Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 4, 8 avril 2015, n° 13/00237

  • Sociétés·
  • Ingénierie·
  • Clientèle·
  • Commission·
  • Assurances·
  • Contrats·
  • Courtier·
  • Propriété·
  • Résiliation·
  • Statut

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 4, 8 avr. 2015, n° 13/00237
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 13/00237
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 28 septembre 2011, N° X11-27.296
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 15 novembre 2022
Lire la décision sur le site de la juridiction

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 4

ARRET DU 08 AVRIL 2015

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 13/00237

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Mai 2009 – Tribunal de commerce de PARIS – 3ème chambre – RG n° 2007005754

(suite à cassation de l’arrêt du 29 Septembre 2011 – Cour d’appel de PARIS – pôle 5 chambre 5- RG n° 09/11985 par l’arrêt du 18 Décembre 2012 -Cour de Cassation – chambre commerciale – Pourvoi n° X 11-27.296)

DEMANDEUR ET DEFENDEUR A LA SAISINE :

Monsieur [G] [V]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Catherine CHATEL, avocat au barreau de PARIS, toque : B0725

DEFENDERESSE ET DEMANDERESSE A LA SAISINE :

SAS MIA INGENIERIE ASSURANCES

immatriculée au RCS de PARIS sous le n° B 398.934.372

ayant son siège [Adresse 2]

[Localité 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Jean-philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053

ayant pour avocat plaidant : Me Stéphanie KUEFFER, plaidant pour le cabinet HBP & ASSOCIES (Me joseph PALAZZOLO), avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 11 Mars 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de chambre

Madame Irène LUC, Conseillère, rédacteur

Madame Claudette NICOLETIS, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l’audience par Madame [O] [N] dans les conditions prévues par l’article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Madame Violaine PERRET

ARRET :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Françoise COCCHIELLO, présidente et par Madame Violaine PERRET, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du 19 mai 2009, assorti de l’exécution provisoire, par lequel le tribunal de commerce de Paris a dit que le contrat liant Monsieur [V] et la société Micromegas Ingénierie Assurances (MIA) avait été rompu le 17 mai 2005, a ordonné à la société Micromegas Ingénierie Assurances (MIA) de restituer à Monsieur [V] les affaires que ce dernier lui avait apportées, autorisé Monsieur [V] à aviser les compagnies d’assurances ainsi que les clients concernés de la propriété des affaires lui revenant pour chacun des contrats visés dans la pièce 18, condamné la société Micromegas Ingénierie Assurances (MIA) à verser une provision de 40 000 € sur commissions dues, donné injonction à la société Micromegas Ingénierie Assurances (MIA), sous astreinte de 1000 € par jour à compter de 30 jours après la signification du présent jugement, de fournir le registre des affaires traitées en commun et validé par un expert-comptable, le registre spécifique créé pour retracer chaque affaire apportée par Monsieur [V], le compte spécifique des commissions à verser à Monsieur [V], dit que la liquidation de l’astreinte restera de la compétence du juge de l’exécution, débouté la société Micromegas Ingénierie Assurances (MIA) de l’ensemble de ses demandes, débouté Monsieur [V] de ses demandes de dommages-intérêts, condamné la société Micromegas Ingénierie Assurances (MIA) à payer à Monsieur [V] la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu l’appel interjeté le 28 mai 2009 par la société Micromegas Ingénierie Assurances (MIA) ;

