Cour d'appel de Reims, 2 décembre 2015, n° 14/01128

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Reims, 2 déc. 2015, n° 14/01128
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 14/01128
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale d'Ardennes, 5 mars 2014, N° 21000055

Texte intégral

Arrêt n°

du 02/12/2015

RG n° : 14/01128

XXX

Formule exécutoire le :

à :

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 02 décembre 2015

APPELANTS :

d’un jugement rendu le 06 mars 2014 par le tribunal des affaires de sécurité sociale des Ardennes – Régime général (n° 21000055)

Maître AH A ès qualités d’administrateur de la société DEVILLE

XXX

XXX

représenté par l’AARPI MARVELL – AVOCATS – PARIS, avocat au barreau de PARIS

SELARL Q H prise en la personne de M. Q H, ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société DEVILLE

XXX

08000 CHARLEVILLE-MÉZIÈRES

représentée par l’AARPI MARVELL – AVOCATS – PARIS, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

FONDS D’INDEMNISATION DES VICTIMES DE L’AMIANTE, subrogé dans les droits des ayants-droit de AF L

XXX

XXX

XXX

représenté par Mme AJ AK-AL (Membre de l’entrep.) en vertu d’un pouvoir

Madame O P veuve L

XXX

XXX

XXX

représentée par la SCP LEOSTIC-MEDEAU, avocat au barreau des ARDENNES

Monsieur AB L

XXX

XXX

XXX

représenté par la SCP LEOSTIC-MEDEAU, avocat au barreau des ARDENNES

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADE DES ARDENNES

XXX

08000 CHARLEVILLE-MÉZIÈRES

représentée par Mme Stéphanie LADAM (Assistante aux audiences) en vertu d’un pouvoir

DÉBATS :

A l’audience publique du 05 octobre 2015, où l’affaire a été mise en délibéré au 02 décembre 2015, Monsieur AB LECLER, conseiller rapporteur, a entendu les plaidoiries en application de l’article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées, et en a rendu compte à la cour dans son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Martine CONTÉ, président

Monsieur AB LECLER, conseiller

Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Madame Bénédicte DAMONT, adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Martine CONTÉ, président, et Madame Bénédicte DAMONT, adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Du 21 janvier 1969 au 24 avril 2001, Monsieur AF L a été salarié de la société SODERY, filiale de la société DEVILLE, puis salarié de la société DEVILLE.

Le XXX, Monsieur C est décédé d’un cancer broncho-pulmonaire primitif.

Le 7 juillet 2008, Madame O P veuve L a souscrit une déclaration de maladie professionnelle auprès de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) des Ardennes, ci-après désignée la caisse, en se fondant sur un certificat médical en date du 27 juin 2008.

Le 3 novembre 2008, la caisse a décidé de la prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle au titre du tableau n°30 bis des maladies professionnelles (cancer broncho-pulmonaire provoqué par l’inhalation de poussières d’amiante).

Le 4 février 2010, Madame O P veuve L, veuve de Monsieur L et Monsieur AB L, son fils, en son nom personnel et ès qualités de représentant légal de sa fille mineure AD L, ci-après désignés ayants droits de Monsieur L ou consorts L, ont saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Ardennes aux fins de voir reconnaître la faute inexcusable de la SA DEVILLE.

Parallèlement, les ayants droits de Monsieur L ont saisi le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante ( K) d’une demande d’indemnisation et ont accepté l’offre de ce dernier.

Par jugement du 14 février 2013, le tribunal de commerce de Sedan a prononcé l’ouverture d’une période de sauvegarde de la société DEVILLE jusqu’au 14 août 2013, et a nommé Maître Q H ès qualités de mandataire judiciaire de la SA DEVILLE.

Par jugement du 13 juin 2013, le tribunal de commerce de Sedan a prolongé la période d’observation jusqu’au 14 octobre 2013.

Par jugement du 17 octobre 2013, le tribunal de commerce de Sedan a converti la procédure de sauvegarde de la SA DEVILLE en redressement judiciaire, et a nommé la SELARL Q H, ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SA DEVILLE, et Maître A, ès qualités d’administrateur judiciaire de la SA DEVILLE.

Les consorts L ont demandé à la juridiction de la sécurité sociale de reconnaître l’existence de la faute inexcusable de la SA DEVILLE dans la maladie professionnelle contractée par Monsieur AF L, de voir fixer au maximum le montant de la rente de l’article L 452-2 du code de la sécurité sociale et de condamner la SA DEVILLE, représentée par Me H, ès qualités de mandataire judiciaire de la SA DEVILLE à leur payer 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

La SA DEVILLE a conclu à l’irrecevabilité des demandes des consorts L tendant à l’indemnisation de leur préjudice, à titre principal a sollicité le débouté des consorts L de l’ensemble de leurs prétentions dirigées contre elle, en tout état de cause qu’il soit dit que les décisions de prise en charge de la maladie et du décès de Monsieur L au titre de la législation professionnelle lui soient déclarées inopposables, de dire qu’elle ne supportera pas les conséquences financières liées à la reconnaissance de la faute inexcusable, et a demandé la condamnation du K à lui payer 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Le K a demandé au tribunal de :

