Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 2, 19 avril 2019, n° 18/09300

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Chronologie de l’affaire

Commentaires5

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Village Justice · 26 septembre 2019

Le 17 septembre 2019, Me Daniel Soulez-Larivière a fait face à l'avocate toulonnaise, Me Aurore Boyard. L'origine de leur querelle : le titre d'un livre de Me Boyard, « L'avocature ». Le célèbre pénaliste parisien a assigné en contrefaçon Me Boyard à qui il reproche d'avoir utilisé, pour son livre, le titre de son célèbre ouvrage « L'avocature » publié en 1982. « L'avocature » de Me Soulez-Larivière s'attache à définir le métier d'avocat. Devenu une institution dans la profession et largement commenté, ce livre a participé à la grande notoriété de Me Soulez-Larivière. De son côté Me …

 

Stéphanie Carre · L'ESSENTIEL Droit de la propriété intellectuelle · 1er juillet 2019

www.cabinet-arenaire.com · 17 mai 2019

Dans un arrêt du 19 avril 2019, la cour d'appel de Paris vient de rappeler que le titre d'une œuvre peut être protégé par le droit d'auteur à condition d'être original (CA Paris, 5-2, 19 avril 2019, RG n°18/09300). Rien de nouveau à cet égard sur le plan des principes, l'article L.112-4 du code de la propriété intellectuelle prévoyant expressément que « le titre d'une œuvre de l'esprit, dès lors qu'il présente un caractère original, est protégé comme l'œuvre elle-même ». L'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris n'en est pas moins intéressant dans la mesure où il apporte quelques …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 2, 19 avr. 2019, n° 18/09300
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/09300
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 22 mars 2018, N° 16/06779
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRET DU 19 AVRIL 2019

(n°76, 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 18/09300 – n° Portalis 35L7-V-B7C-B5VBA

Décision déférée à la Cour : jugement du 23 mars 2018 – Tribunal de grande instance de PARIS – 3e chambre 2e section – n°16/06779

APPELANT

M. B X

Né le […] à […]

De nationalité française

Exerçant la profession d’écrivain

[…]

Représenté par Me My-Kim YANG X de la SCP SEBAN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque P 498

Assisté de Me Claire-Marie DUBOIS plaidant pour la SCP SEBAN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque P 498

INTIMES

M. D Y

Domicilié chez la S.A. LES EDITIONS CALMANN-LEVY

[…]

7006 PARIS

S.A. LES EDITIONS CALMANN-LEVY, agissant en la personne de son directeur général, M. B F, domicilié en cette qualité au siège social situé

[…]

[…]

Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 572 082 279

Représentés par Me Roger LEMONNIER de la SCP LEMONNIER – DELION – GAYMARD – RISPAL, avocat au barreau de PARIS, toque P 516

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 7 mars 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Anne-Marie GABER, Présidente, en présence de Mme G H, Conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport

Mmes Anne-Marie GABER et G H ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Anne-Marie GABER, Présidente

Mme G H, Conseillère

M. François THOMAS, Conseiller, désigné en remplacement de Mme Françoise BARUTEL, Conseillère, empêchée

Greffière lors des débats : Mme I J

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Anne-Marie GABER, Présidente, et par Mme I J, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

Vu le jugement contradictoire du 23 mars 2018 rendu par le tribunal de grande instance de Paris,

Vu l’appel interjeté le 11 mai 2018 par M. B X,

Vu les dernières conclusions récapitulatives remises au greffe, et notifiées, par voie électronique, le 18 février 2019 de M. X,

Vu les dernières conclusions récapitulatives remises au greffe, et notifiées, par voie

électronique, le 12 février 2019 de M. D Y et de la société Calmann-Levy, intimés

Vu l’ordonnance de clôture du 21 février 2019,

SUR CE, LA COUR,

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

Il sera simplement rappelé que M. X est un écrivain utilisant le nom de B K. Il est l’auteur d’un roman publié le 17 avril 2014 aux éditions Alma intitulé «MEMOIRE FAUVE».

