Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 11, 12 avril 2013, n° 12/21643

  • Manquement aux obligations contractuelles·
  • Contrat de communication du savoir-faire·
  • Caractère limité des actes incriminés·
  • Étendue des droits concédés ou cédés·
  • Contrat de transfert de technologie·
  • Frais de recherche et développement·
  • Poursuite des actes incriminés·
  • Investissements réalisés·
  • Obligation d'exclusivité·
  • Obligation de garantie

Chronologie de l’affaire

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Jérôme Passa · Revue des contrats · 1er décembre 2014
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 11, 12 avr. 2013, n° 12/21643
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 12/21643
Importance : Inédit
Publication : RLDI, 99, décembre 2013, p. 31-32, Frédéric Bourguet
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 25 octobre 2012, N° 2012033829
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de commerce de Paris, 26 octobre 2012
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 13 juin 2022
Référence INPI : B20130045
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Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 11

ARRET DU 12 AVRIL 2013

(n°110, 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/21643

Décision déférée à la Cour : jugement du 26 octobre 2012 – Tribunal de commerce de PARIS – 15ème chambre – RG n°2012033829

APPELANTE

S.A.R.L. CAMILLE – COMPAGNIE D’ASSISTANCE MINIERE ET INDUSTRIELLE, agissant en la personne de son gérant domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque L 34

Assistée de Me Pascal WILHELM plaidant pour la SELAS WILHELM & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque K 24

INTIMEES

S.A.S. THALES COMMUNICATIONS & SECURITY, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 3]

[Adresse 3]

S.A.S. THALES SERVICES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentées par la SCP BOLLING – DURAND – LALLEMENT (Me Frédéric LALLEMENT), avocat au barreau de PARIS, toque P 480

Assistées de Me Olivier LITTY, avocat au barreau de PARIS, toque G 149

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 28 février 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Françoise CHANDELON, Conseiller, Faisant Fonction de Président

Mme Dominique SAINT-SCHROEDER, Conseiller

Mme Sonia LION, Vice-Président Placé

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Carole TREJAUT

Mme Françoise CHANDELON a préalablement été entendue en son rapport

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile

Signé par Mme Françoise CHANDELON, Conseiller, Faisant Fonction de Président, et par Mme Carole TREJAUT, Greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

La société Compagnie d’Assistance Minière et Industrielle (Camille), créé en 2006, a pour activité, selon l’extrait Kbis produit, 'le développement de la technologie dite du TP3 puissance pulsée haute performance'.

Elle a signé avec la société Thales Engineering & Consulting (THEC), le 10 mai 2006, un protocole d’accord portant sur le transfert de la technologie dite 'TP3" en vue de son développement puis de son exploitation commerciale.

Si cette technologie concerne toute utilisation de décharges électriques, dont les domaines d’application sont très nombreux, le contrat ne se réfère qu’à des techniques de propulsion de l’énergie électrique dans des matériaux pour les fragmenter, en séparer les composants ou les pulvériser.

Exposant que le protocole lui aurait confié l’exclusivité du savoir faire et de la technologie transmise, la société THEC, aux droits de laquelle vient aujourd’hui la société Thales Service, s’engageant à ne pas exploiter et à ne pas laisser des personnes dont (elle) répond, exploiter la Technologie Contractuelle dans le Domaine Contractuel et que cette dernière aurait violé cette obligation en transmettant son savoir faire à sa société soeur Thales Communications & Security, la société Camille a engagé la procédure par exploits à jour fixe du 22 mai 2012.

Par jugement du 26 octobre 2012, assorti de l’exécution provisoire, le tribunal de commerce de Paris l’a déboutée de ses demandes et l’a condamnée au paiement d’une indemnité de 10.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à chacune des défenderesses.

