Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 21 juin 2012, n° 11/01981

  • Combinaison des couleurs bleue et blanche·
  • Imitation de la méthode commerciale·
  • Imitation des documents commerciaux·
  • Similarité des produits ou services·
  • Pratiques commerciales trompeuses·
  • Clientèle identique ou similaire·
  • Logo de forme rectangulaire·
  • Contrefaçon de marque·
  • Différence phonétique·
  • Concurrence déloyale

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Pau, 1re ch., 21 juin 2012, n° 11/01981
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 11/01981
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Dax, 9 novembre 2010
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Dax, 10 novembre 2010
  • (en réquisition)
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : ALTERNATIVE ELEC
Liste des produits ou services désignés : Produits électriques
Référence INPI : M20120350
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PAU ARRET DU 21/06/2012

1re Chambre

Dossier: 11/01981 Nature affaire :

Demande tendant à faire cesser et/ou à sanctionner une contrefaçon ou une atteinte illicite au droit de l’auteur, à un droit voisin du droit d’auteur ou à un droit de producteur de base de données

ARRET prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 21 juin 2012, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

APRES DÉBATS à l’audience publique tenue le 20 Mars 2012, devant : Monsieur CASTAGNE, Conseiller, faisant fonction de Président Monsieur AUGEY, Conseiller, magistrat chargé du rapport conformément à l’article 785 du code de procédure civile Madame BENEIX, Conseiller assistés de Madame PEYRON, Greffier, présente à l’appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi. dans l’affaire opposant :

APPELANTE : SARL ALTERNATIVE ELEC […] 33000 BORDEAUX agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège représentée par la SCP MARBOT – CREPIN, avocats à la Cour assistée de Maître Denis M, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE : SARL NOVELEC […] 40230 SAUBRIGUES représentée par son gérant domicilié en cette qualité audit siège social représentée par la SCP PIAULT – LACRAMPE-CARRAZE, avocats à la Cour assistée de Maître Sandra A, avocat au barreau de PARIS sur appel de la décision en date du 10 NOVEMBRE 2010 rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DAX

La société Alternative Elec est une entreprise dont l’objet est la distribution d’une trentaine de produits électriques achetés en France et à l’étranger.

La SARL Novelec créée au mois de juin 2007 a pour objet la vente à des clients électriciens de 23 produits achetés à la société Jovean et Rogy. Considérant que la SARL Novelec emploie des moyens déloyaux et cherche à créer une confusion entre elle et la société Alternative Elec, cette dernière a engagé à son encontre une procédure en contrefaçon de marque et en concurrence déloyale devant le tribunal de grande instance de Dax par acte d’huissier du 23 novembre 2008. Par jugement du 10 novembre 2010, cette juridiction a débouté la SARL Alternative Elec de l’ensemble de ses demandes, et l’a condamnée à payer à la SARL Novelec une indemnité de 5 000 € pour frais irrépétibles. Par déclaration au greffe du 26 mai 2011, la SARL Alternative Elec a relevé appel de ce jugement.

Dans ses dernières écritures déposées le 21 décembre 2011, elle a conclu à la réformation de cette décision et demandé à la Cour d’interdire à la société Novelec de faire usage du logo apparaissant sur ses brochures et plaquettes publicitaires, sous astreinte de 500 € par jour de retard, de lui ordonner de détruire tous les prospectus, documents et plaquettes reprenant ledit logo, et elle a sollicité sa condamnation au paiement d’une somme de 75 000 € à titre de dommages-intérêts pour les faits de contrefaçon, et d’une somme du même montant pour les actes de concurrence déloyale, outre la publication de l’arrêt à intervenir, et le paiement d’une indemnité de 30 000 € pour frais irrépétibles. Elle a soutenu d’une part que la structure d’ensemble des deux signes est identique, que l’agencement des couleurs est le même, qu’ils se présentent sous la forme d’un cartouche rectangulaire allongée avec la même division en deux couleurs. Elle fait valoir d’autre part que la brochure publicitaire de la société Novelec est identique à la sienne puisque les produits référencés sont les mêmes, qu’ils sont présentés dans le même ordre, et sous les mêmes rubriques. Elle ajoute que la société Novelec a repris dans l’une de ses brochures les références internes à la concluante. Dans ses dernières écritures du 21 octobre 2011, la SARL Novelec a conclu à la confirmation du jugement et sollicité d’autre part la condamnation de l’appelante au paiement d’une somme de 15 000 € à titre de dommages-intérêts et d’une indemnité de 20 000 € correspondant à ses frais irrépétibles. Elle fait valoir d’une part que les signes ou dénominations qui dans le langage courant ou professionnel sont exclusivement la désignation nécessaire générique ou usuelle du produit ou du service, sont dépourvus de caractère distinctif et ne bénéficient pas de la protection édictée par le code de la propriété intellectuelle, et que tel est le cas du terme Elec qui constitue une marque générique désignant d’une façon générale le produit électricité.

