Cour d'appel de Rennes, 11 septembre 2008, n° 07/01107

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 11 sept. 2008, n° 07/01107
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 07/01107

Texte intégral

Quatrième Chambre

ARRÊT N°

R.G : 07/01107

Mme J B-F

C/

Mme I N O P Y K X

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 11 SEPTEMBRE 2008

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Brigitte VANNIER, Conseiller faisant fonction de Président,

Madame Françoise LE BRUN, Conseiller,

Monsieur Fabrice ADAM, Conseiller,

GREFFIER :

Madame G H, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 20 Mai 2008

devant Madame Françoise LE BRUN, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par l’un des magistrats ayant participé au délibéré, à l’audience du 11 Septembre 2008, date indiquée à l’issue des débats

****

APPELANTE :

Madame J B-F

XXX

XXX

représentée par la SCP GUILLOU & RENAUDIN, avoués

assistée de Me Valérie CIZERON, avocat

INTIMÉE :

Madame I N O P X K Y

XXX

XXX

représentée par la SCP BAZILLE Jean-Jacques, avoués

assistée de la SELARL SALAUN DORE ET ASSOCIES, avocats

Exposé du litige :

Madame I X K Y était propriétaire d’une maison située au lieu-dit 'Beaulieu’ à Guérande, acquise par donation en 1984 puis par héritage en 1994. Elle a fait aménager les combles et un préau dans les années 1990. D’autres travaux ont été réalisés en 1995-1996 à la suite d’un incendie, tel que mentionné dans l’acte de vente.

Par acte sous seing privé du 19 octobre 1999, suivi d’un acte authentique établi le 29 janvier 2000, en l’étude de Maître A, Notaire associé à La Baule, Madame I X K Y a vendu sa maison à Madame J F épouse B, moyennant le prix de 700.000 Francs (106.714,31 €) net vendeur. L’acte notarié stipule une clause d’exclusion de la garantie du vendeur pour les vices même cachés pouvant affecter l’état des constructions.

Environ un mois après son entrée dans les lieux, Madame B a dû faire intervenir un plombier, pour remédier à des refoulements et odeurs persistantes. Monsieur C a constaté une mauvaise évacuation de la cuvette des WC de l’étage ainsi qu’une pente inversée de l’évacuation de l’évier qu’il a réparée. Face à l’aggravation des désordres constatée par huissier les 13 et 19 décembre 2000, Madame B a fait intervenir le Syndicat Intercommunal de la Côte d’Amour et de la Presqu’île guérandaise (SICAPG) qui lui a signifié les 18 décembre 2000 et 3 janvier 2001, que l’état de fonctionnement de l’installation d’assainissement n’était pas acceptable au vu de la réglementation en vigueur.

Sur assignation de Madame B, Madame D a été désignée comme expert par ordonnance de référé du 20 mars 2001. Elle a déposé son rapport le 28 septembre 2002.

Par acte du 3 juin 2003, Madame B a fait assigner Madame K Y en garantie d’un vice caché et restitution d’une partie du prix soit la somme de 12.465,80 €, compte tenu des travaux préconisés par l’expert, outre la somme de 15.000 € à titre de dommages-intérêts et 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 1 juillet 2004, le juge de la mise en état a ordonné un complément d’expertise dont le rapport a été déposé le 4 avril 2005.

Par jugement du 14 décembre 2006, le tribunal de grande instance de Saint Nazaire a :

— Déclaré recevable l’action de Madame J B-F, intentée à bref délai ;

— Débouté Madame J B-F de l’ensemble de ses demandes ;

— Débouté Madame I Y de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamné Madame J B-F aux dépens qui comprendront les dépens de l’ordonnance du 20 mars 2001 et le coût de l’expertise, avec application de l’article 699 du code de procédure civile.

Madame J B-F a régulièrement interjeté appel de cette décision le 20 février 2007.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées :

— le 11 février 2008, pour Madame J B-F;

— le 2 avril 2008, pour I X K Y.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 29 avril 2008.