— déclarer son action recevable,

— dire que la maladie professionnelle de Monsieur L est la conséquence de la faute inexcusable de la SA DEVILLE,

— fixer à son maximum la majoration de rente servie au conjoint survivant de la victime, par application de l’article L.452-2 du code de la sécurité sociale, et que dire que cette majoration lui sera directement versée par l’organisme de sécurité sociale ;

— fixer l’indemnisation des préjudices personnels de Monsieur AF L à la somme totale de 115.200 euros se décomposant comme suit :

préjudice moral : 69.700 euros,

souffrances physiques : 23.000 euros,

préjudice d’agrément : 22.500 euros

— fixer l’indemnisation des préjudices personnels des ayants droit de Monsieur L à la somme totale de 44.600 euros se décomposant comme suit :

Madame O L : 32.600 euros,

Monsieur AB L : 8.700 euros,

Madame AD L : 3.300 euros,

— dire que la CPAM des Ardennes devra verser ces sommes au K, soit un total de 159.800 euros,

— condamner la SA DEVILLE à payer au K une somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles.

La CPAM des Ardennes demande au tribunal de :

— rejeter la demande de la société DEVILLE tendant à voir dire inopposable sa décision en date du 3 novembre 2008 de prise en charge de l’affection de Monsieur L au titre de la législation professionnelle ;

— constater qu’elle s’en remet à prudence de justice tant sur la reconnaissance de la faute inexcusable que sur son indemnisation éventuelle ;

— condamner la SA DEVILLE et la compagnie d’assurance à garantir le remboursement des sommes versées par la caisse au cas où la faute inexcusable serait reconnue.

Par jugement contradictoire du 6 mars 2014, le tribunal des affaires de sécurité sociale des Ardennes a :

— déclaré recevable l’action des ayants droit de Monsieur AF L ;

— dit que la maladie professionnelle de Monsieur AF L est due à la faute inexcusable de son employeur la SA DEVILLE ;

— fixé au maximum le montant de la rente à verser par la CPAM à Madame O L, conjoint survivant, et dit que cette majoration sera directement servie par la CPAM ;

— fixé le préjudice de Monsieur AF L a la somme de 115.200 euros, se décomposant comme suit :

préjudice moral : 69.700 euros,

souffrances physiques : 23.000 euros,

préjudice d’agrément : 22.500 euros,

— fixé l’indemnisation des préjudices personnels des ayants droit de Monsieur AF L à la somme totale de 46.600 euros se décomposant comme suit :

Madame O L : 32.600 euros,

Monsieur AB L : 8.700 euros,

Madame AD L : 3.300 euros.

— dit que la CPAM des Ardennes devra verser ces sommes au K, soit 159.800 euros ;

— débouté la SA DEVILLE de sa demande tendant à se voir déclarer inopposable la décision de la CPAM des Ardennes de prise en charge de la maladie professionnelle de Monsieur AF L ;

— dit que les conséquences financières de sa faute inexcusable devront être supportées par la SA DEVILLE dans le respect des règles régissant le droit des procédures collectives ;

— débouté les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles.

Le 8 avril 2014, la SELARL Q H, ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SA DEVILLE, et Maître A, ès qualités d’administrateur judiciaire de la SA DEVILLE, qui se sont vu respectivement notifier le jugement le 17 mars 2014, ont régulièrement relevé appel de ce jugement.

Par jugement du 14 avril 2014, le tribunal de commerce de Sedan a converti la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et a nommé Maître Q H ès qualités de mandataire liquidateur de la SA DEVILLE.

Initialement appelée à l’audience de la cour du 9 mars 2015, l’affaire a été renvoyée à l’audience du 5 octobre 2015, et ce à la demande de la caisse primaire d’assurance maladie, motif pris du dépôt des écritures de l’appelant le 6 mars 2015.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Pour un plus ample exposé, il sera expressément renvoyé aux écritures déposées par les parties :

— le 6 mars 2015 par la SELARL Q H, ès qualités de mandataire liquidateur de la SA DEVILLE, appelante ;

— le 25 février 2015 par les consorts L, intimés ;

— le 5 mars 2015 par le K, intimé ;

— le 25 septembre 2015 par la CPAM des Ardennes, intimée ;

et soutenues oralement à l’audience.

Par voie d’infirmation, la SELARL Q V, ès qualités de mandataire liquidateur de la SA DEVILLE, demande en cette qualité à être reçu en son intervention volontaire et réitère l’ensemble des prétentions initiales de la SA DEVILLE.

Les ayants droit de Monsieur L sollicitent la confirmation intégrale du jugement déféré et la condamnation de la SA DEVILLE, représentée par son mandataire liquidateur, à leur payer une somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Par voie de confirmation, la caisse réitère l’ensemble de ses demandes initiales.

