Cour d'appel de Pau, 28 novembre 2013, n° 13/04485

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Pau, 28 nov. 2013, n° 13/04485
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 13/04485
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Pau, 5 février 2012, N° F11/00128

Texte intégral

XXX

Numéro 13/4485

COUR D’APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 28/11/2013

Dossier : 12/00770

Nature affaire :

Demande d’indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Affaire :

A X

C/

SAS NESTLÉ FRANCE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 28 Novembre 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 10 Octobre 2013, devant :

Monsieur CHELLE, Président

Madame ROBERT, Conseiller

Monsieur GAUTHIER, Conseiller

assistés de Madame HAUGUEL, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur A X

XXX

XXX

Comparant et assisté de Maître DARMENDRAIL de la SELARL DARMENDRAIL / SANTI, avocat au barreau de PAU

INTIMÉE :

SAS NESTLÉ FRANCE

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités audit siège

XXX

XXX

XXX

Représentée par Maître VIENNE, avocat au barreau de PARIS

sur appel de la décision

en date du 06 FÉVRIER 2012

rendue par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE PAU

RG numéro : F 11/00128

Monsieur A X est engagé par la société GUIGOZ le 22 octobre 1979 par contrat de travail à durée indéterminée en qualité de visiteur médical, lequel sera transféré à la société NESTLÉ FRANCE par application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail.

La relation de travail est soumise à la convention collective nationale dénommée « ALLIANCE 7 ».

Après convocation à un entretien préalable par lettre du 9 décembre 2010, la société NESTLÉ FRANCE notifie à Monsieur A X son licenciement pour faute grave par lettre en date du 13 janvier 2011.

Le 3 mars 2011, Monsieur A X dépose une requête auprès du Conseil de Prud’hommes de Pau aux fins de contestation de son licenciement et condamnation de l’employeur au paiement des indemnités de rupture et dommages-intérêts.

Par jugement en date du 6 février 2012, auquel la présente décision se réfère expressément en ce qui concerne le déroulement des faits et de la procédure, le Conseil de Prud’hommes de Pau :

— dit que le licenciement de Monsieur A X est un licenciement pour faute grave,

— déboute Monsieur A X de l’intégralité de ses demandes,

— condamne Monsieur A X à payer à la société NESTLÉ FRANCE la somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamne Monsieur A X aux dépens.

Monsieur A X interjette appel par lettre recommandée en date du 27 février 2012 du jugement qui lui est notifié le 9 février 2012.

Monsieur A X demande à la Cour de :

— dire que les faits reprochés ne constituent pas une faute grave,

— dire en conséquence qu’il est fondé à percevoir au titre de son licenciement, l’indemnité conventionnelle de licenciement, de préavis et de congés payés sur préavis ainsi que l’indemnité pour violation par l’employeur de l’obligation de formation professionnelle continue,

— condamner la société NESTLÉ FRANCE à lui payer les sommes suivantes :

93.756 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

12.525 € à titre d’indemnité de préavis,

1.252,50 € à titre d’indemnité de congés payés sur préavis,

10.000 € à titre d’indemnité pour violation par l’employeur de l’obligation de formation professionnelle continue,

— dire que l’ensemble des condamnations porteront intérêts au taux légal depuis la saisine du Conseil de Prud’hommes du 3 mars 2011,

— faire application des dispositions de l’article 1154 du code civil autorisant la capitalisation des intérêts,

— condamner la société NESTLÉ FRANCE à payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans des conclusions, déposées le 11 juillet 2013 et reprises oralement Monsieur A X soutient que le contrat de travail initial, toujours en vigueur lors du licenciement, prévoit le paiement d’une somme forfaitaire par jour de voyage passé en dehors de son centre d’attache, ce qui constitue un complément de rémunération établi sur la base du coût de la vie par jour de voyage.

Le seul élément déclenchant le paiement est donc uniquement le voyage et non le remboursement de frais réellement engagés.

L’état justificatif ne constitue qu’un simple récapitulatif des déplacements du mois.

La modification qui est intervenue en cours de contrat instituant un remboursement au réel pour les frais d’hôtel n’est pas opposable à Monsieur A X à défaut de signature d’un avenant.

