Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 5 mai 2021, n° 18/07614

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 3, 5 mai 2021, n° 18/07614
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/07614
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Melun, 28 mai 2018, N° 16/00690
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le

 : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 3

ARRET DU 05 MAI 2021

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/07614 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B54OI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mai 2018 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MELUN – RG n° 16/00690

APPELANTE

SAS PROLIANS LOGISTIQUE NORD

[…]

[…]

Représentée par Me Julie BEOT-RABIOT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0107

INTIMÉ

Monsieur H X

[…]

[…]

Représenté par Me Stéphanie THIERRY LEUFROY, avocat au barreau de MEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Février 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Fabienne ROUGE, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame ROUGE Fabienne, Président de chambre

Madame MENARD Anne, Présidente de chambre

Madame MARMORAT Véronique, Présidente de chambre

Greffier, lors des débats : Mme Samia BOUGUEROUCHE

ARRÊT :

—  CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Fabienne ROUGE, Présidente de chambre et par Najma EL FARISSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur H X, embauché à compter du 07/11/2013 par la SAS PROLIANS LOGISTIQUE NORD en qualité de responsable de Plateforme, statut cadre, niveau VIII, échelon 1, a été licencié par lettre en date du 15/11/2016, énonçant les motifs suivants :

« Nous faisons suite à l’entretien préalable s’étant déroulé le 17 octobre 2016 dernier ainsi qu’à l’entretien, prévu par les dispositions de l’article 27 de la convention collective nationale des cadres des commerces de quincaillerie, s’étant déroulé le 24 octobre 216, et vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave, pour l’ensemble des motifs que nous vous avons exposés et que nous vous rappelons ci-après.

Vous avez été embauché au sein de notre société à compter du 7 novembre 2013 et exercez en dernier état les fonctions de responsable de plate-forme. Vous êtes à ce titre, notamment en charge des équipes de la plateforme logistique. Il vous appartient donc de manager l’équipe exploitation placée sous votre responsabilité pour qu’elle réalise les missions de réception, préparation, contrôle et expédition dans le respect de chacun.

Or nous avons eu récemment à déplorer de votre part des attitudes ou comportements que nous ne saurions tolérer.

Nous avons en effet constaté que vous rencontriez de réels problèmes de management adoptant à l’égard du personnel féminin de vos équipes, un comportement irrespectueux et agressif et plus grave un comportement sexiste. Comportement sexiste que vous avez également adopté envers le personnel féminin de la plateforme qui ne vous est pas rattaché hiérarchiquement. Vos agissements ont été portés à notre connaissance courant octobre par plusieurs collaboratrices de notre société. Lors de l’entretien vous avez clairement exprimé le fait que vous vous attendiez à cela et que vous aviez pris les mesures nécessaires pour vous protéger de telles accusations. Vous nous avez clairement indiqué que vous aviez enregistré les conversations que vous aviez pu avoir avec le personnel féminin. Vous avez même répondu 'c’est une chose de dire qu’un manager est directif c’en est une autre de dire qu’il vous a menacé d’une claque si vous ne sortez pas du bureau'. Au demeurant les propos que vous avez tenu envers une collaboratrice n’était pas une claque mais 'mon poing dans la figure'. Terme que vous n’avez pas réfuté avoir tenu. Ce type d’attitude totalement proscrite est intolérable.

De plus lors de l’entretien, vos propos ont été à la limite de la menace envers votre supérieur. Votre attitude ne peut que nous conforter dans la décision que nous prenons et justifie à elle seule la rupture de votre contrat de travail.

Par ailleurs, il vous a également été reproché plusieurs manquements dans l’exercice de vos missions notamment en termes d’organisation et de contrôle. Ces manquements avaient déjà été soulignés lors de votre entretien d’évaluation du 13 novembre 2015 et des objectifs clairs de progression ont été fixés sur votre fiche d’objectifs 2016, validée et signée par vous le 5 février 2016. A savoir un manque de maîtrise de l’outil LM7 et ce malgré l’accompagnement qui vous a été dispensé et les différentes propositions d’aide auxquelles vous n’avez pas répondu. Ce à quoi vous avez répondu : ' il est sûr que je n’ai pas votre compétence LM7".

Concernant les problèmes d’organisation et de contrôle que nous avons eu à constater; pour toute réponse vous vous retranchez derrière le fait que l’absorption du périmètre de la plateforme sud ouest a généré une hausse d’activité, que du personnel était absent et que des intérimaires ne pouvaient les remplacer, ainsi que derrière le dysfonctionnement de la cercleuse de fin de chaîne. Vous avez même sous entendu que ce dysfonctionnement aurait été dû à une intervention humaine et précisé que vous ne portiez pas d’accusation sans preuve. Vous vous êtes donc contenté de contester sur le principe l’ensemble des reproches qui vous ont été exposés sans pour autant apporter de réelles explications au soutien de votre contestation, votre comportement étant à la limite de la suffisance et vos propos tendancieux'.

Son activité relevait de la convention collective de commerces de quincaillerie, fournitures

industrielles, fers, métaux et équipement de la maison (IDCC 731-brochure 3311).

Monsieur H X a saisi le Conseil de Prud’hommes, en vue de contester son licenciement et solliciter le paiement de différentes sommes.