Par déclaration du 29 novembre 2012, la société Camille a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières écritures, au sens de l’article 954 du code de procédure civile, déposées le 26 février 2013, la société Camille demande à la Cour de :

— infirmer le jugement,

— ordonner la cessation immédiate et définitive de toute exploitation de la technologie visée par le protocole signé sous astreinte de 50.000 € par jour de retard,

— condamner in solidum les sociétés Thales Services et Thales Communications & Security à lui verser 1.369.277 € de dommages- intérêts et 100.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, au sens de l’article 954 du code de procédure civile, déposées le 27 février 2013, les sociétés Thales Services et Thales Communications & Security demandent à la Cour de :

— confirmer le jugement,

— condamner la société Camille au paiement d’une indemnité de 30.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

CELA ETANT EXPOSE,

LA COUR,

Sur le jugement déféré

Considérant que l’article 2 du protocole d’accord précise que la société Camille reste propriétaire exclusif du Savoir-faire et de la Technologie Contractuelle transmise par THEC et que THEC s’engage à ne pas exploiter et à ne pas laisser des personnes dont il répond, exploiter la Technologie contractuelle ;

Considérant que pour rejeter les demandes de la société Camille, la juridiction consulaire a estimé que l’engagement de non divulgation pris par la société THEC ne concernait pas les sociétés de son groupe, interdiction dont elle retient qu’elle ne pouvait être implicite ;

Mais considérant que la cession à titre exclusif, par la société THEC, de la Technologie TP3 et de son Savoir-faire, lui impose les obligations légales de garantie du fait personnel et de l’éviction par un tiers ;

Que la dernière proposition de la clause précitée se borne à préciser la teneur de la garantie du fait personnel et ne saurait restreindre la garantie d’éviction qui découle de l’économie même du contrat ;

Considérant qu’il convient en conséquence d’infirmer de ce chef la décision déférée ;

Sur l’objet de la cession

Considérant que pour conclure au débouté de la société Camille, les intimées soutiennent notamment que la société THEC s’est bornée à vendre du matériel, un prototype outre une documentation technique, d’une valeur correspondant au prix acquitté de 80.000 € ;

Mais considérant qu’elles ne peuvent ainsi balayer la lettre du contrat, qu’elles invitent la Cour à examiner à la lumière de la modicité du prix de cession, rédigé par la société THEC, qui fait état de la cession d’une technologie contractuelle et d’un savoir-faire, notion que les parties ont encore pris soin de définir ;

Et considérant que l’article 1157 du code civil invite le juge à interpréter les dispositions contractuelles dans le sens avec lequel elles peuvent avoir un effet, dont l’existence est ainsi présumée ;

Sur le contexte du protocole

Considérant qu’il résulte des pièces techniques produites que le groupe Thales a débuté ses travaux dans le domaine de l’application civile des puissances pulsées en 1993, cette technologie ayant été utilisée, pendant la seconde guerre mondiale, pour la fabrication de canons électriques ;

Qu’il a ainsi mis au point un procédé direct (par explosion) et indirect (par implosion) puis réalisé deux pilotes correspondants ;

Considérant toutefois qu’à compter de 2002, le groupe Thales a estimé devoir se recentrer sur le coeur de son métier, la défense ;

Qu’il en est pour preuve :

— l’attestation de M. [Y], alors salarié du groupe Thales, que les intimées ne sauraient voir rejeter des débats en l’absence de motifs légalement admissibles, qui témoigne de sa volonté de développer et d’industrialiser cette technologie à travers un partenaire,

— le courrier du 4 novembre 2002 adressé au témoin, ès qualités de dirigeant de la société CSA Consultants, par la société THEC, confirmant ce souhait et lui proposant soit une cession du savoir faire et des équipements, par apport exclusivement en industrie, précisant qu’elle n’apporterait aucun financement,

— un projet de protocole avec une société Xaelys, dont la signature était envisagée le 1er juillet 2005, visant la cession des mêmes droits ou biens mais pour un prix de 275.000 €, comportant une définition précise du domaine contractuel et conférant à la société THEC une priorité pour la fabrication des équipements propres à la mise en oeuvre du savoir-faire si elle désirait y procéder,

— la cession, le 20 mars 2006, de la branche ingénierie civile de la société THEC, celle-ci déclarant développer ses activités 'défense',

— l’affirmation, dans un 'mémo’ du 4 mai 2006 rédigé par un responsable du groupe Thales, que le développement d’un pilote industriel commercialisable ne rentre pas dans le core business de THEC ;

