aux torts de RENOMA et jugé que RENOMA s’était rendue coupable d’actes de dénigrement et qu’elle soit condamnée à lui payer la somme de 101 366 951 francs à titre de dommages intérêts. De son côté, par acte d’huissier du 26 janvier 1995, RENOMA a assigné devant le tribunal de commerce de PARIS, ISIDE et TSGC pour voir :

- constater la résiliation des contrats de licence aux torts d’ISIDE,
- juger qu’ISIDE s’était rendue coupable de manquements contractuels et que TSGC y avait contribué,
- interdire sous astreinte la vente des articles griffés RENOMA,
- ordonner à ISIDE et TSGC de lui remettre la totalité du stock des produits griffés « RENOMA » et le double des factures clients sous astreinte,
- ordonner la publication du jugement ainsi que la diffusion télévisuelle du dispositif du jugement,

— condamner in solidum, ISIDE et TSGC à lui payer 50 millions de francs à titre provisionnel. Ces deux instances ont été jointes devant les premiers juges. TSGC avait soulevé l’incompétence du tribunal de commerce de PARIS au profit des juridictions italiennes. C’est dans ces circonstances qu’est intervenu le jugement déféré en date du 19 juin 1995 qui, sans statuer sur l’exception d’incompétence, a :

- mis hors de cause TSGC,
- pour les autres demandes, constatant qu’il n’existait pas la preuve d’une faute et d’actes de contrefaçon, en l’état de la procédure a renvoyé « les causes au rôle des mesures d’instruction »
- constaté le non paiement de la provision de 9 000 000 francs fixée par le juge des référés,
- condamné RENOMA à payer à TSGC la somme de 25 000 francs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,
- réservé les dépens. ISIDE et RENOMA ont interjeté appel par déclaration au greffe des 24 juillet 1995 et 28 juillet 1995. Le rapport des experts désignés par l’ordonnance de référé a été déposé le 27 septembre 1995 et a été complété par un rapport déposé le 10 novembre 1995. RENOMA, soutenant que le jugement déféré était en réalité un jugement avant dire droit, après dépôt du rapport d’expertise complémentaire du 10 novembre 1995, a conclu en ouverture de rapport devant le Tribunal de commerce de PARIS. Par jugement du 20 mai 1996 du tribunal de commerce, RENOMA a été déclarée irrecevable en ses demandes, en raison de l’effet dévolutif de l’appel. II – PRETENTIONS ET DEMANDES DES PARTIES Les prétentions et demandes des parties peuvent se résumer ainsi : RENOMA poursuit la réformation du jugement en toutes dispositions lui faisant grief. Elle soutient que, son action est fondée non pas sur la contrefaçon (comme inexactement dit par les premiers juges), mais sur l’inexécution des obligations contractuelles à l’égard de ISIDE et sur le fondement de l’article 1382 du code civil à l’égard de TSGC. Elle expose que la résiliation des quatre contrats était justifiée en raison des manquements contractuels suivants commis par ISIDE : la vente de vêtements RENOMA au JAPON, des ventes de produits griffés RENOMA non revêtus de vignettes fournies par RENOMA, de fausses déclarations de chiffre d’affaires et le « non respect du positionnement des produits en terme de prix ».

A l’égard de TSGC, elle critique le jugement qui, d’une part, n’a pas statué sur l’exception d’incompétence qui avait été soulevée par cette société et qui, d’autre part, l’a mise hors de cause. Elle soutient que cette société a joué un rôle actif dans les agissements d’ISIDE, qu’elle est « son fournisseur exclusif de tissus exclusifs RENOMA », que TSGC qualifie elle-même ISIDE de « société contrôlée », que plusieurs administrateurs sont communs aux sociétés ISIDE, TSGC et VERGOSA FINANZIARA et que les agissements auxquels a participé TSGC ont privé RENOMA de redevances qu’elle aurait dû percevoir en FRANCE de son licencié italien ISIDE et de son licencié japonais ALPHA CUBIC, que les tribunaux français sont donc compétents en raison du lieu où le dommage est subi. RENOMA prie en conséquence la cour de :

