Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 8, 24 novembre 2015, n° 14/15626

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Chronologie de l’affaire

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Lettre des Réseaux · 17 décembre 2021

CA Paris, 24 novembre 2015, RG n°14/15626 Un pacte peut soumettre tout transfert de titres de la société par l'un de ses signataires, à un droit de préemption au profit des autres actionnaires. La Cour d'appel de Paris a décidé qu'une augmentation de capital réservée n'était pas soumise à un tel droit de préemption. Ce qu'il faut retenir : Un pacte peut soumettre tout transfert de titres de la société par l'un de ses signataires, à un droit de préemption au profit des autres actionnaires. La Cour d'appel de Paris a décidé qu'une augmentation de capital réservée n'était pas soumise à un …

 

Simon François-luc · Lettre des Réseaux · 17 décembre 2021

Cass. com., 20 septembre 2016, n°15-10.963 La violation de la clause de préemption stipulée au profit du franchiseur peut justifier l'indemnisation des préjudices constitués, d'une part, de la perte de la chance de tirer profit des biens acquis et de se développer et, d'autre part, de la concurrence déloyale en résultant pour le franchiseur. Ce qu'il faut retenir : La violation de la clause de préemption stipulée au profit du franchiseur peut justifier l'indemnisation des préjudices constitués, d'une part, de la perte de la chance de tirer profit des biens acquis et de se développer et, …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 8, 24 nov. 2015, n° 14/15626
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 14/15626
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 12 juin 2014, N° J2014000300;14/16490
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 15 novembre 2022
Lire la décision sur le site de la juridiction

Texte intégral

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 8

ARRET DU 24 NOVEMBRE 2015

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 14/15626

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Juin 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° J2014000300

Appelants dans le RG n° 14/16490 :

Monsieur [Q] [J]

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 1],

de nationalité française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Monsieur [J] [L] [M]

né le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 2]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Monsieur [B] [I]

né le [Date naissance 3] 1972 à [Localité 2]

de nationalité française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Monsieur [R] [R]

né le [Date naissance 4] 1972 à [Localité 3]

de nationalité française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentés par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Ayant pour avocat plaidant Me Eric SERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B1080

Appelant dans le RG 14/16550

Monsieur [T] [Y]

né le [Date naissance 5] 1966 à [Localité 4] (Argentine)

de nationalité française

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représenté par Me Jean-Philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053

Ayant pour avocat plaidant Me Dominique MONDOLINI, avocat au barreau de Paris, toque : J 003

Appelante dans le RG n° 14/15626 :

SA B-PROCESS prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 431 867 555

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Ayant pour avocat plaidant Me Jilali MAAZOUZ, avocat au barreau de PARIS, toque : R30

Intimes dans les RG N° 14/15626, 14/16490 et 14/16550

Monsieur [X] [D]

né le [Date naissance 6] 1969 à [Localité 5]

de nationalité française

[Adresse 7]

[Adresse 7]

Représenté par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Xavier PERNOD, avocat au barreau de PARIS, toque : R128

SARL ASP FINANCE représentée par Me Gérard PHILIPPOT, mandataire judiciaire

radiée du Registre du commerce et des sociétés de Paris

[Adresse 8]

[Adresse 8]

Représentée par Me Jean-Philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053

INTIMES dans le RG n° 14/15626 et 14/16550

Monsieur [Q] [J]

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 1],

de nationalité française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Monsieur [J] [L] [M]

né le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 2]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Monsieur [B] [I]

né le [Date naissance 3] 1972 à [Localité 2]

de nationalité française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Monsieur [R] [R]

né le [Date naissance 4] 1972 à [Localité 3]

de nationalité française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentés par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Ayant pour avocat plaidant Me Eric SERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B1080

Intimee dans le RG 14/16490 et RG 14/16550

SA B-PROCESS prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 431 867 555

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Ayant pour avocat plaidant Me Jilali MAAZOUZ, avocat au barreau de PARIS, toque : R30

Intimé dans le RG 14/15626 :

Monsieur [T] [Y]

né le [Date naissance 5] 1966 à [Localité 4] (Argentine)

de nationalité française

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représenté par Me Jean-Philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053

Ayant pour avocat plaidant Me Dominique MONDOLINI, avocat au barreau de Paris, toque : J 003

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 08 Septembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre

M. Laurent BEDOUET, Conseiller

Monsieur Joël BOYER, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Pervenche HALDRIC

Ministère Public : L’affaire a été communiquée au ministère public.

