Cour d'appel de Reims, 18 décembre 2013, n° 12/01992

  • Licenciement·
  • Critère·
  • Sociétés·
  • Salarié·
  • Employeur·
  • Secteur d'activité·
  • Ordre·
  • Délégués du personnel·
  • Chômage partiel·
  • Dommage

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Reims, 18 déc. 2013, n° 12/01992
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 12/01992
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Troyes, 24 juin 2012, N° F11/00042

Sur les parties

Texte intégral

Arrêt n°

du 18/12/2013

Affaire n° : 12/01992

XXX

Formule exécutoire le :

à :

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 18 décembre 2013

APPELANT :

d’un jugement rendu le 25 juin 2012 par le Conseil de Prud’hommes de TROYES, section industrie (n° F 11/00042)

Monsieur A B

XXX

XXX

XXX

représenté par la SELARL BRUN, avocat au barreau de REIMS

INTIMÉE :

SAS TIMBO

XXX

XXX

représentée par Me Eric MERGLEN, avocat au barreau de MULHOUSE

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Madame Martine CONTÉ, Président

Madame Guillemette MEUNIER, Conseiller

Madame Valérie AMAND, Conseiller

GREFFIER lors des débats :

Madame Françoise CAMUS, Greffier

DÉBATS :

A l’audience publique du 21 octobre 2013, où l’affaire a été mise en délibéré au 18 décembre 2013,

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame Martine CONTÉ, Président, et par Madame Françoise CAMUS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure

Monsieur A B, né le XXX, a été engagé à compter du 18 septembre 2000 en qualité d’agent de production par la société TIMBO PRODUCTEUR BED aux droits de laquelle vient la société TIMBO SAS, spécialisée dans la fabrication de literie et soumise à la convention collective de la fabrication de l’ameublement du 14 janvier 1986.

Sa rémunération mensuelle brute était en dernier lieu de 1.574,95 euros.

Après un entretien du 16 juin 2010, le salarié a été licencié par lettre du 28 juin 2010, pour motif économique dans les termes suivants :

'Notre société connaît une chute importante et continue de l’activité depuis 2007 selon détail ci-dessous.

Cette baisse d’activité est supérieure à notre capacité d’absorption que permet la modulation. En 2009, plus de 300 heures non réalisées ont été payées en raison de compteurs de modulation négatifs, et ce, malgré deux périodes de chômage partiel. Concernant cette année, une demande d’indemnisation au titre du chômage partiel a été déposée courant février afin de limiter l’impact de cette sous-activité. Malgré cela, le décalage entre l’activité de la société et les effectifs nous amène à supprimer 6 postes.

Ce motif nous amène à supprimer votre poste.

Comme nous l’indiquions dans la lettre de convocation à l’entretien préalable, aucune solution de reclassement n’a pu être trouvée, malgré notre recherche, ni dans notre structure ni dans les différentes sociétés du groupe.'

Contestant cette mesure, Monsieur A B a saisi le conseil de prud’hommes de Troyes pour voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et voir condamner la société TIMBO SAS à lui payer des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour le préjudice distinct résultant de la violation de l’ordre des licenciements.

Par jugement du 25 juin 2012, le conseil de prud’hommes de Troyes a débouté le salarié de l’ensemble de ses demandes ; il a considéré que les difficultés économiques de la société étaient avérées et que l’employeur avait satisfait à son obligation de reclassement en sollicitant les diverses sociétés du groupe en France et à l’étranger, et qu’on ne saurait reprocher à l’employeur de ne pas avoir sollicité les établissements de Cannes et Nice qui sont des sites de ventes et non des sites industriels de production de sommiers métalliques. Il a estimé que les critères de licenciement et leur pondération approuvés par les représentants du personnel avaient été respectés.

Monsieur A B a fait appel le 24 juillet 2012 de ce jugement notifié le 30 juin 2012.

Moyens et prétentions des parties

Par conclusions du 17 avril 2013, Monsieur A B demande à la cour d’infirmer le jugement et de dire son licenciement sans cause réelle ni sérieuse, de

condamner la société TIMBO SAS à lui payer, avec exécution provisoire, les somme suivantes :

37.798,80 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail (correspondant à 24 mois de salaires),

15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct tiré de la violation des critères d’ordre de licenciement,

2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions reçues au greffe le 16 août 2013, la société TIMBO SAS demande à la cour d’appel de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de condamner l’appelant aux dépens.

A l’audience du 16 octobre 2013, les parties ont développé oralement les conclusions susvisées auxquelles la cour fait référence pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties.

MOTIVATION

Sur le motif économique

Selon l’article 1233-3 du code du travail, la cause économique d’un licenciement s’apprécie au niveau de l’entreprise ou si elle fait partie d’un groupe au niveau du secteur d’activité.

En l’espèce, s’il résulte des différentes pièces comptables produites aux débats que la société SAS Timbo ayant pour activité la fabrication de sommiers a connu depuis 2007 des difficultés économiques qui se sont traduites par une baisse constante de son chiffre d’affaire et un résultat d’exploitation négatif (- 144.648 euros) au 31 décembre 2009 et également au 31 décembre 2010, il est également patent, comme le soutient le salarié que l’employeur ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l’existence de difficultés économiques au niveau du secteur d’activité du groupe auquel il appartient.