- constater la résiliation des contrats de licence des 2 janvier et 19 octobre 1993, à la date du 20 juillet 1994, aux torts et griefs d’ISIDE,
- dire recevable son action dirigée contre TSGC et dire que cette société a commis une faute délictuelle au préjudice de RENOMA en ce qu’elle a contribué aux faits reprochés à ISIDE,
- prononcer des mesures d’interdiction sous astreinte à l’encontre d’ISIDE et de TSGC et ordonner à ces deux sociétés à leurs frais la remise de la totalité des produits griffés RENOMA sous astreinte,
- évoquer sur les demandes de dommages intérêts,
- condamner in solidum ISIDE et TSGC à payer la somme de 100 millions de francs à ce titre,
- ordonner la publication du jugement dans 20 journaux et à titre de complément de dommages intérêts la diffusion télévisuelle de la décision pour un montant global de 5 millions aux frais in solidum d’ISIDE et TSGC. ISIDE poursuit la réformation du jugement en toutes dispositions lui faisant grief et réitère ses demandes en résiliation abusive en soutenant qu’il ne peut lui être imputé aucun manquement contractuel et en formulant à l’encontre de RENOMA les griefs suivants :

- défaut de préavis,
- notification de la résiliation alors qu’il n’existait aucune faute, la contrefaçon qui avait été alléguée dans la lettre de résiliation n’étant nullement invoquée dans la présente instance, ISIDE reproche en outre à RENOMA, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, d’avoir procédé à une campagne de dénigrement qui a désorganisé son entreprise. Elle conclut à la nullité du jugement qui aurait, selon elle, omis de statuer sur le rejet des prétentions de RENOMA et sur sa demande reconventionnelle, et à la nullité du rapport complémentaire des experts désignés par ordonnance de référé. Elle demande à la cour de :

- débouter RENOMA de toutes ses demandes,
- prononcer la résiliation des quatre contrats de licence aux torts et griefs de RENOMA à compter du 23 octobre 1994,
- dire que la campagne de dénigrement de RENOMA est fautive,

— condamner RENOMA pour le préjudice subi au titre de la résiliation et des dénigrements, à lui payer la somme de 102 832 927 francs à titre de dommages intérêts TSGC, intimée, en raison des demandes de nouveau formées contre elle par RENOMA, réitère in limine litis l’exception d’incompétence des juridictions françaises au bénéfice des juridictions italiennes et subsidiairement conclut à la confirmation du jugement qui l’a mise hors de cause. Formant appel incident, elle demande que RENOMA soit condamnée à lui payer la somme de 3 000 000 francs à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et malicieuse. Chacune des parties sollicite l’allocation d’une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

DECISION I – SUR LA COMPÉTENCE Considérant que TSGC société italienne n’ayant aucun établissement en FRANCE et n’ayant aucun lien contractuel avec RENOMA, se référant aux dispositions des articles 2 et 5 point 3 de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, conclut à l’incompétence des juridictions françaises ; qu’elle soutient que l’article 5 point 3 qui prévoit une exception à la règle de compétence édictée à l’article 2, et désigne le lieu où le fait dommageable s’est produit est d’interprétation restrictive et ne peut être entendu comme tout lieu où un dommage est subi (ce qui aurait été rappelé par un arrêt de la Cour de justice des communautés européennes du 19 septembre 1995) ; Considérant que par l’arrêt susvisé, la Cour rappelant que la notion de « lieu où le fait dommageable s’est produit » visé à l’article 5 point 3 comprend à la fois le lieu où le dommage est survenu et celui de l’événement causal, relève que cette notion ne saurait être interprétée de manière extensive au point d’englober tout lieu où peuvent être ressenties les conséquences préjudiciables d’un fait ayant déjà causé un dommage effectivement survenu dans un autre lieu, mais n’écarte pas, cependant, la compétence des tribunaux du lieu où le dommage directement lié à l’événement causal s’est produit ; qu’il convient donc de rechercher si le dommage invoqué en l’espèce est un dommage directement lié au fait dommageable invoqué, Considérant que RENOMA poursuit TSGC sur le fondement de l’article 1382 du code civil, faisant grief à cette société (qui, au moment des manquements contractuels invoqués à l’encontre d’ISIDE aurait détenu le contrôle de celle-ci par l’intermédiaire d’une filiale, la société VERGOSA) d’avoir aidé de manière active ISIDE à commettre les manquements reprochés et d’avoir ainsi participé au dommage subi à PARIS par RENOMA ;

