Cour d'appel de Pau, 5 décembre 2013, n° 12/01234

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Pau, 5 déc. 2013, n° 12/01234
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 12/01234
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Tarbes, 25 mars 2012

Texte intégral

CP/CD

Numéro 4646/13

COUR D’APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 05/12/2013

Dossier : 12/01234

Nature affaire :

Demande d’indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Affaire :

SA GROUPE APR

C/

Z A

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 05 Décembre 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 16 Octobre 2013, devant :

Madame X, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame HAUGUEL, greffière.

Madame X, en application des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Monsieur CHELLE, Président

Madame X, Conseiller

Monsieur GAUTHIER, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

SA GROUPE APR

prise en la personne de son représentant légal, agissant en qualité de PDG

XXX

XXX

Représentée par Maître BARNABA, avocat au barreau de PAU

INTIMÉ :

Monsieur Z A

XXX

XXX

Comparant et assisté de Monsieur Y, délégué syndical

sur appel de la décision

en date du 26 MARS 2012

rendue par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION DE DÉPARTAGE DE TARBES

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur Z A a été embauché par les Etablissements PENAUILLE le 22 octobre 2001 en qualité d’agent de propreté ASP1 suivant contrat à durée indéterminée, son lieu de travail était fixé à Soues chez Alstom, dont le chantier a été repris par la SA GROUPE APR à compter du 1er juillet 2005 et son contrat a été transféré conformément aux dispositions de l’annexe 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté, il a signé un avenant à son contrat initial le 27 juin 2005 qui reprenait la clause de mobilité qu’il contenait en la complétant.

Après avoir été convoqué par lettre à un entretien préalable au licenciement, il a été licencié par lettre du 13 septembre 2010 pour cause réelle et sérieuse et il a saisi le Conseil de Prud’hommes pour obtenir le paiement de dommages intérêts, la somme de 581,25 € au titre des jours de fractionnement des congés payés et 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Conseil de Prud’hommes de Tarbes, section activités diverses, par jugement contradictoire de départition du 26 mars 2012, auquel il conviendra de se reporter pour plus ample exposé des faits, des moyens et de la procédure a considéré que le licenciement est intervenu sans cause réelle et sérieuse, en conséquence, il a condamné la SA GROUPE APR à verser à Monsieur Z A les sommes de :

568 € au titre des jours de fractionnement des congés payés,

8.772,30 € au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

300 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

ordonner le remboursement à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées au salarié depuis son licenciement jusqu’au présent jugement, dans la limite de six mois d’indemnité de chômage,

— il a débouté les parties du surplus de leurs demandes et a condamné la SA GROUPE APR aux dépens de l’instance.

La SA GROUPE APR a interjeté appel de ce jugement le 10 avril 2012 dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées.

Les parties ont comparu à l’audience, la SA GROUPE APR par représentation de son conseil, Monsieur Z A était assisté de Monsieur Y, représentant syndical.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions déposées le 5 septembre 2013 et développées à l’audience, la SA GROUPE APR demande à la Cour de déclarer l’appel recevable, de réformer le jugement, de dire et juger que la mutation de Monsieur Z A constitue un simple changement des conditions de travail de ce dernier et que son refus de mutation constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement, de lui donner acte de sa proposition de payer une indemnité de congés payés pour un montant de 568 €, de condamner Monsieur Z A à payer la somme de 1.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La SA GROUPE APR fait valoir que le contrat initial de travail de Monsieur Z A indiquait comme lieu de travail Soues chez Alstom tout en précisant, que compte tenu des exigences de la profession du nettoyage, la mobilité était nécessaire et indispensable, de telle sorte, qu’il a accepté d’être affecté sur un autre site géographique dans la zone géographique des Hautes-Pyrénées ; qu’après la reprise par la SA GROUPE APR du chantier, le contrat a fait l’objet d’un avenant, il a été alors engagé en qualité d’agent qualifié de service échelon 2 A et il lui a été rappelé la clause de mobilité : « le salarié reconnaît que l’affectation ne constitue pas un des éléments essentiels de son contrat de travail. Les lieux et horaires de travail pourront être modifiés dans les cas suivants et variations suivantes : « perte ou nouveau chantier, contenu du cahier des charges, demande du client, remplacement d’un salarié absent, réorganisation de l’entreprise, modifications d’horaires ou planning, fermeture temporaire du chantier (vacances), sanction disciplinaire’ Toutefois en raison de la mobilité qu’impose la profession du nettoyage, le salarié signataire pourra être affecté sur tout autre chantier situé dans un rayon de 40 km autour de Tarbes », qu’il y a lieu d’interpréter de façon alternative.

