Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 2 mars 2017, n° 16/04939

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 8, 2 mars 2017, n° 16/04939
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/04939
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 7 février 2016, N° 2015035869
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 8

ARRÊT DU 2 MARS 2017

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/04939

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 08 Février 2016 – RG n° 2015035869

APPELANTS

LE PROCUREUR GÉNÉRAL – SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL

en ses bureaux au Palais de Justice de PARIS

XXX

XXX

SCP X prise en la personne de Maître L D, ès qualités de mandataire judiciaire, agissant en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société anonyme K R

immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 508 823 812,

XXX

XXX

Représentée par Me Antoine DIESBECQ de la SELARL RACINE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0301

INTIMÉS

Monsieur N Y

XXX

XXX

Représenté par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

ayant pour avocat plaidant Me Jean-Paul PETRESCHI, du cabinet AARPI SAINT LOUIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K 0079

SAS K R prise en la personne de la SELARLU P E, ès qualités d’Administrateur provisoire

immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 508 823 812

ayant son siège XXX

XXX

Représentée par Me Fabrice DALAT de la SELARL WERNERT & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0373 substitué par Me Laura DUMONT de la SELARL WERNERT et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0373

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 20 Septembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre

Mme V W-AA, Conseillière

M. Laurent BEDOUET, Conseiller

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l’audience par Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre, dans les conditions prévues à l’article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Mariam ELGARNI-BESSA

MINISTÈRE PUBLIC : représenté lors des débats par Monsieur Marc BRISSET-FOUCAULT, avocat général , qui a fait connaître son avis.

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, président et par Mme Mariam ELGARNI-BESSA, greffier présent lors du prononcé.

*

Le groupe K a été constitué en juin 2009 par M. Y, M. Z et Mme A, dans le cadre de la reprise de la division française du groupe allemand Halberg. L’activité du groupe s’est ensuite diversifiée au fur et à mesure de ses acquisitions successives, la dernière reprise étant celle du groupe Caddie en 2012.

Le groupe, dont l’activité principale est la sous-traitance automobile et aéronautique, est constitué d’une société holding, la Sa K Group, qui contrôle une sous holding, K R, à la tête de sept divisions: K Stamping, K Structures, K Technology, K International, K Metal & Plastic, Caddie et K Aerospace, d’une structure managériale, K Management, et d’une société dédiée à la location de matériels, K Equipement. K Group, holding de tête, avait pour président du conseil d’administration et directeur général, M. Y, Mme A et M. Z, étant quant à eux, administrateurs et directeurs généraux délégués.

Au 31 décembre 2012, le groupe employait près de 4.000 personnes en France et à l’étranger et réalisait un chiffre d’affaires de l’ordre de 400 millions d’euros.

A compter de l’exercice 2012, les résultats du groupe K se sont dégradés, la division Stamping (pôle emboutissage) étant victime du ralentissement du marché automobile. Cette baisse d’activité a provoqué des tensions financières au sein du groupe, les sociétés étant liées par des conventions de trésorerie.

Les sociétés de la division Stamping ont alors été cédées le 11 avril 2014 à un Fonds américain, et ont fait l’objet, dès les 28 avril et 19 mai suivant, de l’ouverture de procédures collectives.

Cette situation a conduit les dirigeants à solliciter et à obtenir, le 25 avril 2014, la désignation d’un mandataire ad hoc, Maître B, à l’effet de les assister dans les discussions avec les partenaires du groupe et d’établir un plan d’apurement du passif. Maître B a alors donné mission au cabinet 8 J de procéder à une revue des prévisions d’exploitation et de trésorerie des sociétés.

Concomitamment à l’ouverture d’une procédure de conciliation au bénéfice d’K R, un accord a été conclu en mai 2014, aux termes duquel les dirigeants investisseurs ont accepté de quitter leurs fonctions opérationnelles au sein d’K R, en échange de l’apport de nouveaux fonds par la société BPI France, actionnaire depuis 2012.