Considérant que RENOMA dont le siège social est à PARIS et qui a passé contrat de licence avec la société ISIDE qui lui payait les redevances à PARIS, a, en raison des manquements contractuels invoqués, subi, en ce lieu, un préjudice directement lié aux faits dommageables ; que les agissements fautifs reprochés à TSGC qui aurait, par son comportement, aidé ISIDE dans la violation de ses obligations contractuelles, sont également susceptibles d’être la cause d’un préjudice directement subi à PARIS par la société RENOMA ; qu’il s’ensuit qu’en application de l’article 5 point 3 de la convention de Bruxelles susvisé, RENOMA ne se prévalant pas d’un préjudice indirect, le tribunal de commerce de PARIS était compétent pour statuer ; que l’exception d’irrecevabilité au profit des juridictions italiennes sera rejetée ; II – SUR LA NULLITÉ DU JUGEMENT Considérant qu’invoquant les dispositions de l’article 455 du nouveau code de procédure civile, ISIDE conclut à la nullité du jugement qui n’est pas motivé, contient une contradiction entre motifs et dispositif et n’a pas statué en définitive sur la demande de RENOMA ainsi que sur sa demande reconventionnelle ; Considérant que, comme le relève à juste titre ISIDE, le jugement déféré comporte une contradiction majeure entre les motifs (le tribunal constatant l’inexistence de fautes) et le dispositif (qui ne prononce pas le débouté) ce qui doit s’analyser en une absence de motivation ; qu’en outre, le tribunal n’a pas statué sur toutes les demandes tant principales que reconventionnelles qui lui étaient soumises ; que le jugement sera donc annulé en application des articles 455 et 458 du nouveau code de procédure civile ; Sur la demande de nullité du rapport complémentaire déposé par les experts le 10 novembre 1995 Considérant qu’ISIDE qui relève que les experts L et B, désignés par l’ordonnance de référé du 2 novembre 1994 ont déposé leur rapport le 27 septembre 1995, conclut à la nullité du complément de rapport ultérieurement déposé par eux ; Que selon ISIDE, l’expert ne peut, après dépôt de son rapport, dresser un second rapport modificatif du premier ; qu’il aurait été nécessaire d’obtenir un nouveau jugement ; que le rapport complémentaire va en effet à l’encontre du premier dès lors que les experts qui avaient d’abord conclu qu’ils n’étaient pas en mesure d’évaluer un préjudice, l’estimant, dans leur rapport complémentaire, à 32 millions de francs ; qu’elle souligne encore que les parties n’ont été nullement convoquées à des opérations d’expertise complémentaires, que l’expert peut procéder à des constatations techniques hors la présence des parties mais qu’il doit cependant soumettre à discussion tous les éléments d’information recueillis afin que les droits de la défense soient respectés ; que tel ne serait pas le cas, les experts s’étant fondés sur une étude de M. B (technicien assistant les experts) qui serait datée du 2 novembre 1995 ; Mais considérant que comme le relève exactement RENOMA, c’est sur incitation du juge chargé du contrôle des expertises en date du 18 octobre 1995 que les experts ont

complété leur rapport en répondant aux sept questions posées ; que M. L et Mme B, pour effectuer ce travail, ne se sont référés qu’aux documents et à l’avis de M. B joints au précédent rapport ; que l’étude alléguée du 2 novembre 1995 n’est en réalité qu’une lettre en réplique aux rappors d’audits communiqués par ISIDE ; qu’ainsi, il n’existe aucune cause de nullité, les experts ayant agi sur instruction du magistrat chargé du contrôle des expertises et ayant donné des précisions sur les questions posées par le magistrat, au vu des documents déjà transmis aux parties ; que la circonstance selon laquelle ISIDE n’a pas été en mesure de discuter les conclusions de ce complément de rapport avant son dépôt n’entraîne pas la nullité de celui-ci, dès lors que tel a été le cas pour l’ensemble des parties qui ont pu, par la suite, en discuter les termes durant la procédure d’appel ; que cette demande en nullité sera rejetée ; III – SUR LES DEMANDES EN RÉSILIATION DES CONTRATS Considérant que pour réclamer la résiliation sans préavis des quatre contrats, RENOMA invoque non pas l’existence d’actes de contrefaçon mais des manquements particulièrement graves d’ISIDE à ses obligations contractuelles ; qu’elle lui fait ainsi grief d’avoir procédé à des ventes parallèles hors des territoires concédés et essentiellement au JAPON, d’avoir apposé des vignettes sur des produits RENOMA qu’elle ne lui avait pas fournies, d’avoir une politique de vente contraire à la politique générale de RENOMA et de ne pas avoir payé les redevances ni transmis ponctuellement les comptes ; IV – SUR LE GRIEF DE VENTE HORS TERRITOIRES Considérant qu’il est constant que de multiples produits RENOMA ont été vendus par ISIDE à des clients se trouvant sur les territoires autorisés et ont été revendus à des distributeurs japonais ; qu’il en a été ainsi notamment des ventes consenties à la société RODIER, de droit panaméen disposant d’une boîte postale en SUISSE, des sociétés TRADING MODE, CARMONA et IFA ; Considérant que RENOMA soutient que les ventes au JAPON ont été réalisées à l’initiative d’ISIDE, soit de concert avec des sociétés japonaises possédant un établissement ou une filiale en EUROPE, soit de concert avec la société de droit panaméen RODIER et que, en tout état de cause, ISIDE se devait de s’assurer que les articles qu’elle vendait, n’iraient pas de manière indirecte alimenter les territoires qui lui étaient contractuellement interdits ; Qu’elle prétend faire la preuve de ces agissements fautifs, d’une part, par les attestations émanant des sociétés intermédiaires ou de distributeurs japonais et d’autre part, par les liens existant entre la société RODIER créée en mai 1993 par les anciens actionnaires majoritaires de la société ISIDE (la famille MOCELLINI) et ISIDE ; Qu’elle souligne encore que l’évolution du chiffre d’affaires réalisée avec RODIER ne peut que prouver qu’ISIDE n’a pas exécuté de bonne foi les contrats ; qu’en effet, l’expertise a mis en évidence que si les ventes étaient modérées en 1993 et au début de

