Cour d'appel de Paris, 21 novembre 2013, n° 13/09561

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 21 nov. 2013, n° 13/09561
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 13/09561
Décision précédente : Tribunal de commerce d'Évry, 23 avril 2013, N° 2013R00102

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 9

ARRET DU 21 NOVEMBRE 2013

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 13/09561

Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référé du 24 Avril 2013 -Président près le Tribunal de Commerce d’Evry – RG n° 2013R00102

APPELANT :

Monsieur A Z

né le XXX à XXX

de nationalité française

XXX

XXX

représenté par : Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

assisté de : Me Anne-Gaëlle TRICOT, avocat au barreau de PARIS, toque : T06

INTIME :

Maître C-A Y

es qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société X FRANCE

XXX

XXX

représenté par : Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090

assisté de : Me Pierre FORGET, avocat au barreau de PARIS, toque : R020, substitué par Me Pierre-Julien PERNAUD, avocat au barreau de PARIS, toque R020

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Octobre 2013, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur A B, Président, et Madame G H, Conseillère, chargés d’instruire l’affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur A B, Président de chambre

Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller

Madame G H, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur A B dans les conditions prévues par l’article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Madame Violaine PERRET

MINISTERE PUBLIC : L’affaire a été communiquée au ministère public.

ARRÊT :

— contradictoire,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Monsieur A B, président et par Madame Violaine PERRET, greffier présent lors du prononcé.

Sur déclaration de cessation de paiements déposée le 19 octobre 2009, la société X FRANCE (société X) a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 2 novembre suivant du tribunal de commerce d’Evry ayant désigné Maître C Y en qualité de liquidateur et ayant provisoirement fixé au 19 octobre 2009 la date de cessation de paiements. À la requête du liquidateur judiciaire, le cabinet d’expertise comptable COGEED a été désigné, par ordonnance du 22 mars 2010 du juge-commissaire, en vue essentiellement de l’examen approfondi de la comptabilité (ne relevant pas de la compétence habituelle de Maître Y ès qualités) afin de rechercher les responsabilités et fautes éventuelles dans le cadre de l’application des articles L 651-1 et suivants du code de commerce.

Le 19 octobre 2010, Maître Y, se fondant essentiellement sur le rapport COGEED, a attrait la société X, prise en la personne de son président Monsieur A Z, devant le tribunal en vue de voir reporter au 3 mai 2008 la date de cessation de paiements. La société X (alors représentée par son ancien dirigeant A Z), s’y est opposée.

Par jugement contradictoire du 26 mars 2012 assorti de l’exécution provisoire, le tribunal a estimé que la société X était en état de cessation de paiements 'au moins dès le 1er janvier 2008 ' et a, en conséquence, fait droit à la demande du liquidateur judiciaire.

Appelante le 2 avril 2012, la société X, agissant alors en la personne de son représentant légal, poursuivait :

— à titre principal, l’annulation du jugement et le rejet des demandes de Maître Y ès qualités aux motifs 'd’irrégularités procédurales’violant les droits de la défense, le principe du contradictoire et le droit à un procès équitable,

— subsidiairement, l’infirmation du jugement en estimant qu’à la date du 3 mai 2008, son actif disponible était au moins égal à 939.043,27 € face à un passif exigible se limitant à hauteur de 483.365,25 €.

Cette instance d’appel est toujours pendante et, le 30 mai 2013, a fait l’objet d’un sursis à statuer dans l’attente de la solution à la présente instance d’appel sur ordonnance de référé.

En effet, le liquidateur judiciaire a estimé entre temps, au vu des dernières écritures de la société X du 17 janvier 2013 dans l’instance en report de la date de cessation des paiements, que le dirigeant, Monsieur Z, qui agit au nom de la société exerçant son droit propre, est en conflit d’intérêts du fait d’une autre instance en sanction à son encontre personnellement ultérieurement engagée le 30 octobre 2012 et actuellement pendante devant le tribunal de commerce d’Evry, l’intéressé, selon Maître Y, 'instrumentalisant ' la procédure en report de la date de cessation des paiements pour se défendre dans l’instance en sanction. Le liquidateur judiciaire a dès lors, le 20 février 2013, saisi le président du tribunal de commerce d’une requête en désignation d’un mandataire ad hoc à la société X sur le fondement de l’article L 641-9 II du code de commerce.

