Cour d'appel de Rennes, 22 novembre 2013, n° 11/02345

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 22 nov. 2013, n° 11/02345
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 11/02345

Texte intégral

8e Ch Prud’homale

ARRÊT N°593

R.G : 11/02345

Société SMURFIT KAPPA FRANCE SAS

C/

M. D-E Y

S.A. SYNERGIE

Confirmation

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2013

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur D-François SABARD, Président,

Madame Marie-Hélène L’HÉNORET, Conseiller,

Madame Catherine LEGEARD, Conseiller,

GREFFIER :

Monsieur Z A, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 07 Juin 2013

devant Madame Catherine LEGEARD, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 22 Novembre 2013, date à laquelle a été prorogé le délibéré successivement fixé aux 20 septembre, 11 octobre et 15 novembre précédents, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE et intimée à titre incident :

La Société SMURFIT KAPPA FRANCE SAS prise en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

représentée par Me Marina DAVID substituant à l’audience Me Christophe PLAGNIOL (CMS – Bureau Francis LEFEBVRE), Avocats au Barreau des HAUTS DE SEINE

INTIME et appelant à titre incident :

Monsieur D-E Y

XXX

XXX

comparant en personne, assisté de Mme Brigitte CHAMBRAGNE, Déléguée syndicale SUD RAIL, suivant pouvoir

INTERVENANTE forcée, de la cause :

La SA SYNERGIE prise en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

représentée par Mme B C, juriste de l’entreprise suivant pouvoir

FAITS ET PROCEDURE :

Entre le 11 octobre 2004 et le 19 février 2010, Monsieur Y a été mis à la disposition de la SAS SMURFIT KAPA dans le cadre de 60 contrats de mission conclus avec la société d’intérim SYNERGIE.

Suivant requête reçue au greffe le 7 mai 2010, Monsieur Y a saisi le Conseil de Prud’hommes de NANTES d’une action dirigée à l’encontre de la société utilisatrice afin d’obtenir principalement la requalification de ses contrats de mission en contrat à durée indéterminée, des rappels de salaire et des indemnités de rupture et dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 2 mars 2011, le Conseil de Prud’hommes de NANTES a :

— dit que les contrats de mission de Monsieur Y devaient être requalifiés en contrat à durée indéterminée à compter du 6 juin 2005,

— condamné la SAS SMURFIT KAPA FRANCE à payer à Monsieur Y

les sommes suivantes :

' 1.671,71 euros à titre d’indemnité de requalification d’un contrat de mission temporaire en contrat à durée indéterminée,

' 24,73 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période du 8 au 19 octobre 2007,

' 1.245,46 euros bruts à titre de prime d’ancienneté et de congés payés afférents,

' 5.392,83 euros bruts à titre de prime de treizième mois et de congés payés y

afférents pour la période de 2005 à 2008,

' 5.663,08 euros à titre de prime d’intéressement pour la période 2005 à 2009,

' 3.343,42 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 334,34

euros de congés payés y afférents,

' 1.625,27 euros à titre d’indemnité de licenciement,

' 10.030,26 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause

réelle et sérieuse,

' 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

' 900 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

les dites sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter de la date

de saisine du Conseil le 7 mai 2010 pour les sommes à caractère salarial et du

prononcé du jugement pour celles à caractère indemnitaire,

— ordonné l’exécution provisoire du jugement pour la totalité des condamnations à caractère salarial et à hauteur de la somme de 10.000 euros en ce qui concerne les condamnations à titre indemnitaire,

— débouté la SAS SMURFIT KAPA FRANCE de ses demandes reconventionnelles,

— condamné en outre d’office la SAS SMURFIT KAPA FRANCE à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à Monsieur Y dans la limite de six mois d’indemnités,

— laissé les dépens à la charge de la SAS SMURFIT KAPA FRANCE.