Le K sollicite la confirmation intégrale du jugement.

MOTIVATION :

Compte tenu de la liquidation de la SA DEVILLE, il y aura lieu de mettre hors de cause Maître A ès qualités d’administrateur judiciaire de la SA DEVILLE et de recevoir la SELARL Q V, ès qualités de mandataire liquidateur de la SA DEVILLE, en son intervention volontaire.

Ayant exactement relevé que les consorts L, indemnisés par le K, et ayant engagé une action en recherche de la faute inexcusable de l’employeur, n’ont formé aucune demande indemnitaire à l’encontre de la société DEVILLE, le premier juge a exactement dit recevable leur action tendant seulement à faire reconnaître la faute inexcusable de l’employeur.

* * * *

L’employeur est tenu envers son salarié à une obligation de sécurité de résultant dont le manquement revêt le caractère d’une faute inexcusable, lorsque l’employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’éviter.

Il suffit, pour qu’une faute inexcusable soit retenue que l’exposition de la victime au risque ait été habituelle, peu important le fait que la victime n’ait pas participé directement à l’emploi ou à la manipulation d’amiante.

Monsieur L a été employé successivement comme :

— chef d’équipe contremaître du 21 janvier 1969 au 31 décembre 1990 sur le site de MONTCY NOTRE DAME de la société SODERY ;

— chef d’équipe contremaître du 1er janvier 1981 au 30 décembre 1996 sur le site de X appartenant initialement à la société SODERY ;

— responsable du montage Ilot du 1er janvier 1997 au 24 avril 2001 sur le site de CHARLEVILLE-MÉZIÈRES de la société DEVILLE.

Courant décembre 1990, Monsieur L a été transféré des effectifs de la société SODERY a ceux de la société DEVILLE, tout en restant physiquement à l’usine de X, la société DEVILLE avant absorbé la société SODERY à compter du 31 décembre 1990 ainsi qu’en atteste le procès-verbal d’assemblée générale ordinaire de celle-ci en date du 16 mai 1991.

Alors que l’article L.1224-2 du code du travail considère le nouvel employeur comme tenu, à l’égard des salariés sont les contrats de travail subsistent, aux obligations incombant à l’ancien employeur, sauf procédure collective ou substitution d’employeur intervenue sans convention entre ces derniers, qu’il est constant que la société DEVILLE a absorbé à compter du 31 décembre 1990 la société SODERY, ainsi qu’en atteste le procès-verbal d’assemblée ordinaire de la société DEVILLE du 16 mai 1991, les moyens de la société DEVILLE, selon laquelle le salarié ne démontre aucune exposition au risque avant le 1er janvier 1997, date de sa dernière affectation, sont radicalement inopérants, sans préjudice de leur éventuelle inexactitude, ainsi qu’il sera vu plus bas.

De plus, la maladie professionnelle doit être considérée comme contractée au service du dernier employeur chez lequel la victime a été exposée au risque, avant sa constatation médicale, sauf à cet employeur à rapporter la preuve contraire.

— - -

L’exposition au risque du salarié est suffisamment démontrée par :

— l’enquête réalisée par la caisse au cours de laquelle le préposé de l’employeur a rapporté que jusqu’en 1997, Monsieur L était chargé de vérifier la fabrication des inserts faits par les salariés, que sur cette chaîne, se trouvaient des joints et des tresses nécessaires à l’étanchéité des produit fabriqués, les tresses arrivant en bobines et étaient coupées en fonction des besoins, les bobines étant stockées dans le magasin de l’entreprise SODERY, distinct du lieu de travail de Monsieur L et fermé. Le préposé de l’employeur indique le travail s’est effectué dans un environnement utilisant l’amiante, à laquelle le salarié était exposé 8 heures par jour, et ce sans port de protections respiratoires pendant l’exposition à l’amiante.

— les énonciations du procès-verbal du CHSCT de la société DEVILLE en date du 17 mars 1992, faisant état de l’établissement de X, alors lieu d’affectation de Monsieur L, selon lesquelles Monsieur I demande s’il est normal d’utiliser encore de l’amiante pour les joints de porte, ce à quoi Monsieur J, a répondu que cette substance est en cours de remplacement par de la fibre de céramique ;

— l’évocation, à la réunion des délégués du personnel du 24 mars 1993 par le préposé de la direction de la société, que la société recevait de l’amiante traitée et en tresse et que pour l’instant, il n’y avait rien d’autre qui puisse remplacer les joints d’amiante ;

— l’attestation de Monsieur F, faisant état sur le site de CHARLEVILLE, de l’exposition de Monsieur L aux poussières d’amiante en raison de sa présence dans les ateliers, car les opérateurs au montage découpaient, mettaient en forme et inséraient les tresses d’amiante dans les gorges à l’aide d’un maillet, cette opération étant d’ailleurs consignée dans les gammes de montage); l’exposition étant continuelle faute de mise à disposition de protection individuelle ou collective.