ARRET :

— contradictoire

— rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, présidente et par Madame Pervenche HALDRIC, greffière présente lors du prononcé.

Le 20 juin 2000, MM. [J], [M], [R] et [I] (les fondateurs)

ont créé la Sarl B-Process ayant pour objet le développement de produits informatiques et la création d’une plate-forme de dématérialisation des factures à destination des entreprises. Ayant besoin de lever des fonds pour se développer, la société, après avoir fait appel à des investisseurs privés, s’est tournée vers des investisseurs financiers et a changé de forme sociale pour devenir une société anonyme à conseil de surveillance et directoire, les quatre associés fondateurs étant nommés membres du directoire, M. [I] en devenant le président.

Sont notamment entrées au capital de B-Process les sociétés Ventech et I-Source Gestion (capital-risqueur) et Bred-Gestion (investisseur industriel), cette prise de participation se réalisant à la faveur d’augmentation de capital ou de rachat d’actions, ces opérations ayant progressivement entraîné une dilution de la participation des fondateurs.

Un pacte d’actionnaires ayant pour objet de régir les rapports entre les associés a été signé le 25 septembre 2000 par les quatre fondateurs, les investisseurs privés,

B-Process et les investisseurs financiers. Il a fait l’objet de trois avenants, le dernier en date du 18 mai 2004 ayant introduit au profit des quatre fondateurs une indemnité de départ en cas de révocation par le conseil de surveillance, sauf faute grave ou lourde.

Les explications des parties divergent sur l’interprétation des résultats ensuite obtenus par B-Process.

Le 25 janvier 2006, en présence d’un huissier qui avait été désigné sur requête pour consigner les propos échangés, le conseil de surveillance a révoqué intégralement le directoire, le remplaçant immédiatement par un nouveau directoire de trois membres, MM.[D], [Y] et [V]. Le conseil de surveillance a décidé le même jour d’un audit de la société qui a été confié au cabinet Mazars.

Le 10 mai 2006, MM.de [J], [M], [R] et [I] ont engagé une procédure devant le tribunal de commerce de Paris à l’encontre de B-Process et de certains des investisseurs financiers en paiement des indemnités de départ prévues au pacte, que le nouveau président du directoire avait refusé de leur verser au motif des fautes qu’ils auraient commises lors de leurs mandats, et de divers dommages et intérêts ensuite de leurs révocations qu’ils considèrent comme sans juste motif et abusives. Cette procédure fait l’objet d’une instance parallèle.

A la suite de la plainte avec constitution de partie civile déposée le 31 mai 2006 par B-Process à l’encontre des quatre fondateurs, le tribunal a par jugement du 19 juin 2007 ordonné un sursis à statuer. Une ordonnance de non-lieu, confirmée par arrêt du 8 novembre 2010 est intervenue le 3 mai 2010, les parties civiles s’étant le 21 janvier 2011 désistées de leur pourvoi.

Pendant le cours de ces procédures, l’assemblée générale de B-Process a :

— le 1er juin 2007, procédé à une opération de coup d’accordéon,

— le 19 septembre 2007, approuvé une augmentation de capital en numéraires réservée à la société Asp Finance, détenue à 100% par MM. [Y] et [D], membres du nouveau directoire, au moyen de la création de 28.548 actions au prix unitaire de 10 euros, Asp Finance ayant souscrit à cette augmentation qui lui avait été réservée, une augmentation de capital étant par ailleurs réservée aux minoritaires, au titre de la clause anti-dilution.

Ultérieurement Asp Finance a cédé ses actions B-Process à MM. [D] et [Y].

Le 13 octobre 2011, la société américaine Ariba Inc a racheté l’intégralité des titres de B-Process, en ce compris ceux des fondateurs, au prix de 35.000.000 euros.