A cet égard, il n’est pas contesté et cela résulte des termes mêmes de la lettre du 4 juin 2010 (pièce 23) envoyée par le dirigeant du groupe suédois X Anders AB à la société Timbo que cette dernière appartient au groupe suédois composé d’au moins 33 sociétés implantées dans 22 pays.

Vainement l’employeur prétend-il voir limiter le périmètre d’appréciation des difficultés économiques aux deux seules sociétés implantées en France (la société Wifor et Y Z) en prétendant que son activité de fabrication de sommiers électriques serait spécifique et non commune à celle des sociétés du groupe suédois.

En effet, cette allégation n’est corroborée par aucun élément de preuve ; en réalité il ressort des pièces versées par le salarié (pièces 4 et 11) que X Anders développe, fabrique et commercialise des lits des matelas et des produits associés, ce dont il se déduit nécessairement un secteur commun, la fabrication de lits incluant celle de sommiers.

De surcroît c’est bien auprès de l’ensemble des filiales du groupe que la société Timbo a recherché un possible reclassement de Monsieur A B, admettant ainsi un secteur d’activité commun.

Or les difficultés économiques du groupe ne sont nullement démontrées par l’employeur ; les pièces produites par le salarié présentent au contraire le groupe X Anders en 2010 (pièce 11) comme générant un chiffre d’affaires de plus de 7 milliards de SEK.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, et en l’absence de preuve de l’existence de difficultés économiques à l’échelle du groupe, sur le même secteur d’activité, le licenciement de Monsieur A B sera déclaré sans cause réelle et sérieuse, sans qu’il soit besoin d’examiner comme surabondants les autres moyens du salarié pour contester le bien-fondé de son licenciement.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Au vu de son ancienneté dans l’entreprise (près de 10 ans) et de son âge (53 ans) au moment de son licenciement et de sa rémunération mensuelle (1.574,95 euros), le préjudice du salarié qui s’est inscrit comme agent commercial après son licenciement (pièce 17), puis a de nouveau bénéficié d’allocations d’aide au retour à l’emploi, sera intégralement réparé par l’allocation de la somme de 20.000 euros conformément à l’article L. 1235-3 du code du travail et Monsieur A B sera débouté du surplus des dommages-intérêts dont il ne justifie pas le bien-fondé.

En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d’ordonner le remboursement par la société TIMBO SAS à Pôle Emploi des indemnités chômage servies à Monsieur A B du jour de son licenciement jusqu’au jour de l’arrêt dans la limite de six mois d’indemnités.

Sur la violation des critères d’ordre du licenciement

A l’appui de sa demande, le salarié soutient que les critères d’ordre n’auraient pas été définis pour la réunion des délégués du personnel du 31 mai 2010 et verse à l’appui de ses allégations l’attestation d’une représentante du personnel.

Il ressort pourtant du procès-verbal de réunion des délégués du personnel que les critères proposés par l’employeur ont été retenus à la majorité de 4 voix pour, 1 contre (l’attestante).

A sa demande l’employeur a transmis l’ordre des critères au salarié et le nombre de points affectés à chacun des salariés de l’entreprise, par catégorie.

Au vu du tableau détaillant les points en fonction des critères retenus par les délégués du personnel produit par l’employeur, ce dernier justifie avoir respecté les critères d’ordre en ce qui concerne Monsieur A B.

Vainement celui-ci allègue-t-il une discrimination par l’âge : l’âge est un des critères légaux retenus régulièrement par l’employeur ; en outre l’accord de non-discrimination par l’âge en date d’avril 2010 invoqué par le salarié impose seulement à l’employeur le maintien de l’emploi des salariés de plus de 55 ans et ne s’appliquait donc pas à Monsieur A B, alors âgé de 53 ans.

Enfin, l’employeur justifie avoir procédé à une juste appréciation des compétences du salarié ainsi qu’en témoigne l’attestation du chef d’atelier en poste depuis 1987 et en mesure d’apprécier objectivement la valeur professionnelle de tous ses collaborateurs, y compris Monsieur A B.

Par suite, la décision déférée sera confirmée en ce qu’elle a débouté Monsieur A B de sa demande en dommages et intérêts pour violation des critères d’ordre des licenciements.

Sur les autres demandes

L’issue du litige commande de condamner la société TIMBO SAS aux dépens d’appel ainsi qu’à payer à Monsieur A B la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté Monsieur A B de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour violation des critères de licenciement ;

L’infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau :

Dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur A B ;

Condamne la société TIMBO SAS à payer à Monsieur A B :

—  20.000 euros de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne le remboursement par la société TIMBO SAS à Pôle Emploi des indemnités chômage servies à Monsieur A B du jour de son licenciement jusqu’au jour de l’arrêt dans la limite de six mois d’indemnités ;

Condamne la société TIMBO SAS aux dépens d’appel.

Le greffier, Le président,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Reims, 18 décembre 2013, n° 12/01992