En outre, cette exposition est confirmée par les attestation de MM. Y, M, G, et faisant état sur la production sur le site de X de la société SODERY comprenait le montage d’inserts et de foyers DEVILLE où était utilisé de l’amiante.

La circonstance que Monsieur F, ancien salarié, ait lui-même saisi la juridiction de sécurité sociale en contestation d’un refus de la caisse de prise en charge d’un affection dont il était atteint au titre de la législation professionnelle n’est pas de nature, de ce seul fait, à mettre en doute l’authenticité de ses dires. Enfin s’il est exact que ce dernier, responsable du service achat en 2001 et affecté sur le site de CHARLEVILLE, n’a jamais effectué la moindre tâche en rapport avec les processus de fabrication des fours et inserts, il a indiqué se rendre plusieurs fois par semaine dans les ateliers.

La valeur probante de l’attestation initiale de Monsieur Y en date du 18 février 2013 n’a pas lieu d’être mise en doute, puisque si l’employeur a cru utile de s’interroger sur celle-ci, la seconde attestation de Monsieur Y en date du 9 juillet 2013 précise c’est en vertu de ses mandats syndicaux au sein des institutions représentatives du personnel qu’il a pu en substance se rendre dans les ateliers de SODERY, et faire les constatations rapportées aux débats.

L’attestation de Monsieur D, fait état, au cours de l’année 1999, de l’utilisation d’amiante pour la réparation des appareils remis en stock neuf ou second choix, les manipulations des cordons et plaques joints en amiante se faisant sans précaution particulière et sans consigne spéciale de l’employeur.

Enfin, c’est de manière totalement inopérante que la société DEVILLE entend combattre les constatations rapportées dans l’attestation de Monsieur G en précisant que celles-ci ne sont aucunement justifiée, ni assorties d’un quelconque commencement de preuve.

— les énonciations du procès-verbal du CHSCT de la société DEVILLE en date du 11 décembre 1995, au cours duquel l’inspecteur du travail constate que certains opérateurs utilisent encore l’amiante, sollicite la réalisation d’une liste des secteurs utilisant encore de l’amiante, demande de vérifier les opérations réalisées avec de l’amiante et de désigner un expert qui analysera l’utilisation et les risques, et exigeant que l’amiante disparaisse le plus rapidement possible.

Par ailleurs, si la société DEVILLE prétend que le poste de découpe de tresses contenant de l’amiante n’a pas été occupé par Monsieur L, et a été tenu habituellement par un seul salarié, elle précise que ce poste de découpe n’a été doté d’un système d’aspiration qu’au cours de l’année 1990. Elle reconnaît ainsi a minima l’exposition des salariés aux poussières d’amiantes résultant de la découpe des tresses antérieurement à l’installation de ce système d’aspiration.

Bien plus, il résulte de l’enquête de Monsieur Z, inspecteur du travail, que les opérations de découpe ont occupé a priori un seul salarié au sein de l’atelier de montage, que les tresses découpées étaient ensuite manutentionnées au sein de cartons puis acheminées vers les lignes de montage des équipements; sur ces lignes, les joints étaient manuellement posés par des salariés qui devaient par ailleurs régulièrement procéder à des découpes plus précises.

Dès lors, est ainsi caractérisée l’exposition aux poussières d’amiante de l’ensemble des salariés de l’atelier de montage, amenés à réaliser des découpes, alors qu’il résulte nécessairement de la mise en place à partir de l’année 1990 d’un système d’aspiration au seul poste de découpe que le seul traitement antipoussière des tresses n’était nécessairement pas suffisant pour empêcher l’émission de fibres et poussières d’amiante, puisque la société a mis en place un système d’aspiration, limité au seul poste de découpe, alors que les autres salariées devaient néanmoins,

après des opérations de découpe, procéder eux-même à des opérations de découpe plus précise sans que leurs postes de travail respectifs aient été doté de système d’aspiration.

Surabondamment, les consorts L ont produit des livres de nomenclature pour les années 1995 et 1996 faisant état pour ces périodes de l’utilisation de tresses d’amiante pour la fabrication de poêles à fuel, et de l’utilisation de pièces de cette substance sur la gamme de montage de 1994 à 1997.

Ces éléments mettent suffisamment en évidence que Monsieur L a été exposé habituellement à des poussières d’amiante.

— - -

L’ordonnance du 2 août 1945 avait créée le tableau n°25 des maladies professionnelles visant la fibrose pulmonaire consécutive à l’inhalation de poussière renfermant de la silice libre ou de l’amiante.

Le décret du 31 août 1950 a créé le tableau n°30 relatif aux affectations causées par l’inhalation de poussières d’amiante, complété par le décrEt du 5 janvier 1976 introduisant le cancer broncho pulmonaire primitif ainsi que le mésothéliome primitif pleural péri cardiaque et périonéal.

