Cour d'appel de Rennes, 2ème chambre, 9 décembre 2016, n° 13/07568

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 2e ch., 9 déc. 2016, n° 13/07568
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 13/07568
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

2e Chambre

ARRÊT N°609

R.G : 13/07568

XXX

C/

M. A Y

Mme C Z

Mme X Y

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES ARRÊT DU 9 DÉCEMBRE 2016 COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN,

Assesseur : Madame Isabelle LE POTIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Béatrice LEFEUVRE, Conseiller,

GREFFIER :

Monsieur E F, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 4 octobre 2016, devant Madame Béatrice LEFEUVRE, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 9 décembre 2016 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats, après prorogation du délibéré ****

APPELANTE :

XXX

dont le siège social est XXX

XXX

venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE DE L’OUEST, dont le siège social est 15 boulevard de la Boutière 35760 SAINT-GRÉGOIRE

Représentée par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP PHILIPPE COLLEU DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Chrystelle MARION de la SCP MARION LEROUX SIBILLOTTE ENGLISH, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

INTIMÉS :

Monsieur A Y

XXX

XXX

Madame X Y

XXX

XXX

Représentés par Me Xavier DENECKER, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

Madame C Z

née le XXX à LAMBALLE

XXX

XXX

Représentée par Me Patrick LEMASSON de la SELARL LEMASSON & ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

EXPOSE DU LITIGE

Pour assurer le financement d’un navire de pêche destiné à l’activité professionnelle de Monsieur A Y, la Banque Populaire de l’Ouest(ci après ' la Banque') a consenti à celui-ci et à sa compagne Madame C Z, par acte du 22 mai 2002, un prêt professionnel de 98 000 € remboursable par 120 mensualités de 1203,38 € à compter du 15 décembre 2002, après règlement de cinq échéances de 566,77 €, pour la période du 15 juin 2002 au 15 novembre 2002, le taux d’intérêt contractuel étant de 6,1%. Par acte du 20 juillet 2005, Madame X Y s’est portée caution solidaire de tous engagements de son fils A Y, à hauteur de 20 000 €, pour une durée de dix ans.

Le prêt était par ailleurs garanti par une hypothèque maritime.

A Y était également titulaire d’un compte courant auprès de la BPO.

A la suite du naufrage du navire, les échéances ont cessé d’être payées à compter du 15 juin 2006.

La Banque populaire de l’Ouest, après avoir délivré à Monsieur Y et Madame X Y des mises en demeure, a saisi le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc par acte du 7 juin 2011 d’une action en paiement dirigée contre les emprunteurs principaux et la caution.

Par jugement du 17 septembre 2013, le tribunal de grande instance de Saint- Brieuc a :

Au titre du prêt professionnel litigieux souscrit le 22 mai 2002 :

— condamné solidairement Monsieur A Y, Madame C Z et Madame X Y à payer à la Banque Populaire de l’Ouest une somme de 20 000 Euros, qui à l’encontre de Monsieur A Y, Madame C Z portera intérêts au taux contractuel de 6,10% à compter du 7 juin 2011 ;

— condamné solidairement Monsieur A Y et Madame C Z à payer à la Banque Populaire de l’Ouest le complément de ce qui est dû à cette banque au titre de ce prêt professionnel litigieux, à savoir une somme de 63 988,72 Euros, avec intérêts au taux contractuel de 6,10 % à compter du 7 juin 2011 ;

— condamné la Banque Populaire de l’Ouest à payer à Monsieur A Y une somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts ;

— condamné la Banque Populaire de l’Ouest à payer à Madame C Z une somme de 45 000 € à titre e dommages et intérêts ;

Au titre du découvert en compte courant :

— condamné Monsieur A Y à payer à la Banque Populaire de l’Ouest une somme de 16 301,30 € ;

— condamné la Banque Populaire de l’Ouest à payer à Monsieur A Y une somme de 2 276,04 Euros à titre de dommages et intérêts ;

Par ailleurs :

— dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens ;

— débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 23 octobre 2013, la Banque Populaire de l’Ouest aux droits de la quelle intervient la société Intrum Justitia Debt Finance AG, (ci-après 'la Banque ') devant la cour, a interjeté appel de cette décision.