Elle précise que le client chez qui travaillait le salarié ayant réduit ses prestations, il lui a été proposé à compter du 1er juin 2010 sa mutation sur d’autres sites, il a accepté une mise à disposition temporaire pour la période du 7 au 18 juin 2010 à la Caserne Bernadotte de Pau prolongée jusqu’au 9 juillet 2010, puis par courrier du 27 juillet 2010, il a été informé de son affectation au siège social à Lons pour une mutation définitive à compter du 1er septembre 2010 où il serait en charge du stock des produits, de la préparation de la gestion des commandes qu’il a refusée par courrier du 4 août 2010, à raison des frais engendrés par les déplacements, que n’ayant rien d’autre à lui proposer, elle s’est vu contrainte de lui adresser une convocation à un entretien préalable de licenciement ; que dans l’intervalle, elle lui a proposé le paiement d’une prime de poste de 100 € ainsi que les paniers qu’il a également refusés et le licenciement est intervenu le 13 septembre 2010 pour refus de mutation et non présentation à son poste de travail.

Il a effectué son préavis du 14 septembre au 14 novembre 2010, à compter du 11 octobre 2010, il a été affecté sur le site de la Poste Bastillac à Tarbes qui lui a été proposé, afin de parvenir à une solution amiable, par courrier du 29 octobre 2010 ainsi que partiellement sur les Résidences de Promologis, propositions qu’il encore refusées par courrier du 9 novembre 2010.

Elle fait valoir que le changement de localisation est intervenu dans le même secteur géographique qui constitue une modification des conditions de travail et non une modification du contrat de travail, que le juge départiteur s’est tenu à la seule distance de 40 km qui serait dépassée de 9 km, que la nouvelle affectation du salarié dictée par les nécessités et l’intérêt de l’entreprise que le salarié n’était pas en mesure de refuser au regard de ses engagements contractuels et de la particularité et des contraintes de la profession du nettoyage.

*******

Monsieur Z A, intimé, par conclusions déposées le 10 octobre 2013 et développées à l’audience demande à la Cour de confirmer le jugement dans toutes ses dispositions, de condamner la SA GROUPE APR à payer la somme de 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Monsieur Z A rappelle que le contrat initial du 22 octobre 2001 prévoyait que le travail serait effectué dans les Hautes-Pyrénées, qu’il a toujours travaillé à Tarbes, que lors de la reprise du chantier par la SA GROUPE APR l’avenant, qui a été soumis à sa signature et qu’il a accepté, reprenait la clause de mobilité du premier contrat dans la limite d’un rayon de 40 km autour de Tarbes, que s’il a accepté des chantiers provisoires hors périmètre, l’employeur a voulu lui imposer une mutation définitive qui change ses attributions, sa qualification, que d’agent de service, il devient gestionnaire de stocks, livreur, préparateur et gestionnaire des commandes à Lons situé à 51 km dans les Pyrénées-Atlantiques et lui faire signer une clause de mobilité de 40 km autour de Pau ; que c’est dans ces conditions qu’il a refusé le poste proposé considérant que cette proposition constituait une modification essentielle de son contrat de travail, que la proposition sur Tarbes n’était pas acceptable pour comprendre des amplitudes de 16 heures de travail de 5 heures à 21 heures avec cinq périodes de travail différentes dans la journée, alors que le code du travail interdit des amplitudes supérieures à 11 heures ; il a même été travaillé à Bordeaux pendant une semaine avec des journées de 10 heures de travail, 46 heures par semaine du 28 juillet au 2 octobre 2010 ; qu’il a constaté par ailleurs, que les embauches avaient eu lieu sur le site pendant la période de son préavis, il ajoute qu’à ce jour, il n’a pas retrouvé du travail et perçoit l’allocation d’aide au retour à l’emploi.

La Cour se réfère expressément aux conclusions visées plus haut pour l’exposé des moyens de fait et de droit.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La Cour examinera successivement les points litigieux au vu du dossier de la procédure, des éléments des débats et des pièces régulièrement produites au dossier.

Sur la recevabilité de l’appel :

L’appel formalisé dans les délais et formes requis est recevable.

Au fond,

Le paiement des jours de fractionnement n’est plus contesté par la SA GROUPE APR, il convient en tant que de besoin de confirmer la condamnation.

Sur la rupture du contrat de travail :

La lettre de licenciement du 13 septembre 2010 pour cause réelle et sérieuse qui fixe les limites du litige est fondée sur le refus de mutation de Monsieur Z A à titre définitif à compter du 1er septembre 2010 sur le poste situé au siège social de la société à Lons et la non présentation à son poste de travail le 1er septembre 2010.