l’année 1994, il n’en a pas été de même au cours du 3e trimestre 1994 puisque sur un chiffre d’affaires global d’ISIDE de 4 341 873 451 de lires, près de la moitié a été réalisée avec la société RODIER et que sur plusieurs des factures émises par ISIDE figurait le nom des donneurs d’ordre japonais ; qu’ainsi ISIDE ne peut prétendre n’avoir pas eu connaissance des destinations finales et qu’à tout le moins elle aurait dû « s’émouvoir de l’intervention massive de ces sociétés écrans » ce d’autant plus qu’elle avait été mise en garde dès janvier 1994 ; Considérant qu’ISIDE réplique que la clause d’interdiction de vente directe ou indirecte ne doit pas recevoir l’interprétation extensive qu’en fait RENOMA ; que, selon elle, il lui était seulement interdit de participer de façon concertée à des exportations en dehors des territoires concédés mais qu’elle ne peut être recherchée pour des reventes qui auraient été effectuées par ses clients ; Que cette interprétation de la portée de ses obligations résulterait de la suppression de l’exigence prévue au précédent contrat de porter sur chaque bon de commande ou facture la mention « revente directe ou indirecte au JAPON interdite » ; Qu’elle soutient encore que RENOMA ne démontre pas qu’elle aurait utilisé des sociétés écrans et que les sociétés RODIER, CARMONA, IFA et TRADING MODE auraient revendu des articles RENOMA au JAPON sur sa demande alors qu’au surplus, la vente de tels produits est libre dans ce pays ; Que l’expertise a fait apparaitre que de nombreux produits commercialisés au JAPON n’étaient pas fabriqués par elle et que ces importations parallèles préexistaient aux contrats de 1993 et ont continué après la rupture (prospectus de 1996) ; Qu’elle fait encore valoir qu’à supposer établies ces importations parallèles, elles n’auraient été cause d’aucun préjudice pour RENOMA puisque les redevances ont été payées à cette société ; que seule la licenciée au JAPON, la société ALPHA CUBIC pourrait se plaindre d’un préjudice ; Considérant cela exposé que les documents mis aux débats, et notamment ceux établis au cours de la procédure pénale en ITALIE démontrent que les ventes parallèles de produits RENOMA au JAPON sont, d’une part, antérieures à la conclusion de contrats avec ISIDE et, d’autre part, ont continué après la rupture des relations contractuelles ; que par ailleurs, il ressort notamment d’une attestation de M. C en date du 30 novembre 1994 que RENOMA elle-même ne serait pas étrangère à l’existence de ce marché parallèle ; Que toutefois, au regard du contrat du 2 janvier 1993, ISIDE avait l’interdiction de vendre soit directement soit indirectement hors des territoires concédés, sauf autorisation particulière par écrit de son donneur de licence ; qu’ISIDE ne peut valablement soutenir qu’elle n’avait aucune obligation de contrôle ; qu’en effet, d’une part, RENOMA lui avait, par la lettre du 4 janvier 1994, rappelé l’interdiction de vente au JAPON et l’obligation d’exercer un contrôle rigoureux sur l’ensemble de ses revendeurs, sans protestation de sa part ; que d’autre part, plusieurs attestations et auditions effectuées au cours de la

procédure pénale démontrent que ISIDE connaissait en tout ou partie la destination des produits livrés aux sociétés ci-dessus citées qu’il en est ainsi des attestations :