Vu l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 29 septembre 2011,

Vu l’arrêt de la Cour de cassation du 18 décembre 2012,

Vu les conclusions de la société MIA Ingénierie Assurances, signifiées le 10 février 2004, dans lesquelles elle demande à la cour de recevoir son appel, de réformer le jugement entrepris, et statuant à nouveau, constater que Monsieur [V] étant seul à l’initiative d’une volonté de modifier les termes de la convention du 16 juin 2003 et donc d’abandonner le projet « en cours de route », constater la révocation mutuelle de la convention du 16 juin 2003, par voie de conséquence, dire que les affaires développées en commun appartiennent exclusivement à la société Mia, débouter Monsieur [V] de ses prétentions, le condamner à rembourser à la société Mia la somme de 40 000 € versée en exécution du jugement entrepris, outre intérêts au taux légal à compter du 19 mai 2009, y ajoutant, donner acte à la société Mia de ce qu’elle reconnaît devoir à Monsieur [V] la somme de 13 922,47 € au titre des commissions 2004 et 2005, arrêtées au 18 août 2005, date de fin de préavis contractuel, constater que Monsieur [V] a gravement manqué à ses obligations contractuelles, professionnelle et de loyauté en se livrant à un pillage et un détournement avéré tant de sa clientèle que des contrats d’assurance communs, le condamner à payer à la société MIA la somme de 95 000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi, juger qu’après compensation judiciaire, M. [V] reste devoir à la société MIA la somme de 81 077,53 € (95 000 – 13 922,47), outre intérêts au taux légal à compter du jugement de première instance, ordonner la capitalisation des intérêts échus, en tout état de cause, condamner Monsieur [V] au paiement de la somme de 10 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions de Monsieur [V] dans lesquelles il demande à la cour de constater que la propriété des affaires apportées depuis le 16 juin 2003 et jusqu’au 17 août 2005 à la société MIA lui a été reconnue par les articles 6 et 7 de la convention du 16 juin 2003, constater la violation par la société MIA de l’article 7 de la convention d’apporteur d’affaires du 16 juin 2003, en conséquence rejeter l’appel interjeté par la société Mia, confirmer le jugement entrepris, y ajoutant, recevoir l’appel incident de Monsieur [V], prononcer aux torts exclusifs de la société Mia la résiliation de la convention du 17 juin 2003, condamner la société Mia à payer à Monsieur [V], en exécution de la convention, la somme de 137 660 € à titre de commissions sur le chiffre d’affaires, assortie des intérêts légaux et lesdits intérêts capitalisés à compter de la mise en demeure du 10 décembre 2005, dire que la provision de 40 000 € sur les commissions versées sera imputée prioritairement sur les intérêts conformément à l’article 1254 du Code civil, la somme de 50 000 € en réparation des préjudices causés par la violation systématique des droits de Monsieur [V], condamner la société Mia à lui payer la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour appel abusif ainsi que celle de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE,

Considérant qu’il résulte de l’instruction les faits suivants :

Monsieur [V] et la société Micromegas Ingénierie Assurances (ci-après MIA) ont conclu le 13 juin 2003 une convention d’apporteur d’affaires, afin que Monsieur [V] soit formé aux fonctions d’agent d’assurances par la société Micromegas Ingénierie Assurances (MIA) et qu’éventuellement, ils fondent ensemble une société. Aux termes de cette convention, les parties ont convenu de coopérer en vue de la création d’un portefeuille d’affaires nouvelles, développées conjointement. Il était convenu, au titre de la rémunération, que pendant sa formation, Monsieur [V] ne recevrait, pour les affaires qui requerraient l’intervention technique ou commerciale de la société Mia, que 30 % des commissions, que cette dernière lui verserait lorsque son statut le lui permettrait. Ce protocole prévoyait que la clientèle apportée par Monsieur [V] lui appartiendrait, à condition qu’il obtienne son statut d’agent d’assurances, statut que la société Micromegas Ingénierie Assurances (MIA) devait l’aider à obtenir sous un certain délai. Faute d’obtenir ce statut ou en cas d’abandon du projet, la convention prévoyait que les affaires apportées deviendraient la propriété de la société Mia.

Les parties ont eu un différend et la coopération n’était plus possible entre elles. Un litige est apparu quant à la propriété de la clientèle. La société MIA a résilié le contrat, par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 mai 2005.