Aussi, le premier juge a exactement affirmé que ces différents tableaux jouaient le rôle d’avertisseur de danger, et que la société DEVILLE ne pouvait pas raisonnablement soutenir le bien fondé de son absence de conscience ou de devoir de conscience de danger en se fondant sur une prétendue progressivité de la prise de conscience du danger présenté.

Il y sera ajouté que le décret du 17 août 1977 a porté réglementation de mesures d’hygiène et de sécurité applicable dans les établissements où le personnel est exposé à l’action de poussières d’amiante.

Il sera observé que le décret du 6 juillet 1992 a fixé un plafond de concentration de fibre d’amiante dans l’air de 0,6 fibre par cm3 par heure, passé à 0,3 en 1996 ; puis 0,1 au 1er janvier 1998.

Dans son cas très particulier, la société DEVILLE fait elle-même observer avoir été inscrite dans la catégorie amiante par arrêté du 3 juillet 2000 modifiant la liste des établissements susceptibles d’ouvrir droit à l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante pour la période de 1950 à 1992, et inscrite dans l’annexe II de cet arrêté listant 'les établissements ayant fabriqué des matériaux contenant de l’amiante et les établissements de flocage et de calorifugage à l’amiante'

Aussi, eu égard au caractère réglementaire de cet acte administratif et à sa nécessaire publication, la société DEVILLE ne peut pas sérieusement prétendre que 'cette information n’avait pas été portée à sa connaissance', mais ne l’a été incidemment qu’en 2006, à l’occasion de la demande d’un de ses salariés au bénéfice de cette allocation.

Du reste, la société DEVILLE, qui indique avoir pour activité principale la fabrication de produits de chauffage individuel en fonte et en acier, ne peut utilement invoquer devant la présente juridiction l’illégalité de l’arrêté du 3 juillet 2010 au regard de l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 portant financement de la sécurité sociale pour l’année 1999.

En vertu du principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, il n’appartient pas, sauf dans le cas visé à l’article 111-5 du code pénal, aux juridictions de l’ordre judiciaire d’apprécier la légalité d’un acte réglementaire.

En outre, l’appelante cite elle-même la lettre du ministre du travail en date du 13 novembre 2012 à l’ADDEVA 08, faisant état de ce que l’enquête locale pour la période courant de 1950 à 1992 correspondant à celle pendant laquelle les salariés de l’entreprise ont été exposés à une activité susceptible de relever du dispositif législatif, qu’en particulier, ces salariés ont utilisé des tresses d’amiantes jusqu’en 1995.

Bien plus, l’argumentation de la société se trouve grevée d’une grave contradiction interne en ce qu’elle ne peut pas à la fois faire valoir son absence de devoir de conscience tenant selon elle à l’évolution progressive de la prise de conscience du danger, tout en faisant valoir la précocité et la régularité des vérifications et concertations opérées, mettant en évidence la constance avec laquelle elle a été informé de la permanence de l’exposition des salariés à l’amiante pour :

— avoir, dès avant l’entrée en vigueur du décret du 17 août 1977, fait procéder à de premières mesures de dépoussiérement en 1976 alors qu’elle n’y était réglementairement pas tenue; sauf à être consciente d’un danger, et ce antérieurement à une évolution réglementaire ;

— produire le compte rendu de la réunion du CHSCT du 3 mars 1983 faisant état de la concentration dans l’air nécessaire pour créer un risque d’inhalation d’amiante, et de la nécessité d’étudier pour le stockage des tresses d’amiante coupées une autre système que la mise en carton ouvert (page 3) ;

— avoir fait procédé en juillet 1985 au remplacement du dépoussiéreur de l’atelier de polissage par un appareil plus puissant, sauf à reconnaître l’efficacité insuffisante des équipements antérieurement utilisés ;

— produire le rapport du médecin du travail pour l’année 1987 comportant une étude en milieu de travail faisant état de ce que les cordelettes d’amiante au poste de polissage sont remplacées par des cordelettes de composition moins toxiques pour la santé ;

— se targuer de ce que les valeurs relevées le 20 mars 1985 par la CRAM du Nord Est en matière de concentration de fibres d’amiante dans l’air, réalisées à l’aide de préleveurs individuels portés par les salariés, s’étageant de 0,10 à 0,22 fibres par cm3 d’air, sont inférieures à la valeur plafond par jour de travail de 2 fibres/cm3 d’air défini par le décret du 17 août 1977 précité, alors que ses résultats faisaient indubitablement état d’une exposition au risque ;

— faire état d’une action exposée à une réunion tenue le 21 avril 1992, dont l’objet consistait à remplacer des joints amiantes par des joints céramique, sans pour autant fixer de délais à cette action, toujours en cours 3 années plus tard (voir paragraphe suivant) ;

