Cour d'appel de Paris, 12 février 2015, n° 12/07002

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 12 févr. 2015, n° 12/07002
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 12/07002
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 29 février 2012, N° 2011039772

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

ARRET DU 12 FEVRIER 2015

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/07002

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Mars 2012 – Tribunal de Commerce de PARIS – 4e chambre – RG n° 2011039772

APPELANTE

SAS EXAPAQ

ayant son siège XXX

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Jean-Yves LE DIZET de la SELARL COLBERT PARIS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0184

Assistée de Me Christelle VERRECCHIA, avocat au barreau de PARIS, toque : K0184

INTIME

Monsieur Y X

XXX

XXX

Représenté par Me Vincent RIBAUT de la SCP RIBAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Décembre 2014, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre, et Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président, chargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président

Monsieur Olivier DOUVRELEUR, Conseiller

Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président, aux lieu et place de Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre, empêchée, et par Monsieur Bruno REITZER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

Faits et Procédure

Monsieur Y X, transporteur exerçant à titre individuel, a été, à partir d’octobre 1996, le sous-traitant de la société Exapaq pour l’enlèvement et le transport de colis dans la région du Havre. En avril 2008, Exapaq et Monsieur X ont régularisé un contrat à durée indéterminée à effet du 1er mars 2008.

Par lettre en date du 16 avril 2009, la société Exapaq a notifié à Monsieur X la cessation de leur relation commerciale à l’issue d’un préavis de trois mois expirant le 16 juillet 2009, décision confirmée le 11 juin 2009.

Par acte du 30 septembre 2009, Monsieur X a assigné la société Exapaq devant le tribunal de commerce du Havre qui s’est déclaré incompétent au profit de celui de Paris.

Par jugement rendu le 1er mars 2012, le tribunal de commerce de Paris a condamné la société Exapaq à payer à Monsieur X la somme de 27.500,00 euros, débouté pour le surplus de ses demandes, dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de ce jugement pour cette condamnation, dit les parties mal fondées en leurs demandes plus amples ou contraires, condamné la société Exapaq à payer à Monsieur X la somme de 5.000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens et ordonné l’exécution provisoire de la disposition concernant l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Exapaq a interjeté appel de ce jugement le 13 avril 2012.

Par ses dernières conclusions signifiées le 12 novembre 2012, elle demande d’infirmer le jugement entrepris, de débouter Monsieur X de ses demandes et de le condamner au paiement de la somme de 5.000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle fait valoir que, contrairement à ce qu’a retenu le tribunal, le contrat du 1er mars 2008 a repris les dispositions du contrat-type de sous-traitance dans le transport – contrat-type qui exclut l’application de l’article L 442-6 I, 5° du code de commerce – que le préavis de rupture de trois mois prévu par ce contrat-type a été inséré dans la convention liant les parties et a été respecté, de sorte qu’il n’y a eu aucune rupture brutale de la relation commerciale.

Elle indique qu’il n’y a pas eu davantage faute de sa part dans la résiliation du contrat la liant à Monsieur X :

— ni en ce qu’elle n’aurait pas respecté l’esprit de loyauté du contrat-type de sous-traitance, sur l’obligation du donneur d’ordre de faire mention du volume de prestations qu’il est envisagé de confier au sous-traitant ; qu’en effet, contrairement à ce que prétend Monsieur X, la convention du 1er mars 2008 renvoie à une annexe tarifaire comprenant un chiffre d’affaires garanti ;

— ni sur le motif de la résiliation du contrat, reposant réellement sur une baisse d’activité notable d’Exapaq en 2009 ;

— ni sur un quelconque espoir de poursuite des relations contractuelles, Exapaq n’ayant, à aucun moment, imposé à Monsieur X l’achat d’un nouveau camion ;

— ni enfin quant à une situation d’exclusivité dans laquelle Monsieur X se serait trouvé par rapport à Exapaq, le contrat stipulant au contraire qu’aucune relation exclusive n’est exigée avec le transporteur.

Elle ajoute que Monsieur X ne justifie pas du quantum des dommages et intérêts réclamés, qu’en tout état de cause, la seule réparation admissible est, non une perte de chiffre d’affaires, mais une perte de marge brute pendant le préavis, et que les éléments produits ne sont pas probants à cet égard.

Monsieur X, appelant à titre incident, par ses conclusions signifiées le 12 septembre 2012, demande à la Cour de dire que la société Exapaq a commis un abus dans l’exercice de son droit de résiliation du contrat et la condamner au paiement des sommes de 65.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, avec intérêts au taux légal à compter du 14 mai 2009, et de 7.500,00 en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Il expose qu’aucun préavis n’a réellement été appliqué par la société Exapaq, et que le motif de rupture invoqué par Exapaq – à savoir la baisse du volume d’activité d’Exapaq ayant conduit à une réorganisation des agences Exapaq, notamment celle du Havre – n’a aucun fondement, le volume des relations Exapaq – X étant resté constant en 2008 et 2009.

