Cour d'appel de Rennes, du 4 septembre 2003, 02/01633

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

En vertu de l’article 121-2 du Code pénal, la responsabilité pénale des personnes morales n’est engagée que pour les infractions commises pour leur compte par leurs organes ou représentants. De ce fait, en cas d’infraction volontaire, la relaxe à titre personnel de l’organe ou du représentant de la personne morale interdit de rechercher la responsabilité pénale de celle-ci pour les actes que ce représentant aurait commis pour son compte

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 4 sept. 2003, n° 02/01633
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 02/01633
Importance : Inédit
Textes appliqués :
Code pénal, article 121-2
Dispositif : other
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000006943104
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Sur les parties

Texte intégral

DOSSIER N° 02/01633 Arrêt du 4 SEPTEMBRE 2003 COUR D’APPEL DE RENNES 3ème Chambre, ARRÊT Prononcé publiquement le 4 SEPTEMBRE 2003 par la 3ème

Chambre des Appels Correctionnels, PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR : G.A.E.C. DU LAUNEL NE de SIREN : 328-376-090 « X… » – 27250 AMBENAY Prévenu, appelant, non comparant Représenté par Maître LECUYER, avocat au barreau d’EVREUX, substituant Maître

SPAGNOL, avocat au barreau d’EVREUX ET : BASCHET Gilles, demeurant Le Vent du Large – 3238, route de la Corniche – 83700 BOULOURIS Partie civile, intimé, non comparant Représenté par Maître LE PASTEUR , avocat au barreau d’ARGENTAN, LE MINISTÈRE PUBLIC Appelant, COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats et du délibéré

: Président

:

Monsieur CHAUVIN, Conseillers

:

Madame PIGEAU,

Monsieur LOURDELLE, Prononcé à l’audience du 4 SEPTEMBRE 2003 par Monsieur CHAUVIN, conformément aux dispositions de l’article 485 alinéa 3 du Code de Procédure Pénale. MINISTÈRE PUBLIC

:

représenté aux débats par Monsieur

AVIGNON, Avocat Général et lors du prononcé de l’arrêt par Madame FIASELLA, Avocat Général GREFFIER

: en présence de Mademoiselle ROUXEL lors des débats et de Mademoiselle DELAUNAY lors du prononcé de l’arrêt DÉROULEMENT DES DÉBATS : A l’audience

publique du 03 JUILLET 2003, le Président a constaté la représentation prévenu, qui n’a pas comparu, la Cour déclarant alors le présent arrêt contradictoire par application de l’article 411 du Code de Procédure Pénale. A cet instant, le conseil prévenu et le conseil de la partie civile ont déposé des conclusions. Ont été entendus : M. CHAUVIN, en son rapport, Le conseil de la partie civile en sa plaidoirie, L’Avocat Général en ses réquisitions, Le conseil du prévenu en sa plaidoirie, Le prévenu qui a eu la parole en dernier, Puis, la Cour a mis l’affaire en délibéré pour son arrêt être rendu à l’audience publique du 4 septembre 2003 ; Conformément aux prescriptions de l’article 462 alinéa 2 du Code de Procédure Pénale, le Président a avisé les parties présentes de la date de l’audience à laquelle l’arrêt serait rendu.

RAPPEL DE LA PROCÉDURE : LE JUGEMENT : Le Tribunal Correctionnel d’ARGENTAN par jugement en date du 08 FEVRIER 2000, pour : RECEL DE BIEN OBTENU A L’AIDE D’UNE ESCROQUERIE a condamné le G.A.E.C. du X… à la peine d’amende de dix mille francs ; sur l’action civile, a reçu BASCHET Gilles en sa constitution de partie civile et lui a donné acte de ce qu’il se réserve de solliciter l’indemnisation de ses préjudices ; a condamné solidairement Y… Laurent, Y… Bertrand et le GAEC du X… à payer à BASCHET Gilles la somme de 10.000 francs par application de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale ; LES APPELS : Appel a été interjeté par : G.A.E.C. DU X…, le 14 Février 2000 M. le Procureur de la République, le 21 Février 2000 LES ARRÊTS : * La Cour d’Appel de CAEN, par arrêt contradictoire en date du 19 février 2001 : a réformé le jugement déféré en ses dispositions relatives à LOONES Laurent ; a relaxé Y… Laurent, a confirmé le jugement en ses autres dispositions étant précisé que les faits ont été commis du 1er mars 1994 au 8 août 1996 et que les condamnations civiles sont à la charge exclusive du GAEC du X… ;

y additant, a condamné le GAEC du X… représenté par Y… Laurent à verser à BASCHET Gilles, partie civile, 15.000 francs par application de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale pour l’ensemble de la procédure ; a condamné le GAEC du X… représenté par Y… Laurent aux dépens de l’action civile ; [* La Cour de Cassation , par arrêt en date du 7 mai 2002, a cassé et annulé l’arrêt déféré mais en ses seules dispositions relatives au GAEC du X…, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Par arrêt en date du 19 juin 2002, la Cour de Cassation a ordonné la rectification de l’arrêt rendu le 7 mai 2002 sous le numéro 2630 en ce qu’il sera indiqué « renvoie la cause et les parties devant la Cour d’Appel de Rennes, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil » aux lieu et place de « renvoie la cause et les parties devant la Cour d’Appel de Rouen, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil »

; LA PRÉVENTION : Considérant qu’il est fait grief au G.A.E.C. du X… : – d’avoir à AMBENAY (27) et à la TRINITE DES LAITIERS (61), à compter du 1er

mars

1994, détenu une somme d’argent de 500.000 francs en sachant que cette somme provenait d’un délit commis par M. Bertrand Y… et d’avoir, en connaissance de cause, bénéficié d’un produit de ce délit, faits prévus et réprimés par les articles 121-2, 321-1, 321-3, 321-9, 321-10, 321-12 du Code Pénal et par l’article 460 de l’ancien code pénal en vigueur à la date des faits commis antérieurement au 1er mars 1994 ; *] [* *] Rappel des faits : M. Z…

Y… et son fils Laurent ont le 4 octobre 1983 constitué à AMBENAY (EURE) au lieudit « X… » le Groupement Agricole d’Exploitation en Commun du X… (ci-après G.A.E.C.). M. Z…

Y…, gérant du G.A.E.C. depuis l’origine a pris sa retraite le 30

septembre

1991 et a été remplacé par son épouse devenue associée et gérante jusqu’à son décès le 19 juillet 1993, date à partir de laquelle Laurent Y… est resté seul

et unique associé. Le 2 octobre 1990, M. Bertrand Y…, autre fils de Z…

Y…, mais non associé au G.A.E.C., exploitant à titre personnel des terres sur la commune de la TRINITE DES LAITIERS (Orne) obtient du nouveau propriétaire du domaine exploité par lui une somme de 500.000 francs destinée, selon l’engagement pris, à financer l’achat d’engrais et de semences, avec garantie de paiement sur la récolte de l’année 1991. Contrairement à ce qui avait été convenu cette somme n’a nullement servi à la mise en valeur des terres exploitées par Bertrand Y…, mais celui-ci, qui se faisait passer pour Z…

Y…, a fait rédiger le chèque à l’ordre de celui-ci, avec mention G.A.E.C. du X… et il a été encaissé par le G.A.E.C. lequel a ensuite réglé des dettes personnelles de Bertrand Y…, notamment les fermages dus par celui-ci à son ancien propriétaire. M. Bertrand Y… a été poursuivi pour abus de confiance pour l’obtention frauduleuse de cette somme de 500.000 francs (et pour d’autres délits). Le Tribunal Correctionnel d’ARGENTAN a requalifié ce fait en escroquerie par usage d’un faux nom (celui de son père) ayant déterminé la remise des fonds après que M. BASCHET se soit renseigné sur la réputation et la solvabilité de Z…

Y… qui était bonne, à la différence de celle de Bertrand Y…. Laurent Y… a été poursuivi pour recel de cette somme de 500.000 francs sachant qu’elle provenait d’un délit à compter du 12 octobre 1990 et d’avoir en connaissance de cause bénéficié du produit de ce délit. Le G.A.E.C. du X… a été poursuivi pour le même délit mais à partir du 1er mars 1994 date d’entrée en vigueur du nouveau code pénal prévoyant la responsabilité des personnes morales. Le Tribunal correctionnel d’ARGENTAN a déclaré ces deux prévenus coupables, par jugement du 8 février 2000. Sur appel de leur part, la Cour d’Appel de CAEN par arrêt du 19 février 2001 a relaxé M.

Laurent Y…, estimant qu’à aucun moment celui-ci n’a à titre personnel dissimulé,

détenu, transmis, fait office d’intermédiaire pour la transmission ou bénéficié de tout ou partie de cette somme de 500.000 francs. En revanche elle a déclaré le G.A.E.C. coupable de recel pour la période comprise entre le 1er mars 1994 et le 8 août 1996, date du remboursement intégral des sommes avancées. Sur l’action civile, la Cour a mis à la charge exclusive du G.A.E.C. du X… la condamnation au profit de M. BASCHET. La Cour a estimé que le G.A.E.C. a perçu la somme de 500.000 francs alors qu’il connaissait la situation financière difficile de Bertrand Y…, son endettement important lui interdisant tout recours à des emprunts ce qui devait l’amener à s’interroger sur l’origine de ces fonds. Il a été aussi relevé que cette somme a été immédiatement dépensée pour régler des dettes de M. Bertrand Y… qui n’était pas membre du G.A.E.C., d’où il ressortait que le G.A.E.C., qui ne pouvait méconnaître la provenance frauduleuse de cette somme avait commis le délit de recel. Sur pourvoi, la Cour de Cassation a cassé cet arrêt en ses seules dispositions concernant le G.A.E.C. du X… au visa de l’article 121-2 du Code Pénal aux motifs que les personnes morales ne peuvent être déclarées responsables d’une infraction que s’il est établi qu’elle a été commise, pour leur compte, par leurs organes ou représentants et qu’en se déterminant comme il est rappelé ci-dessus, la Cour n’avait pas recherché si les faits énoncés avaient été commis par un organe ou représentant de la personne morale. Prétentions des parties devant la Cour de renvoi : Le G.A.E.C. du X… appelant conclut à la réformation du jugement du Tribunal correctionnel d’ARGENTAN et à la relaxe du G.A.E.C. du X…, faisant valoir à cette fin que la responsabilité des personnes morales n’est engagée que si la preuve est rapportée de la commission de l’infraction par une personne physique ayant la qualité d’organe ou de représentant de la personne morale. Il critique l’arrêt de la Cour qui a omis de