Ensuite de la démission des dirigeants, la gouvernance du groupe K a été confiée au début du mois de juin 2014 à un cabinet de consultants spécialisé en restructuring, le cabinet Prosphères, dirigé par M. C.

Sur déclarations de cessation des paiements, des procédures de redressement judiciaire ont été ouvertes, le 27 juin 2014 à l’égard des sociétés de la division Caddie et de la sous-holding K R, les 2 et 7 juillet 2014 à l’égard des sociétés K Saint Pierre en Faucigny, K le Chambon, Stequal Group, Stequal, K Management et K Equipment, puis le 1er août 2014 à l’égard des sociétés K Aerospace, K Metal & Plastic, K International, K Saint Helène, K Saint Etienne, K La Roche sur Foron, K Cusset, K Saint Medard en Jalles, K Technology, K Montreuil Bellay, K Montoire sur le Loire, K Le Mans et K Structures.

Par ordonnance du 22 octobre 2014, le juge-commissaire a désigné M. Guibert, en qualité de technicien, pour faire rapport sur l’origine des difficultés ayant conduit à la cessation des paiements de la société Alta R et de ses filiales, sur les flux financiers ayant existé dans la société K R et ses filiales directes ou indirectes, sur les flux financiers ayant existé entre ses filiales, ainsi qu’ au bénéfice de tiers et sur les éventuelles restitutions de fonds auxquelles il devra être procédé dans le cadre des périodes d’observation.

Cette mission a été complétée le 10 novembre 2015, à l’effet de déterminer la date de cessation des paiements de chacune des entités du groupe K sous procédure collective.

M. Guibert a déposé un rapport d’étape, le 4 novembre 2015, complété le 30 novembre 2015.

Des cessions d’actifs sont intervenues dans le cadre des procédures de redressement judiciaire, suivies de conversion en liquidation judiciaire.

En juin 2015, la Scp X, prise en la personne de Maître D, ès qualités de mandataire judiciaire, a engagé des procédures tendant à voir reporter la date de cessation des paiements d’un certain nombre des sociétés du groupe. C’est dans ce contexte que s’inscrit la présente instance.

Par jugement du 27 juin 2014, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société K R, puis par un second jugement du 1er février 2016, la procédure a été convertie en liquidation judiciaire et a désigné la Scp X, prise en la personne de Maître D, ès-qualités de mandataire liquidateur, la date de cessation des paiements étant fixée provisoirement au 26 juin 2014, soit à la date de dépôt de la déclaration de cessation des paiements.

Suite à la démission de M. C de ses fonctions de dirigeant de la société le 4 août 2014, le président du tribunal de commerce de Paris a, par ordonnance du 11 août 2014, nommé la Selarlu P E, prise en la personne de Maître E, ès-qualités d’administrateur provisoire de la société en remplacement du dirigeant démissionnaire.

Par jugement du 1er décembre 2014, le tribunal de commerce de Paris a arrêté le plan de cession de la société et a maintenu les organes de la procédure en leurs fonctions.

Par assignation du 17 juin 2015, la Scp X, prise en la personne de Maître D, ès-qualités, a sollicité le report de la date de cessation des paiements au 27 décembre 2012.

Par jugement du 19 octobre 2015, le tribunal de commerce de Paris a déclaré l’intervention volontaire de M. Y recevable en sa qualité d’ancien dirigeant de la société et a rejeté sa demande de sursis à statuer, puis par jugement du 8 février 2016, a débouté le mandataire liquidateur de l’ensemble de ses demandes, disant n’y avoir lieu à reporter la date de cessation des paiements de la société fixée au 26 juin 2014

La Scp X, prise en la personne de Maître D, ès qualités, a relevé appel du jugement du 8 février 2016, selon déclaration du 24 février 2016, et demande à la cour dans ses conclusions signifiées le 12 août 2016, de la déclarer recevable et fondée en son appel, de réformer le jugement, de juger que l’état de cessation des paiements était caractérisé le 31 décembre 2012, le passif exigible s’élevant à 1.850.000 euros pour un actif nul,et l’était toujours au 31 décembre 2013 avec un passif exigible à tout le moins de 1.550.000 euros pour un actif nul, en conséquence de reporter la date de cessation des paiements au 31 décembre 2012, soit dix-huit mois antérieurement au jugement d’ouverture, et de condamner M. Y au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Le ministère public a également relevé appel de cette décision, selon déclaration du 25 février 2016, et demande à la cour dans ses conclusions signifiées le 13 mai 2016, d’infirmer le jugement du 8 février 2016 en ce qu’il a dit n’y avoir lieu à modification de la date de cessation des paiements d’K R et de fixer la date de cessation des paiements au 27 décembre 2012.