- de M. S, PDG de la 4e division de la société DOSHIDA qui relate, le 9 décembre 1994, des « rencontres au JAPON et en ITALIE avec M. Roberto MOCELLINI, directeur du service de recherche et développement d’ISIDE, responsable des produits ISIDE et de leurs ventes pour sa société »,
- de M. T entendu le 19 septembre 1995, qui indique qu’il est le représentant officiel en ITALIE de la DOSHIMA CORPORATION Ltd d’OSAKA, que son entreprise a acquis des produits RENOMA pendant trois ans et demi jusqu’à fin juin 1994, que concrètement, il s’occupait des rencontres en ITALIE entre les directeurs de la DOSHIBA et Roberto MOCELLINI qui, pour lui, personnifiait ISIDE,
- de M. A qui déclare le 9 décembre 1994 avoir rencontré « M. Roberto MOCELLINI représentant la société ISIDE qui lui avait indiqué que la facturation et les livraisons seraient assurées par RODIER »,
- de M. O importateur de la société CARMONA qui déclare « qu’il a été client de la société ISIDE pour des cravates, écharpes, ceintures…. destinés à être revendus sur le territoire japonais de 1992 au 30 juillet 1994 et que les dirigeants connaissaient la destination finale des produits RENOMA » ; Considérant qu’en outre, plusieurs factures adressées par ISIDE à RODIER portent le nom de donneurs d’ordre qui sont des sociétés implantées au JAPON ; qu’il en est ainsi de plusieurs factures portant les noms de NAKKA (pour NAKKAMURA), JEM (pour JEM INTERNATIONAL, AOYA (pour AOYAMA, DOSH (pour DOSHISHA et DAI (pour DAIEI) ; Considérant qu’en raison des liens existant entre les anciens actionnaires majoritaires de la société ISIDE, dont certains travaillaient encore pour ISIDE et la société RODIER, ISIDE ne pouvait ignorer à qui RODIER destinait les produits RENOMA acquis en grandes quantités dans son entreprise ; Considérant que c’est donc à juste titre que RENOMA reproche à ISIDE d’avoir vendu hors du territoire concédé ; V – SUR LA VENTE DE PRODUITS AVEC DES VIGNETTES NE CORRESPONDANT PAS À CELLES LIVRÉES PAR RENOMA Considérant que chacun des contrats susvisés comporte l’obligation pour ISIDE d’acquérir les vignettes de RENOMA afin de les apposer sur les produits de marque RENOMA qu’elle fabrique ; Considérant que, selon RENOMA, il est établi que de nombreuses vignettes ont en réalité été fabriquées, hors de son contrôle, et apposées sur des produits, en violation des obligations contractuelles ; qu’elle le déduit de la comparaison entre les vignettes par elles fournies à ISIDE et le nombre de produits vendus, bien supérieur à celui de ces vignettes, nombre qui s’est d’ailleurs accentué au cours de l’année 1994, ce dont elle ne pouvait se

rendre compte, ISIDE ne lui ayant donné le chiffre des ventes réalisées à partir du 2e trimestre 1994 qu’au cours de la présente procédure ; Considérant qu’ISIDE ne conteste pas avoir apposé de telles vignettes mais affirme que cela a été effectué avec l’accord de RENOMA qui lors de l’envoi des comptes contrôlait le nombre de ventes déclarées et pouvait donc comparer avec le nombre d’étiquettes livrées et n’a jamais protesté alors que le montant des ventes était supérieur au nombre de vignettes livrées ; qu’elle relève encore que RENOMA a reçu toutes les redevances relatives à l’ensemble des produits ; Mais considérant qu’ISIDE ne peut se prévaloir d’un accord tacite sur cette pratique ; qu’en effet, par une lettre en date du 8 novembre 1993, RENOMA rappelait "qu’aucune ceinture RENOMA – quel qu’en soit le fabricant- ne peut être commercialisée sans la vignette RENOMA ; (qu’ils font) le maximum pour faire parvenir au plus vite, les vignettes en question …..et que bien entendu cette obligation contractuelle s’applique à l’ensemble des produits concédés par RENOMA" ; qu’en outre, ce n’est qu’au cours de l’année 1993 et en 1994 que la distorsion a été très importante entre les vignettes livrées et les produits vendus ; Considérant qu’il convient de relever que selon les documents de la procédure pénale en ITALIE, durant les années 1993 et 1994, ISIDE a acquis de la société TEXCONTROL SpA 1 221 962 vignettes RENOMA, soit un chiffre supérieur au nombre de produits déclarés ; Qu’ISIDE, qui ne démontre pas avoir recueilli l’accord de son donneur de licence, a ainsi violé de manière caractérisée une clause essentielle des contrats ; que les griefs de ROMANA à cet égard sont fondés. VI – SUR LES FAUSSES DÉCLARATIONS DE CHIFFRE D’AFFAIRES ET LA PRATIQUE DE PRIX CONTRAIRES À LA POLITIQUE GÉNÉRALE DE RENOMA Considérant que comme il a été ci-dessus relevé, le nombre de vignettes commandé en ITALIE a été bien supérieur au nombre des produits déclarés ; que même s’il est possible d’admettre que partie de ces vignettes n’ait pas été utilisée, il est constant que n’ont été retrouvées en stock qu’environ 5 000 étiquettes et qu’il n’est donné aucune indication sur ce qu’il est advenu des autres vignettes acquises auprès de la société TEX CONTROL ; Considérant en outre qu’au cours de l’expertise, alors que les experts puis le sapiteur lui en avaient fait injonction, ISIDE n’a pas transmis l’intégralité de sa comptabilité ; qu’elle a communiqué des rapports d’audit non contradictoires qui indiquent avoir contrôlé la comptabilité mais ne donnent aucune précision sur les documents comptables sur lesquels ils se fondent (aucun document n’étant annexé à ces rapports) ; que RENOMA relève à juste titre des incohérences dans ces études, en ce qu’il a été constaté une corrélation entre les quantités vendues et les déclarations de chiffre d’affaires alors qu’il n’est donné aucune indication sur la méthode de vérification et que l’expertise contradictoire a mis en évidence qu’il n’y avait pas de concordance entre les quantités déclarées, le chiffre