Il précise que la société Exapaq n’a pas appliqué loyalement le contrat :

— en imposant à Monsieur X, juste avant la résiliation, un contrat prévoyant un préavis de trois mois, préavis d’ailleurs manifestement insuffisant au regard d’une relation de 13 ans ;

— en incitant Monsieur X à investir et en s’entretenant avec lui des nouvelles conditions tarifaires, lui laissant ainsi penser que les relations contractuelles perdureraient.

Il ajoute que la résiliation abusive du contrat lui a occasionné un préjudice caractérisé par une perte d’emploi, et il réclame en conséquence une indemnisation à hauteur d’une année de chiffre d’affaires, voire une année de marge brute.

MOTIFS

Considérant qu’il est constant que Monsieur X a exécuté des prestations de transport de marchandises en sous-traitance de la société Exapaq à partir d’octobre 1976 ; que, le 1er mars 2008, la société Exapaq et Monsieur X ont conclu une convention à durée indéterminée de sous-traitance de prestations de transport de marchandises ; que, par sa lettre en date du 16 avril 2009, la société Exapaq a notifié à Monsieur X la rupture de la relation commerciale et a fixé à trois mois la durée du préavis de rupture ;

Sur la rupture brutale de la relation commerciale

Considérant que l’article L 442-6 I, 5° du code de commerce dispose qu''engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte, notamment, de la durée de la relation commerciale.' ;

Considérant que l’article 10, alinéa 2, de la convention de sous-traitance de prestations de transport de marchandises du 1er mars 2008 stipule que 'chacune des parties est libre d’y mettre fin à tout moment par lettre recommandée avec accusé de réception moyennant le respect d’un préavis (…) de trois mois si le contrat est en vigueur depuis plus d’un an à la date de sa dénonciation.' ; qu’il n’est pas contestable que, comme le rappelle la société Exapaq, cette stipulation reprend la disposition de l’article 12.2 du contrat-type applicable aux transporteurs publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants, figurant en annexe I du décret n° 2003-1285 du 26 décembre 2003 portant approbation du contrat type applicable aux transports publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants, qui énonce que 'le contrat de sous-traitance à durée indéterminée peut-être résilié par l’une ou l’autre partie par l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception moyennant un préavis d’un mois quand le temps déjà écoulé depuis le début d’exécution du contrat n’est pas supérieur à six mois. Le préavis est porté à deux mois quand ce temps est supérieur à six mois et inférieur à un an. Le préavis à respecter est de trois mois quand la durée de la relation est d’un an et plus’ ;

Considérant que, les dispositions du contrat-type réglant la durée du préavis de rupture d’un contrat de sous-traitance de transport, l’article L 442-6 I, 5° du code de commerce n’est pas en l’espèce applicable ; que, le préavis de trois mois prévu par le contrat-type ayant été respecté, la Cour dira qu’il n’y a pas eu rupture brutale de la relation commerciale ;

Sur la rupture abusive du contrat du 1er mars 2008

Considérant que, même si un préavis de rupture de la relation commerciale suffisant est respecté, une telle rupture peut revêtir un caractère abusif en raison des circonstances accompagnant la résiliation ;

Considérant que celui qui use de son droit de résilier un contrat à durée indéterminée dans le respect des modalités prévues par celui-ci n’a pas à justifier d’un quelconque motif ; que l’article 10 précité permet la résiliation à tout moment du contrat à l’initiative de chaque partie ; que, si Exapaq justifie la résiliation du contrat par la baisse d’activité d’Exapaq en 2009, l’inexactitude éventuelle des motifs invoqués est en tout état de cause inopérante pour caractériser l’exercice abusif du droit de résiliation ;

Que par ailleurs ne peuvent être interprétés comme ayant fait espérer au sous-traitant une poursuite de la relation :

— ni les contacts pris pour la fixation d’un nouveau tarif, la révision du prix, prévue à chaque date anniversaire de la convention par l’article 6.2 'Conditions et modalités de révision du prix', étant indépendante de toute résiliation éventuelle du contrat, et au surplus Monsieur X admettant que les échanges intervenus sur ce point n’ont donné lieu à aucun accord formalisé ;

— ni une demande d’Exapaq tendant à ce que Monsieur X fasse l’acquisition d’un nouveau camion, achat qui a été réalisé très antérieurement aux mois de mars et d’avril 2009, dont le sous-traitant ne rapporte en tout cas pas la preuve qu’il ait été exigé par Exapaq et dont l’intérêt, visant à disposer d’un véhicule de 14 m3, au lieu de 11m3 jusqu’alors, n’est au demeurant pas discuté par Monsieur X ;

Qu’aucun comportement déloyal de la part d’Exapaq, ni aucun abus du droit de résilier n’est, dans ces circonstances, établi ;

Qu’en conséquence, la Cour déboutera Monsieur X de sa demande et infirmera le jugement entrepris ;

Considérant que l’équité commande de condamner Monsieur X à payer à la société Exapaq la somme de 2.000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement rendu le 28 juin 2011 par le tribunal de commerce de Paris,

Statuant à nouveau,

DEBOUTE Monsieur X de ses demandes,

CONDAMNE Monsieur X à payer à la SAS Exapaq la somme de 2.000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur X aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président,

pour La Présidente de chambre empêchée

B. REITZER P. BIROLLEAU

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