Le 16 août 2012, les quatre fondateurs ont assigné B-Process, la société Asp Finance et MM. [Y] et [D] devant le tribunal de commerce de Paris pour voir annuler l’augmentation de capital décidée le 19 septembre 2007 et les cessions intervenues à la suite de la souscription par Asp Finance à cette augmentation et obtenir le paiement de divers dommages et intérêts.

Par jugement du 13 juin 2014, assorti de l’exécution provisoire, le tribunal de commerce de Paris a débouté les fondateurs de leur demande de mise sous séquestre de sommes détenues par MM. [D] et [Y], a dit irrecevable la demande de nullité de l’assemblée générale du 19 septembre 2007, recevable l’action en nullité des cessions d’actions intervenues en septembre 2007, les cessions ayant été effectuées en violation de la clause d’adhésion et de la clause de préemption du pacte d’actionnaires, a constaté que les actions ayant ultérieurement été cédées à un tiers en 2011, non signataire du pacte et non partie à la procédure, la nullité ne pouvait être prononcée, mais retenant la responsabilité de B-Process, d’Asp Finance et de MM. [D] et [Y] les a condamnés in solidum à payer aux fondateurs la somme de 164.507,69 euros majorée de l’intérêt au taux légal à compter du 16 août 2012, correspondant à la perte de chance d’exercer leur droit de préemption, a débouté les défendeurs de leurs demandes reconventionnelles en dommages et intérêts , a condamné MM.[D] et [Y], les sociétés Asp Finance et B-Process à payer à chacun des défendeurs 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Il a été relevé appel de ce jugement, le 4 août 2014, par les quatre fondateurs, le 5 août 2015, par M. [Y] et, le 6 août suivant, par M. [D], les sociétés B-Process et Asp Finance ayant été intimées.

Par conclusions signifiées le 2 juillet 2015, les fondateurs demandent à la cour:

— à titre principal, de les juger recevables et non prescrits en leurs appels et prétentions, de juger qu’Asp Finance, MM.[D] et [Y] étaient tenus d’adhérer au pacte d’actionnaires, de juger que les intimés ont en connaissance de cause agi en violation de leurs droits de préemption, de prononcer la nullité impérative pour fraude de l’augmentation de capital du 19 septembre 2007, d’annuler l’assemblée générale ayant décidé d’une augmentation de capital le 19 septembre 2007 et les cessions d’actions consécutives au profit d’Asp Finance et de MM. [D] et [Y], de leur substituer les quatre fondateurs au regard de l’augmentation intervenue, de débouter B-Process,Asp Finance, MM. [D] et [Y] de l’intégralité de leurs prétentions et, à défaut, de condamner in solidum les défendeurs intimés à leur payer à titre de restitution par équivalent monétaire ou à titre de dommages et intérêts pour perte subie ou gain manqué 313.260,17 euros et 2.820.219,69 euros et de débouter B-Process, Asp Finance, MM. [D] et [Y] de l’intégralité de leurs prétentions,

— subsidiairement, de faire droit à ces mêmes prétentions sur le fondement délictuel,

— en tout état de cause, de condamner in solidum les intimés défendeurs à payer 20.000 euros à chacun des fondateurs au titre des frais irrépétibles, outre les dépens.

Dans ses écritures n°4 signifiées le 24 août 2015, M. [D] demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré irrecevable comme prescrite l’action en nullité de l’assemblée générale du 19 septembre 2007,de dire n’y avoir lieu à annulation des cessions litigieuses ni à indemnisation des fondateurs de ce chef, d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamné in solidum à verser 164.507,69 euros, de débouter les fondateurs de toutes leurs prétentions en appel, de condamner in solidum les quatre fondateurs à lui verser 150.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et de réputation résultant de l’action indue, ainsi que 75.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Par conclusions n°4 du 27 juillet 2015, M. [Y] et la Sarl Asp Finance sollicitent la confirmation du jugement en ce qu’il a dit l’action en nullité de l’assemblée générale irrecevable comme prescrite et en ce qu’il a débouté les fondateurs de leur demande de nullité des cessions d’actions intervenues entre Asp Finance et MM. [D] et [Y], de l’infirmer pour le surplus, de débouter les fondateurs de toutes leurs prétentions, de les condamner solidairement à payer M. [Y] et à Asp Finance 25.000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens.