***

Motifs :

La recevabilité de l’action n’est pas remise en cause devant la cour.

Madame B fait valoir les désordres constatés par l’expert au mois de juillet 2001, consistant en une humidité très importante des murs en pierre, ayant provoqué une dégradation de l’installation téléphonique, ainsi qu’une humidité excessive dans les cloisons et aménagements intérieurs de la salle de bains, ayant dégradé totalement le meuble sous lavabo. Elle souligne l’aggravation des désordres constatés lors de la contre-expertise, le 16 septembre 2004, avec des remontées d’humidité persistantes en pied des murs du séjour et de la cuisine.

Madame B argue des conclusions de l’expert, attribuant la présence d’odeurs nauséabondes à la pente inversée du système d’évacuation des eaux usées et l’humidité excessive aux dysfonctionnements de ce système d’évacuation, ayant une taille inadaptée à un usage d’habitation à l’année, avec un système d’épandage hors d’usage et la descente d’eaux pluviales raccordée sur le réseau des eaux usées, ce qui a provoqué la stagnation des eaux rejetées près de la maison, source d’humidité. Madame B revendique l’existence d’un vice caché pour elle, mais qui ne pouvait être ignoré de Madame Y, selon les dires de l’expert, retenant l’occupation saisonnière de la maison comme pouvant avoir diminué la gêne mais sans pouvoir masquer les insuffisances du système d’assainissement, provoquant le bouchage des canalisations, une évacuation ralentie ainsi que le refoulement et la remise en charge de la canalisation par temps de pluie. Elle prétend que les travaux ont été réalisés à moindre frais, à la suite d’un incendie, le 30 avril 1995, pour une maison secondaire et par Monsieur Y qui était un professionnel de la plomberie et des pompes d’assainissement. Elle revendique l’exclusion de la clause de non garantie des vices cachés, en ce que Madame Y serait assimilée à un professionnel et serait en tout état de cause de mauvaise foi. Elle demande sa condamnation à lui payer la somme de 14.023,31 € à titre de restitution d’une partie du prix, outre 17.000 € à titre de dommages-intérêts et 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Madame Y fait valoir également les dires de l’expert soulignant certes sa connaissance nécessaire des odeurs nauséabondes dans la cuisine et de la mauvaise évacuation des toilettes, mais tempérant tout aussitôt cette appréciation en notant que l’utilisation ponctuelle et réduite de la maison a permis l’évacuation des eaux ménagères sans provoquer de dégâts apparents, les désordres s’étant aggravés du fait d’un usage quotidien. Elle soutient que la non conformité du système d’assainissement n’est pas elle-même en cause, mais ses conséquences sur la salubrité de la maison dont elle estime que les phénomènes d’humidité, du fait de leur importance, ne peuvent être la conséquence des seuls dysfonctionnements affectant le réseau extérieur. Elle met en cause, comme plus vraisemblable, une mauvaise étanchéité du réseau d’évacuation des eaux usées, du fait d’une fuite sur le réseau enterré sous la cuisine et la salle de bains.

Madame Y réfute toute dissimulation au moment de la vente de l’immeuble, notamment par la présence apparente de salpêtre dans la cuisine, tandis que les murs du séjour étaient à l’état brut. Elle conteste l’existence d’odeurs nauséabondes du temps de son occupation et elle fait valoir sa bonne foi dégageant sa responsabilité du fait d’un vice caché. Elle conteste la qualification professionnelle de son mari en tant que technicien d’assainissement et fait valoir son intervention limitée au réseau extérieur d’évacuation des eaux pluviales, tandis qu’une entreprise s’est chargée du remplacement de la fosse septique ainsi que des canalisations d’entrée et sortie des eaux usées, en 1996.

Sur le vice caché :

La maison a fait l’objet de travaux de rénovation en 1990, consistant en un aménagement des combles et la transformation d’un appentis en préau. Elle a subi un sinistre d’incendie le 30 avril 1995, suivi de travaux de plâtrerie dans le séjour en mai 1995, d’électricité en juin 1996 et de peinture en juillet 1996, incluant les murs de la cuisine mais pas du séjour. Aucune trace d’humidité n’était visible lors du déménagement de Madame Y, ni lors des visites de Madame B.