Par jugement rendu par le 29 mai 2018, le Conseil de Prud’hommes de MELUN a jugé que le licenciement de Monsieur X était dépourvu de cause réelle et sérieuse, a fixé son salaire de référence à la somme de 3850€ et a condamné la Société PROLIANS LOGISTIQUE NORD à lui payer les sommes suivantes :

—  46.200 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, :

—  11.550 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

—  1.155 € au titre des congés payés afférents au préavis,

—  2.310 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

—  4.595,18 € à titre de rappel de salaire du 10 octobre au 15 novembre 2016,

—  459,52 € à titre de congés payés afférents , avec intérêts au taux légal

—  1.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux dépens

La SAS PROLIANS LOGISITIQUE NORD en a interjeté appel.

Par conclusions récapitulatives déposées par RPVA , auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société SAS PROLIANS LOGISITIQUE NORD demande à la cour d’infirmer le jugement , de dire le licenciement pour faute grave bien fondé, de débouter Monsieur X de I’intégralité de ses demandes à ce titre et de le condamner aux dépens.

Par conclusions récapitulatives déposées par RPVA, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens Monsieur H X demande à la cour de confirmer le jugement, de juger que les condamnations porteront intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes de Meaux, de le réformer sur le montant et de condamner la SAS PROLIANS LOGISTIQUE NORD à lui régler la somme de 69.300 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, et celle de 3.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour l’instance d’appel.

La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des

prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

MOTIFS :

Sur la faute grave

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et justifie son départ immédiat. L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve. A défaut de faute grave, le licenciement pour motif disciplinaire doit reposer sur des faits précis et matériellement vérifiables présentant un caractère fautif réel et sérieux.

Monsieur X soutient qu’il a été victime d’un accident du travail le 30 juin 2016

Il a alors dénoncé les dysfonctionnements de la structure : manque de personnel et défaut de respect des règles de sécurité sur la plateforme et il estime que son licenciement est une réponse à cette remise en cause.

La société PROLIANS verse aux débats les attestations de salariées se plaignant du comportement sexiste de Monsieur X.

Les attestations toutes datées des mois de février et mars 2017 de Mesdames Y, Z, A et E mentionnent des faits précis détaillés dont certains remontant à plusieurs années. Toutes décrivent des attitudes sexistes de la part de Monsieur X ainsi qu’une ambiance pesante qui s’est poursuivie au cours des années.

Madame Z indique en avoir parlé à la médecine du travail en mars et juillet 2016 et à Monsieur C au retour de Monsieur D qui avait été en arrêt de travail. Madame E déclare en avoir parlé à Monsieur C début octobre 2016 , Madame Y dit en avoir parlé à la médecine du travail en avril 2016 , en raison de poussées de tension artérielle et en avoir parlé en septembre 2016 à Monsieur C.

Madame A atteste que celui-ci cherchait la confrontation, qui engendrait des altercations violentes. Ainsi celui-ci lui avait dit 'vous sortez de mon bureau avant que je vous mettre mon poing dans la figure'. Ce grief spécifique repris dans la lettre de licenciement est démontré par ce témoignage.

Madame E déclare qu’il lui a mis les mains sur le bas des hanches alors qu’elle se trouvait sur un escabeau.

Ces quatre salariées relatent l’une que Monsieur X lui a déclaré 'ce n’est pas une tenue décente vous allez me les perturber' que sur une palette de papier qu’elles avaient demandée Monsieur X avait inscrit 'aller les grosses'; qu’avec un geste qualifié selon les attestations d’obscène ou de douteux il avait déclaré 'ça va reluire'. Par ailleurs toutes déclarent qu’il avait cessé de leur dire bonjour et qu’elles appréhendaient de le voir.

Les précisions apportées sur l’information faite au médecin du travail de leurs difficultés avec ce salarié apporte un crédit certain à ces attestations. Il ne peut être déduit de leur silence que celles-ci n’ont apporté qu’une importance très relative au comportement de Monsieur X comme le mentionne le Conseil de Prud’hommes.

S’il est surprenant que ces salariées aient attendu septembre ou octobre 2016 pour se plaindre des remarques et de l’ attitude sexiste caractérisée de Monsieur D, il ne peut être tiré

argument de ce silence pour déconsidérer ces témoignages.

Il résulte de ces témoignages que le remplacement de Monsieur X par Monsieur C lors de l’arrêt de travail de Monsieur X leur a permis de prendre conscience de ce qu’elle subissait et de le dénoncer en raison de la crainte du retour de ce dernier.

Les attestations de Messieurs F, I J et G indiquant dans les mêmes termes que Monsieur X était respectueux des collaborateurs et collaboratrices sont imprécises et ne contredisent pas les évènements précis mentionnés dans les attestations des salariées, qui ont pu et dû intervenir en l’absence de témoins.

Le comportement sexiste de Monsieur X est établi ainsi que son impact sur le bien être des salariées.

Ce seul élément constitue une faute grave qui justifie le licenciement sans indemnités de Monsieur X.

Le jugement du conseil de prud’hommes sera infirmé en totalité.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement du Conseil de prud’hommes en toutes ses dispositions

Dit la faute grave établie et le licenciement justifié par cette faute grave

Déboute Monsieur X de l’ensemble de ces demandes

Condamne Monsieur X aus dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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