faire cette recherche. M. BASCHET, partie civile intimée, conclut : – à la confirmation du jugement en ce qu’il a déclaré le G.A.E.C. coupable du délit de recel, – au donné acte de ce qu’il se réserve de demander par ailleurs l’indemnisation de ses préjudices, – à la condamnation du G.A.E.C. à lui payer une somme de 1.524 euros pour frais de procès de première instance et 2.000 euros pour frais devant la Cour. Il fait pour l’essentiel valoir qu’il n’y a aucune contradiction entre la condamnation du G.A.E.C. et la relaxe de Laurent LOONES ou l’absence de poursuites contre Z…

Y…, ces absences de poursuites ou de culpabilité tenant simplement au fait que le recel suppose d’avoir détenu, dissimulé, transmis ou bénéficié à titre personnel des fonds alors qu’en l’espèce c’est le G.A.E.C. qui a reçu, détenu ou utilisé les fonds litigieux. Le Ministère Public requiert la déclaration de culpabilité à compter du 1er mars 1994 et le prononcé d’une peine d’amende. Sur quoi la Cour :

En droit selon l’article 112-1 du Code Pénal sont seuls punissables les faits constitutifs d’une infraction à la date à laquelle ils ont été commis. En droit également le délit de recel punissable tant dans le code pénal ancien que dans le nouveau, étant un délit continu ne prend fin que lorsque le receleur se libère valablement de l’objet recelé. En droit encore la responsabilité pénale des personnes morales, applicable au délit de recel, n’a été prévue que par le nouveau code pénal entré en vigueur le 1er mars 1994. En droit enfin l’article 121-2 du Code Pénal prévoit que la responsabilité pénale des personnes morales n’est engagée que pour les infractions commises pour leur compte par leurs organes ou représentants, En cas d’infraction volontaire la relaxe à titre personnel de l’organe ou représentant de la personne morale interdit de rechercher la responsabilité pénale de celle-ci pour les actes que ce représentant aurait commis pour le compte de celle-ci. En l’espèce, s’il est

constant que la somme de 500.000 francs a bien été obtenue par une escroquerie de Bertrand Y…, ainsi qu’en a décidé le Tribunal d’ARGENTAN par décision définitive et s’il est constant également que le G.A.E.C. a, par ses dirigeants de l’époque en 1990 reçu ces fonds en pleine connaissance de leur origine frauduleuse puisque Bertrand Y… criblé de dettes n’était pas membre du G.A.E.C. auquel il apportait une somme importante, que le G.A.E.C. n’était pas en affaires avec M. BASCHET, qu’ils ont laissé noter en comptabilité : « prêt à terme BASCHET », mention erronée, qu’ils ont fait rectifier cette écriture par une autre tout aussi inexacte « compte courant associés », et surtout qu’ils ont fait payer par le G.A.E.C. des dettes personnelles de Bertrand Y…, il n’en demeure pas moins que ce fait n’est devenu pénalement punissable à l’encontre du G.A.E.C. qu’à compter du 1er mars 1994. A cette date, Laurent Y… étant seul membre associé du G.A.E.C. et partant le seul représentant ou organe de celui-ci, sa responsabilité ne peut plus être recherchée puisqu’il a été définitivement relaxé. La responsabilité de la personne morale ne pouvant s’apprécier qu’à travers celle de son organe ou représentant qui en matière d’infractions intentionnelles se confondent ne peut plus dès lors être pénalement recherchée. Il s’ensuit que la relaxe s’impose. Sur l’action civile : Par suite de ce qui est décidé au pénal, l’action civile ne peut qu’être rejetée. PAR CES MOTIFS, LA COUR, Après en avoir délibéré conformément à la loi, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à l’égard de G.A.E.C. DU X… et, BASCHET Gilles Réforme le jugement déféré. Relaxe le G.A.E.C. de X… des faits de recel. Rejette les demandes de la partie civile. LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT, F. DELAUNAY J.Y. CHAUVIN

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Cour d'appel de Rennes, du 4 septembre 2003, 02/01633