Sur la technologie des puissances pulsées

Considérant qu’il résulte des pièces techniques produites que cette technologie a de multiples domaines d’application ;

Que parmi les nombreuses classifications proposées par les spécialistes, celle du groupe Thales peut être retenue qui distingue :

— le retraitement et la dépollution,

— les alimentations pulsées,

— les générations d’ondes EM,

— les simulateurs ;

Considérant qu’il est constant que le contrat porte sur les applications du premier groupe cité ;

Sur l’existence d’un savoir-faire

Considérant que les intimées soutiennent que le secret est une des composantes de cette notion au terme du règlement européen du 27 avril 2004, de sorte que la société THEC n’aurait pu transmettre un savoir-faire à la société Camille d’une technologie qui relève du domaine public,

Qu’elle ajoute que l’appelante a reconnu qu’aucun savoir-faire n’avait été cédé et qu’en toute hypothèse, sa transmission à la société Thales Communications & Security n’est pas démontrée ni davantage son exploitation par cette dernière ;

Considérant que l’article 1.5 du contrat définit le savoir-faire contractuel comme les connaissances techniques de THEC relatives à la Technologie contractuelle précisant qu’il comprend l’assistance technique… pour permettre le transfert de technologie ;

Considérant que cette définition ne s’oppose pas à celle donnée par le règlement communautaire précité ou par l’article 39.2 des Accords sur les Aspects des droits de Propriété Intellectuelle qui touchent au Commerce encore cités par les intimées, lesquelles reconnaissent l’existence d’un savoir-faire en présence d’informations acquises par l’expérience qui ne sont pas aisément accessibles et n’ont pas été divulguées par leur titulaire, ce qui leur confère une valeur commerciale ;

Considérant que pour en nier l’existence, les intimées soutiennent que la technique des puissances pulsées est connue depuis 1923, date de l’invention, brevetée, du générateur de Marx (procédé direct), que la technologie indirecte a été découverte en 1960 ou encore que la diversité de ses applications, notamment médicales, fait l’objet de nombreuses publications et même d’un colloque annuel de sorte que le secret qui participe à sa définition ne peut être retenu ;

Mais considérant que des singularités d’application peuvent, dans un domaine technique connu, constituer des secrets de fabrique dès lors que leur découverte nécessite des recherches longues et coûteuses, les distinguant des règles de l’art que tout professionnel peut acquérir rapidement et qu’elles constituent alors un savoir-faire commercialisable ;

Considérant qu’en l’espèce, la thèse de M. [F] [S] permet de constater que si le principe de concassage et de recyclage des matériaux est connu, qui consiste en une restitution dans de l’eau de la charge de condensateurs par un commutateur de puissance, les paramètres permettant de parvenir aux résultats optimaux restent à définir, les essais portant notamment sur les distances inter-électrodes ou le volume d’énergie utile pour atteindre la rupture diélectrique de l’eau ;

Qu’il résulte par ailleurs d’une étude de chercheurs japonais que le principe de libération/ extraction est fondé sur la différence entre propriétés physiques magnétiques et électriques propres à chaque composant rentrant dans la constitution des minéraux, ce dont il résulte que des procédés différents doivent être appliqués selon le matériau à détruire ;

Considérant encore que M. [Y] précise, dans l’attestation précitée, que si des effets de résonnance, de dilatation et le déplacement d’ions métalliques dans la structure cristalline des matériaux permettent de fragmenter les roches, pour une raison qui reste mal comprise, de tels résultats n’ont pu être obtenus par Thales qu’au travers d’un assemblage très précis de certains composants, qu’il qualifie de savoir-faire ;

Que le témoin précise encore que participent à sa définition :

— les notes de calcul sur les phénomènes d’oscillations amorties,

— les spécifications et réglages des générateurs d’impulsion,

— la procédure de montage des condensateurs,

— les spécifications techniques et références des câbles LMJ,

— les études et procédures de calcul sur la brisabilité, les documents techniques d’assemblage, les équipements liés à cette technologie ;