Les deux appels ont été joints le 8 mars 2016.

Dans ses écritures signifiées le 12 septembre 2016, M. Y demande à la cour de juger qu’au 31 décembre 2012, l’état de cessation des paiements de la société K R n’était pas caractérisé, de sorte que la date de cessation des paiements ne peut être reportée à cette date, de confirmer le jugement du 8 février 2016 en toutes ses dispositions, de débouter la Scp X, prise en la personne de Maître D, ès-qualités, et le ministère public de l’ensemble de leurs demandes et de condamner la Scp X, ès-qualités, au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens dont distraction au profit de Maître Etevenard, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

La société K R demande à la cour, dans ses conclusions signifiées le 27 juin 2016, de prendre acte qu’elle s’en rapporte à justice sur le mérite des demandes présentées par la Scp X, ès-qualités et de réserver les dépens aux frais privilégiés de la procédure collective.

SUR CE,

La Sa K R, créée en 2008, était dirigée par M. Y, qui a été remplacé au début de l’été 2014 par un manager de transition, M. C du cabinet F, en qualité de directeur général et Mme G en qualité de président du conseil d’administration.

Mère des sociétés têtes de division et sous holding d’K Group, son activité se limitait à la gestion de ses participations dans ses filiales, ses revenus provenant quasi-exclusivement des remontées de dividendes de ses filiales. Elle n’employait aucun salarié.

Pour rejeter la demande de report de la date de cessation des paiements, le tribunal a retenu qu’au 31 décembre 2012, la trésorerie disponible d’ K R était de -146 000 euros, pour un découvert autorisé non utilisé de 150 000 euros, que le compte fournisseurs de – 137 000 euros n’était pas échu, qu’au 31 décembre 2013, la trésorerie disponible de la société K R était de 151 000 euros, que la société disposait toujours d’un découvert autorisé non utilisé de 150 000 euros, et que le compte fournisseurs de -133 000 euros, non échu, était couvert par la trésorerie disponible, que le technicien précise que les comptes courants des sociétés du groupe et les facturations inter sociétés ne sont pas pris en compte pour apprécier la notion de cessation des paiements, qu’au cours de l’année 2014, l’activité de la société s’est poursuivie de la même manière qu’en 2012 et 2013, ce qui signifie que cette dernière ayant des charges d’exploitation réduites et disposant d’une trésorerie versée sur demande par les actionnaires, indépendamment de son activité propre, mais en fonction des besoins financiers de ses filiales, elle ne pouvait pas se trouver en situation de cessation des paiements.

La Scp X soutient liminairement que l’état de cessation des paiements de la société doit s’apprécier au regard de la situation d’ensemble du groupe K, dès lors que les défauts d’organisation d’une part, la centralisation de la trésorerie et les importants flux financiers intragroupe d’autre part, ont créé un lien de dépendance irréversible entre toutes les entités du groupe, de sorte qu’au vu de la situation très dégradée du groupe, la présente société se trouvait nécessairement en état de cessation des paiements dès la fin 2012.

M. Y réplique qu’un groupe ne peut pas se trouver en état de cessation des paiements par lui-même et qu’il doit être procédé à une analyse de l’actif disponible et du passif exigible, société par société.

Si le groupe K était globalement exsangue au 31 décembre 2013, cette situation, n’est pas, en elle-même, de nature à caractériser l’état de cessation des paiements de sa filiale, dès lors qu’eu égard au principe de l’autonomie des personnes morales et de leur patrimoine, l’appartenance d’une société à un groupe ne modifie pas le périmètre d’appréciation de l’état de cessation des paiements de cette entité, seule la situation de trésorerie de la société débitrice, en elle-même, devant être prise en compte pour comparer son actif disponible à son passif exigible.

