Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 2, 4 octobre 2019, n° 18/23120

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 2, 4 oct. 2019, n° 18/23120
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/23120
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 4 octobre 2018, N° 18/07140
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Paris, 5 octobre 2018, 2018/07140
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : EP2346552 ; WO2010043533
Titre du brevet : Dispositif de libération de médicaments et son procédé de fabrication ; Dispositif d'administration de médicament et procédé de fabrication d'un dispositif d'administration de médicament
Classification internationale des brevets : A61M
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Référence INPI : B20190066
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS ARRET DU 04 octobre 2019

Pôle 5 – Chambre 2

(n°136, 8 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 18/23120 – n° Portalis 35L7-V-B7C-B6TYY Décision déférée à la Cour : ordonnance sur référé-rétractation du 05 octobre 2018 – Tribunal de grande instance de PARIS – 3e chambre 2e section – RG n°18/07140

APPELANTES AU PRINCIPAL et INTIMEES INCIDENTES S.A.S. MYLAN, agissant en la personne de son président domicilié en cette qualité au siège social situé […] 69800 SAINT-PRIEST

S.A.S. MYLAN MEDICAL, agissant en la personne de son président domicilié en cette qualité au siège social situé […] 75008 PARIS Représentées par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE-BENETREAU, avocat au barreau de PARIS, toque K 111 Assistées de Me Denis S, avocat au barreau de PARIS, toque A 0948

INTIMEE AU PRINCIPAL et APPELANTE INCIDENTE S.A.R.L. SANOFI-AVENTIS DEUTSCHLAND GmbH, société de droit allemand, prise en la personne de ses directeurs généraux domiciliés en cette qualité au siège social situé Brüningstrasse 50 65926 Frankfurt am Main HESSEN Allemagne Représentée par Me Luca DE MARIA de l PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque L 0018 Assistée de Me Jean-Hyacinthe DE M plaidant pour l’AARPI GIDE – LOYRETTE – NOUEL, avocat au barreau de PARIS, toque T 03

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 5 juin 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Anne- Marie GABER, Présidente, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport, en présence de Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mmes Anne-Marie G et Laurence L ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Anne-Marie GABER, Présidente Mme Laurence LEHMANN, Conseillère Mme Isabelle DOUILLET, Conseillère, désignée en remplacement de Mme Françoise BARUTEL, Conseillère, empêchée

Greffière lors des débats : M Carole T

ARRET : Contradictoire Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile Signé par Mme Anne-Marie GABER, Présidente, et par Mme Carole T, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu l’ordonnance 'sur référé-rétractation’ contradictoire du 5 octobre 2018 rendue par le délégataire du Président du tribunal de grande instance de Paris (RG 18/07140),

Vu l’appel interjeté le 26 octobre 2018 par les sociétés Mylan et Mylan M (dites ensemble sociétés Mylan),

Vu les dernières conclusions (conclusions d’appel n°2) remises au greffe, et notifiées, par voie électronique, le 5 avril 2019 par les sociétés Mylan appelantes,

Vu les dernières conclusions (conclusions en réponse n°2) remises au greffe, et notifiées, par voie électronique le 30 avril 2019 par la société de droit allemand Sanofi-Aventis Deutschland GmbH (Sanofi), intimée et incidemment appelante,

Vu l’ordonnance de clôture du 23 mai 2019,

SUR CE, LA COUR,

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

Il sera simplement rappelé que la société Sanofi est notamment titulaire d’un brevet européen EP 2346552 désignant la France intitulé « Dispositif d’administration de médicament et procédé de fabrication d’un dispositif d’administration de médicament » issu d’une demande internationale WO 2010/043533, publiée le 22 avril 2010 , déposée le 8 octobre 2009 sous priorité d’une demande de brevet européen EP 08017889 du 13 octobre 2008.