d’affaires encaissé et le chiffre d’affaires des ventes ; qu’il en est ainsi à titre d’exemple d’une facture en date du 28 février 1994 établie par ISIDE à l’ordre de IFA portant sur une livraison de 11000 ceintures et d’un réglement déclaré pour 275 ceintures sans qu’il puisse être vérifié par d’autres documents de quelle manière et à quelle date ont été payés les autres objets facturés ; Qu’il résulte, en conséquence, de l’ensemble de ces éléments qu’ISIDE n’a déclaré à son contractant qu’une partie du chiffre d’affaires réalisé et a dissimulé des ventes ; que le grief formé par RENOMA est justifié ; Considérant qu’il est établi que les produits authentiques RENOMA vendus au JAPON par les intermédiaires clients d’ISIDE ont été commercialisés à des prix moins élevés que les produits vendus par les licenciés et pour partie de ces produits, dans des hypermarchés ; qu’ainsi, ISIDE a également violé ses obligations contractuelles selon lesquelles : « de manière à préserver son image de marque et le créneau de clientèle dans lequel RENOMA doit être vendu, ISIDE préviendra RENOMA des prix de détail desdits articles, avant leur mise en vente, selon les possibilités commerciales de chaque marché » et « la vente des articles portant 0la griffe RENOMA dans les grandes surfaces type hypermarché feront l’objet d’une autorisation écrite de RENOMA » ; Considérant que ces manquements graves aux obligations résultant des contrats signés en 1993 justifient le prononcé de la résiliation aux torts d’ISIDE, sans qu’il puisse être reproché à RENOMA de ne pas avoir respecté le délai de préavis d’un mois ni la procédure de conciliation prévue dans un seul des contrats ; qu’il convient encore de relever que de fait, ISIDE a bénéficié du délai de six mois après la rupture des relations contractuelles pour continuer la vente des produits RENOMA ; que ISIDE ne peut en conséquence se plaindre d’un comportement fautif de RENOMA ; Considérant qu’ISIDE invoque vainement d’autres manquements imputables à RENOMA ; qu’elle n’établit pas, en effet, contrairement à ce qu’elle prétend, que son contractant aurait recherché d’autres licenciés sur les territoires donnés en licence à ISIDE, avant la rupture des relations ou même durant la période du mois de préavis contractuellement prévu ; qu’il ne saurait davantage être reproché à RENOMA d’avoir envoyé à la société ART SERIGRAPHIE une lettre en date du 17 mai 1994 autorisant le vente de tee-shirts en FRANCE dès lors que ce territoire n’avait pas été donné en licence à ISIDE pour ces vêtements ; Considérant qu’ISIDE fait encore valoir que RENOMA a eu un comportement fautif à son égard, en se livrant à une campagne de diffamation ; que cette société invoque à ce titre la diffusion d’une lettre « circulaire » en date du 23 octobre 1994, la multiplication des procédures judiciaires et une saisie contrefaçon pratiquée à PARIS chez un client d’ISIDE ; Considérant toutefois que la lettre circulaire susvisée, à supposer qu’elle ait été envoyée à l’ensemble des clients d’ISIDE, ce qui n’est pas établi, est postérieure aux relations contractuelles et ne contient aucun propos injuriux à l’encontre d’ISIDE, le destinataire