Par assignation du 8 mars 2006, Monsieur [V] a assigné la société Micromegas Ingénierie Assurances (MIA) devant le tribunal de grande instance de Versailles, qui s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris. Il demandait la résiliation de la convention d’apporteur d’affaires du 13 juin 2003 aux torts exclusifs de la société MIA. Le tribunal a fait droit à ses demandes, estimant que MIA avait rompu le contrat liant les parties le 17 mai 2005 et que Monsieur [V] avait acquis son statut de courtier le 23 septembre 2005 sans l’aide de MIA. Il a ordonné à MIA de restituer à Monsieur [V] les affaires que ce dernier lui avait apportées.

Par arrêt du 29 septembre 2011, la cour d’appel de Paris a estimé au contraire que la rupture de la convention d’apporteur d’affaires était imputable à Monsieur [V] et qu’en conséquence les affaires développées en commun appartenaient exclusivement à la société Mia. Elle a jugé que Monsieur [V] avait commis une faute grave, conformément à l’article 8 du contrat, en refusant les conditions de rémunération proposées par la société Mia, et qu’ainsi cette société avait pu légitimement résilier le contrat. Elle a condamné M. [V] à payer à la société Mia une somme de 31 000 € à titre de dommages-intérêts et limité les sommes dues par la société MIA à Monsieur [V] aux sommes de 13 922,47 euros et 10 000 € au titre des droits et commissions restant dus pour la période 2004-2005 et la période postérieure à la résiliation.

Par un arrêt du 18 décembre 2012, la Cour de Cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l’arrêt rendu le 29 septembre 2011 et remis la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt. Elle a relevé « qu’en se déterminant ainsi, en relevant à la charge de Monsieur [V] une tentative de renégociation des conditions du contrat, impropre à caractériser un manquement grave à ses obligations contractuelles, seul de nature, en vertu de l’article 8 de la convention du 16 juin 2003, à justifier la résiliation du contrat à ses torts, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ».

Sur la propriété de la clientèle

Considérant que la société Mia soutient que la clientèle exploitée aux termes de la convention du 16 juin 2003 appartient exclusivement à la société Mia, en raison de l’abandon du projet par Monsieur [V] ; que cet abandon résulte de sa volonté de rompre la convention et de racheter la clientèle, à un moment où le projet envisagé n’était pas encore concrétisé ; que Monsieur [V] a dénoncé la convention du 16 juin 2003 dans un courrier du 6 mai 2005, la société Mia ayant accepté cette dénonciation par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 mai 2005, entraînant ainsi la révocation de la convention par la volonté des parties et excluant l’application de l’article 8 du contrat, réservé aux conditions d’application de la résiliation ;

Considérant que Monsieur [V] expose que sa lettre du 6 mai 2005 n’était que la réponse à un courriel de la société MIA, du 21 avril 2005, qui donnait une interprétation contestable de la convention d’apporteur d’affaires ; que cette interprétation était précisée par la société Mia dans un courrier du 10 mai 2005 lui enjoignant d’acquiescer par retour de courrier aux conditions restrictives mentionnées dans cette lettre, le refus devant être considéré comme un manquement grave aux accords ; que ce courrier avait pour objectif de le contraindre à renoncer à la clientèle apportée par Monsieur [V] à la société Mia pendant la durée de leur collaboration, alors qu’il était prévu par la convention que cette clientèle était la propriété de Monsieur [V] ; qu’il était en effet stipulé dans ce courrier « MIA héberge tous les dossiers que [G] [V] voudra bien lui confier et les conservera en gestion aussi longtemps que ces contrats resteront en vigueur » ; qu’ainsi, jusqu’à la fin des contrats conclus avec la clientèle apportée, la société Mia considérait qu’elle devait percevoir sa part de commissions, alors que cette perception était limitée à la durée de la collaboration entre les parties, selon les dispositions de l’article 4 de la convention ; qu’elle proposait à Monsieur [V] le rachat de cette clientèle dans le même courrier ; que la remise en cause de la convention était à l’initiative de la société MIA, qui, par courrier du 21 avril 2005, avait dénié les droits à commissions et à la propriété des affaires apportées qui étaient reconnus à Monsieur [V] par les articles 6 et 7 de la convention ; qu’aucune faute grave ne lui était imputable ; qu’enfin, aucun accord tacite n’était intervenu entre les parties pour résilier le contrat ;