S’il admet qu’il n’aurait pas dû produire des justificatifs d’hôtel inexacts, il n’avait ni l’intention, ni le sentiment de léser l’employeur ; en effet, les sommes lui ont été payées à l’occasion de « voyages » en Gironde dans le cadre du contrat de travail et n’ont jamais dépassé les montants prévus par le tableau de remboursement de frais unilatéralement fixés par l’employeur.

En supposant qu’il ait reconnu avoir utilisé l’en-tête de l’hôtel depuis début 2010 pour élaborer des fausses factures, alors qu’il rentrait chez lui ou était logé chez une cousine habitant Bordeaux, il cherchait avant tout à éviter un conflit avec son employeur.

De plus, l’employeur a été informé à compter du 9 décembre 2010 des faits qui lui sont reprochés or, la mise à pied conservatoire ne lui a été notifiée que le 4 janvier lors de l’entretien préalable.

De plus, le préavis lui a été payé ; la faute grave sera écartée et il est en droit de percevoir l’indemnité conventionnelle de licenciement et l’indemnité compensatrice de préavis.

Enfin, Monsieur A X soutient que l’étendue de la faute grave peut varier en fonction de divers éléments tels qu’en l’espèce, son ancienneté de 31 ans et 2 mois pour l’entreprise sans qu’aucun grief ne lui soit formulé et des entretiens annuels mettant l’accent sur ses atouts, son savoir-faire et ses compétences.

Son comportement a changé lorsque lui a été confié le département de la Gironde qui entraînait une surcharge de travail.

L’employeur ne justifie pas d’un quelconque préjudice.

L’employeur a violé son obligation de formation, ce manquement nuit à ses chances de retrouver un autre emploi ; il sollicite un dédommagement au titre de l’absence de formation.

La société NESTLÉ FRANCE demande à la Cour de :

— confirmer le jugement dont appel dans l’ensemble de ses dispositions,

— débouter Monsieur A X de l’ensemble de ses demandes,

— condamner Monsieur A X à verser à la société NESTLÉ FRANCE la somme de 9.145,10 € au titre des sommes indûment perçues,

— condamner Monsieur A X à verser à la société NESTLÉ FRANCE la somme de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Dans des conclusions écrites, déposées le 23 septembre 2013 et reprises oralement, la société NESTLÉ FRANCE soutient que le comportement de Monsieur A X est incontestablement constitutif d’une faute grave puisque ce dernier a falsifié le montant de factures de l’hôtel ALL SUITES HOME de Mérignac et a également créé de fausses factures pour les soirs où il ne dormait pas à l’hôtel, alors qu’il rentrait chez lui ou dormait chez sa famille à Pessac près de Bordeaux.

Monsieur A X a pleinement reconnu ces faits précisant lors d’un entretien avec son supérieur hiérarchique que cela durait depuis début 2010.

Monsieur A X a mis en place un véritable stratagème (création de fausses factures à l’aide d’une trame, utilisation d’un télépéage personnel, etc) afin de tromper son employeur et percevoir de manière récurrente pendant deux ans des remboursements indus.

Ce comportement a nui au bon fonctionnement et à l’image de l’entreprise, le salarié ayant perçu à son détriment 9.145,10 € à l’aide des fausses factures établies soit trois fois sa rémunération mensuelle fixe durant un peu moins de 24 mois.

Le manquement à l’obligation de loyauté de Monsieur A X est d’autant plus grave qu’il bénéficiait en sa qualité de visiteur médical d’une grande autonomie dans l’exercice de sa fonction et d’une importante ancienneté.

La déloyauté persistante de Monsieur A X est d’autant plus coupable qu’il n’hésite pas, au lendemain de son licenciement, à attenter à la réputation de la société auprès de ses clients.

La mise à pied conservatoire a été régulièrement notifiée immédiatement, à l’issue de l’entretien préalable qui a été reporté au 20 décembre 2010 à sa demande.