étant seulement prévenu de l’existence d’une enquête en « raison d’un problème de contrefaçon » ; que les autres actes reprochés à RENOMA ne sont pas davantage pertinents pour prouver l’existence d’une campagne de dénigrement, dès lors que la saisie contrefaçon et les procédure judiciares invoquées n’ont été effectuées que pour préserver les droits de RENOMA, sans publicité répréhensible que les demandes en dommages intérêts formées par ISIDE seront rejetées ; VII – SUR LA RESPONSABILITÉ DE TSGC Considérant que, selon RENOMA, TSGC a commis des fautes sur le fondement de l’article 1382 du code civil, cette société étant en réalité intervenue dans la gestion d’ISIDE ; qu’elle invoque sa qualité d’actionnaire majoritaire dans le capital d’ISIDE, l’existence de dirigeants communs aux deux sociétés et le fait qu’elle était fournisseur exclusif d’ISIDE pour les tissus fabriqués en exclusivité pour RENOMA ; Considérant que TSGC était fabricant de tissus exclusifs pour RENOMA mais fabrique pour de multiples autres sociéts (RENOMA n’ayant représenté que 4% de son chiffre d’affaires global) ; que cette société n’est pas, comme l’affirme RENOMA, actionnaire majoritaire d’ISIDE ; que c’est en réalité une de ses filiales qui contrôle cette société ; qu’il ne peut être tiré de ces seules circonstances, et de l’existence d’administrateurs communs (ce qui est fréquent pour des sociétés appartenant au même groupe) que TSGC s’immisce réellement dans la gestion d’ISIDE ; Considérant que n’apparait nullement déterminant l’envoi sur papier à en tête de TSGC de la lettre de protestation à la résiliation en date du 22 juillet 1994, par laquelle Michele C informe RENOMA que TSGC a pris le « contrôle de la société ISIDE depuis le mois de mai 1993 et précise qu’il réorganise la direction et l’administration de la société » ; que M. C, (qui est administrateur de TSGC cherchait par cette lettre à rassurer RENOMA ; que les termes utilisés ne prouvent pas une immixtion de la société TSGC dans la gestion d’ISIDE ; que de plus M. C signataire de la lettre était à cette date administrateur d’ISIDE et avait donc qualité pour écrire au nom de cette dernière ; Considérant que RENOMA ne démontre pas par d’autres documents que TSGC aurait accompli des actes positifs de gestion tels que la conclusion de marchés ou d’actes commerciaux, pris des décisions ou même imposé, concernant les activités, une orientation de quelque nature que ce soit, ni qu’elle aurait aidé ISIDE dans la violation de ses obligations contractuelles ; que sa demande dirigée contre TSGC, est mal fondée, TSGC, société mère et ISIDE devenue sa filiale, gardant leur indépendance juridique et patrimoniale ; que RENOMA sera donc déboutée de ses prétentions de ce chef ; VIII – SUR LA DEMANDE DE TSGC EN DOMMAGES INTÉRÊTS POUR PROCÉDURE ABUSIVE Considérant que selon TSGC, RENOMA ne pouvait se méprendre sur l’absence totale de fondement de son action, que de plus, à l’occasion de la procédure de référé, cette société aurait porté de graves atteintes à son honneur et à sa considération et qu’elle se réserve