Ce brevet a été maintenu sous une forme modifiée le 4 janvier 2016 par la division d’opposition de l’Office Européen des Brevets (OEB), un recours contre cette décision est en cours. La société Sanofi a par ailleurs formé devant l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) le 11 mai 2018 une demande de limitation de la partie française de son titre.

La société Sanofi estimait que la société Mylan, représentée pour la France par la société Mylan Médical, laquelle avait obtenu le 23 mars 2018 de l’agence européenne du médicament une autorisation de mise sur le marché (AMM) sous la dénomination « Semglee » d’un produit (le Semglee) associé à un stylo d’injection, s’apprêtait à commercialiser en France et en Europe ce stylo d’injection qui serait identique au stylo « Basalog One » commercialisé par un groupe indien et mettrait en œuvre les caractéristiques de la revendication délivrée ainsi que celles ajoutées à la revendication 1 telle que maintenue par la division d’opposition et faisant l’objet de la demande de limitation devant l’INPI.

Elle a, dans ces circonstances, obtenu le 8 juin 2018 sur requêtes, par trois ordonnances du délégataire du président du tribunal de grande instance de Paris (RG 18/01659, 18/01660 et 18/01662), l’autorisation de faire pratiquer trois opérations de saisie-contrefaçon du dispositif litigieux respectivement dans les locaux de la société Mylan à Saint- Priest et à Meyzieu (69) et au siège social de la société Mylan Médical à Paris.

Les saisies-contrefaçons ont été diligentées à compter du 13 juin 2018.

Les sociétés Mylan soutenant en particulier que les conditions de délivrance des ordonnances autorisant les saisies-contrefaçons n’étaient pas réunies ont fait assigner les 20 et 21 juin 2018 la société Sanofi et l’huissier de justice ayant procédé à la saisie-contrefaçon dans les locaux de Saint-Priest aux fins d’obtenir la rétractation des trois ordonnances précitées et la restitution des éléments saisis.

La société Sanofi a quant à elle fait assigner au fond les sociétés Mylan en contrefaçon des revendications 1 à 6 de la partie française de son brevet européen devant le tribunal de grande instance de Paris le 13 juillet 2018, étant observé que, contrairement à ce qui est noté par les sociétés Mylan (notamment en page 19 de leurs conclusions), n’est pas seulement visée la réparation d’un préjudice moral, mais également d’un préjudice commercial (pièce 23 des sociétés Mylan) .

Par ordonnance en référé-rétractation, dont appel, le premier juge a, entre autres dispositions :

- rejeté les demandes de rétractation,

— ordonné la remise à la société Sanofi des pièces placées sous scellés lors des opérations de saisies-contrefaçon opérées à l’encontre de la société Mylan à Saint-Priest et à Meyzieu, à l’exception de la pièce constituant l’annexe 7 « courrier à en-tête de MYLAN, émanant de Madame Anne Y [directeur général de MYLAN SAS], daté du 9 avril 2018 » ;
- débouté la société Sanofi de sa demande d’information sous astreinte relative à l’obtention d’un prix de remboursement du Semglee,
- débouté les sociétés Mylan de leurs demandes d’interdiction d’utiliser les documents saisis dans des procédures judiciaires externes à la France,
- condamné les sociétés Mylan aux dépens et à payer en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile notamment 12 000 euros à la société Sanofi.

Les sociétés Mylan, appelantes, soutiennent que la société Sanofi n’aurait pas fait une présentation loyale des faits au juge des requêtes, que le brevet n’aurait pas de portée certaine, que le but poursuivi était tout autre que celui présenté au juges des requêtes et qu’il n’existait pas au jour des requêtes de contrefaçon avérée ni imminente.

Elles réitèrent dès lors à l’encontre de la société Sanofi leur demande de rétractation des trois ordonnances du 8 juin 2018 et de remise des éléments saisis, et à titre subsidiaire leurs demandes de modification des dites ordonnances afin qu’il y soit prévu le maintien de toutes les pièces saisies chez les huissiers instrumentaires, ceux-ci se constituant séquestres de ces pièces jusqu’à ce que la société saisissante justifie de l’obtention d’un prix de remboursement en France pour le Semglee.