Considérant que l’article 6 de la convention stipule : « Monsieur [V] reste propriétaire des affaires apportées à MIA. Toutefois il ne pourra en disposer librement qu’à la seule condition qu’il ait acquis le statut de courtier. Sinon, ou en cas d’abandon du projet en cours de route par [G] [V], les affaires apportées deviendront la propriété de MIA» ;

Considérant que, contrairement à ce qu’il est soutenu par la société Mia, le courrier du 6 mai 2005 adressé par Monsieur [V] ne peut s’analyser comme un refus de continuer à collaborer sur les bases acquises, ou d’abandonner le projet, mais comme la volonté de clarifier le mode de rémunération de Mia au-delà de l’installation en qualité d’indépendant de Monsieur [V] ; qu’il est formellement contesté le fait de rémunérer Mia pour les dossiers apportés par Monsieur [V], au-delà de son installation comme indépendant, ce qui aurait pour effet de priver Monsieur [V] de la propriété de ses affaires et ce qui n’est, au demeurant, nullement prévu par la convention ; que Monsieur [V] a, à juste titre, protesté contre cette interprétation fallacieuse du contrat, aucune commission n’étant due à la société MIA concernant les affaires apportées par Monsieur [V], après l’installation de Monsieur [V] comme indépendant ; que Monsieur [V] n’a jamais demandé la résiliation du contrat ; que c’est donc bien la société Mia qui en a pris l’initiative le 17 mai 2005 en ces termes : « ton refus de continuer à collaborer sur les bases acquises me contraint donc à t’informer à mon tour que je fais cesser toute prolongation de notre collaboration à compter de ce jour » ; que cette résiliation ne pouvait, en vertu de l’article 8 du contrat, intervenir que pour l’un des faits énumérés audit article et, en ce qui concerne la présente affaire, en cas de manquement grave de M. [V] à ses obligations ; qu’aucun manquement grave à ses obligations n’étant imputable à Monsieur [V], la résiliation est donc abusive ; que la société Mia ne démontre pas qu’il y ait eu révocation mutuelle de la convention ;

Considérant que la société Mia ne peut donc alléguer que Monsieur [V] n’aurait pas acquis le statut de courtier dans l’exécution de la convention, ce qui le priverait de la propriété de sa clientèle ; qu’en effet, il n’est nullement mentionné dans la convention que l’acquisition du statut de courtier dut se faire pendant l’exécution de la convention ; qu’en toute hypothèse, la résiliation intervenue étant irrégulière, le contrat était prolongé au moins jusqu’au 31 décembre 2005, soit postérieurement à l’acquisition du statut de courtier par Monsieur [V], en septembre 2005 ; que le projet de création d’une structure commune entre les deux partenaires ne constituait nullement l’objet de la convention, mais était simplement envisagé, en ces termes : « l’éventualité de la création d’une société commune pourrait d’ailleurs être envisagée » ; que l’objet essentiel de la convention était que Monsieur [V] ait le statut de courtier pour créer ou reprendre une société de courtage ; que la société Mia ne peut donc sérieusement invoquer un projet « Pegassur » pour refuser la restitution des affaires apportées par Monsieur [V] ;

Considérant que la proposition effectuée le 6 mai 2005 par Monsieur [V] tendant à acheter sa clientèle à la société MIA ne démontre pas qu’il reconnaissait que cette clientèle appartenait à la société MIA, mais constitue la réponse au courrier du 21 avril 2005 de la société MIA, dans lequel celle-ci sollicitait « une offre de rachat de sa part » ; qu’il en est de même du projet d’accord de cession de clientèle civile sous conditions, proposé par le conseil de Monsieur [V], qui concrétise cette proposition, ce projet étant par ailleurs non signé, non daté et non accepté par aucune des parties ;