En l’état de ses dernières conclusions du 15 juin 2016, l’appelante demande à la cour :

— de décerner acte que la société Intrum Justitia Debt Finance AG, Société Anonyme, dont le siège social est situé à XXX, XXX, Suisse, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de ZUG Suisse sous le N°CH 100.023.266 vient aux droits de la Banque Populaire de l’Ouest , société coopérative de banque populaire dont le siège social est situé XXX, 35760 Saint-Grégoire, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Rennes (35000) sous le numéro 549 200 400, suivant acte sous seing privé en date du 15/02/2016 ;

En conséquence :

'S’agissant du prêt professionnel :

— de réformer le jugement rendu le 13 septembre 2013 par le tribunal de grande instance de Saint Brieuc en ce qu’il n’a pas accueilli l’ensemble du quantum revendiqué par la Banque Populaire de l’Ouest et en ce qu’il a retenu un manquement au devoir de mise en garde ;

— de confirmer en revanche la condamnation de Madame X Y au titre de ce prêt à la somme de 20 000 € ;

— de débouter tant Monsieur A Y que Madame X Y et Madame C Z de toute demande de condamnation de la société Intrum Justitia Debt Finance AG venant aux droits de la Banque Populaire de l’Ouest ;

— de condamner solidairement au titre du prêt professionnel Monsieur A Y et Madame C Z et Madame X Y à régler à la société Intrum Justitia Debt Finance AG venant aux droits de la Banque Populaire de l’Ouest , au titre du prêt professionnel, la somme de 83 988,72€, outre les intérêts au taux de 6,10 % à compter du 11 décembre 2010jusqu’à la date effective de paiement, étant précisé que la condamnation de Madame X Y sera limitée à la somme de 20 000 € ;

' S’agissant du débit bancaire :

— de réformer au titre du découvert du compte courant le jugement en ce qu’i1 a reconnu une faute à ce titre de la Banque Populaire de l’Ouest ;

— de débouter tant Monsieur A Y que Madame X Y et Madame C Z de toute demande reconventionnelle de condamnation de la société Intrum Justitia Debt Finance AG venant aux droits de la Banque Populaire de l’Ouest ;

— de condamner Monsieur A Y à régler à la société Intrum Justitia Debt Finance AG venant aux droits de la Banque Populaire de l’Ouest, au titre du compte courant, la somme de 16 301,30 €, outre les intérêts au taux de 5,59% à compter du 11 décembre 2010 jusqu’à la date effective de paiement ;

— de condamner solidairement Monsieur A Y, Madame C Z et Madame X Y à régler à la société Intrum Justitia Debt Finance AG venant aux droits de la Banque Populaire de l’Ouest la somme de 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— de condamner solidairement Monsieur A Y, Madame C Z et Madame X Y aux entiers dépens.

Monsieur A Y et Madame X Y, par conclusions communes d’intimés et d’appelants incident, du 20 mars 2014, demandent à la cour:

Vu les articles 1134, 1147 et 2288 du code civil, – de constater et au besoin de dire et juger que la Banque Populaire de l’Ouest a commis une faute engageant sa responsabilité en octroyant le prêt objet du litige à Monsieur Y, co-emprunteur ;

— de condamner en conséquence la Banque Populaire de l’Ouest à verser à Monsieur A Y la somme de 65.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chance ;

— de constater et au besoin de dire et juger que la Banque Populaire de l’Ouest a commis une faute engageant sa responsabilité en laissant le compte bancaire de Monsieur Y présenter un solde débiteur important ;

— de condamner en conséquence la Banque Populaire de l’Ouest à verser à Monsieur A Y la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi de ce fait ;

— de débouter la Banque Populaire de l’Ouest de l’ensemble des demandes formulées à l’encontre de Madame X Y au titre du cautionnement;

— de débouter la Banque Populaire de l’Ouest de ses demandes plus amples ou contraires ;

— de condamner la Banque Populaire de l’Ouest à verser à Monsieur A Y et à Madame X Y, chacun, la somme de 2.000 €, en cause d’appel, au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— de condamner la Banque Populaire de l’Ouest aux entiers dépens de

première instance et d’appel.

Par dernières conclusions du 20 mars 2014, Madame C Z, intimée et formant appel incident, demande à la cour :

Vu l’article 1147 du code civil,

Vu l’article 1315 du code civil,

— de confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a jugé que la Banque Populaire de l’Ouest (BPO) a manqué à son devoir de mise en garde à l’égard de Mme Z,

— de dire dès lors que la BPO a commis une faute engageant sa responsabilité en sollicitant le concours de Mme Z en qualité de co-empruntrice du prêt professionnel affecté à l’activité de Monsieur Y, son concubin de l’époque,

— en conséquence, de condamner la BPO à verser à Mme Z des dommages et intérêts à hauteur de 65 000 € au lieu et place des 45 000 €, alloués par le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc dans le cadre du jugement attaqué,

Y ajoutant :

— de condamner la BPO à payer à Madame Z la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du NCPC,

— de condamner la BPO aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens et de l’argumentation des parties, la cour se réfère expressément à leurs dernières conclusions respectives. MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le montant des sommes dues au titre du prêt et du solde débiteur du compte courant

La Banque réclame au titre du prêt à ce titre, outre le principal non contesté par les emprunteurs, l’intégralité des intérêts contractuels à compter du 11 décembre 2010, et non, comme retenu par le tribunal, à compter de l’assignation du 7 juin 2011.