Par conclusions signifiées le 29 décembre 2014, B-Process entend voir juger qu’Asp Finance n’était pas soumise aux dispositions du pacte, que les cessions subséquentes des actions à MM. [D] et [Y] n’étaient pas soumises à la clause de préemption du pacte, que la responsabilité de B-Process ne peut être engagée au titre de ces opérations, en conséquence, d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné in solidum MM. [D] et [Y], les sociétés B-Process et Asp Finance à payer aux fondateurs 164.507,69 euros outre intérêts et une indemnité au titre des frais irrépétibles, en ce qu’il a rejeté les demandes reconventionnelles, statuant à nouveau de débouter les fondateurs de toutes leurs prétentions, en tout état de cause de condamner solidairement ces derniers au paiement de 50.000 euros sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile et d’une indemnité de 12.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

SUR CE

— Sur la demande d’annulation de l’assemblée générale du 19 septembre 2007

Le 19 septembre 2007, l’assemblée générale de B-Process a approuvé une augmentation de capital en numéraires réservée à Asp Finance au moyen de la création de 28.548 actions au prix unitaire de 10 euros, Asp Finance a souscrit à cette augmentation et a ultérieurement cédé ses actions à ses propres actionnaires MM. [D] et [Y].

Une augmentation de capital en numéraire au même prix a été réservée par cette même assemblée aux actionnaires minoritaires, dont les fondateurs, avec suppression à leur profit du droit de souscription des autres actionnaires.

MM.[Y] et [D] ainsi qu’Asp Finance reprennent en cause d’appel la fin de non-recevoir tirée de la prescription, soutenant que celle-ci était acquise au 30 septembre 2008 en application de l’article L 235-9 alinéa 3 du code de commerce, soit trois mois après l’assemblée générale du 30 juin 2008 ayant suivi l’augmentation de capital et en tout état de cause au plus tard au 19 septembre 2010 au vu du délai de l’article L235-9 du code de commerce. Ils contestent toute fraude dans cette opération et soulignent en tout état de cause que les fondateurs n’établissent pas avoir été dans l’impossibilité d’agir.

Tandis que les fondateurs considèrent qu’en présence d’une fraude la prescription de l’action en nullité de l’augmentation de capital n’est plus triennale mais quinquennale, la fraude résultant des manoeuvres employées par les investisseurs pour favoriser l’entrée au capital de B-Process des nouveaux dirigeants après le 'coup d’accordéon’ du 1er juin 2007 que l’état financier de la société ne justifiait aucunement et qui ne visait qu’à réduire les droits des minoritaires.

Selon l’article L253-9 du code de commerce les actions en nullité de la société ou d’actes et délibérations postérieurs à sa constitution se prescrivent par trois ans à compter du jour où la nullité est encourue, l’alinéa 3 enfermant cependant l’action en nullité fondée sur l’article L225-149-3 dans un délai de trois mois à compter de la date de l’assemblée générale suivant la décision de l’augmentation de capital.

Les fondateurs faisant valoir que le rapport du directoire à l’assemblée générale n’a pas fourni d’indications utiles sur les motifs de l’augmentation de capital et que cette augmentation est intervenue en violation des articles L 225-19, R 225-102, R 225-113,

R225-114 et L 225-149-3 du code de commerce, leur action en nullité de l’assemblée générale relève de la prescription spécifique édictée par le troisième alinéa de l’article L253-9 du code de commerce.

Le délai de trois mois pour agir a donc commencé à courir à compter de l’assemblée générale du 30 juin 2008, première des assemblées générales ayant suivi celle du 19 septembre 2007 qui a décidé de l’augmentation de capital, de sorte que délai expirait le 30 septembre 2008.