Le contrat initial de travail du salarié indiquait comme lieu de travail Soues chez Alstom tout en précisant, que compte tenu des exigences de la profession du nettoyage, la mobilité était nécessaire et indispensable, de telle sorte, qu’il a accepté d’être affecté sur un autre site géographique dans la zone géographique des Hautes-Pyrénées étant précisé que Monsieur Z A habite à Tarbes.

La clause de mobilité reprise dans l’avenant du 27 juin 2005 signée lors de la reprise du chantier Alstom par la SA GROUPE APR est ainsi rédigée : « le salarié reconnaît que l’ (les) affectation (s) ne constituent pas un des éléments essentiels de son contrat de travail. Les lieux et horaires de travail pourront être modifiés dans les cas suivants et variations suivantes : perte ou nouveau chantier, contenu du cahier des charges, demande du client, remplacement d’un salarié absent, réorganisation de l’entreprise, modifications d’horaires ou planning, fermeture temporaire du chantier (vacances), sanctions disciplinaires. En cas de modification de cette répartition, Monsieur Z A devra être averti par lettre recommandée ou remise en mains propres 7 jours à l’avance. Toutefois, en raison de la mobilité qu’impose la profession du nettoyage, le salarié signataire pour être affecté sur tout autre chantier situé dans un rayon de 40 kms autour de Tarbes ».

La SA GROUPE APR expose que les deux alinéas de la clause sont alternatifs c’est-à-dire que dans le premier alinéa, les huit causes de mutation doivent être entendues dans la zone géographique du lieu du travail et que pour tous les autres cas, il ne pourra pas être affecté à un chantier situé au-delà du rayon de 40 km autour de Tarbes.

Or, les causes évoquées dans le 1er alinéa couvrent toutes les hypothèses d’une possible mutation et on ne voit pas très bien quels seraient les autres cas qui pourraient se présenter dans lesquels le 2e alinéa de la clause serait uniquement applicable ; l’employeur n’en donne aucun exemple de telle sorte, que les deux alinéas doivent s’interpréter de façon cumulative.

Il est constant qu’une clause de mobilité qui définit de façon précise la zone géographique d’application ne donne pas à l’employeur le pouvoir d’en étendre unilatéralement la portée, que dans la mesure où il n’est pas contesté que le siège de la SA GROUPE APR à Lons dans les Pyrénées-Atlantiques se situe à plus de 40 km de Tarbes, 49 km selon l’employeur, 51 km selon le salarié, il s’agit d’une modification essentielle du contrat de travail et non une modification des conditions de travail qui justifie le refus de Monsieur Z A de sa mutation définitive à Lons ; que l’avenant au contrat proposé modifiait par ailleurs, la clause de mobilité en remplaçant la mention 40 km autour de Tarbes par 40 km autour de Pau.

Le salarié n’avait aucune obligation d’accepter les postes proposés postérieurement à la lettre d’envoi de licenciement puisque le contrat était rompu.

Le licenciement est donc sans cause réelle ni sérieuse et le jugement sera confirmé.

Sur les dommages et intérêts sur le fondement de l’article L. 1235-3 du code de travail :

Monsieur Z A a neuf ans d’ancienneté dans l’entreprise au moment du licenciement, il percevait un salaire moyen de 1.462,05 €, il justifie d’une longue période de chômage, le Conseil de Prud’hommes lui a alloué la somme de 8.772,30 € soient l’équivalent de six mois de salaire dont il demande la confirmation et qui sera retenue.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Z A les frais par lui exposés et non compris dans les dépens, la Cour lui alloue à ce titre la somme de 500 €.

La SA GROUPE APR qui succombe en ses prétentions sera condamnée aux entiers dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu en matière sociale et en dernier ressort,

Déclare l’appel recevable,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf l’application de l’article L. 1235-4 du code du travail,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Y ajoutant,

Condamne la SA GROUPE APR à payer à Monsieur Z A la somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Le licenciement déclaré illégitime est sanctionné par l’article L. 1235-4 du code du travail, la Cour ordonne le remboursement par la SA GROUPE APR à Pôle Emploi des sommes versées au salarié au titre du chômage dans la limite de 3 mois,

Les sommes dues au titre des créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la notification de la saisine du Conseil de Prud’hommes à l’employeur,

Les sommes dues au titre des dommages et intérêts portent intérêts au taux légal à compter de la décision qui les fixe soit à compter de la décision rendue par le Conseil de Prud’hommes,

Condamne la SA GROUPE APR aux entiers dépens d’appel.

Arrêt signé par Monsieur CHELLE, Président, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,

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