Le motif retenu par le premier juge, à savoir la carence de la Banque à agir en paiement depuis plusieurs années, ne peut cependant faire obstacle à l’application des dispositions contractuelles de ce prêt professionnel, qui prévoient le paiement d’intérêts de retard sur toute somme due, au taux contractuel qui peut être majoré de 3%, l’application de cette dernière disposition n’étant pas sollicité par la banque.

En conséquence, et au vu du décompte produit par la banque, le montant total de la dette au titre du prêt que les emprunteurs devront solidairement régler s’élève à 83 988,72 € avec intérêts au taux contractuel de 6,10% sur la base du principal de 67 492,15 € à compter du 11 décembre 2010.

S’agissant de la somme due au titre du compte courant, par Monsieur A Y en tant que titulaire du compte, il est produit par la Banque la fiche d’ouverture de ce compte, la quelle ne comporte aucune disposition quant à la perception d’intérêts conventionnels.

Monsieur Y qui ne s’en prévaut que dans les motifs de ses conclusions pour solliciter le débouté des intérêts contractuels, soutient surtout que la banque a commis une faute en laissant s’accroître le solde débiteur de ce compte courant, et demande désormais que la somme qui lui été allouée par le tribunal à titre de dommages et intérêts en réparation de ce préjudice, soit 2 276,04 €, équivalant au montant des intérêts, soit augmentée par la cour à 10 000€.

La Banque conclut à la réformation du jugement sur ce point, et, soutenant n’avoir commis aucune faute, conclut au débouté de la demande de dommages et intérêts et à la condamnation de Monsieur Y au paiement de la somme de 16 301,30 € augmentée des intérêts au taux de 5,59% à compter du 11 décembre 2010.

Il ressort des seuls éléments produits par la Banque, soit la fiche d’ouverture de compte et la mise en demeure adressée à Monsieur Y le 23 janvier 2007, qu’à cette date, le solde débiteur de son compte courant s’élevait à 13 868,19 €.

Il n’est pas contesté que ce compte était dédié à l’activité professionnelle de Monsieur Y puisque les échéances de remboursement du prêt y étaient prélevées, et que cette activité venait d’être interrompue par le naufrage du bateau de pêche, survenu en mai 2006, de sorte que le solde débiteur du compte a pu s’en trouver augmenté.

Aucune faute de la banque ne peut donc être retenue à ce titre.

A l’inverse, dès lors que le décompte de sa créance dont la banque fait état dans ses conclusions, arrêté au 10 décembre 2010 est constituée d’un principal de 13 525,56 € et d’intérêts au taux de 5,59% qui n’est pas contractuellement prévu, le montant de la condamnation sera limité à 13 525,56 €, avec intérêts au taux légal à compter du 8 janvier 2007, date de la mise en demeure adressée à monsieur Y.

Sur la responsabilité de la banque à l’égard de chacun des emprunteurs au titre de son obligation de mise en garde.

La banque reproche au tribunal d’avoir fait droit au moyen tiré de son manquement à son obligation de mise en garde des emprunteurs à l’égard du risque d’endettement excessif, soutenant que l’un et l’autre avaient la qualité d’emprunteur averti, et que, au surplus, l’endettement résultant du prêt ne présentait pas de risque excessif d’endettement, comme en témoigne le fait que ce n’est que le naufrage du navire financé qui est à l’origine du défaut de paiement des échéances, lesquelles ont pu être remboursées jusque là.

S’agissant de Monsieur Y, ce dernier conteste que sa qualité antérieure de professionnel salarié de la pêche permette de le qualifier d’emprunteur averti.

Il fait valoir ensuite que le montant des échéances mensuelles de remboursement du prêt représentait 45% des revenus du foyer constitué de lui même et de Madame Z ainsi que de leur petite fille. Il sollicite donc désormais l’augmentation des dommages et intérêts à la somme de 65 000 €.

L’expérience de la pêche acquise par Monsieur Y ne permet effectivement pas de le qualifier d’emprunteur averti, dès lors qu’il avait exercé son activité comme salarié, et ne disposait de ce fait des compétences en matière de gestion et d’appréciation des risques financiers éventuels résultant de l’emprunt qu’il voulait souscrire, par comparaison avec les ressources procurés par l’entreprise qu’il voulait ainsi créer.