La fraude alléguée par les fondateurs, au demeurant non suffisamment caractérisée, ne peut avoir d’incidence sur le cours de la prescription que dans la mesure où elle a empêché les demandeurs d’agir en annulation. Or, il ne ressort aucunement des pièces au débat que les défendeurs ont été empêchés d’agir avant l’acquisition de la prescription, ayant eu connaissance de la modification du capital social décidée le 19 septembre 2007, ne contestant pas avoir souscrit à l’augmentation de capital qui avait été décidée et réservée par cette même assemblée générale aux autres actionnaires qu’Asp, ni avoir participé à l’assemblée générale suivante du 30 juin 2008. C’est donc vainement que les fondateurs soutiennent que leur action en nullité de l’assemblée générale du 19 septembre 2007 est soumise à la prescription quinquennale.

Il s’ensuit qu’il n’est justifié d’aucune cause d’interruption ou de suspension de la prescription et que celle-ci était acquise à la date de délivrance de l’assignation, le 16 août 2012, étant observé qu’elle serait acquise de la même manière en cas d’application de la prescription triennale.

A ces motifs, le jugement sera confirmé en ce qu’il a déclaré irrecevable la demande d’annulation de l’assemblée générale du 19 septembre 2007 ayant voté l’augmentation de capital.

— Sur l’action en nullité des acquisitions et cessions de titres par Asp Finance

Les fondateurs poursuivent l’annulation des acquisitions et cessions d’actions consécutives à l’assemblée générale du 19 septembre 2007 au profit d’Asp Finance puis de MM. [Y] et [D].

Les intimés n’ont pas repris en cause d’appel la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action en nullité des cessions de titres, le tribunal de commerce ayant considéré que la prescription applicable en matière contractuelle étant de 5 ans, l’action avait été engagée dans ce délai.

Au soutien de leur demande les fondateurs font valoir que sous couvert d’un fallacieux besoin de financement de la société, les intimés, agissant de concert avec les investisseurs financiers, ont usé de manoeuvres pour favoriser une entrée frauduleuse d’Asp Finance au capital de B-Process, en violant les clauses du pacte sur l’adhésion des tiers à cette convention, sur le droit de préemption et la suppression du droit préférentiel de souscription.

Tandis que MM. [Y] et [D], Asp Finance et B-Process soutiennent que l’augmentation de capital réservée à Asp Finance n’est aucunement frauduleuse, qu’elle ne constitue ni dans la lettre, ni dans l’esprit du pacte une opération sur titre imposant l’adhésion au pacte, de sorte que ni la souscription réalisée par Asp Finance ni les cessions ultérieures au bénéfice de MM. [Y] et [D] ne sont soumises au droit de préemption conventionnel. Y ajoutant, B-Process conteste être tenue d’un quelconque engagement de porte-fort relatif à l’adhésion au pacte n’étant que l’émetteur des actions et non l’initiateur de l’augmentation de capital réservée, ainsi que toute responsabilité au titre de la transcription des cessions et des ordres de mouvement, Asp Finance et MM. [Y] et [D] n’étant pas parties au pacte.

Sont inopérants les moyens de nullité fondés sur l’entrée frauduleuse d’Asp Finance au capital de B-Process à raison d’une augmentation de capital pour des motifs fallacieux, de la valeur des actions réservées à Asp Finance et de la suppression du droit préférentiel de souscription, dès lors que l’action contre les délibérations de l’assemblée générale ayant voté l’augmentation de capital et ses modalités se trouve prescrite.

S’agissant de la nullité fondée sur la violation du pacte d’actionnaires signé le 25 septembre 2000 par les quatre fondateurs constituant le groupe fondateurs, par 23 personnes composant le groupe investisseurs privés, par la société B-Process et cinq sociétés financières composant le groupe investisseurs financiers et ayant pour vocation d’organiser les relations entre les fondateurs, les investisseurs privés et financiers, il sera relevé les éléments suivants :

L’article 1d du pacte, seule disposition conventionnelle traitant de l’adhésion au pacte, stipule (1d) 'En cas d’opération sur titres par l’un des soussignés au profit d’un tiers non signataire des présentes, le tiers se trouvera soumis aux droits et obligations du soussigné initiateur de l’opération sur titres, tels que ceux-ci résultent des présentes pour la durée du pacte restant à courir, le soussigné initiateur de l’opération sur titres se portant fort de la signature des présentes par le tiers. Il est toutefois entendu que les attributaires de BSA ou de BCE donnant accès à des actions de catégorie C ne seront pas tenus de signer le présent pacte, mais devront signer dès l’attribution de leurs BSA une convention d’actionnaires simplifiée conforme pour l’essentiel à l’annexe 4 des présentes'.