Elle ajoute que la forme de son logo ainsi que les couleurs utilisées, à savoir le bleu et le blanc sont tout à fait banales et se retrouvent dans de très nombreuses marques de produits électriques, et ne peuvent pas plus constituer un signe distinctif d’identification du produit. En ce qui concerne les faits de concurrence déloyale, elle fait valoir que sa brochure ne comporte aucune mention des références figurant dans la brochure de la SARL Alternative Elec, que ce soit dans son ancienne version ou dans la nouvelle, et qu’il est évident que le contenu est identique, puisque les deux sociétés commercialisent les mêmes produits, que le format de la plaquette est le plus banal, et que la classification des produits a seulement pour objet de rendre la plaquette plus lisible. L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 février 2012.

Motifs de l’arrêt 1. sur la contrefaçon de marque. L’article 713-3 du code de la propriété intellectuelle dispose que : « sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public : a) la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits similaires ou services similaires à ceux désignés dans l’enregistrement ; b) l’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement. Cet article doit être interprété à la lumière de l’article 5 paragraphe 1 de la directive numéro 89/104 conformément à l’obligation d’interprétation conforme qui pèse sur le juge national.

Cela signifie :

- que la preuve de la contrefaçon repose sur l’établissement d’un risque de confusion, c’est-à-dire le fait que le public puisse croire que les produits en cause proviennent de la même entreprise ou bien d’entreprises liées économiquement ;

- que les tribunaux doivent prendre en compte plusieurs facteurs, et caractériser une certaine interdépendance entre les facteurs, notamment la similitude des marques et celle des produits ou services désignés. Il convient donc d’analyser les différents critères permettant d’établir l’existence d’un risque de confusion :

- sur l’agent de référence du risque de confusion : en l’espèce, les deux entreprises ont pour objet la vente exclusivement à un public de professionnels de produits électriques ;

— sur la similitude entre les produits ou les services : il n’est pas contesté que les deux entreprises vendent des produits similaires par leur nature, leur composition, et leur destination ;

- sur la similitude entre les signes. Il convient de constater en premier lieu que les deux marques présentent une similitude visuelle résultant de la taille du logo, de sa configuration rectangulaire ainsi que des couleurs utilisées, mais il convient de relever également que ces deux marques n’ont pas eu recours à la même typographie. D’autre part la couleur bleue n’est pas exactement la même, ainsi que l’alternance entre les couleurs bleue et blanche. Il convient de noter par ailleurs que l’usage des couleurs bleue et blanche dans le logo de la marque est également pratiqué par les autres concurrents notamment EDF, et la plupart des marques concurrentes présentent leurs logos sous la forme d’un rectangle. Il existe donc une certaine similitude visuelle. Pour ce qui est de la similitude auditive, il y a lieu de remarquer que les deux marques comportent un suffixe commun à savoir « Elec », mais il est manifeste et non contesté que ce suffixe est très banal et qu’il est couramment utilisé chez les professionnels. En outre, le reste du vocable est phonétiquement différent et ne comporte pas le même nombre de syllabes. Il ressort donc de l’analyse de ces éléments que les ressemblances existant au niveau de l’utilisation des couleurs et du suffixe Elec sont insuffisantes pour pouvoir créer un risque de confusion chez des clients professionnels de l’électricité. En conséquence il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté les demandes présentées par la SARL Alternative Elec au titre de la contrefaçon de marque. 1. sur la concurrence déloyale. L’action en concurrence déloyale repose sur l’application de l’article 1382 du code civil et permet de sanctionner les actes contraires à la loyauté commerciale, qu’ils interviennent entre concurrents ou non concurrents, et elle constitue donc une limite au principe de la libre concurrence. Elle se distingue de l’action en contrefaçon en ce qu’elle ne constitue pas l’exercice du même droit et qu’elle ne tend pas aux mêmes fins.