Suivant courrier recommandé posté le 31 mars 2011 , la société SMURFIT

KAPA FRANCE a interjeté appel de cette décision. En cause d’appel, elle a fait

citer la société d’intérim SYNERGIE en intervention forcée.

'''

Vu les conclusions n°2 déposées et oralement soutenues lors des débats par la SAS SMURFIT KAPPA FRANCE demandant à la Cour de :

— déclarer son appel recevable et bien fondé,

— infirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de NANTES en date du 2 mars 2011 dans l’ensemble de ses dispositions,

Statuant à nouveau,

A titre principal

— la déclarer recevable et bien fondée en sa demande d’intervention forcée de la Société SYNERGIE dans la procédure actuellement pendante devant la Cour d’appel de Rennes l’opposant à Monsieur Y suite à son appel à l’encontre du jugement du Conseil de Prud’hommes de Nantes en date du 2 mars 2011 ;

— dire les demandes de Monsieur Y formées à son encontre mal fondées;

En conséquence,

— la mettre hors de cause,

— débouter Monsieur Y de l’intégralité de ses chefs de demande formés à son encontre,

— condamner Monsieur Y à lui verser la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux dépens;

A titre subsidiaire :

— dire que l’arrêt à intervenir sera commun et opposable à la Société SYNERGIE;

— dire que la Société SYNERGIE sera tenue de la garantir de toute condamnation pouvant intervenir à son encontre dans le cadre de la procédure engagée par Monsieur Y,

En tout état de cause :

— débouter la Société SYNERGIE de ses demandes dirigées à son encontre,

Vu les conclusions déposées et oralement soutenues par Monsieur Y, demandant à la Cour de :

— confirmer en toutes ses dispositions la décision du Conseil de Prud’hommes de Nantes du 2 mars 2011 sauf en ce qu’elle condamne la société SMURFIT KAPPAFRANCE à lui payer la somme de 5663,08 € à titre de prime d’intéressement,

— faire droit à son appel incident formé sur ce point et condamner la société

SMURFIT KAPPAFRANCE à lui verser la somme de 5.663,08€ à titre de dommages et intérêts pour défaut de paiement de la prime d’intéressement,

— Subsidiairement, confirmer la décision entreprise sur ce point également.

Y additant

— condamner la Société SMURFIT KAPPAFRANCE à lui verser la somme de 1500 € au titre des frais irrépétibles exposés à hauteur d’appel, et ce sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile

— la condamner aux entiers dépens,

Vu les conclusions récapitulatives n°2 déposées et oralement soutenues lors des débats par la SA SYNERGIE demandant à la Cour de :

— déclarer sa mise en cause irrecevable,

— la mettre hors de cause,

— condamner la Société SMURFIT KAPPA France à lui payer 2000 € au titre de l’article 700 CPC,

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la mise en cause de la société SYNERGIE :

La société SYNERGIE fait valoir que la demande en intervention forcée formée par la société SMURFIT KAPPA France est irrecevable car ne respectant pas les conditions fixées à l’article 555 du code de procédure civile; en outre, elle observe que Monsieur Y ne formule aucune demande à son encontre et que si la société SMURFIT KAPPA France entend lui opposer une inexécution contractuelle, il lui appartient de saisir le Tribunal de commerce.

La société SMURFIT KAPPA France réplique sa demande d’intervention forcée est conforme aux dispositions de l’article 331 du code de procédure civile et recevable en cause d’appel.

Aux termes de l’article 555 Code de Procédure Civile les personnes qui n’ont pas été parties ou représentées en première instance ne peuvent être appelées en intervention forcée en cause d’appel que si l’évolution du litige implique leur mise en cause, cette évolution se caractérisant par la révélation d’une circonstance de fait ou de droit née du jugement ou postérieure à celui-ci,modifiant les données juridiques du litige.

En l’occurrence, aucun fait de nature à modifier les données du litige ne s’est révélé après le jugement du Conseil de Prud’hommes. Si une modification de la jurisprudence peut provoquer une évolution du litige, force est de constater que tel n’est pas le cas.