Si les conventions de trésorerie conclues au sein du groupe entre les filiales opérationnelles et les sociétés tête de division, ainsi qu’avec la Sa K Group et sa sous holding K R, permettent de centraliser la trésorerie, de faire remonter aux sociétés faîtières les excédents de trésorerie des filiales, d’alimenter les entités du groupe ayant besoin de fonds et génèrent d’importants flux intragroupe, ces flux ne remettent cependant pas davantage en cause le périmètre d’appréciation de l’état de cessation des paiements, l’impact des créances intragroupe n’ayant à être débattu qu’à l’occasion de la détermination, pour chaque entité, du passif exigible et de l’actif disponible.

Il résulte de l’article L 631-1 du code du commerce qu’est en état de cessation des paiements, tout débiteur se trouvant dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, que cependant, n’est pas en état de cessation des paiements, le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible.

M. Y soutient vainement que les résultats figurant dans le tableau établi par le technicien ne correspondent pas d’une façon générale à un état de cessation des paiements au sens de l’article L 631-1 du code du commerce, en ce que M. Guibert aurait uniquement dégagé une notion comptable à partir du bilan, sans distinguer selon que le passif est ou non exigible, dès lors que le rapport du 30 novembre 2015 fait suite au complément de mission ordonné par le juge-commissaire, aux fins de rechercher spécifiquement la date de cessation des paiements de chacune des sociétés du groupe et qu’il résulte des énonciations liminaires du rapport que ce technicien a fondé ses travaux sur les notions de passif exigible et d’actif disponible telles que définies par la jurisprudence, notions dont il a ensuite fait une application pratique, en récapitulant dans ses tableaux, d’une part, les disponibilités et les lignes de découvert, d’autre part, le retard fournisseurs supérieur à 60 jours et le retard fiscal et social à plus de 30 jours, en tenant compte, le cas échéant, de l’existence d’un moratoire social.

Dans son rapport du 30 novembre 2015, détaillant la situation de chacune des entités du groupe, M. Guibert retient pour K R une situation nette au 31 décembre 2012 de – 133.000 euros et au 31 décembre 2013 de + 168.000 euros.

Si le technicien a dû rédiger son rapport complémentaire dans des délais très contraints, qui ne lui ont pas permis de disposer de l’intégralité des pièces comptables, ce qui a pu le conduire dans certains cas à procéder par estimation, il n’en demeure pas moins que son rapport constitue une base objective de discussion, qu’il appartient aux parties de compléter ou de critiquer, la cour ayant à apprécier les points du rapport en débat, au vu notamment des pièces complémentaires communiquées.

Pour voir fixer la date de cessation des paiements au 27 décembre 2012 , selon le ministère public ou au 31 décembre 2012, selon le liquidateur, les appelants soutiennent qu’il y a lieu de retraiter la situation nette déterminée par M. Guibert, en ce que :

— le passif exigible ne comprend pas, à tort, les dettes fournisseurs intragroupe qui doivent s’ajouter aux retards fournisseurs tiers, en ce qu’il ya lieu d’intégrer également dans ce passif les créances exigibles déclarées par S T U, par H, par Maître I, ès qualités de liquidateur, pour la société Caddie Sa, ainsi que les créances déclarées par Noord Nederlandse et par la Banque Palatine au passif de la société en sa qualité de garant pour un total de 1.620.000 euros, de même que les comptes courants débiteurs groupe.

— le montant de l’autorisation de découvert à prendre en compte n’est pas de 150.000 euros, mais de 50.000 euros au regard des justificatifs produits par M. Y, auquel incombe la charge de la preuve.