Si la société a commencé à avoir des doutes quant à sa loyauté suite à une visite de contrôle à l’hôtel de Mérignac, ce n’est que le 9 décembre lorsque l’établissement lui a remis une déclaration du nombre de nuitées passées par Monsieur A X à l’hôtel, qu’elle a pris conscience de la gravité des faits et a convoqué immédiatement le salarié.

Enfin ce n’est que lors de l’entretien préalable que Monsieur A X a confirmé les faits qui lui étaient reprochés, date à laquelle l’employeur a pu avoir la certitude du bien-fondé de ses griefs et également date à compter de laquelle le maintien dans l’entreprise de Monsieur A X est devenu impossible.

En tout état de cause, la mise à pied conservatoire n’est pas un préalable indispensable à un licenciement pour faute grave.

Mais de plus, le paiement de la mise à pied conservatoire n’empêche pas l’employeur de se prévaloir de la faute grave.

Enfin, la falsification était récurrente et s’est étalée au minimum sur deux années lui permettant de détourner un montant confirmé de plus de 9.145,10 € au préjudice de son employeur.

La prétendue modification du contrat de travail aux motifs de remboursement forfaitaire à l’origine du contrat est sans intérêt.

L’employeur reconnaît effectivement avoir substitué au versement forfaitaire un remboursement au réel des frais d’hôtel, cependant, dès l’embauche et jusqu’au licenciement, le remboursement des frais professionnels est conditionné à la production de justificatifs des frais de voyage.

Monsieur A X qui se targue d’une solide expérience et de bons résultats entend invoquer des manquements de la société à son obligation de formation continue.

Cependant, tout au long de sa carrière celui-ci a bénéficié de nombreuses formations mais de plus, il n’a jamais formulé la moindre demande à ce titre ni évoqué le moindre besoin d’adaptation, dès lors, qu’il bénéficiait effectivement d’une grande ancienneté, était expérimenté et maîtrisait les spécificités de ses fonctions ; Il sera débouté de cette demande.

À titre reconventionnel, Monsieur A X ne conteste pas le montant des sommes qu’il a détournées et qu’il s’était engagé à rembourser.

L’employeur est en conséquence en droit de solliciter le remboursement par Monsieur A X des sommes détournées outre les intérêts de retard depuis la date de leur versement et ce sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la notification de l’arrêt à intervenir.

Cette dernière disposition qui ne figure pas dans le dispositif des conclusions de la société NESTLÉ FRANCE a été reprise oralement à l’audience par son conseil.

SUR QUOI

Sur le licenciement :

La lettre de licenciement en date du 13 janvier 2011 qui fixe les limites du litige est libellée ainsi que suit :

« … Vous occupez le poste de visiteur médical au sein de la société NESTLÉ France depuis le 22 octobre 1979.

Vous êtes donc amené, dans le cadre de votre activité, à effectuer des déplacements professionnels et passer de nombreuses nuits à l’hôtel.

Le 26 novembre 2010, Monsieur Z, votre supérieur hiérarchique, s’est rendu à l’hôtel ALL SUITES HOME de Mérignac dans le cadre d’un contrôle de routine concernant vos notes de frais.

À cette occasion, Monsieur Z a rencontré la directrice d’exploitation de l’hôtel, Madame Y qui s’est montrée surprise du montant des factures présentées et a procédé à la vérification de celles-ci.

Le 9 décembre 2010, Madame Y remettait ainsi à Monsieur Z la totalité des facturations réellement émises à votre nom en 2009 et 2010, et réalisait une attestation par laquelle elle déclarait le nombre exact de nuitées et le montant afférent qui vous avait été facturé en 2009 et 2010.

Madame Y constatait également que les autres factures n’émanaient pas du système de facturation de l’hôtel.

En effet, par e-mail du 7 décembre 2010, vous avez reconnu avoir utilisé une trame de facturation ressemblant à celle de l’hôtel ALL SUITES HOME afin d’élaborer vous-même des factures pour obtenir des remboursements plus conséquents via vos notes de frais.

Vous avez également reconnu avoir présenté et fabriqué de fausses notes de frais lors de l’entretien préalable auquel nous vous avons convoqué.