En effet, si la société SMURFIT KAPPA France invoque un arrêt de la Cour de Cassation en date du 24 avril 2013, au demeurant postérieur à l’assignation en intervention forcée délivrée le 31 janvier2013, cette décision qui statue sur une condamnation in solidum sollicitée par le salarié qui demandait la requalification de ses contrats de mission à l’égard des deux sociétés utilisatrice et temporaire, ne constitue pas une circonstance nouvelle de droit alors même qu’en l’espèce, Monsieur Y ne formule ne formule aucune demande à l’encontre de la société d’intérim SYNERGIE.

L’appel en intervention forcée de la société SYNERGIE doit ainsi être déclarée irrecevable.

Sur la requalification des contrats de mission :

Monsieur Y sollicite quant à lui la confirmation de la décision soulignant que la société SMURFIT KAPPA France avait intégré les intérimaires dans son mode de gestion permanent des ressources humaines et sans se donner les effectifs suffisants en COI pour faire face à son activité normale. Il soutient que du fait de la succession de ses contrats et du poste de broyeur occupé depuis le 3 octobre 2005, il faisait partie de l’effectif nécessaire au fonctionnement normal de l’entreprise.

Bien qu’ayant admis en première instance que la requalification des contrats de mission était encourue à compter du 3 octobre 2005, date à laquelle Monsieur Y avait occupé le poste de broyeur, la société SMURFIT KAPPA France conteste désormais toute requalification; elle soutient en effet que les motifs du recours aux contrats de mission, à savoir remplacement de salariés absents ou accroissement temporaire d’activité sont parfaitement conformes aux dispositions légales compte tenu, s’agissant du second motif, des variations cycliques d’activité imprévisibles liées à la fois au fonctionnement de ses clients les plus importants et aux contraintes organisationnelles de sa production. Elle souligne en outre que Monsieur Y n’a pas toujours occupé le même poste.

***

Les contrats de mission, pour être valables, doivent être conclus pour l’un des motifs prévus par les dispositions légales et ne peuvent avoir pour objet de pourvoir un emploi relevant de l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice.

En l’espèce, les soixantes contrats de mission ont été conclus soit pour le remplacement de salariés absents soit pour accroissement temporaire d’activité, motifs visés à l’article L1251-6 du Code du Travail.

Le remplacement de salariés absents n’est pas soumis à une condition d’urgence et il peut y être recouru, même si l’absence est prévisible, y compris en conséquence pour la période des congés payés annuels sauf si le recours aux travailleurs temporaires révèle un sous effectif chronique au sein de l’entreprise utilisatrice.

Dés lors, si le contrat de mission conclu du 6 juin au 17 juin 2005 pour le remplacement de M. X, en congé annuel, faisant suite à des contrats de mission pour le remplacement du même salarié en arrêt maladie n’apparaît pas irrégulier, force est de constater que cette mission a été suivie par deux contrats conclus du 20 juin au 16 juillet 2005 et du 8 août au 30 septembre 2005 pour un accroissement temporaire d’activité justifié par la nécessité pour le premier de « Renforcement de personne lié aux congés d’été » et pour le second de « Renfort d’effectif lié à la surcharge du planning dû aux congés d’été ». Cet « accroissement temporaire d’activité » n’avait donc pour objectif que d’assurer l’activité de l’entreprise nonobstant l’absence des salariés en congé ce qui impliquait l’obligation pour la société SMURFIT KAPPA France de recourir à des contrats de mission de remplacement ce qu’elle n’a pas fait. Le motif d’accroissement temporaire d’activité n’étant pas réel, la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée s’impose en conséquence pour le moins à compter du 20 juin 2005. Au demeurant, la Cour relève que la société SMURFIT KAPPA France ayant reconnu en première instance que Monsieur Y occupait le même poste de broyeur depuis octobre 2005, fait dont elle ne peut en cause d’appel dénier la réalité, la succession des contrats de mission pendant plus de quatre ans démontre que l’intéressé occupait un emploi relevant de l’activité normale et permanente de l’entreprise.