d’engager toutes procédure de fond pour obtenir paiement de dommages intérêts au titre des préjudices commerciaux et moraux subis ; Mais considérant que RENOMA, en raison des liens économiques existant entre TSGC et ISIDE a pu se méprendre de bonne foi sur la portée de ses droits à l’égard de TSGC ; que la demande de dommages intérêts pour procédure abusive sera rejetée ; IX – SUR LA DEMANDE DE TSGC EN PAIEMENT D’INDEMNITÉ SUR LE FONDEMENT DE L’ARTICLE 700 DU NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE Considérant que les diverses procédures engagées à l’encontre de TSGC en référé puis au fond ont entraîné des frais importants pour TSGC qu’il ne serait pas équitable de laisser à sa charge ; qu’il convient de condamner RENOMA à payer la somme de 60 000 francs à ce titre ; X – SUR LES MESURES RÉPARATRICES Considérant que pour justifier sa demande en paiement de la somme de 100 000 000 francs à titre de dommages intérêts pour le préjudice subi du fait des manquements contractuels d’ISIDE, RENOMA invoque le manque à gagner qui résulte des « ventes éludées et des ventes hors territoire contractuel » qui selon elle et comme l’ont relevé les experts doit être calculé non pas seulement en tenant compte des redevances non perçues mais de la marge réalisée par ISIDE ; qu’elle soutient encore qu’elle a subi un préjudice important par la dépréciation de l’image de sa marque et la déstabilisation du réseau de vente de ses produits ; Considérant que la comparaison entre le nombre de vignettes fabriquées (1 675 551, y compris celles fournies par RENOMA) et la quantité de produits déclarée à la fin du 3e trimestre 1994 (783 028 selon les experts), ainsi que le stock de vignettes dans les locaux d’ISIDE (plus de 5000) permettent de déterminer le préjudice subi sur la base de 900 000 produits non déclarés ; Considérant que les experts qui ont retenu des chiffres bien supérieurs ne sauraient être suivis sur ce point dans leurs conclusions ; qu’en effet, l’absence de communication des pièces comptables les ont obligés à faire des hypothèses non justifiées compte tenu du nombre d’étiquettes en réalité fabriquées ; que par ailleurs le préjudice doit être évalué non par rapport à la marge d’ISIDE mais par rapport aux dommages causés au donneur de licence et donc en l’espèce essentiellement par rapport aux taux de redevances fixés contractuellement ; Considérant que compte tenu de ces circonstances (et notamment d’un prix moyen de vente des produits de 60 francs), la cour a des éléments suffisants pour fixer le préjudice subi par RENOMA en raison de son manque à gagner à la somme de 8 000 000 de francs ;

Considérant que RENOMA ne saurait, par ailleurs, faire supporter à ISIDE seule la « ruine de la marque RENOMA au JAPON » ; Qu’en effet, les actes d’importation parallèle ont continué au JAPON après la rupture des relations contractuelles sans que la responsabilité d’ISIDE se soit révélée dans ces actes ; que, si RENOMA justifie de ce que la société ALPHA CUBIC, sa licenciée au JAPON a eu des difficultés, elle ne démontre pas que son image de marque ait pour autant été détruite ; que cependant le comportement d’ISIDE a causé une désorganisation dans le système commercial de RENOMA qui a ainsi subi un préjudice distinct de celui résultant du manque à gagner ; que ce préjudice sera justement et suffisamment réparé par l’allocation de la somme de 500 000 francs à titre de dommages intérêts ; Considérant qu’il y a lieu de faire droit aux mesures d’interdiction sous astreinte et de remise du stock se trouvant entre les mains d’ISIDE dans les termes du dispositif ci- dessous énoncé ; Considérant qu’il convient d’ordonner la publication de l’arrêt dans trois journaux ou revues au choix de RENOMA dans la limite de 20 000 francs par insertion à la charge de ISIDE ; que la mesure de diffusion télévisuelle n’est pas justifiée, le préjudice étant suffisamment réparé par les condamnations ci-dessus prononcées ; Considérant qu’il ne serait pas équitable de laisser à la charge de RENOMA les frais non compris dans les dépens qui seront fixés à la somme de 100 000 francs ; PAR CES MOTIFS : Prononce la nullité du jugement du 19 juin 1995 ; Rejette les exceptions d’incompétence et de nullité du rapport d’expertise complémentaire ; Constate la résiliation des contrats en date des 2 janvier 1993 et 19 octobre 1993 aux torts exclusifs de la société ISIDE, à compter du 20 juillet 1994 ; Met hors de cause la société TESSITURA SERICA GIOVANNI CANEPA ; Condamne la société ISIDE à payer à la société TEXTILE DES ARTICLES RENOMA la somme de 8 500 000 francs à titre de dommages intérêts ; Fait interdiction à la société ISIDE de continuer à commercialiser des articles sous la marque RENOMA sous astreinte de 1 000 francs par infraction constatée passé le délai d’un mois de la signification du présent arrêt ; Ordonne la remise entre les mains de la société RENOMA du stock des produits RENOMA sous la même astreinte par jour de retard passé le délai d’un mois de la signification du présent arrêt ;

Ordonne la publication du présent arrêt dans trois journaux ou revues au choix de la société RENOMA aux frais de la société ISIDE dans la limite de 20 000 francs par publication ; Condamne la société ISIDE à payer à la société RENOMA la somme de 100 000 francs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ; Condamne la société RENOMA à payer à la société TESSITURA SERICA GIOVANNI CANEPA la somme de 60 000 francs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ; Rejette toutes autres demandes ; Condamne la société ISIDE aux entiers dépens qui seront recouvrés par la SCP Annie BASKAL et la SCP D’AURIAC-GUIZARD, avoués, selon les dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure civile.

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 20 février 1998