Ainsi, par des manoeuvres délibérées et répétées, vous avez obtenu de la Société le remboursement de notes de frais sur la base de factures fictives et obtenu un défraiement supérieur à celui que vous auriez dû percevoir.

Vous avez ainsi perçu de la société, sur la base de fausses factures, un montant de 4.217,50 € pour l’année 2009 et de 4.927,60 € pour l’année 2010, soit un total de 9.145,10 €.

Vous avez ainsi non seulement contrevenu à votre obligation de loyauté à l’égard de la société, mais également nuit au bon fonctionnement de l’entreprise et porté atteinte à son image de marque et à sa réputation auprès de tiers, notamment auprès de l’hôtel ALL SUITES HOME de Mérignac.

Compte tenu de la gravité de vos agissements et de ses conséquences, votre maintien dans l’entreprise s’avère impossible.

Par conséquent, j’ai le regret de vous notifier par la présente, votre licenciement pour faute grave, sans indemnité de préavis ni de licenciement… ».

La faute grave dont la preuve appartient à l’employeur se définit comme un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis.

En l’espèce, il est reproché à Monsieur A X d’avoir, par des manoeuvres délibérées et répétées durant 2 années, obtenu de son employeur le remboursement de notes de frais sur la base de factures fictives et obtenu un défraiement supérieur à celui qu’il aurait dû percevoir, soit la somme totale de 9.145,10 €.

À la suite d’un contrôle effectué par le responsable hiérarchique du salarié, Monsieur Z, auprès de l’hôtel ALL SUITES HOME de Mérignac, au cours duquel, la directrice de l’établissement s’est étonnée du nombre de nuitées que Monsieur A X aurait passées dans l’établissement ; Monsieur Z adresse le 7 décembre à ce dernier un mail dans lequel il récapitule les déclarations faites par Monsieur A X sur ces faits, à savoir « Cela dure depuis début 2010. Je me suis servi de l’en-tête de l’hôtel ALL SUITES HOME pour élaborer des fausses factures ou les créer… ».

Monsieur A X répondra le même jour à ce courriel dans les termes suivants : « il est bien entendu aussi que je couchais très régulièrement à l’hôtel… Je comptais mettre fin à cette pratique qui m’était pesante avec l’ouverture prochaine de l’autoroute… j’espère pouvoir m’en expliquer tout en assumant mes responsabilités et ma bêtise… j’espère que ce seul faux pas en 31 ans de carrière, au vu du sérieux de mon travail et des résultats… ».

Monsieur A X reconnaît incontestablement les faits qui lui sont reprochés à savoir l’élaboration de fausses factures, qu’il qualifie d’une « erreur de comportement » dans ses écritures, en contestant seulement la qualification de faute grave, argumentant également d’une modification unilatérale par l’employeur du contrat de travail qui, à l’origine prévoyait un paiement forfaitaire par jour de voyage, pour imposer par la suite, un remboursement des frais réels plafonnés.

Cependant, si effectivement le contrat de travail initial mentionne que le paiement se fera sur une base forfaitaire établie d’après le coût de la vie par jour de voyages passés en dehors de son centre d’attache, il est également expressément stipulé que ces frais seront payés sur production d’un état justificatif adressé à la société GUIGOZ, alors employeur de Monsieur X.

Mais de plus, la modification des modalités de remboursement des frais ne justifie en rien la production de fausses factures par le salarié.

Monsieur A X conteste également la qualification de faute grave aux motifs que l’employeur a tardé dans la notification de la mise à pied conservatoire, par ailleurs, payée par l’employeur, et plus généralement dans la mise en oeuvre de la procédure de licenciement.

Le 26 novembre 2010, Monsieur Z, supérieur hiérarchique de Monsieur A X, se rend à l’hôtel ALL SUITES HOME de Mérignac dans le cadre d’un contrôle de routine concernant les notes de frais, il y rencontre la directrice qui s’étonne du montant des factures présentées et qui le 9 décembre 2010 remet à Monsieur Z la totalité des facturations réellement émises en 2009 et 2010.

Par lettre de ce même jour, le 9 décembre 2010, l’employeur convoque Monsieur A X à un entretien préalable fixé au 20 décembre 2010, date qui sera reportée à la demande de Monsieur A X au 4 janvier 2011.

