Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 14 janvier 2021, n° 18/08521

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 7, 14 janv. 2021, n° 18/08521
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/08521
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Créteil, 28 mai 2018, N° 14/01108
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le

 : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 7

ARRET DU 14 JANVIER 2021

(n° ,6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/08521 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6CAH

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mai 2018 -Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de CRETEIL – RG n° 14/01108

APPELANTE

Madame Y X

[…]

94340 D LE PONT

Représentée par Me Catherine LOUINET-TREF, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 215

INTIMEE

EPIC C D LE PONT HABITAT en liquidation, pris en la personne de son liquidateur, Monsieur A B, Directeur des études économiques et financières de la Fédération Nationale des Sociétés Anonymes et Fondations d’HLM, sis […].

[…]

94345 D LE PONT

Représentée par Me Laurent PARRAS, avocat au barreau de PARIS, toque : C0684

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Novembre 2020, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat, entendu en son rapport, a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre,

Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de Chambre,

Madame Bérengère DOLBEAU, Conseillère.

Greffier, lors des débats : Madame Lucile MOEGLIN

ARRET :

—  CONTRADICTOIRE,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre et par Madame Lucile MOEGLIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Par contrat d’apprentissage du 12 février 2009, Mme X a été embauchée par l’établissement public local à caractère industriel ou commercial C D le pont habitat (C) en qualité de secrétaire. La relation de travail s’est poursuivie par la conclusion d’un contrat à durée indéterminée à temps plein le 1er septembre 2009.

Par courrier du 22 août 2011 réitéré le 31 août suivant, Mme X a notifié à son employeur sa démission, la salariée ayant souhaité effectuer son préavis jusqu’au 2 septembre 2011.

L’C et Mme X ont conclu deux contrats de professionnalisation successifs, le premier pour la période du 19 septembre 2011 au 31 aout 2012 et le second du 1er septembre 2012 au 31 aout 2013.

Le 8 septembre 2013, l’C a indiqué à Mme X que leur relation contractuelle prendrait fin au 31 aout 2013.

Mme X a saisi le Conseil de prud’hommes de Créteil le 12 mai 2014 de demandes de nature salariale et indemnitaire.

Par jugement du 29 mai 2018, le conseil de prud’hommes a :

— débouté Mme X de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de l’C D le pont habitat ;

— condamné Mme X à payer à C D le pont habitat la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— laissé les dépens éventuels à la charge de Mme X ;

Pour statuer ainsi, le conseil a jugé que Mme X avait émis le souhait de bénéficier d’une formation qualifiante en choisissant la voie du contrat de professionnalisation après avoir été informée de l’impossibilité de conclure un tel contrat tout en conservant son contrat à durée interminée. Le conseil en a déduit que la volonté de démissionner de Mme X était indiscutablement claire et non équivoque d’autant plus que la salariée avait réitéré sa volonté de démissionner par un courrier en date du 31 aout 2011 alors qu’elle avait déjà émis cette volonté une première fois par un courrier du 22 aout 2011.

Mme X a interjeté appel du jugement le 7 juillet 2018.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions transmises par la voie électronique le 27 septembre 2018, Mme X conclut à l’infirmation du jugement et elle demande à la cour de :

— juger que la relation contractuelle entre les parties s’est poursuivie sous le régime du contrat de travail à durée indéterminée depuis le 1er septembre 2009 ;

— condamner en conséquence l’C à lui payer les sommes suivantes :

— rappel de salaires : 13 788,80 €

— congés payés afférents : 1 378,88€

— indemnité compensatrice de préavis : 2 860,44€

— indemnité compensatrice de congés payés afférents : 286,04€

— indemnité conventionnelle de licenciement : 1 638,79€

— indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 25 750 €

—  2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel

— ordonner la remise sous astreinte de l’attestation Pôle Emploi, du certificat de travail et des bulletins de paie d’octobre 2011 à août 2013 conformes à la décision à intervenir ;

— condamner l’C aux entiers dépens.

Sur la rupture de son contrat de travail, elle soutient que sa démission ne résultait pas d’une volonté claire et non équivoque puisqu’elle souhaitait poursuivre sa relation contractuelle et suivre une formation de professionnalisation. Elle soutient que son employeur a préféré que cette formation s’inscrive dans le cadre d’un contrat de professionnalisation et qu’elle a donc dû démissionner.

Elle soutient que son contrat d’apprentissage doit être pris en compte pour le calcul de son ancienneté.

Sur l’indemnité conventionnelle de licenciement, elle fait valoir l’article 14 de la convention collective applicable.

Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, elle invoque la déloyauté de l’employeur et son préjudice personnel, professionnel et financier.

Sur le rappel de salaires, elle soutient qu’en préférant conclure un contrat de professionnalisation au lieu de lui permettre de bénéficier d’une période de professionnalisation, l’employeur l’a rémunérée à hauteur de 80% du SMIC.

Par conclusions transmises par la voie électronique le 3 décembre 2018, l’C, pris en la personne de son liquidateur M. A B, conclut à la confirmation du jugement et demande donc à la cour de :

— juger que la démission est claire et non équivoque, et produit tous ses effets ;

— débouter en conséquence Mme X de l’ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire, en cas d’infirmation du jugement et donc de démission affectée d’un vice du

consentement, elle demande à la cour de :

— juger que la rupture du contrat de travail est intervenu au jour de la démission de Mme X, augmentée de la durée du préavis réduit, soit au 2 septembre 2011 ;

— réduire à de plus juste proportions le quantum des demandes formées par Mme X.

En tout état de cause, elle demande à la cour de :

— débouter Mme X de sa demande au titre du rappel de salaire ;

— constater la régularité de la rupture du contrat de professionnalisation ;

— condamner Mme X à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner Mme X aux entiers dépens.