Il précise qu’il est également musicien de profession, auteur-compositeur de musique rock et qu’avant

de s’adonner à l’écriture il a longuement travaillé dans le monde télévisuel, son livre se voulant une critique de la société du monde médiatique.

M. Y est également écrivain et a publié aux éditions Calman-Levy, le 19 août 2015, un roman intitulé «MEMOIRES FAUVES». Ce roman raconte l’histoire d’un rock-star dénommé «fauves» et dénonce derrière l’histoire d’une star, la violence faite aux enfants. Il s’agit également d’une autobiographie car l’auteur se met en scène au travers d’un personnage du roman appelé Z qui est producteur phonographique et directeur artistique d’un label, ce qu’était l’auteur dans les années 70 à 90.

Après mise en demeure infructueuse, M. X a fait assigner M. Y et la société Calman-Levy par acte du 4 avril 2016 devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon du titre de son ouvrage «MEMOIRE FAUVE» et, à titre subsidiaire, en concurrence déloyale.

Le jugement dont appel du 23 mars 2018, après avoir écarté des débats deux pièces qui n’avaient pas été régulièrement produites aux débats par M. X, a jugé que le titre «MEMOIRE FAUVE» était dépourvu d’originalité et a débouté M. X de ses demandes tant au titre du droit d’auteur qu’à celui de la concurrence déloyale et l’a condamné aux dépens.

M. X ne reprend pas en cause d’appel ses demandes fondées sur la concurrence déloyale de sorte que le jugement sera nécessairement confirmé de ce chef.

Sur la protection du titre «MEMOIRE FAUVE»

M. X revendique la protection du droit d’ auteur sur le titre de son 'uvre en vertu du premier alinéa de l’article L. 112-4 du code de la propriété intellectuelle qui dispose que :

«Le titre d’une 'uvre de l’esprit, dès lors qu’il présente un caractère original, est protégé comme l''uvre elle-même.»

Il n’est pas contesté que le roman de M. X bénéficie pour lui même de la protection au titre du droit d’auteur et dès lors son titre peut y prétendre, sans formalité, à la condition qu’il soit pourvu d’originalité.

L’originalité d’une 'uvre doit s’apprécier de manière globale de sorte que la combinaison des éléments qui la caractérise du fait de leur agencement particulier lui confère une physionomie propre qui démontre l’effort créatif et le parti-pris esthétique portant l’empreinte de la personnalité de l’auteur.

La cour constate que les deux mots «Mémoire» et «Fauve» qui constituent le titre «MEMOIRE FAUVE» ne présentent par eux mêmes aucune originalité et peuvent se retrouver, séparément, dans de nombreux titres d''uvres littéraires. Pour autant ils ne sont pas généralement utilisés en association l’un avec l’autre et les intimés, qui contestent le caractère original du titre, n’allèguent pas pour autant d’une utilisation conjointe de ces deux mots.

M. X, à qui il appartient d’identifier, au regard de ce titre, les éléments traduisant sa personnalité expose que le livre qu’il a écrit relate «la vie d’une jeune femme devenue membre d’un club de sport, qu’elle fréquente avec assiduité, voire obsession. Elle se sent investie d’une mission et s’y emploie de toutes ses forces jusqu’à ce que cela en soit trop pour elle et que son corps et son esprit lâchent, l’emportant dans un profond coma.

A son réveil, la protagoniste se trouve sur un lit d’hôpital psychiatrique, soignée pour paranoïa aigüe. A, elle ne se souvient plus de son nom ni de son enfance, elle semble privée de mémoire.

Tout ce dont elle se souvient ce sont les seules semaines intenses passées dans son Club de sport.

Son psychiatre lui demande de l’écrire dans un cahier.

L’héroïne s’attellera alors à se reconstruire, à rechercher et retoucher son passé.