La SCP I-J (en la personne de Maître Christophe J) a été désignée par ordonnance du 27 février 2013, du président du tribunal de commerce d’Evry, pour représenter la société X, 'en lieu et place de son dirigeant Monsieur A Z ou tout autre, dans tous les cas et toutes les procédures où Maître C Y, en sa qualité de liquidateur ne saurait la représenter en application d’une disposition légale ou réglementaire’ la même décision précisant 'que le mandataire ad hoc pourra pour le compte de la société X France SA, s’adjoindre tout conseil en relation avec l’exercice des droits propres de la société X France SA et mettre fin, si besoin est, à la mission de tout autre conseil de ladite société'.

Le 28 mars 2013, le dirigeant évincé a assigné Maître Y ès qualités en référé devant le président du tribunal de commerce d’Evry en rétractation de l’ordonnance du 27 février 2013 désignant un mandataire ad hoc à la société X.

Par ordonnance du 24 avril 2013, le délégataire du président du tribunal de commerce d’Evry a implicitement rejeté la demande de rétractation en confirmant l’ordonnance sur requête du 27 février précédent, et a condamné Monsieur Z à verser 1.000 € de frais irrépétibles à Maître Y ès qualités.

Vu l’appel interjeté le 13mai 2013, par Monsieur Z et ses ultimes écritures télé-transmises le 25 juillet suivant, réclamant 4.784 € de frais irrépétibles et poursuivant l’infirmation de l’ordonnance de référé du 24 avril 2013 ayant rejeté sa demande de rétractation de l’ordonnance sur requête du 27 février 2013 en sollicitant le remboursement des frais irrépétibles qui ont été payés ;

Vu les dernières conclusions télé-transmises le 27 septembre 2013, par Maître Y intimé ès qualités, réclamant 1.500 € de frais irrépétibles et poursuivant la confirmation de l’ordonnance de référé ;

Vu le visa du 27 septembre 2013 du Ministère public ;

SUR CE, la cour :

Considérant que l’article L 641-9 II du code de commerce dispose que les dirigeants sociaux en fonction lors du prononcé du jugement de liquidation judiciaire le demeurent, sauf disposition contraire des statuts ou décision de l’assemblée générale ;

Que pour justifier la désignation d’un mandataire en lieu et place des dirigeants sociaux en fonction, le demandeur à la mesure doit en établir la nécessité ;

Considérant que, contrairement à ce qu’à retenu le délégataire du président du tribunal de commerce, l’intervention du même avocat pour assister :

— la société dans l’instance en contestation du report de la date de cessation de paiements,

— le dirigeant lui-même dans l’instance en sanction dirigée à son encontre,

est à elle seule insuffisante à établir la nécessité requise par l’article précité, étant au surplus observé qu’il a été indiqué devant le juge consulaire des référés qu’aujourd’hui les conseils chargés respectivement de la défense du dirigeant personnellement et de la société X exerçant son droit propre sont désormais indépendants l’un de l’autre, le liquidateur judiciaire n’ayant pas établi la prétendue 'apparence d’indépendance’ qu’il invoque [conclusions page 7] en se limitant à l’affirmer sans aucune démonstration ;

Que, suite à l’introduction d’une instance en comblement de l’insuffisance d’actif et en faillite personnelle à l’encontre de Monsieur Z, le liquidateur judiciaire en a déduit l’existence d’un conflit d’intérêts entre la société elle-même et son dirigeant dans l’instance en report de la date de cessation de paiements ;

Mais considérant qu’en se bornant à affirmer sans le démontrer :