Il s’évince de ces dispositions que l’adhésion des tiers au pacte s’impose en cas d’opération sur titres effectuées par l’un des soussignés au profit d’un tiers non signataire des présentes, étant souligné que le pacte prévoit en son article 4.2.2 un droit de préemption au profit des actionnaires en cas d’opération sur titres dite non libre, c’est à dire réalisée au profit d’un tiers, selon un ordre variant en fonction du groupe auquel appartient l’initiateur de l’opération.

Les parties sont contraires sur le sens à donner à la notion 'd’opération sur titres', et son application à la souscription à l’augmentation de capital réservée à Asp Finance.

Selon la définition donnée à l’article 1a du pacte l’opération sur titres signifie’ tout transfert de titres de la société par l’un des signataires des présentes (seul ou conjointement avec d’autres parties), soit à titre gratuit soit à titre onéreux, consécutif notamment à une cession, à un apport, y compris tout type de fusion ou scission, une donation, un legs ou un autre mode de mutation, y compris si ce transfert a lieu par voie d’adjudication publique ou en vertu d’une décision de justice, de même que tout démembrement de la propriété entre un ou plusieurs nu- propriétaires et un ou plusieurs usufruitiers, toute attribution judiciaire liée au nantissement de titres, ou renonciation individuelle aux droits préférentiels de souscription au bénéfice d’une personne physique ou d’une personne morale identifiée.', 'le titre’ étant lui-même défini par le pacte comme tout droit, toutes valeurs mobilières de la société cessibles, existantes ou futures donnant droit de manière immédiate ou différée par voie de conversion, d’échange de remboursement ou de quelque manière que ce soit, à une quote-part du capital social ou des droits de vote de la société, détenues par les parties aux présentes de même que de toutes valeurs mobilières de la société qui pourraient leur être attribuées pour quelque raison que ce soit ( souscription, cession, donation, legs, attribution gratuite, fusion ou scission etc.) ainsi que de tous les droits attachés aux dites valeurs mobilières ( en ce compris notamment les droits préférentiels de souscription).

Il est constant que l’entrée d’Asp Finance au capital de B-Process résulte de sa souscription à l’augmentation de capital par émission de nouvelles actions décidée par l’assemblée générale de B-Process. Cette opération s’est donc réalisée sans mutation des titres existants, ni transfert de propriété, l’inscription d’Asp Finance sur les registres d’actionnaires se faisant au travers de la création d’un compte et non d’un transfert de compte.

Il est indifférent que le pacte intègre dans les opérations sur titres, par une clause dite balai, 'tout autre mode de mutation', la souscription à des actions nouvellement émises ne procédant pas d’une mutation.

L’est également l’emploi des termes 'valeurs existantes ou futures’ que retiennent les fondateurs, ainsi que le terme 'etc’ qui suit l’énoncé des modes d’attribution des valeurs mobilières, ces notions n’étant pas évoquées dans la définition des opérations sur titres mais uniquement dans celle des titres et visant les titres acquis par les signataires du pacte.

C’est encore vainement que les fondateurs analysent la souscription à l’augmentation de capital comme un apport au sens du pacte, l’apport visé à l’article 1d s’entendant nécessairement au vu de la rédaction de la clause comme l’une des modalités de transfert de titres par l’un des signataires du pacte et non d’un apport en numéraires résultant de la souscription à des actions nouvelles par un tiers.