Cependant, l’installation téléphonique a dû être changée au mois de février 2000, en raison de l’humidité des murs. Monsieur C est intervenu le 20 mars 2000 pour reprendre la canalisation d’évacuation de l’évier dont la pente était inversée. Il a constaté la trop grande proximité de la canalisation d’évacuation du WC de l’étage avec celle du rez-de-chaussée, nécessitant également reprise.

Le SICAPG a constaté les 4 et 12 décembre 2000, des anomalies sur les raccordements des évacuations d’eaux usées et d’eaux pluviales, ainsi qu’une absence de ventilation de la fosse septique rendant l’installation d’assainissement non réglementaire.

L’huissier a constaté le 3 janvier 2001, un suintement humide dans les joints des pierres apparentes constituant les murs en pierre du salon-séjour.

L’expert a constaté le 12 juillet 2001, des coulures d’eau sur les murs du salon-séjour, qu’elle a mis en lien avec l’interruption d’un drain périphérique extérieur posé par Monsieur X en limite des façades de la maison, mais s’interrompant sur la longueur de ces murs en pierre apparente. Ces coulures ont été constatées par Madame B dès son installation et par huissier le 3 janvier 2001. Cette humidité a nécessité le remplacement de l’installation téléphonique. Monsieur X a de fait réalisé la conception et la réalisation du réseau d’évacuation des eaux pluviales ainsi que le réseau de drainage.

Les désordres les plus importants ont été constatés dans la salle de bains, affectant les cloisons et les aménagements intérieurs, et se manifestant par une humidité excessive dans les murs et des moisissures ainsi que la dégradation totale du meuble sous lavabo. L’expert a estimé dans une première approche que les désordres résultent d’un défaut d’évacuation des eaux usées et d’une non conformité du réseau d’assainissement, avec au surplus un risque de fuite sur l’installation d’eau commune pour la cuisine et la salle de bains.

Elle a fait référence aux constatations du SICAPG ayant relevé le mauvais raccordement des eaux ménagères sur la fosse septique, l’absence de ventilation en aval de la fosse septique, la mauvaise évacuation des toilettes de l’étage, le réseau d’évacuation des eaux vannes non détecté et l’absence de traitement avant l’évacuation dans la fosse septique.

L’expert a constaté en septembre 2004 puis en février 2005, une aggravation des dommages dans la salle de bains et la persistance des remontées d’humidité en pied des murs du séjour et de la cuisine. Une entreprise spécialisée a procédé à une recherche de fuite qui a permis de constater le bouchage du réseau d’évacuation des eaux usées à la sortie de la maison, les raccords simplement emboîtés et non collés des canalisations d’eaux usées de la salle de bains, ainsi que la contre-pente de la canalisation d’eaux usées de la cuisine par ailleurs sous-dimensionnée. L’évacuation des eaux vannes n’a pu être localisée. Il a été observé que la descente d’eaux pluviales située à l’angle de la maison est raccordée sur le réseau EU/EV, ce qui explique le débordement total du réseau en cas de pluie, compte tenu de sa saturation, étant observé que les autres descentes d’eaux pluviales sont raccordées à un réseau indépendant. La fosse septique est de capacité réduite (1,2 mètres cubes), ne collecte pas les eaux usées et ne correspond pas aux normes, tandis que le système d’épandage est hors d’usage. La configuration des lieux impose la réalisation d’une installation d’épuration à cultures fixées, après suppression de l’installation existante, pour un coût évalué à 11.323,31 € TTC selon un devis a été établi par la société ASTEC.