Sur la teneur du contrat et son exécution

Considérant que la technologie contractuelle, objet du savoir-faire cédé, comporte, aux termes de l’article 1.2 du contrat, la technologie du TP3 et tous les équipements et matériel qui lui sont liés, y compris les tests et essais déjà réalisés lorsqu’ils sont la propriété exclusive de THEC ;

Que la documentation contractuelle qui, selon l’article 1.4, la décrit, comprend les pièces nécessaires ou utiles à l’utilisation des équipements permettant sa mise en oeuvre ;

Qu’elle fait l’objet d’une annexe 1 ;

Que cette annexe cite 15 techniques de broyage concernant différents matériaux, corindon, graphites, carte électroniques, semi-conducteurs, circuits imprimés, disques compacts, minéraux, minerais et kimberlites et 1 technique de traitement de verre feuilleté ;

Considérant encore que la société Camille verse aux débats la première page de rapports d’essais ou d’analyse, campagne d’essais ou encore synthèse concernant le broyage de ces différents matériaux outre des documents transmis, dont il précise la teneur en page 11 de ses conclusions ;

Que sur chaque page des rapports d’essais ou d’analyse figure la mention suivante :

'Ce document est la propriété de THALES. Il est remis à titre confidentiel. Il ne peut être copié, ni communiqué à des tiers sans autorisation écrite de THALES. Toute infraction donnera lieu à des poursuites judiciaires’ ;

Considérant ainsi que leur transmission dans le cadre de la cession démontre que la documentation contractuelle ne se limitait pas aux différents ouvrages traitant de l’état des connaissances en matière de puissances pulsées comme le soutiennent les intimées mais que la société THEC avait procédé à un certain nombre d’expériences lui ayant permis d’avancer pour atteindre l’objectif poursuivi d’une exploitation commerciale ;

Que la nature confidentielle des résultats obtenus permet ainsi de retenir qu’elle a bien transmis un savoir-faire à son cocontractant ;

Considérant que les intimées ne sauraient encore soutenir que la société Camille a elle-même dénié l’existence d’un savoir-faire en se référant à un courrier de son dirigeant rédigé en décembre 2007 ;

Que si ce dernier se plaint de l’absence de transmission du savoir-faire contractuel à cette date, précisant que celui-ci ne saurait se résumer à la livraison d’un générateur de Marx et de son mode d’emploi qui relèvent du domaine public, il ajoute que le savoir-faire attendu est lié à l’utilisation de ces procédés et évoque les capitalisations faites par THALES durant ces dernières années dont il livre une liste sur laquelle figurent :

— le bilan énergétique en fonction de la nature des matériaux fragmentés,

— des précisions sur les rapports d’essais à qui il reproche de ne pas toujours indiquer les paramètres réglables et de ne pas expliquer le choix de ces valeurs en relation avec les résultats de la fragmentation voulue ;

Qu’il termine son courrier en indiquant qu’il serait contraire à l’esprit et à la lettre du contrat d’obliger la société Camille à refaire le chemin technologique parcouru par THALES depuis une dizaine d’années ;

Et considérant que le procès-verbal de réception sans réserve signé par la société Camille le 18 décembre 2008 prouve qu’elle a obtenu les réponses attendues et a effectivement bénéficié du savoir-faire dégagé par la société THEC aux termes de ses années d’expérimentation ;

Qu’il apparaît ainsi que cette dernière lui a donné, le 23 juin 2008, un certain nombre de calculs sur les distances maximales de plasma froid, dont les intimées ne sauraient soutenir, sans étayer leur propos du moindre avis technique, qu’il s’agirait de données connues ;

Considérant que les annexes du contrat et le contexte entourant sa signature permettent de constater que ce savoir-faire concerne la technologie du TP3 appliquée aux domaines des mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables ;

Qu’en ayant cédé à la société Camille l’exclusivité, la société Thales Service, venue aux droits de la société THEC aux termes d’un avenant n°1 au protocole signé par les trois parties le 13 novembre 2007, ne pouvait en faire bénéficier la société Thales Communications & Security ;