Elles maintiennent par ailleurs leur demande d’interdiction d’utiliser les documents saisis dans des procédures judiciaires externes à la France limitant leur demande d’astreinte à 100.000 euros par infraction constatée, et la société Mylan réclame le paiement d’une somme de 15 000 euros au titre de ses frais irrépétibles.

La société Sanofi, appelante incidente, sollicite la remise de la pièce intitulée « pièce 7 » placée sous séquestre par l’huissier de justice au cours de la saisie-contrefaçon opérée à Saint-Priest. À titre subsidiaire, en cas de mise sous séquestre, elle demande d’ordonner aux sociétés Mylan de l’informer de toute décision de lancement du Semglee en France, ainsi que de l’obtention d’un prix de remboursement et de l’accomplissement de la « blue box » pour ce produit, en prévoyant pour chacune de ces informations une pénalité journalière de 100 000 euros en cas de retard. Elle réclame enfin une

somme complémentaire de 50 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il sera préalablement relevé que si les appelantes mettent en cause devant la cour l’impartialité de l’huissier de justice ayant procédé à la saisie-contrefaçon réalisée à Saint- Priest et demandent d’en tirer les conséquences en rétractant l’ordonnance ayant autorisé la saisie- contrefaçon à laquelle celui-ci a procédé, il n’a pas été interjeté appel de la décision entreprise à l’encontre de cet huissier instrumentaire (M. B), lequel a été mis hors de cause par les premiers juges, qui ont en outre condamné les sociétés Mylan à lui payer 12 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

L’huissier de justice dont s’agit n’étant ainsi pas partie au présent recours, la cour ne saurait apprécier les manquements reprochés à ce tiers à l’instance dans l’exécution de sa mission, étant ajouté que seule une nullité des opérations de saisie serait le cas échéant susceptible d’être encourue, ce qui ne relève pas de la compétence du juge de la rétractation ni partant de la cour statuant sur une décision de ce dernier.

Les moyens de ce chef sont donc inopérants et ne peuvent qu’être rejetés.

Le recours portant sur une décision relative aux ordonnances sur requêtes critiquées il appartient à la cour de rechercher si les conditions invoquées par les appelantes, prévues par les textes, pour procéder aux saisies-contrefaçons en cause étaient, ou non, réunies à la lumière d’un réexamen contradictoire, et ce, dans la limite des pouvoirs appartenant au juge ayant autorisé lesdites mesures, étant précisé que des dispositions qui s’avéreraient excessives peuvent également être supprimées.

Les appelantes invoquent en fait un manquement au devoir de loyauté du requérant et une atteinte au principe de proportionnalité.

Sur le devoir de loyauté

La procédure non contradictoire de saisie-contrefaçon permet d’apporter la preuve de la contrefaçon notamment en matière de brevet d’invention sans que le saisi soit préalablement informé, les saisies ne sont par ailleurs qu’un moyen probatoire.

Les sociétés Mylan prétendent qu’en l’espèce la présentation des faits réalisée par la société Sanofi tendait à tromper le juge des requêtes, qu’en particulier cette société savait qu’elles n’étaient pas sur le point de contrefaire en France le brevet EP 552 ne pouvant pas y commercialiser le Semglee sans procédure nationale, ni prix de remboursement.

Une AMM communautaire vaut pour l’ensemble de l’Union Européenne (UE) mais ne signifie certes pas nécessairement que le médicament bénéficiant d’une telle autorisation de mise sur le marché est disponible dans l’ensemble des États membres, requérant en particulier pour sa commercialisation en France d’autres démarches (procédure dite 'blue box’ auprès de l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé et d’obtention du prix nécessaire au remboursement du médicament auprès de la Haute Autorité de Santé et du Comité Économique des Produits de Santé).