Tandis que M. Y conteste toute intégration des créances fournisseurs intra-groupe dans le passif exigible, en ce que leur remboursement n’a pas été demandé et en ce qu’il s’agit de créances réciproques entre sociétés du groupe, immédiatement compensables entre elles, soulignant en outre que nombre de créances revenant au groupe dans son ensemble, notamment au titre des crédits d’impôts, n’ont pas été comptabilisés. Il maintient qu’il y a lieu de prendre en compte une autorisation de découvert de 150.000 euros.

Au 31 décembre 2012, M. Guibert a retenu une situation nette passive de -133.000 euros, au vu d’une situation de trésorerie négative de -146.000 euros, d’un retard fournisseurs à 60 jours de -137.000 euros , que le tribunal a considéré comme non échu, et pour seul actif disponible d’une ligne de découvert de 150.000 euros, étant relevé qu’aucun élément ne permet de caractériser une situation différente au 27 décembre 2012. Il ressort du rapport du technicien que le passif fournisseurs a été analysé hors groupe, de sorte que le moyen de M. Y pour contester un état de cessation des paiements au 31 décembre 2012, tiré de ce que les dettes fournisseurs intragroupe ne peuvent être considérées comme échues, est à ce stade inopérant.

Il n’est par ailleurs produit aucun élément permettant de remettre en cause le passif exigible fournisseurs hors groupe, qui ressort de l’analyse du technicien, de sorte que c’est à tort que le tribunal a considéré que le passif de -137.000 euros n’était pas échu.

Face à ce passif exigible de 283.000 euros (146.000 +137.000), le seul actif disponible est une ligne de découvert autorisé, portée dans le rapport Guibert pour un montant de 150.000 euros au 31 décembre 2012 et au 31 décembre 2013, ce montant, détaillé aux annexes 4a et 5a, correspondant à une réserve de crédit de 100.000 auprès du LCL et de 50.000 euros auprès du Crédit Agricole. M. Guibert ayant réclamé au cours de ses opérations la communication du montant des autorisations accordées aux 31 décembre 2012 et 2013 et ayant disposé des comptes sociaux, a pu se convaincre de la réalité de ces autorisations, de sorte que le montant du découvert porté, sans réserve, dans le rapport est suffisamment démontré par M. Y et sera tenu pour acquis.

Une insuffisance d’actif disponible existait donc bien au 31 décembre 2012.

M. Y fait cependant valoir qu’en tout état de cause, cette situation n’a été que passagère, K R étant à nouveau in bonis en 2013.

Contrairement à ce qu’indique M. Y, les appelants ne considèrent pas qu’K R se trouvait in bonis au 31 décembre 2013, et ils entendent voir retraiter dans de notables proportions le passif exigible retenu par le technicien à hauteur de

—  133.000 euros au 31 décembre 2013, en y ajoutant les dettes fournisseurs groupe et des dettes fournisseurs tiers omises.

M. Guibert indique dans son rapport que 'L’analyse des flux intercompagnie au 31 décembre 2013 sur la base des balances et grands-livres au 31 décembre 2013 ( version V2) montre que, contrairement à ce qui est indiqué par 8 J notamment, les soldes sont réciproques’ et que ' le rapprochement entre les balances au 30 juin 2014 et les situations passives établies par Maître D montre qu’il n’y a quasiment pas d’écart ( K€ 255) entre les créances intragroupe.'

Si la réciprocité des écritures dans les comptes des sociétés du groupe, entendue au sens comptable du terme, ne signifie pas compensation, il n’en demeure pas moins que les dettes fournisseurs intragroupe ne constituent un passif exigible, que si le liquidateur est en mesure d’établir leur exigibilité à la date considérée.

Or, l’exigibilité des créances fournisseurs intragroupe doit s’apprécier au vu des dispositions spécifiques régissant les relations internes au sein du groupe.

En l’espèce, les relations au sein du groupe K sont régies, non seulement par plusieurs conventions de trésorerie, mais aussi par des conventions d’animation, de prestations de services, de cautions et garanties, d’intégration fiscale, de contrat d’abandon de créance avec ou non clause de retour à meilleure fortune ( rapport de M. Guibert du 4 novembre 2015), de sorte que dans ce fonctionnement spécifique, il ne saurait être déduit l’exigibilité des créances intra-groupe des seules factures émises, quand bien même elles seraient datées, ni davantage des déclarations de ces créances au passif de la liquidation, de telles déclarations ne permettant pas de caractériser la date de leur réelle exigibilité.