C’est donc à juste titre que le Conseil de Prud’hommes a accordé à Monsieur Y l’indemnité de requalification prévue par l’article L1251-41du Code du Travail égale à un mois de salaire complétée par des dommages et intérêts à hauteur de 5.000 euros, le préjudice du salarié maintenu pendant près de cinq ans dans une situation de précarité accentuée en outre par les courtes durées des missions n’étant pas contestable.

Sur la rupture du contrat de travail :

La cessation de la relation salariale requalifiée en contrat à durée indéterminée à l’issue du dernier contrat de mission s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse puisque sans lettre de licenciement étant observé qu’il importe peu que Monsieur Y a refusé de poursuivre la relation dans le cadre de missions d’intérim dès lors que du fait de la requalification, il doit être fait application des règles relatives à la rupture d’un contrat à durée indéterminée.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qui’il a accordé les indemnités de rupture (préavis et indemnité de licenciement) et des dommages et intérêts sur le fondement de l’article L1235-3 du code du travail, la somme allouée correspondant à l’indemnité minimale de six mois de salaire.

Les conditions d’effectif et d’ancienneté du salarié prévues à l’article L1235-4 du Code du Travail étant réunies, le Conseil de Prud’hommes doit être approuvé en ce qu’il a ordonné le remboursement des indemnités de chômage.

Sur les demandes salariales :

Monsieur Y bénéficiant d’un contrat à durée indéterminée depuis juin 2005, le conseil de prud’hommes ne peut qu’être approuvé en ce qu’il a fait droit à ses demandes en paiement de primes et avantages qui auraient du lui être versées à ce titre, à savoir 13 ème mois (due après six mois de présence), primes d’ancienneté, primes d’intéressement (qu’il n’y a pas lieu de requalifier en dommages et intérêts) étant observé que la différence entre les dates de requalification retenues par le conseil de prud’hommes (6 juin 2005) et la Cour (20 juin 2005) n’a pas d’incidence sur les montants accordés.

S’agissant du rappel de salaire du 8 au 22 octobre 2007, la société SMURFIT KAPPA France qui avait reconnu en première instance que le taux applicable était bien de 8,80 € prétend devant la Cour que ce taux était bien de 8,44 € sans apporter aucune justification. En tout état de cause, les contrats de mission versés aux débats établissent que Monsieur Y était rémunéré sur la base d’un taux horaire de 8,80 € depuis le 1 er mars 2007 ; bénéficiant d’un contrat à durée indéterminée, le salarié ne pouvait se voir imposer une réduction de ce taux au demeurant appliqué de nouveau dès la mission suivante.

Le jugement sera donc également confirmé sur l’intégralité des dispositions

relatives aux demandes de nature salariale.

* * *

Sur les dépens et l’article 700 du Code de Procédure Civile :

La SAS SMURFIT KAPPA FRANCE succombant en ses dépens supportera la charge des dépens de première instance et d’appel.

L’équité commande de faire application de l’article 700 du Code de Procédure Civile et d’allouer à Monsieur Y la somme de 1.200 € au titre des frais irrépétibles d’appel, montant s’ajoutant à l’indemnité accordée par le premier juge.

Il sera également accordé à la société SYNERGIE une indemnité de 1.200 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Déclare recevable l’appel interjeté par la SAS SMURFIT KAPPA FRANCE à l’encontre du jugement rendu le 2 mars 2011 par le Conseil de Prud’hommes de Nantes.

Déclare irrecevable l’action en intervention forcée formée par la SAS SMURFIT KAPPA FRANCE à I’encontre de la SA SYNERGIE.

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la SAS SMURFIT KAPPA FRANCE à verser à Monsieur Y et à la SA SYNERGIE la somme de 1.200,00 euros chacun au titre des frais irrépétibles d’appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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Textes cités dans la décision

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  2. Code du travail
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