— 'l’existence d’un conflit avéré et manifeste’ entre les intérêts de X d’une part et les intérêts personnels de Monsieur Z d’autre part, [à cinq reprises :conclusions pages 2, 3, 5, 6 et 7],

— que 'la nécessité est laissée à l’appréciation du président du tribunal de la procédure collective’ [conclusions page 6],

— que 'la simple introduction d’une action en responsabilité […] place le dirigeant en situation de conflit d’intérêts, s’agissant de l’exercice des droits propres du débiteur personne morale dans l’instance en report de DCP’ [conclusions page 6],

Maître Y ès qualités ne rapporte pas pour autant la preuve qui lui incombe de justifier la désignation d’un mandataire ad hoc par exception au principe posé par l’article précité L 641-9 II du code de commerce ;

Que, sauf à estimer que dès qu’on s’oppose aux moyens et arguments développés par le mandataire de justice, il y a nécessité d’écarter le dirigeant social, Maître Y ès qualités ne rapporte pas davantage la démonstration qui lui incombe en se bornant à relever que 'dans les conclusions que’ Monsieur Z 'a fait prendre à X dans l’instance en report de la DCP ' l’intéressé prétend que la société n’a pas eu recours à des moyens condamnables en tentant de justifier la prise d’hypothèque et les paiements critiqués par le liquidateur judiciaire ;

Qu’à cet égard, il convient d’observer que Maître Y ès qualités n’a pas indiqué quel serait l’intérêt de la société débitrice dans le report de la date de cessation de paiements, de sorte que l’intérêt personnel du dirigeant à contester la décision l’ayant ordonnée n’est pas, en l’état des pièces du dossier, en conflit d’intérêts avec ceux de la société ;

Qu’en effet, il appartient au mandataire de justice de faire valoir ses moyens et arguments dans le cadre d’un débat contradictoire, dont les échanges seront d’autant plus pertinents qu’ils se feront avec la personne auteur des actes critiqués et que le maintien en fonction des dirigeants sociaux ne fait pas obstacle à l’exercice le cas échéant, par le liquidateur, des actions qui tendent à la réparation des préjudices antérieurement subis par la société de leur fait ;

Qu’à cet égard l’affirmation du liquidateur judiciaire selon laquelle les droits de Monsieur Z personnellement seraient néanmoins préservés est inopérante quant au bien fondé de la nécessité de désigner un mandataire au sens de l’article L 641-9 II du code de commerce en remplacement du dirigeant social en exercice au jour de l’ouverture de la procédure collective ;

Considérant que succombant, Maître Y ès qualités ne saurait prospérer dans sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile mais qu’il serait, en revanche, inéquitable de laisser à Monsieur Z la charge définitive des frais irrépétibles qu’il a dû personnellement exposer ;

Qu’il n’y a pas lieu d’ordonner le remboursement des frais irrépétibles qui auraient été payés en exécution de l’ordonnance, dès lors que celle-ci étant ci-après infirmée, il appartiendra aux parties d’en tirer spontanément toute conséquence en restituant, le cas échéant, les sommes initialement réglées en exécution provisoire de ladite ordonnance ;

PAR CES MOTIFS,

Infirme en toutes ses dispositions l’ordonnance du 24 avril 2013, du juge des référés du tribunal de commerce d’Evry et statuant à nouveau,

Rétracte l’ordonnance sur requête du 27 février 2013, du président du tribunal de commerce d’Evry ayant désigné un mandataire ad hoc à la société X FRANCE en remplacement du dirigeant social en exercice au jour de l’ouverture de la procédure collective,

Rejette la demande correspondante de Maître C Y ès qualités de liquidateur judiciaire de la société X FRANCE,

Le condamne ès qualités aux dépens de première instance et d’appel et à verser 4.700 € de frais irrépétibles à Monsieur A Z,

Admet Maître Edmond FROMANTIN, avocat postulant, au bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE, LE PRESIDENT,

V.PERRET F. B

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Textes cités dans la décision

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