— s’être vu avisée à la réunion du CHSCT du 21 juin 1994 de la persistance de l’utilisation d’amiante, pièces de récupération utilisée pour caler les pièces à polir, mais encore du non remplacement des cordelettes d’amiante ;

— avoir été mis en demeure à la réunion du CHSCT du 13 juin 1995 par l’inspecteur du travail de remplacer l’amiante, encore utilisé pour un type d’appareil, par un autre composant ;

— prétendre avoir essayé, dès 1986, de remplacer les cordelettes d’amiantes pour d’autres matériaux, et n’avoir abouti à l’arrêt total de l’utilisation de cette substance dans la fabrication des appareils qu’en octobre 1995 ;

— indiquer ne plus utiliser de tresses en amiante depuis 1995, alors que les travaux de pose, dépose et calorifugage contenant de l’amiante, travaux d’équipement, entretien, ou maintenant sur matériels ou dans locaux et annexes revêtus au contenant des matériaux à base d’amiante ont été ajoutés par décret du 22 mai 1996, sauf à être consciente d’un danger, et ce antérieurement à une évolution réglementaire ;

— déclarer à la réunion du CHSCT du 11 décembre 1995, par l’organe de Monsieur E, responsable du service maintenance/travaux neufs, que la société DEVILLE n’a 'pas enlevé de l’amiante dans notre outil de production. Ce dont on parle (tresses, joints, et amiante caoutchouté) c’est simplement les produits que nous fabriquons où l’amiante utilisé a été supprimé’ (page 4), alors qu’un visite sur site le même jour met évidence que le stock d’amiante de pièces détachées, non épuisé, continue à être utilisé car le produit de remplacement n’a pas été défini, et que l’amiante continue à être utilisée dans certains appareils, pour lesquels la fibre de céramique, produit de remplacement envisagé, ne peut pas remplacer l’amiante (page 6) ;

— avoir attendu la réunion du CHSCT du 19 septembre 1996 pour proposer la mise en place d’extracteurs mécaniques afin d’assurer la ventilation des locaux, puis exposer avoir demandé à la société VERITAS de 'faire une proposition d’étude’ afin de rechercher le taux d’amiante dans l’atmosphère, tout en indiquant 'faire jouer la concurrence pour minimiser le coût de cette étude', à telle enseigne que celle-ci n’a été réalisée que près de 3 ans plus tard (voir paragraphe ci-dessous) ;

— se prévaloir du rapport du bureau VERITAS sur la mesure d’empoussièrement en fibres d’amiantes dans l’atmosphère des immeubles bâtis faisant suite à des mesures réalisées du 25 au 31 août 1999, qui n’a pas recherché l’ensemble de ces aérosols, mais les seules fibres d’amiante aux dimensions définies par l’arrêté du 15 janvier 1998.

En outre, des éléments postérieurs à la période d’emploi de Monsieur L attestent de l’ancienneté de la connaissance par l’employeur, de l’exposition de ses salariés à l’amiante, tous concomitants à la période d’emploi du salarié, puisque la société DEVILLE a fait en sorte de :

— donner des éléments présentés à la réunion CHSCT du 23 novembre 2006, alors que (page 11/13) :

— Monsieur B, représentant du personnel, y fait valoir, sans contradiction de quiconque que 'au polissage, il y a des poussières (d’amiante) qui sont restées fixées sur les poutres, et quand il y a choc, toutes les poussières volent';

— Monsieur N, membre du CHSCT, y a présenté un plan de l’entreprise montrant les zones identifiées lors du diagnostic de décembre 2003 comme comportant de l’amiante :

zones comportant de l’amiante dégradée : loge du gardien, bureau d’étude, canalisation au niveau du montage,

zones comportant de l’amiante en bon état :

au niveau du toit pour la réparation, le mabor, des bureaux logistiques, la réception, le magasin tôle, l’usinage PPG, le magasin labo, la chaufferie,

au niveau du sol pour le labo, le bureau au 1re étage au dessus de l’émaillerie,

au niveau des murs dans le local du comité d’entreprises et un des sanitaires du rez-de-chaussée,

au niveau de canalisations pour la salle de réunion près du local CE ;

— Faire état des éléments présentés à la réunion du CHSCT du 13 février 2007, alors qu’y sont évoqués les résultats d’une analyse concluant que si 6 des 8 points de mesure d’empoussièrement sont totalement vierges de fibres d’amiante, il y rapporté toutefois que 2 points de mesures d’empoussièrement restants contiennent moins de 1 fibre par litre (en dessous de la valeur réglementaire de 5 fibres par litre), alors que cet audit prescrit à l’entreprise de surveiller l’évolution de la dégradation sur des deux points (ppg + montage) et de réaliser de nouvelles mesures dans les deux ans au plus tard ;

— se prévaloir des déclarations de l’inspecteur de travail, rapportées au procès-verbal du CHSCT en date du 13 février 2007, insistant sur la surveillance de la dégradation du toit de la PPG, et invitant l’entreprise à se rapprocher du propriétaire des bâtiments pour envisager le remplacement de la toiture PPG, qui n’a été remplacée qu’en 2011 : il est ainsi établi que jusqu’au 13 février 2007 le toit de l’entreprise contenait de l’amiante, sans que la société DEVILLE ne fasse état de travaux antérieurs de nature à supprimer totalement les poussières d’amiante.