Et considérant que les intimées ne sauraient conclure à la nullité du contrat, pour imprécision de l’objet, alors que la convention permet de le déterminer, ou en application des règles du droit de la concurrence, alors que l’interdiction sollicitée ne concerne que les activités, civiles, de retraitement et de dépollution laissant aux sociétés du groupe Thales l’opportunité de développer toute autre application de la technologie TP3 ;

Sur la violation de l’exclusivité conférée à la société Camille

Considérant que la société Thales Communications & Security qui n’avait pas contesté devant les premiers juges avoir bénéficié des informations détenues par sa société soeur, soutient, en cause d’appel, que la société Camille n’en rapporte pas la preuve ;

Mais considérant que l’état d’avancement de ses travaux, que révèlent les documents produits, comme il sera précisé ci-dessous, ne permet pas de retenir cette nouvelle version des faits ;

Sur les travaux de la société Thales Communications & Security

Considérant qu’il résulte d’une 'fiche projet’ rédigée par l’Agence Nationale de la Recherche que cette société a développé une technologie innovante pour fragmenter des panneaux ;

Que cette technologie s’est montrée efficace sur la fragmentation de divers matériaux mais qu’aucun test ou études n’ont été réalisés à ce jour sur des panneaux complexes ;

Que l’article précise encore :

— que Thales Communications utilisera deux prototypes, arc électrique direct et indirect dans l’eau,

— que ses travaux de recherche visent à comprendre les phénomènes physiques amenant à la fragmentation et de définir les matières recyclables suite à la fragmentation ;

Considérant que cette note d’information suffit à démontrer que, contrairement à ce que soutiennent les intimées, la société Thales Communications & Security travaille effectivement sur l’application de la technique de puissance pulsée à la dépollution par fragmentation de matériaux et recyclage ;

Et considérant que pour être parvenue à fragmenter rapidement divers matériaux, elle a nécessairement bénéficié du savoir-faire de sa société soeur, qui n’a obtenu de tels résultats, comme démontré ci-dessus, qu’au terme de plusieurs années de recherches ;

Considérant au surplus que le ministère de l’industrie lui a accordé une subvention pour le traitement par fragmentation des cartes électroniques et des petits appareils en mélange, dont le savoir-faire a été cédé à la société Camille d’après les pièces produites ;

Sur le préjudice

Considérant qu’il convient d’accueillir la demande de la société Camille tendant à obtenir, sous astreinte, la cessation immédiate par la société Thales Communications & Security de toute activité liée à l’application de la technologie du TP3 aux mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables ;

Considérant que la société Camille sollicite encore paiement de 1.369.277 € au titre du préjudice subi ;

Que cette somme correspond au montant des dépenses engagées depuis sa création, principalement en recherche et développement ;

Considérant que l’exploitation démontrée, au sein du groupe Thales du savoir-faire qui lui avait été transmis l’a, comme elle le soutient, privée d’une partie de ses actifs ;

Considérant toutefois que le préjudice se trouve limité par l’interdiction faite à la société Thales Communications & Security de poursuivre ses travaux dans le secteur concerné et qu’il convient de l’évaluer à la somme de 200.000 € ;

Considérant que l’équité commande encore d’allouer à la société Camille la somme de 30.000 € au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre de cette procédure ;

Considérant que ces condamnations seront mises à la charge, in solidum, des deux intimées, la société Thales Services pour avoir violé l’exclusivité conférée à la société Camille, la société Thales Communications & Security pour avoir poursuivi ses activités après avoir été informée par l’appelante de la teneur du protocole du 10 mai 2006 ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

Ordonne à la société Thales Communications & Security de cesser dans le mois suivant la signification du présent arrêt toute activité liée à l’application de la technologie du TP3 aux mines, minéraux, minerais et autres matériaux recyclés ou recyclables ;

Dit que passé ce délai, elle y sera contrainte sous astreinte de 10.000 € par jour de retard pendant un délai de six mois ;

Condamne in solidum les sociétés Thales Services et Thales Communications & Security à payer à la société Camille – Compagnie d’Assistance Minière et Industrielle 200.000 € de dommages-intérêts outre 30.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum les sociétés Thales Services et Thales Communications & Security aux dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Conseiller, Faisant Fonction de Président

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