L’action présentée sur ce fondement par la SARL Alternative Elec est donc recevable en la forme. La SARL Alternative Elec soutient que la SARL Novelec cherche délibérément à créer un risque de confusion avec son entreprise ou ses produits, de manière à

profiter illégitimement de sa réputation notamment en imitant son catalogue publicitaire.

- sur la plaquette publicitaire de la société Alternative Elec. La comparaison des plaquettes permet de mettre en évidence qu’elles ont un même format, à savoir une feuille A4 pliée en deux et que les mêmes produits y figurent. D’autre part le fait qu’elle comporte une même classification des produits n’est pas suffisant à caractériser un acte de concurrence déloyale dans la mesure où le format de la plaquette n’est pas original, que d’autre part la classification permet de la rendre plus lisible, et qu’enfin les produits sont spécifiques et destinés à la même clientèle et qu’il est donc pas surprenant que les produits d’appel soient au moins pour partie identiques.

- sur les actes de publicité mensongère. Il convient de relever que la SARL Alternative Elec ne rapporte pas le moindre élément de preuve à l’appui de ses allégations. Elle soutient que les mentions : livraison gratuite, et garantie 10 ans sont mensongères, mais elle n’en justifie pas car il lui faudrait pour cela établir que la SARL Novelec n’appliquerait pas les principes énoncés dans sa plaquette publicitaire. En outre, l’existence d’horaires identiques, la pratique de la gratuité de la livraison, ou de la livraison rapide à J + 1 ne sont pas suffisants pour caractériser une copie des méthodes commerciales qui sont très largement usitées dans ce domaine et également dans une très grande majorité des secteurs d’activités liées à la vente de produits ou de services. Dès lors le risque de confusion entre les deux entreprises n’est pas démontré.

- sur l’utilisation de la norme ISO. La SARL alternative Elec soutient que la référence à la norme ISO 9001 dans les brochures de la société Novelec est constitutive d’une pratique commerciale douteuse, au motif que la norme ISO certifie la qualité du management de l’entreprise alors que la norme IEC certifie les produits électriques. La brochure de la société Novelec précise que la fabrication des produits est accréditée de la norme ISO -9001 : 2000 IEC. Or, la société chinoise qui fabrique les produits commercialisés par la société Novelec est bien accréditée pour cette norme (cf pièce numéro 17 : certification de l’usine Jovean et Rogy). La société Novelec est donc en droit de faire état de cette accréditation dans ses documents commerciaux. En définitive, la Cour juge que la SARL Alternative Elec ne rapporte pas la moindre preuve permettant de caractériser des actes de concurrence déloyale.

Elle sera donc déboutée des fins de cette demande. Il y a lieu dès lors de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, y compris celle relative au rejet de la demande en dommages-intérêts présentée par la SARL Novelec qui ne rapporte pas de manière indiscutable la preuve du caractère abusif ou dilatoire de la procédure engagée à son encontre.

Par contre il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la SARL Alternative Elec à payer à la SARL Novelec une indemnité de 5 000 € pour frais irrépétibles. Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SARL Novelec les frais irrépétibles qu’elle a été contrainte d’engager en cause d’appel ; la SARL Alternative Elec sera condamnée à lui payer une nouvelle indemnité d’un montant de 3 000 €.

Par ces motifs

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort.

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Dax du 10 novembre 2010, et y ajoutant : Condamne la SARL Alternative Elec à payer à la SARL Novelec une indemnité de 3 000 € (trois mille euros) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties de leurs autres demandes. Condamne la SARL Alternative Elec aux dépens. Autorise les avocats de la cause qui en ont fait la demande à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l’avance sans avoir reçu provision.

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