Pour elle, sa mission n’est cependant pas terminée. De la paranoïa au jeu d’échecs, des mécanismes de la maladie à la manipulation, il n’y a qu’un pas, qu’elle franchira.

Se visionnant alors sur l’échiquier de la vie comme une dame noire en quête de sa rivale la dame blanche. ».

Il expose que le livre s’articule autour de deux périodes, une première partie «période Fauve » qui est en fait le récit de la période avant « l’accident » et la seconde «période blanche ». Le terme «période fauve» est d’ailleurs explicité dans le livre, l’héroïne indiquant qu’il ne s’agit pas d’une référence au fauvisme mais à sa vie d’avant l’hôpital (paradis blanc) durant laquelle elle vivait comme un «fauve» dans la «jungle».

Dès lors, la preuve de l’originalité du titre «MEMOIRE FAUVE» est parfaitement rapportée et le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur la contrefaçon alléguée du titre protégé

Aux termes de l’article L.122-4 du code de la propriété intellectuelle, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite.

Le livre de M. Y publié par les éditions Calman-Levy avec le titre «Mémoires Fauves», qui ne diffère du titre premier que par l’ajout du pluriel à «mémoire» et à «fauve», pluriel qui au demeurant garde à l’expression la même sonorité et ne permet pas la différentiation des titres, caractérise la contrefaçon.

La cour rappelle qu’il importe peu que le titre «Mémoires Fauves» choisi par M. Y puisse avoir sa logique propre au regard de l’ouvrage traitant des souvenirs d’un personnage dont le nom de scène est « Fauves » et que l’éventuelle bonne foi des contrefacteurs est sans incidence.

La contrefaçon sera retenue par la cour.

La contrefaçon du titre original que M. X avait choisi pour son livre lui crée nécessairement un préjudice et ce d’autant que le livre de M. Y qui n’a été publié que 16 mois après la sortie du livre de M. X, est également un roman partant de souvenirs d’une héroïne ou d’un héros lié dans un cas au monde médiatique télévisuel et dans l’autre au monde de la musique rock et alors que les deux auteurs sont issus professionnellement du monde musical.

Au vu de ces éléments et des pièces versées aux débats, la cour est en mesure de fixer l’indemnisation réparant l’entier préjudice subi par M. X à la somme totale de 5 000 euros.

Il sera en outre fait interdiction à M. Y et à la société Calman-Levy de poursuivre la commercialisation du livre«Mémoires Fauves» sous ce titre et enjoint à la société Calman-Levy d’obtenir des libraires le retour des exemplaires invendus à ce jour du livre portant ce titre, et ce dans un délai de 2 mois à compter de la signification de l’arrêt sous une astreinte provisoire de 50 euros par exemplaire contrefaisant.

Sur les autres demandes

M. Y et la société Calman-Levy qui succombent seront condamnés aux dépens de première

instance et d’appel et à payer à M. X une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement sauf en ce qu’il a débouté M. X de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale,

Et statuant à nouveau dans cette limite,

Dit que le titre «MEMOIRE FAUVE» du livre de M. X bénéficie de la protection du droit d’auteur,

Condamne in solidum M. Y et la société Calman- Levy à payer à M. X une sommetotale de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour contrefaçon,

Fait interdiction à M. Y et à la société Calman-Levy de poursuivre la commercialisation du livre «Mémoires Fauves» sous ce titre et enjoint à la société Calman-Levy d’obtenir des libraires le retour des exemplaires invendus à ce jour du livre portant ce titre, et ce dans un délai de 2 mois à compter de la signification du présent arrêt sous une astreinte provisoire de 50 euros par exemplaire contrefaisant.

Rejette toutes autres demandes des parties contraires à la motivation ;

Condamne in solidum M. Y et la société Calman-Levy aux dépens de première instance et d’appel et à payer à M. X une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente

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