Il en est de même des créances en compte courant Groupe qui ne constituent un passif exigible qu’à partir du moment où elles ont été réclamées, ce dont il n’est pas justifié à la date considérée.

Cette absence d’exigibilité au 31 décembre 2012 et au 31 décembre 2013 ressort d’ailleurs de la déclaration de cessation des paiements effectuée le 26 juin 2014 par le successeur de M. Y, qui a inscrit les différentes créances des fournisseurs 'Groupe’ ainsi que les créances en comptes courants des associés créanciers dans le passif à échoir et non dans le passif exigible, à la différence des créances des fournisseurs ' Hors Groupe’ qui figurent pour partie dans le passif échu.

N’est en conséquence pas opérant le moyen tiré de l’article L 441-6,I du code du commerce.

Il n’y a donc pas lieu d’inclure dans le passif exigible au 31 décembre 2012 et au 31 décembre 2013, les créances fournisseurs groupe et les créances en comptes courants des associés créanciers.

S’agissant du retraitement du passif exigible fournisseurs tiers à 60 jours, afin d’y ajouter, selon le liquidateur, les créances suivantes au vu des déclarations qui ont été faites au passif d’K R:

— sur la créance de la banque S T ( pièce 29)

S T a déclaré une créance de 1.167.802,66 euros ( 9.912.892,94 Cny) résultant de la garantie donnée par K R, le 30 juillet 2012, à la bonne exécution par Caddie T Ldt de ses obligations au titre d’une autorisation de découvert consentie par la banque, en dernier lieu le 26 octobre 2012, pour 13.832.151,01 Cny, soit environ 1.690.000 euros, cette facilité bancaire devant être intégralement remboursée au 30 novembre 2012 au plus tard. Caddie T s’étant trouvée dans l’incapacité de rembourser sa dette à la date prévue, S T, K R et Caddie T ont régularisé un accord le 20 mars 2014 aux termes duquel K R s’est engagée à rembourser les sommes dues selon un échéancier courant du 25 mars au 15 novembre 2014, qui, selon le déclarant, n’a jamais été respecté, la banque ayant obtenu ultérieurement en référé, le 18 juillet 2014, la condamnation d’K R au paiement d’une provision de 1.120.830,65 euros.

Le liquidateur soutient qu’une somme de l’ordre de 1.200.000 euros était exigible depuis le 30 novembre 2012 et que l’accord conclu emportait reconnaissance d’exigibilité par la caution.

Cependant, l’exigibilité au 31 décembre 2012 et/ou au 31 décembre 2013, à l’égard d’K R, des sommes dues à la banque ne résulte pas suffisamment de l’engagement de payer qu’elle a pris dans l’accord conclu le 20 mars 2014. En effet, cet accord rappelle simplement en son article 2.1 que conformément aux facilités bancaires accordées à Caddie T, tous les montants à recouvrer devaient être payés au plus tard le 30 novembre 2012. Rien ne démontrant qu’K R, qui n’est pas la débitrice principale, mais seulement la caution, a été appelée au titre de son engagement, avant le 31 décembre 2013.

Cette créance ne sera en conséquence pas intégrée dans le passif exigible au 31 décembre 2013.

— sur la créance de H ( pièce 30 )

La société H a déclaré une créance de 2.500.000 euros comportant un poste de 380.000 euros au titre 'des dettes fiscales et sociales avant l’année 2013", dont se prévaut le liquidateur. Cependant, aucun justificatif n’est versé au débat à l’appui de cette déclaration de créance dans la présente instance, permettant d’apprécier l’existence et l’exigibilité de cette créance avant 2013, étant observé que H, entreprise de métallurgie, et vraisemblablement fournisseur du groupe K, n’est manifestement pas un créancier fiscal d’K R et apparaît en réalité revendiquer des dommages et intérêts.