Il sera relevé que si la société Sanofi indiquait clairement dans la présentation des faits soumise au juge des requêtes que la société Mylan avait obtenu une AMM communautaire, elle ne se prévalait nullement de la réalisation par les sociétés Mylan de telles démarches. Elle faisait uniquement valoir que la publication d’un communiqué de presse annonçait l’obtention de cette AMM ainsi que le lancement en Europe du Semglee à compter du second semestre 2018, soumettant ces éléments au juge des requêtes ainsi en mesure d’apprécier s’ils étaient, ou non, suffisants à justifier les autorisations sollicitées de saisies-contrefaçons.

Il sera ajouté que le juge des requêtes était par ailleurs parfaitement informé de l’absence de commercialisation à la date des ordonnances puisqu’ainsi que le soulignent les sociétés Mylan celles-ci prévoient la possibilité pour l’huissier instrumentaire de demander à quelle date le Semglee serait commercialisé en France avec le stylo injecteur pour son administration.

Le simple fait de soutenir en de telles conditions que la société Mylan s’apprêtait à commercialiser de l’insuline glargine dans le stylo du Basalog One en France et en Europe sous la dénomination Semglee, arguant d’un risque de commercialisation commençant à courir le 1er juillet 2018, ne saurait suffire à caractériser une déloyauté de la part du requérant pour obtenir les autorisations de procéder aux mesures en cause.

Enfin, si certains éléments saisis ont ensuite pu montrer qu’un projet de lancement du Semglee était arrêté, la poursuite des opérations par la société Sanofi n’en est pas pour autant déloyale dès lors que ces mesures avaient été autorisées en l’absence de toute commercialisation actuelle et qu’ainsi que relevé par le premier juge la contrefaçon ne se limite pas à des actes de commercialisation, l’importation ou la détention en France aux fins de mise dans le commerce du produit objet du brevet constituant également des actes de contrefaçon de nature à justifier la recherche du produit prétendument contrefaisant ainsi que de tout document s’y rapportant.

Il n’est par ailleurs pas discuté que la société Sanofi indiquait bien dans ses requêtes qu’il existait une procédure d’opposition contre la

délivrance du brevet européen, un maintien du dit brevet sous une forme modifiée, un recours contre cette décision devant l’OEB et une demande devant l’INPI de limitation de la partie française du brevet.

Dès lors, il ne peut pas être considéré que le fait de ne pas avoir particulièrement attiré l’attention du juge des requêtes, professionnel du droit, sur les éventuelles conséquences juridiques de cette situation concernant le titre invoqué constituerait un manquement au devoir de loyauté de la société Sanofi.

Sur le principe de proportionnalité

Les sociétés appelantes soutiennent encore que le requérant devait fournir des indices permettant un contrôle de proportionnalité dès lors qu’il importe de ne pas paralyser toute activité commerciale concurrentielle et de préserver des informations confidentielles sans rapport avec la contrefaçon alléguée.

Toutefois, il ne peut être considéré, alors que les requêtes précisaient que la société Mylan représentait le titulaire de l’AMM pour la France, que le fait d’avoir annoncé publiquement dans un communiqué de presse du 27 mars 2018 que cette AMM communautaire avait été obtenue, et qu’il était prévu, en collaboration avec une société étrangère, une commercialisation par 'Mylan’ au second semestre 2018 notamment en Europe, ne constituait pas un indice suffisant permettant de rendre vraisemblable le fait qu’ait été prévue et organisée la distribution du stylo injecteur en France par les sociétés Mylan même si aucune commercialisation n’y était encore intervenue et si le communiqué ciblait de manière générale l’Europe ou divers marchés de l’Europe sans viser précisément la France, ni au demeurant aucun autre pays européen .

Il était en outre mentionné dans le communiqué précité, invoqué à l’appui des requêtes, l’existence d’un 'duo’ de 'Mylan’ avec la société Biocon, laquelle commercialisait le stylo Basalog One dont la société Sanofi soumettait au juge des requêtes la comparaison avec le stylo du Semglee, en se fondant sur la notice du médicament et le mode d’emploi du stylo.