A titre principal, sur la rupture de la relation contractuelle, elle soutient que la démission de Mme X était valide puisque celle-ci souhaitant poursuivre sa formation a démissionné de son poste par courrier du 22 août 2011.

A titre subsidiaire, elle soutient que l’ancienneté de Mme X ne peut continuer à courir au-delà de la date de la rupture du contrat à durée indéterminée et que les contrats d’apprentissage conclus postérieurement à celui-ci ne sauraient être pris en compte pour décompter l’ancienneté de la salariée.

Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, elle soutient que Mme X ne justifie en rien d’un préjudice au 2 septembre 2011 puisqu’elle a conclu dès la mi-septembre un contrat de professionnalisation.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions déposées et développées oralement à l’audience.

L’instruction a été déclarée close le 7 octobre 2020.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la démission de Mme X

Lorsque le salarié démissionne en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture constitue une prise d’acte et produit les effets soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d’une démission.

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail. Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l’annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur et lorsqu’il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu’à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, le juge doit l’analyser en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d’une démission.

La conclusion d’un contrat à durée indéterminée à compter du 1er septembre 2009 n’est pas contestée par l’C et résulte du contrat produit aux débats par les deux parties de sorte que la demande formulée par la salariée tendant à voir constater l’existence d’une telle relation contractuelle n’a pas lieu d’être.

Par courrier du 22 août 2011, Mme X a informé son employeur de sa décision de démissionner de son poste de secrétaire de direction, précisant qu’elle souhaitait bénéficier d’une prise d’effet au 2 septembre 2011 et d’une dispense d’exécution de son préavis de manière à rendre son départ effectif à cette date. Elle a demandé à son employeur de mettre à sa disposition les documents de fin de contrat.

Par courrier du 23 août 2011, l’C a donné son accord pour une dispense d’exécution du préavis.

Un nouveau courrier identique au précédent a été adressée par la salariée à l’C le 31 août 2011.

Mme X reproche à l’C d’avoir souhaité que la formation qu’elle envisageait de suivre s’inscrive dans le cadre d’un contrat de professionnalisation.

L’échange de courriels du mois de juillet 2011 entre Mme X, la responsable administrative et ressources humaines et le service professionnalisation révèle que Mme X a été informée de l’impossibilité de bénéficier d’un contrat de professionnalisation, étant en contrat à durée indéterminée. Ceci démontre qu’initialement, la salarié voulait suivre une formation dans le cadre d’un contrat de professionnalisation. Ayant eu connaissance de cette restriction et de ce qu’elle ne pouvait prétendre qu’à une période de formation, Mme X a précisé, lors de cet échange, qu’elle allait se renseigner sur la période de professionnalisation auprès de l’organisme de formation, mais elle ne démontre pas avoir sollicité son employeur en ce sens. En revanche, elle verse elle-même aux débats la demande de réservation budgétaire présentée par l’C auprès de l’Opca, l’organisme de formation, dès le 4 août 2011 afin de lui permettre de suivre une licence en gestion des entreprises au sein de l’Institut d’administration des entreprises Gustave Eiffel d’une durée de 550 heures dans le cadre d’un contrat de professionnalisation.

La salariée, qui soutient que l’C lui a imposé de conclure un contrat de professionnalisation, ne verse aux débats aucune pièce en ce sens.

La conclusion ultérieure d’une convention tripartite de formation pour la mise en oeuvre d’un contrat de professionnalisation entre Mme X, son employeur et l’université de Paris Est Créteil pour la période du 19 septembre 2011 au 31 août 2012, et d’une seconde convention tripartite conlue pour la période du 1er septembre 2012 au 31 août 2013, atteste du choix de l’appelante en faveur d’un contrat de professionnalisation en toute connaissance des conséquences quant au sort du contrat à durée indéterminée signé deux ans auparavant.

En effet, la conclusion d’un contrat de professionnalisation est réservée aux personnes âgées de seize à vingt-cinq ans révolus afin de compléter leur formation initiale, aux demandeurs d’emplois de vingt-six ans et plus, aux bénéficiaires du revenu de solidarité active, de l’allocation de solidarité spécifique ou de l’allocation aux adultes handicapés ou aux personnes ayant bénéficié d’un contrat unique d’insertion, à ceux qui n’ont pas validé un second cycle de l’enseignement secondaire et qui ne sont pas titulaires d’un diplôme de l’enseignement technologique ou professionnel en application des articles L. 6325-1 du code du travail modifiés par la loi n°2009-1437 du 24 novembre 2009 alors applicable. Or, Mme X ne discute pas qu’elle ne relevait d’aucune de ces catégories limitativement énumérées.

Postérieurement à sa démission, Mme X n’a jamais contesté celle-ci ainsi qu’en atteste l’absence de courrier adressé à son employeur et n’a jamais reproché à ce dernier un quelconque manquement. En effet, la décision prise par la salariée ne découle que de l’application de la loi lui interdisant de

bénéficier d’un contrat de professionnalisation et de son désir personnel de suivre une formation dans ce cadre spécifique.

Il s’en déduit que Mme X a manifesté de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail afin de pouvoir bénéficier d’un contrat de professionnalisation de sorte qu’aucun manquement n’est imputable à l’employeur. Dès lors, il n’y a pas lieu de requalifier sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse. En conséquence, Mme X est déboutée de la totalité de ses demandes. Le jugement est confirmé.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;

CONDAMNE Mme X à payer à l’établissement public local à caractère industriel ou commercial C D Le Pont Habitat, pris en la personne de son liquidateur M. A B, la somme de 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme X au paiement des dépens d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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