Considérant que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a jugé que la société MIA devait restituer à Monsieur [V], les affaires que ce dernier lui avait apportées et a autorisé Monsieur [V] à aviser les compagnies d’assurances ainsi que les clients concernés de la propriété des affaires lui revenant pour chacun des contrats visés dans la pièce 18 de Monsieur [V] ;

Sur le paiement des commissions antérieurement à la révocation de la convention

Considérant que la société Mia reconnaît devoir à Monsieur [V] la somme de 13 922,47 € ;

Sur les commissions postérieures à la révocation de la convention

Considérant que la société Mia soutient qu’aucune somme ne serait due par elle, la clientèle étant sa propriété ; qu’elle soutient en revanche que Monsieur [V] serait redevable à son égard de dommages-intérêts ;

Considérant que Monsieur [V] n’a perçu aucune commission, au titre de l’exécution de la convention, en 2004 et en 2005 ; que pendant les deux années d’exécution de la clause de non-concurrence, la société Mia a conservé les contrats apportés par Monsieur [V] ; que la société Mia bénéficie toujours en 2015 des contrats apportés par les deux clients principaux de Monsieur [V], les sociétés CGA PAC et ECOTEC ; que Monsieur [V] s’est basé pour évaluer ses commissions, sur le chiffre d’affaires indiqué dans l’attestation de l’expert-comptable de la société Mia et sur les informations transmises par les assureurs ; que les commissions sur le chiffre d’affaires de Monsieur [V] s’élevaient, pour les exercices 2004 à 2007, à 51 834 €, se décomposant comme suit : 5088 € au titre du chiffre d’affaires 2004, 19 982 € au titre du chiffre d’affaires 2005, 13 688 € pour 2006 et 13 076 € pour 2007 ; que la société Mia ne conteste pas utilement ces chiffres ; qu’il n’y a pas lieu, en revanche, de corriger cette somme au titre du reversement de 15 % à Micromégas SSII et du taux réel de commissions perçues par la société MIA, la cour ne disposant pas des éléments pertinents pour ce faire ;

Considérant, au titre des commissions de 7 % prélevées sur les contrats de CGAPLC et ECOTEC, que les commissions perçues par Mia s’élèvent à 14 313 € au titre des années 2008 et 2009 et à 13 003 € au titre des années 2010 à 2012 et, enfin, à 6500,50 € au titre des six premiers mois de 2013 ; que les commissions perçues par la société Mia sur les affaires apportées par Monsieur [V], de 2008 à 2012, s’élèvent à 74 136,50 € ; que le décompte versé aux débats par Monsieur [V] (pièce n°30 et attestations de chiffre d’affaires) n’est pas sérieusement démenti par la société Mia ;

Considérant qu’il y a donc lieu de condamner la société Mia à payer à Monsieur [V] la somme de 120 999,50 €, soit la somme globale de 125 970,50 euros (51 834 + 74 136,50), dont il y a lieu de déduire les commissions rétrocédées à Monsieur [V] pour le dernier trimestre 2009, soit 4 971 euros ;

Sur la demande de la société Mia

Considérant que la société Mia soutient que Monsieur [V] aurait eu un comportement déloyal, en s’accaparant toute une clientèle qui ne lui appartenait pas, après la résiliation de mai 2005 ; qu’il aurait pris contact avec les clients développés en commun avec la société Mia en vue de les convaincre de changer de courtier ; qu’il aurait transféré, en l’espace de quelques semaines, la plus grande majorité des contrats communs (51 contrats) au seul profit de son cabinet de courtage dénommé « Praeventio » ;

Considérant qu’elle demande à titre d’indemnisation, non seulement la valorisation de la clientèle indûment captée par Monsieur [V], que celui-ci avait évaluée à 31 100 €, mais encore le pourcentage de commissions que la société Mia était encore en droit d’encaisser sur la vie des contrats en cours ; qu’elle fixe son préjudice à 75 000 €, dont 31 000 € au titre du détournement de clientèle, 12 000 € par an au titre de la perte des commissions sur les contrats en cours, ainsi que des clients perdus du fait des effets de l’exécution provisoire de la décision entreprise et du temps perdu à la formation de Monsieur [V] ;