En outre, il résulte des comptes rendus des CHSCT des 17 mars 1992, 24 mars 1993 et 11 décembre 1995 une interpellation suffisante émanant des salariés sur la poursuite de l’utilisation d’amiante, auquel l’employeur répond systématiquement que le remplacement de l’amiante par une autre substance est en cours, le dernier compte-rendu faisant état des constatations de l’inspecteur du travail présent, concluant que certains opérateurs utilisaient encore de l’amiante, et exigeant la disparition la plus rapide possible de l’utilisation de cette substance.

Il est ainsi suffisamment établie la conscience de la société DEVILLE d’avoir exposé Monsieur C à des poussières d’amiante, dont elle ne pouvait ignorer la gravité, et ce sans avoir pris des mesures pour l’en préserver.

La société DEVILLE a donc commis une faute inexcusable à l’origine de la maladie professionnelle de Monsieur L, et le jugement sera confirmé sur ce point.

* * * *

Le premier juge a exactement fixé à son maximum la majoration de rente due au conjoint survivant, et le jugement sera confirmé de ce chef.

* * * *

Alors que les ayant droits de Monsieur L sollicitent confirmation du jugement en ce qu’il a évalué le préjudice personnel du salarié décédé et les préjudices des ayants droit, et que les autres parties n’élèvent pas de moyen tendant à remettre en cause le principe et l’évaluation de ces préjudices, le jugement sera confirmé sur ces points.

* * * *

La société DEVILLE entend voir déclarer inopposable à son encontre la décision de la caisse de prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle.

Elle soutient dans un premier temps qu’il résulte des articles L.461-5 et L.431-2 du code de la sécurité sociale qu’en cas de décès de la victime, les ayant droits ne sont pas habilités à effectuer la déclaration de maladie professionnelle auprès de la caisse primaire d’assurance maladie, l’indemnisation de ceux-ci ne pouvant intervenir qu’à l’égard d’une maladie dont la caractère professionnel a déjà été reconnu, hors le cas posé par l’article 40 de la loi du 23 décembre 1998, offrant la faculté aux ayants droits d’un victime décédée d’une affection professionnelle consécutive à l’inhalation de poussières d’amiante, de faire eux-même une déclaration de maladie professionnelle auprès de la caisse, à la condition que la première constatation de la maladie ait été faite entre le 1er janvier 1947 et le 23 décembre 1998.

Néanmoins, il résulte de la combinaison des article L.431-2, L.461-1, L.461-5 du code de la sécurité sociale que les droits de la victime ou de ses ayant droits aux prestations et indemnités prévues par la législation sur les maladies professionnelles se prescrivent par deux ans, soit de la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle, soit de la cessation du travail en raison de la maladie constatée, soit de la cessation du paiement du paiement des indemnités journalières, soit de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie.

Il s’en déduit la faculté pour l’ayant-droit d’un assuré social, atteint d’une maladie dont un certificat médical établit le lien possible de celle-ci avec l’activité professionnelle, d’introduire, après le décès de ce dernier, une demande de prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle auprès de la caisse compétente, dans les délais sus décrits.

Alors que l’employeur ne dénie pas aux intimés la qualité d’ayants-droit de Monsieur AF L, ni ne soulève aucun moyen relativement à la prescription de leur action, rappelle lui-même que la date de première constatation médicale doit être fixée au 27 juin 2008, date du certificat médical initial faisant le liant entre l’affection et l’activité professionnelle, et que la demande de la veuve de Monsieur L a été déposée auprès de la caisse le 7 juillet 2008, cette dernière demande était donc recevable, quand bien même Monsieur L était-il décédé le XXX, sans avoir lui-même déposé de demande de prise en charge de la sa maladie au titre de la législation professionnelle.

— - -

Il résulte de l’article R.441-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction alors applicable, antérieure à l’entrée en vigueur au 1er janvier 2010 du décret du 29 juillet 2009, que préalablement à sa prise de décision sur le caractère professionnelle d’une maladie ou d’un accident, la caisse doit informer l’employeur des éléments susceptibles de lui faire grief, de la date à laquelle sera prise sa décision, de la faculté de l’employeur de venir consulter le dossier dans ses locaux dans un délai suffisant pour lui permettre de prendre connaissance du dossier, et le cas échéant, de formuler des observations.

Le délai ainsi imparti à l’employeur court à compter du jour ou celui-ci a la possibilité de prendre connaissance du dossier constitué par la caisse.