L’assimilation entre, d’une part, une opération d’augmentation de capital avec suppression du droit préférentiel de souscription et, d’autre part, la renonciation individuelle au droit préférentiel de souscription au bénéfice d’une personne identifiée, cette dernière étant soumise par le pacte au régime des opérations sur titres, ne saurait davantage être retenue, dès lors que la négociation individuelle d’un droit préférentiel de souscription prévue par l’article L 225-132 du code de commerce alinéa 4 transfère au bénéficiaire le droit de l’actionnaire renonçant, signataire du pacte, de souscrire à l’augmentation de capital, alors que l’augmentation de capital réservée à un bénéficiaire désigné avec suppression du droit préférentiel, implique la suppression du droit préférentiel pour tous les actionnaires, cette faculté prévue par l’article L225-138 du même code résultant d’un vote de l’assemblée générale, étant observé à la suite des intimés, qu’assimiler à une obligation sur titres l’augmentation de capital réservée à un bénéficiaire désigné, accepté par la majorité des actionnaires en assemblée générale vient contredire le droit de préemption que l’article 4.2.2 du pacte attache précisément aux opérations sur titres.

Il ne saurait être déduit par une interprétation a contrario de l’article 1d in fine, qui soumet les attributaires de BSA et de BCE donnant accès à des actions de catégorie C à la signature d’une convention d’actionnaires simplifiée, que toutes les autres opérations portant sur la souscription à une augmentation de capital, y compris par des tiers, nécessite l’adhésion au pacte, une telle analyse conduisant à étendre des dispositions claires à un cas de figure non prévu par les parties.

Par conséquent, les fondateurs ne peuvent sans dénaturer la convention analyser l’entrée d’Asp Finance au capital de B-Process par souscription à l’augmentation de capital décidée le 19 septembre 2007 en une opération sur titres au sens du pacte.

Dès lors, il n’est pas établi qu’Asp Finance était de plein droit adhérente au pacte ou avait l’obligation d’y adhérer dans un délai imparti, ni qu’elle était tenue de respecter le droit de préemption prévu par l’article 4.2.2 du pacte, étant souligné qu’en l’absence d’adhésion volontaire au pacte, Asp Finance ne s’est pas volontairement soumise aux obligations qu’il comportait, peu important à cet égard les échanges qui ont eu lieu ultérieurement avec les dirigeants ou le conseil de surveillance au sujet de la nécessité d’adhérer puisqu’il n’en est résulté aucune adhésion.

En l’absence d’obligation d’adhérer au pacte il n’ y a pas lieu de rechercher si cette adhésion devait intervenir en qualité d’investisseur privé ou d’investisseur financier, ni si B-Process était ou non tenue en vertu du pacte de se porter-fort de cette adhésion.

Si la cession ultérieure des actions souscrites par Asp Finance au profit de MM. [Y] et [D], ses actionnaires et membres du directoire, emporte transfert de propriété des titres, elle ne relève pas pour autant des obligations nées du pacte, dès lors que l’adhésion n’est prévue qu’en cas de transfert de titres de la société 'par l’un des signataires des présentes', qu’Asp Finance n’ayant jamais été signataire, ni adhérente du pacte, n’avait donc pas l’obligation de se conformer à la procédure conventionnelle de préemption préalablement à la cession de ses titres à ses propres actionnaires.

Les fondateurs recherchent subsidiairement la responsabilité délictuelle de MM.[Y] et [D], des sociétés Asp Finance et B-Process pour manquement à l’obligation de loyauté et concertation frauduleuse avec les investisseurs financiers.

Les intimés contestent toute responsabilité délictuelle, arguant de la parfaite transparence dans laquelle l’opération s’est déroulée, de sa conformité avec les droits des actionnaires résultant de la clause anti-dilution, de l’absence d’artifice, la souscription aux actions nouvelle par Asp Finance étant motivée par des motifs patrimoniaux propres à ses actionnaire et n’ayant aucune incidence sur les droits des fondateurs. Ils invoquent en tout état de cause l’absence de perte de chance, les fondateurs ne démontrant pas qu’il existait une probabilité pour qu’ils exercent le droit de préemption, n’ayant jamais manifesté leur intention d’acquérir les titres cédés par Asp Finance, M. [Y] ajoutant qu’en l’absence de tout manquement à des obligations contractuelles, sa responsabilité en qualité de dirigeant ne peut être retenue, aucune faute détachable de ses fonctions n’étant établie.