De ces éléments il ressort que l’immeuble présente des désordres se traduisant par des odeurs nauséabondes et des phénomènes d’humidité dans la salle de bains et dans le séjour, provenant d’une installation d’assainissement non réglementaire et sous-dimensionnée par rapport à la taille de la maison vendue pour l’habitation d’au moins deux personnes. L’emménagement de Madame B à demeure, avec son fils, a provoqué un engorgement rapide de cette installation, mettant en cause la salubrité de l’immeuble.

Sur la garantie des vices cachés :

Selon l’article 1641 du code civil, 'le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait pas acquise ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus'.

Selon l’article 1643 du code civil : 'Il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que dans ce cas, il n’ait stipulé qu’il ne sera obligé à aucune garantie'.

L’acte de vente passé entre Madame X K Y et Madame F épouse B stipule en sa page 8, au bénéfice du vendeur, une exclusion de la garantie des vices même cachés pouvant affecter les constructions.

La maison vendue par Madame Y est affectée d’un vice de construction du réseau d’assainissement qui compromet la salubrité de l’habitation et en diminue tellement l’usage que Madame B prétend qu’elle en aurait donné un moindre prix, tenant compte des travaux nécessaires à la réfection totale du réseau d’assainissement pour l’adapter à la configuration des lieux.

L’expert a estimé que les odeurs nauséabondes et la mauvaise évacuation des toilettes de l’étage étaient forcément connues de Madame Y, cette dernière ayant eu forcément à connaître des problèmes d’humidité même en occupation saisonnière, à l’occasion de quelques jours successifs de vacances. L’expert a estimé aussi que des travaux de peinture avaient dû être réalisés pour maintenir la blancheur des murs de la cuisine mais ce fait n’est pas établi.

Monsieur Y a réalisé le réseau d’évacuation des eaux pluviales. Son relevé de carrière établit une formation d’apprenti en plomberie-chauffage en 1967 et un emploi dans une entreprise de pompes et assainissement pendant deux mois en 1984, mais pas de réelle qualification en la matière. Madame Y justifie de diverses factures de travaux dans les années 1990, puis en 1995-1996 à la suite de l’incendie. La fosse septique, en particulier, a été remplacée au mois d’octobre 1996 par la S.A.R.L. Picaud, qui a également remplacé les canalisations d’entrée et sortie de cette installation.

Madame Y ne peut être retenue à partir de ces éléments comme un vendeur professionnel. Elle a vendu une maison ancienne, spécifiée comme non raccordée à l’assainissement communal et dont l’acquéreur a déclaré faire son affaire personnelle sans recours contre quiconque. Madame Y a fait changer la fosse septique 4 ans avant la vente, par un professionnel dont il n’est pas argué de réserves sur l’état de l’installation s’avérant désormais défectueuse.

Les mauvais raccordements de l’installation et le sous-dimensionnement de la fosse septique ont généré des odeurs nauséabondes ainsi qu’un mauvais écoulement des eaux usées dont les manifestations ont pris une ampleur alarmante après un peu plus d’un mois d’occupation par Madame B et son fils.

Madame Y n’effectuait dans cette maison que de courts séjours de fins de semaines et de vacances. Elle prétend n’avoir pas subi les désordres dont se plaint Madame B et aucun élément objectif ne vient conforter les affirmations de l’expert sur ce point, le tribunal ayant justement retenu les désagréments d’une mauvaise évacuation des toilettes de l’étage, sans provoquer de dégâts apparents au moment de la vente, en raison de l’utilisation ponctuelle et réduite de la maison.

Pour ces motifs et ceux non contraires du jugement déféré il convient de le confirmer en ce qu’il a écarté la mauvaise foi de Madame Y se prévalant à juste titre de la clause d’exclusion de la garantie des vices cachés.

Sur les frais et dépens :

Il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ses dispositions sur les frais et dépens et l’article 700 du code de procédure civile.

Madame B-F qui succombe sera condamnée aux dépens d’appel, ainsi qu’à payer à Madame Y la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

***

Par ces motifs :

LA COUR :

Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant

Condamne Madame J F épouse B à payer à Madame I X K Y la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Madame J B-F aux dépens d’appel, recouvrés au bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,

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