La société Sanofi fournissait ainsi des informations pouvant, nonobstant l’absence de début de commercialisation notamment en France, permettre d’apprécier l’intérêt de rechercher dans l’établissement situé à Meyzieu, présenté comme le centre de conditionnement des boites de médicaments Mylan pour le marché français, ainsi qu’aux sièges sociaux des sociétés Mylan situés en France (Saint-Priest et Paris) des éléments de preuve de l’existence d’une contrefaçon et, partant, d’apprécier si des mesures de saisie- contrefaçon n’excédaient pas le but probatoire invoqué, à savoir la

constatation 'de la matérialité, de l’origine, de la consistance et de l’étendue de la contrefaçon’ telle qu’alléguée.

Enfin, la loi permet de faire constater une atteinte portée à une demande de brevet publiée ou notifiée au tiers à l’encontre duquel un requérant entend obtenir une autorisation de saisie-contrefaçon.

Si en l’état des procédures citées dans les requêtes, la portée du brevet n’était pas nécessairement définitivement fixée il était bien précisé qu’était en cause le stylo Semglee lequel serait identique au stylo Basalog One et qu’était invoquée la mise en œuvre supposée dans ce stylo 'de chacune des caractéristiques de la revendication délivrée’ et de 'chacune des caractéristiques ajoutées à la revendication 1 telle que maintenue par la division d’opposition et faisant l’objet de la demande de limitation’ du brevet européen.

Il ne saurait dès lors être considéré que les mesures autorisées le 8 juin 2018 seraient disproportionnées au regard du but poursuivi, à savoir établir l’existence d’actes de contrefaçon susceptibles d’exister au jour de la requête, étant rappelé que les opérations de saisie contrefaçon sont toujours réalisées sous la responsabilité de celui qui a obtenu l’autorisation d’y procéder et qu’il appartiendra au juge du fond d’apprécier si les éléments saisis permettent, ou non, de caractériser l’existence d’actes de contrefaçon en France.

Il s’infère du sens de la présente décision que l’ordonnance entreprise doit être confirmée en ce qu’elle a rejeté les demandes de rétractation des trois ordonnances du 8 juin 2018.

Sur les autres demandes

Les sociétés Mylan demandent la restitution des éléments saisis, contestant encore la décision entreprise en ce qu’elle n’a pas ordonné le maintien de toutes les pièces saisies au sein des études des huissiers instrumentaires ni fait droit à leur demande de non utilisation des dites pièces à l’étranger dans le cadre d’autres procédures.

Il n’est pas discuté qu’aucun document n’a été saisi au cours des opérations réalisées au siège de la société Mylan Médical.

Le premier juge a exactement rappelé quels étaient les éléments saisis à l’encontre de la société Mylan à Saint-Priest et à Meyzieu placés sous scellés par les huissiers instrumentaires (pages 12 et 13 du jugement).

Il sera relevé qu’il n’est pas sérieusement contesté que ces documents concernent bien le stylo d’injection litigieux, qui reproduirait un stylo injecteur commercialisé hors de l’Europe, et il ne peut être considéré que ces éléments ne présenteraient pas d’utilité au regard des informations fournies (quantité de produit insérée dans le stylo,

conditionnement, assemblage du stylo, réseaux d’approvisionnement et de distribution de ce stylo) pour la défense des droits de la société Sanofi dans le cadre d’une action en contrefaçon de son brevet sur le territoire français.

Enfin si des noms de salariés ou des références internes peuvent apparaître il n’est nullement démontré qu’il s’agirait d’éléments confidentiels susceptibles de conférer un avantage concurrentiel excédant la nécessité d’obtenir des moyens probatoires pour agir en contrefaçon d’un brevet couvrant un dispositif d’administration de médicament ainsi que le procédé de fabrication du dit dispositif.