À l’issue de l’entretien préalable du 4 janvier 2011, l’employeur notifie à Monsieur A X une mise à pied à titre conservatoire « compte tenu de la gravité des fautes » et lui notifiera son licenciement pour faute grave par lettre recommandée du 13 janvier 2011.

En conséquence, l’employeur a mis en oeuvre la procédure de licenciement le jour même de la réception des facturations de l’hôtel, a notifié à Monsieur A X la mise à pied conservatoire à l’issue de l’entretien préalable au cours duquel l’employeur a recueilli les observations du salarié.

Il ne peut être reproché à l’employeur d’avoir attendu l’entretien préalable pour notifier la mise à pied conservatoire, s’agissant d’un salarié ayant plus de 30 ans d’ancienneté.

Enfin, l’employeur qui entend se prévaloir d’une faute grave, n’est pas tenu de prononcer au préalable une mise à pied conservatoire mais de plus, il ne peut lui être fait grief d’avoir réglé la mise à pied conservatoire, ce qui constitue pour le salarié une mesure de faveur qui n’est pas incompatible avec le prononcé d’une faute grave.

En conséquence, l’employeur rapporte la preuve des manoeuvres délibérées du salarié, durant 2 années et consistant en la production de factures fictives et d’un montant falsifié afin d’obtenir de son employeur le remboursement de notes de frais pour un montant total de 9.145,10 €, ce qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a dit que le licenciement repose sur une faute grave et a débouté Monsieur A X de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail.

Sur la demande relative aux manquements de l’employeur à son obligation de formation continue :

Monsieur A X soutient que l’employeur a manqué à son devoir d’adaptation et de formation continue, réduisant ainsi ses possibilités de réinsertion rendant plus difficile la recherche d’un emploi.

En application des dispositions de l’article L. 6321-1 du code de travail, l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail , il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations, et peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, ainsi qu’à la lutte contre l’illettrisme.

Il ressort des pièces produites que Monsieur A X a d’une part, une grande expérience dans ses fonctions mais également un professionnalisme et des qualités professionnelles reconnues par les médecins visités ainsi que par son employeur de sorte que son parcours au sein de l’entreprise démontre que l’employeur a assuré son adaptation à son poste de travail et a veillé au maintien de ses capacités à occuper un emploi, en le faisant évoluer dans son métier.

Il ne peut de plus soutenir ne pas avoir été suffisamment formé pour solliciter un emploi dans une activité professionnelle différente de la sienne, étant précisé qu’il ne démontre pas avoir sollicité une formation à ces fins.

Sur la demande reconventionnelle de l’employeur :

La société NESTLÉ FRANCE sollicite à titre reconventionnel la condamnation de Monsieur A X au remboursement des sommes détournées à savoir la somme de 9.145,10 €.

Cependant, si un salarié qui encaisse des sommes pour le compte de son employeur avec l’obligation de les restituer à ce dernier peut être condamné à exécuter son obligation contractuelle sans qu’une faute lourde n’ait à être caractérisée, ce n’est pas le cas en l’espèce, les sommes dont l’employeur sollicite le remboursement consistant en des paiements de frais professionnels obtenus frauduleusement par le salarié.

La faute grave ne suffisant pas à engager la responsabilité pécuniaire du salarié à l’égard de l’employeur, la société NESTLÉ FRANCE sera déboutée de ce chef de demande.

Sur la demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société NESTLÉ FRANCE l’intégralité des frais engagés, il convient de lui allouer une indemnité de 1.000 €.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud’homale et en dernier ressort,

Reçoit l’appel formé par Monsieur A X le 27 février 2012 ;

Confirme le jugement du Conseil de Prud’hommes de Pau en date du 6 février 2012 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute Monsieur X de sa demande relative à la formation continue,

Déboute la société NESTLÉ FRANCE de sa demande reconventionnelle,

Condamne Monsieur A X à payer à la société NESTLÉ FRANCE la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur A X aux dépens.

Arrêt signé par Monsieur CHELLE, Président, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,

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