Cette créance n’a pas lieu d’être intégrée dans le passif exigible au 31 décembre 2013. – sur la créance de la SA Caddie ( pièce 31)

Le liquidateur de la SA Caddie située à Schiltigheim a déclaré le 23 juillet 2014 une créance de 44.576,44 euros. Cette créance avait préalablement fait l’objet, le 7 août 2013, d’une demande en paiement et le 9 janvier 2014, d’une mise en demeure, toutes deux adressées à la Sas K Kdi à Drusenheim (67) au titre de factures d’électricité pour des locaux occupés sur le site de Schiltigheim.

Aucun lien n’est fait avec une obligation personnelle d’K R, la société visée comme débitrice étant K Kdi, de sorte qu’il n’est pas établi à ce titre une dette exigible à l’égard d’K R au 31 décembre 2013.

XXX

Noord Nederlandse a déclaré une créance de 1.346.156,06 euros au titre de trois engagements de caution solidaire consentis par K R en garantie de toutes sommes dues par Caddie Strasbourg au titre des livraisons de matériels.

Le cautionnement du 18 octobre 2012 garantit le paiement des livraisons pour la période du 18 octobre 2012 au 30 décembre 2013 dans la limite de 450.000 euros, le second cautionnement daté du 20 février 2013, les livraisons du 20 février 2013 au 30 décembre 2013 dans la limite de 1 million d’euros. Le troisième cautionnement daté du 29 janvier 2014 concerne une période postérieure à l’objet du litige.

La déclaration de créance communiquée sans ses annexes vise une attestation de l’expert-comptable du fournisseur en date du 23 juin 2014, des tentatives de règlements amiables non datées et des mises en demeure délivrées au débiteur principal et à la caution le 17 juin 2014. En cet état, il n’existe aucun élément sur la mise en oeuvre de la caution avant le 31 décembre 2013, de sorte que l’exigibilité de la créance au 31 décembre 2013, à l’égard K R, n’est pas établie.

Cette créance n’a donc pas lieu d’être intégrée dans le passif exigible au 31 décembre 2013.

— sur la créance de la Banque Palatine ( pièce 33):

La Banque Palatine a déclaré une créance totale de 4.074.685,50 euros, correspondant notamment à deux engagements de caution qu’K R a consentis à la banque dans l’intérêt d’K Bessines (660.151,49 euros) et d’K Beaucourt (213.365,31 euros ), créances dont se prévaut le liquidateur dans ses écritures.

Toutefois, la lecture de cette déclaration de créance ne met pas en évidence une exigibilité des sommes dues par la caution, ni au 31 décembre 2012, les cautionnements étant postérieurs à cette date ( 25 janvier 2013 et 27 février 2013), ni au 31 décembre 2013, la déclaration visant un capital restant dû au 28 avril 2014, date d’ouverture des procédures collectives concernant les débitrices principales et des intérêts ayant couru à compter de cette date.

Cette créance n’a pas à figurer dans le passif exigible au 31 décembre 2013.

Ainsi au 31 décembre 2013, K R disposait d’un actif disponible de 301.000 euros ( 151.000+150.000 euros) lui permettant de faire face à un retard fournisseurs de -133.000 euros et ne se trouvait donc pas en état de cessation des paiements.

Il s’ensuit que l’insuffisance d’actif disponible au 31 décembre 2012 n’a été que provisoire, la société ayant rétabli une situation de trésorerie positive au cours de l’exercice 2013. C’est dès lors à juste titre que le tribunal n’a pas fait droit à la demande de report de la date de cessation des paiements. Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Aucune considération d’équité ne justifie de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque.

Les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective

PAR CES MOTIFS, Confirme le jugement,

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,

Ordonne l’emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire et dit qu’ils pourront être recouvrés directement par les avocats qui en ont faite la demande conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Mariam ELGARNI-BESSA Marie -Christine HÉBERT-PAGEOT

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Textes cités dans la décision

  1. Code de commerce
  2. Code de procédure civile
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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 2 mars 2017, n° 16/04939