Considérant que la société Mia est mal fondée à soutenir le grief de détournement de clientèle à l’encontre de Monsieur [V] alors qu’elle était elle-même soumise à l’obligation de restituer les affaires apportées par celui-ci ainsi qu’à une obligation de non-concurrence, obligations qu’elle n’a pas respectées ; que Monsieur [V] n’a perçu aucune commission sur les contrats qu’il avait apportés, compte tenu du fait que la société Mia a conservé les clients apportés ; que la société Mia ne démontre pas davantage de préjudice du fait de la formation de Monsieur [V], à laquelle elle s’était engagée dans la convention, n’ayant assuré que 13 séances de formation, dont la dernière date du 24 août 2004 et Monsieur [V] ayant eu recours à un autre formateur pour faire valider son livret ; que cette demande sera donc rejetée ;

Sur la pratique de dénigrement

Considérant que la société Mia prétend que Monsieur [V] a discrédité la société MIA ; qu’elle en veut pour preuve un courrier adressé à la société CG APLC le 6 octobre 2009 ; qu’elle sollicite à ce titre une indemnisation de 20 000 € pour la pratique de dénigrement de Monsieur [V] ;

Mais considérant que si, en raison du refus de la société Mia d’exécuter le jugement entrepris, Monsieur [V] avait informé neuf clients et assureurs de la propriété des affaires apportées, aucune de ces lettres ne contenait de mentions dénigrantes ou déloyales et toutes portaient la mention de l’appel interjeté par Mia devant la cour d’appel de Paris ; que le courrier adressé à la société CG APLC n’est pas davantage dénigrant ; qu’aucune faute ne peut être imputée à Monsieur [V] et la demande de la société MIA sera rejetée ;

Sur les autres demandes de Monsieur [V]

Considérant que la société Mia ne rapporte pas la preuve d’avoir véritablement aidé Monsieur [V] dans l’acquisition de la formation de courtier, son livret étant incomplet et non validé ; qu’elle ne démontre pas davantage avoir exécuté l’obligation de tenue des registres destinés à retracer les affaires apportées pour leur permettre une identification, contrairement à l’article 3 de la convention ; qu’elle ne démontre pas avoir cantonné les commissions dues à Monsieur [V] sur un compte spécifique, contrairement à l’article 4 de la convention ;

Considérant que l’ensemble de ces inexécutions contractuelles a fait grief à Monsieur [V], qui n’a pu bénéficier du travail accompli pendant l’exécution de la convention, n’a pu récupérer la clientèle apportée par lui et est resté sans rémunération jusqu’au jugement de première instance ; qu’il y a lieu de lui allouer une indemnité de 10 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ;

Considérant en revanche qu’il n’est pas démontré que l’exercice de l’appel par la société Mia ait dégénéré en abus ; que la demande de Monsieur [V] pour procédure abusive sera donc rejetée ;

PAR CES MOTIFS

— confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a rejeté la demande de dommages-intérêts de Monsieur [V],

— l’infirme sur ce point,

— et, statuant à nouveau,

— condamne la société Mia Ingénierie Assurances à payer à Monsieur [V] la somme de 120 999,50 €, majorée des intérêts au taux légal à compter du 19 mai 2009, lesdits intérêts capitalisés selon les dispositions de l’article 1154 du Code civil,

— condamne la société Mia Ingénierie Assurances à payer à Monsieur [V] la somme de 10000 € à titre de dommages intérêts,

— condamne la société Mia Ingénierie Assurances aux dépens de l’instance d’appel qui seront recouvrés selon les dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

— condamne la société Mia Ingénierie Assurances à payer à Monsieur [V] la somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

V. PERRET F. COCCHIELLO

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 4, 8 avril 2015, n° 13/00237