Il n’est pas plus justifié de la nécessité de mise sous séquestre de ces éléments jusqu’à l’obtention d’un prix de remboursement du Semglee ni partant de modification des ordonnances du 8 juin 2018.

La décision entreprise a justement pu retenir que les documents en cause se rapportant au produit argué de contrefaçon devaient être remis au saisissant, la société Sanofi, ce qui a été fait en exécution cette décision.

L’ordonnance dont appel sera en conséquence confirmée de ces chefs.

Le premier juge a cependant exclu de la remise des pièces un courrier daté du 9 avril 2018 au motif qu’aucun contrôle de proportionnalité ne pouvait être opéré pour ce document.

Il ressort des écritures d’appel ( pages 70 à 72, §237,240 et 242) des sociétés Mylan que cette pièce (annexe SP 7) ne contient en fait aucun élément autre que ceux fournis par d’autres documents, dont la cour a admis que la remise n’excédait pas les nécessités de la défense des droits de la société Sanofi ou qu’ils ne présentaient pas un caractère confidentiel imposant leur placement sous scellé.

Il n’y a donc pas lieu d’exclure cette annexe 7 de la remise de pièces ordonnées au profit de la société Sanofi et l’ordonnance dont appel sera infirmée sur ce point.

Le premier juge a par ailleurs exactement retenu qu’il n’y a pas lieu d’interdire de communiquer des moyens de preuve régulièrement obtenus en France dont le contenu peut être vérifié au soutien d’autres actions à l’étranger sur la contrefaçon alléguée, étant observé qu’il a été précédemment retenu que les autorisations de saisies- contrefaçons ont été loyalement obtenues et ne contreviennent pas au principe de proportionnalité.

Il ne saurait être considéré que des éléments saisis aux fins d’établir une atteinte aux droits de propriété en France ne pourraient pas ensuite être utilisés dans d’autres instances en contrefaçon du stylo

en cause à l’étranger, aux risques et péril du saisissant, en application des dispositions de la loi n°80-538 du 16 juillet 1980.

À cet égard, il sera ajouté qu’aucun élément ne permet de suspecter une utilisation à d’autres fins que la poursuite de la contrefaçon ou la prévention d’une commercialisation du stylo injecteur en cause, susceptibles de ne pas respecter le principe de proportionnalité, alors que des actions à l’étranger sont actuellement en cours.

La décision entreprise sera dès lors confirmée en ce qu’elle a rejeté ce chef de prétention.

Il résulte de ce qui précède qu’il n’y a pas lieu d’examiner les demandes de la société Sanofi formées à titre subsidiaire, en cas de mise sous séquestre, qui s’avèrent sans objet.

PAR CES MOTIFS.

Statuant dans les limites de l’appel et de l’appel incident,

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’elle a excepté de la remise à la société Sanofi des pièces placées sous scellés par les huissiers de justice au cours des saisies- contrefaçons opérées à l’encontre de la société Mylan la pièce constituant l’annexe 7 « courrier à en-tête de MYLAN, émanant de Madame Anne Y [directeur général de MYLAN SAS], daté du 9 avril 2018 » ;

Et statuant à nouveau du chef ainsi infirmé,

Ordonne la remise à la société Sanofi-Aventis Deutschland GmbH de la pièce constituant l’annexe 7 « courrier à en-tête de MYLAN, émanant de Madame Anne Y [directeur général de MYLAN SAS], daté du 9 avril 2018 » placée sous scellés lors des opérations de saisie- contrefaçon diligentées à l’encontre de la société Mylan SAS à Saint- Priest ;

Rejette toutes autres demandes des parties contraires à la motivation ;

Condamne in solidum les sociétés Mylan SAS et Mylan Médical SAS aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, et, vu l’article 700 dudit code, les condamne in solidum à verser à ce titre à la société Sanofi-Aventis Deutschland GmbH une somme complémentaire totale de 3 000 euros pour les frais irrépétibles d’appel.

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