En l’espèce, le courrier avisant la société DEVILLE de la fin de l’information a été adressé par la caisse le 22 octobre 2013, faisait savoir à son destinataire que la décision sur la prise en charge interviendrait le 3 novembre 2008, lui rappelant sa faculté de venir consulter les pièces constitutives du dossier préalablement à cette décision.

Par courrier en date du 23 octobre 2008 adressé à la caisse, la société DEVILLE a accusé réception de l’avis de fin d’information susdit, et a demandé la transmission du dossier à son propre médecin conseil.

Par courrier en date du 27 octobre 2008, la caisse a transmis copie des pièces constitutives du dossier à la société DEVILLE.

Alors que la délai à compter duquel la société DEVILLE a été mise en mesure de consulter le dossier a commencé à courir dès le jeudi 23 octobre 2008, et non le lendemain comme le soutient à tort l’employeur, et a expiré le lundi 3 novembre 2008, sans que la demande de copie de pièce du dossier faite par l’employeur et sa satisfaction par la caisse, qui n’était pas tenue d’y faire droit, soit de nature à modifier l’appréciation de ce délai ou à le proroger, et que celui-ci comporte 7 jours ouvrables pendant lesquels il était loisible à l’employeur de venir consulter les pièces du dossier, la caisse a ainsi ménagé un délai suffisant permettant à la société DEVILLE de prendre connaissance du dossier et de faire part de ses éventuelles observations.

Surabondamment, la caisse fait valoir, sans réplique de l’employeur sur ce point, que leurs locaux respectifs ne sont séparés que de 200 mètres.

La caisse a ainsi suffisamment justifié avoir respecté le principe du contradictoire à l’endroit de l’employeur lors de l’instruction du dossier.

— - – -

La société DEVILLE soutient enfin l’absence de caractérisation médicale de l’affectation, faute pour la caisse d’avoir procédé à une autopsie du sujet, qu’elle était tenu de réaliser en cas de décès de la victime avant la déclaration de maladie professionnelle, par application de l’article D.461-16 du code de la sécurité sociale, cet examen devant être réalisé dans les conditions de l’article L.442-4 du même code.

Or, si ce dernier texte dispose que l’autopsie est pratiquée soit à la demande des ayants droits, soit, si ceux-ci ne s’y opposent pas, à la demande de la caisse, c’est seulement si cette dernière l’estime utile à la manifestation de la vérité.

Dès lors, il était loisible à la caisse de ne pas pratiquer l’autopsie, alors qu’elle indique exactement qu’il n’existait aucune doute sur la cause du décès au vu du certificat médical en date du 8 juillet 2008 relatant les causes du décès.

Enfin, la circonstance avancée par la société DEVILLE, tenant au caractère multifactoriel des cause du cancer bronchique, est rigoureusement inopérante, alors que l’appelant ne se propose pas de renverser la présomption d’imputabilité en démontrant que l’affection développée par Monsieur L serait due à des causes totalement étrangères à son exposition aux poussières d’amiante.

En outre, l’employeur n’a développé aucun moyen portant sur l’absence de réunion des conditions prévues au tableau des maladies processionnelles idoine, alors qu’il résulte suffisamment des éléments du dossier que les travaux auxquels Monsieur L a concouru étaient des travaux d’usinage, découpe et ponçage de matériaux contenant de l’amiante, et qu’il n’a en particulier pas critiqué le diagnostic de cancer broncho pulmonaire primitif retenu par la caisse.

Dès lors, la caractérisation médicale de l’affection est parfaitement établie.

Dès lors, il y aura lieu de rejeter la demande de la société DEVILLE tendant voir déclarer l’inopposabilité à son encontre de la décision de la caisse de prise ne charge de l’affection au titre de la législation professionnelle, et le jugement sera confirmé sur ce point.

* * * *

Il y aura donc lieu de dire que les conséquences financières de sa faute inexcusable devront être supportées par la SA DEVILLE dans le respect des règles régissant le droit des procédures collectives, et le jugement sera confirmé sur ce point.

Enfin, il y aura lieu de condamner la SA DEVILLE à payer aux consorts L une somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles, cette créance étant inscrite au passif de la SA DEVILLE à la diligence de la SELARL Q H, son mandataire liquidateur, et le jugement sera infirmé sur ce point.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant publiquement, contradictoirement, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Met hors de cause Maître A ès qualités d’administrateur judiciaire de la SA DEVILLE ;

Reçoit la SELARL Q V, ès qualités de mandataire liquidateur de la SA DEVILLE, en son intervention volontaire ;

Confirme le jugement en toutes ces dispositions, sauf en ce qu’il a débouté les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles ;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :

Ordonne l’inscription au passif de la SA DEVILLE à la diligence de la SELARL Q H, ès qualités de mandataire liquidateur de la SA DEVILLE, de la créance de Madame O P, Monsieur AB L, et Madame AD L, ayants droit de Monsieur AF L à hauteur de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Cour d'appel de Reims, 2 décembre 2015, n° 14/01128