Il résulte des pièces au débat que la recapitalisation de B-Process a été mise en oeuvre de manière transparente en ce qu’elle a été votée à la majorité par l’assemblée générale extraordinaire. Les fondateurs n’établissent pas en quoi le fait pour Asp Finance de souscrire à l’augmentation de capital pour le compte de ses actionnaires serait déloyal à l’égard des fondateurs, ceux-ci n’ignorant manifestement pas cette situation, cette souscription par la personne morale plutôt que par les personnes physiques pour des raisons d’optimisation patrimoniale n’ayant aucunement préjudicié à leurs droits, MM. [Y] et [D], n’étant pas davantage qu’Asp Finance tenus d’adhérer au pacte auquel ils n’ont pas spontanément adhéré ou soumis au droit de préemption.

En l’absence de manquement aux obligations contractuelles découlant du pacte la seule qualité de dirigeant de MM. [Y] et [D] lors des opérations litigieuses n’est pas davantage de nature à caractériser une faute délictuelle à l’égard des fondateurs.

Quant à B-Process, elle n’a fait que transcrire sur ses registres les opérations telles que réalisées par les intéressés, ainsi qu’elle y était tenue, et n’a donc de ce chef commis aucun acte déloyal ou fautif.

A ces motifs, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande d’annulation des cessions, mais infirmé en ce qu’il a condamné B-Process, Asp Finance et MM. [Y] et [D] au paiement de dommages et intérêts, statuant à nouveau la cour déboutera les fondateurs de leur demande de dommages et intérêts .

— Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts

En cause d’appel, M. [D] porte à 150.000 euros sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice d’image résultant selon lui des propos mensongers et calomnieux dus à la mauvaise foi des fondateurs et qui l’ont contraint à supporter le poids financier et moral d’une procédure purement opportuniste.

Cependant, M. [D] ne justifie pas des conséquences portées à son image par la procédure introduite par les fondateurs en 2012, ni d’un préjudice financier autre que les frais qu’il a été contraints d’exposer pour assurer sa défense en justice, qui feront l’objet d’une indemnisation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par M. [D].

— Sur les autres demandes et les dépens

La solution du litige ne suffit pas à caractériser que le droit que tiennent les fondateurs de faire trancher le litige en justice a dégénéré en abus. Il s’ensuit que B-Process sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

MM. [J], [M], [I] et [R], parties perdantes, seront condamnés aux dépens de première instance et d’appel, le jugement étant réformé sur ce point.

Le jugement sera également infirmé en ce qu’il a condamné MM. [Y] et [D] et les sociétés B-Process et Asp Finance au paiement d’une indemnité au titre des frais irrépétibles, statuant à nouveau la cour déboutera les fondateurs de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile et les condamnera sur ce fondement à verser à M. [D] une indemnité de 7.000 euros et à M.[Y] et Asp Finance pris ensemble une indemnité de 7.000 euros, l’équité ne commandant au regard du contexte général les opposant à la société de faire application de ces dispositions au profit de B-Process.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement en ce qu’il a condamné in solidum MM. [Y] et [D], les sociétés B-Process et Asp Finance au paiement de 164.507 euros outre intérêts, au paiement d’indemnités en application de l’article 700 du code de procédure civile du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens et en ce qu’il a débouté MM. [Y] et [D] et la société Asp Finance de leurs demandes au titre des frais irrépétibles, dans la limite de l’appel, le confirme pour le surplus,

Statuant des chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute MM. [J], [M], [I] et [R] de toutes leurs demandes,

Déboute B-Process de sa demande de condamnation de MM. [J], [M], [I] et [R] au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamne MM. [J], [M], [I] et [R] pris ensemble à payer à M. [D], d’une part, une indemnité de 7.000 euros et à M.[Y] et Asp Finance pris ensemble, d’autre part, une indemnité de 7.000 euros,

Déboute B-Process de sa demande en paiement d’une indemnité en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne MM. [J], [M], [I] et [R] aux dépens de première instance et d’appel et dit qu’ils seront recouvrés selon les modalités de l’article 699 du code de procédure civile par les avocats qui en ont fait la demande.

La Greffière, La Présidente,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de commerce
  2. Code de procédure civile
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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 8, 24 novembre 2015, n° 14/15626