Il ressort cependant des informations obtenues par la Banque lors de la demande du prêt en cause déposé par Monsieur Y qu’elle s’est renseignée sur la rentabilité de l’exploitation de l’entreprise de pêche qu’il voulait créer, sur le matériel dont il disposait déjà, sur son expérience professionnelle certaine, et sur ses capacités de remboursements compte tenu des débouchés de vente dont il disposait déjà également.

Ces renseignements recueillis démontrent que la Banque s’est assurée du caractère proportionné du risque lié à l’endettement, au vu des éléments fournis par Monsieur Y lui même.

Cette corrélation entre l’endettement mesuré et les capacités financières de l’entreprise ainsi créée en mai 2002 est confirmée par le fait que c’est à compter du naufrage du navire, en mai 2006, que les difficultés de remboursement des échéances du prêt ont commencé.

La banque ne pouvait anticiper cet événement, à l’origine de l’endettement devenu excessif de ce fait.

En conséquence, lors de la souscription du prêt, l’endettement que Monsieur Y souhaitait contracter n’était pas excessif et risqué par rapport à ce qu’il pouvait espérer obtenir par la création de son entreprise de pêche.

La Banque ne peut donc se voir reprocher un manquement par rapport à son obligation de mise en garde de Monsieur Y, en l’absence d’un risque d’endettement excessif.

Le jugement déféré, qui a fait droit à la demande de Monsieur Y à ce titre, sera infirmé sur ce point.

S’agissant du manquement de la Banque à son obligation de mise en garde de Madame Z, il sera retenu que celle-ci ne peut, du seul fait qu’elle exerçait la profession de poissonnière en tant que gérante, et associée d’une SARL à hauteur de 50% être qualifiée d’emprunteur averti.

En raison de la nature particulière de l’entreprise et de l’activité de patron pêcheur que voulait créer son compagnon, tributaire d’aléas spécifiques, sa propre activité de gérante d’un commerce de poissonnerie ne la prédisposait pas à avoir des compétence financières, et à apprécier les risques posés par l’endettement né de l’emprunt pour lequel son concours était sollicité, par rapport à la rentabilité de l’entreprise dans la gestion de laquelle elle n’était pas appelée à intervenir. A l’égard de Madame Z, emprunteur profane, la Banque devait donc vérifier le risque posée par l’emprunt sollicité, et, s’il apparaissait excessif par rapport à la situation de la candidate à l’emprunt, la mettre en garde.

Or la banque n’a sollicité aucun élément d’information quant à la situation de ressources et de charges de Madame Z, laquelle justifie par ses avis d’imposition des année 2001 et 2002 que ses revenus mensuels se limitaient à 1307 € pour 2001 et 1067 € pour 2002, alors que le remboursement de l’échéance mensuelle du prêt était de 1203,38 € ; que par ailleurs, elle ne disposait d’aucun patrimoine immobilier et que ses économies étaient aussi très limitées.

Le risque patent de surendettement occasionné par le prêt envisagé nécessitait donc une information particulière de la Banque à l’égard de Madame Z, et la carence de l’établissement financier à ce titre a fait perdre à cette dernière une chance d’apprécier les risques encourus et de consentir, ou non, au prêt en cause en connaissance de la situation.

La perte de cette chance justifie la condamnation de la Banque à lui payer des dommages et intérêts tels qu’arbitrés par le tribunal, soit 45 000 €, sans qu’il soit justifié d’allouer la somme augmentée devant la cour à 65 000 €.

Le montant de la condamnation confirmée de la Banque entrera en compensation, le cas échéant, avec la somme qui pourrait être réclamée à Madame Z en exécution de sa condamnation solidaire au paiement du prêt.

Sur la somme réclamée à la caution et la contestation de la validité de son engagement formée par celle-ci.

Madame X Y, qui s’est portée caution de A Y à hauteur de 20 000 €, conteste la validité de cet engagement, en raison de la formulation de la mention manuscrite qu’elle a apposée sur l’acte de caution, selon lequel elle s’est portée caution dans la limite de 20 000 € 'couvrant le paiement du principal des intérêts et le cas échéant des pénalités ou des intérêts de retard.'

Elle soutient que l’absence de virgule entre 'le principal’ et 'les intérêts’ justifie l’annulation de son engagement pour inobservation des dispositions des articles L 341-2 et L 341-3 du code de la consommation.

L’absence de cette virgule, qui résulte manifestement d’une erreur matérielle, n’affecte cependant pas la validité de l’engagement dès lors qu’elle ne le prive pas de son sens.

Madame Y sera en conséquence condamnée solidairement avec A Y à payer à la Banque la somme de 20 000 €, le jugement déféré étant confirmé sur ce point.

L’appelante principale et les intimés appelants incident, qui succombent partiellement sur leurs prétentions respectives, devront conserver à leur charge les dépens de première instance et d’appel qu’ils ont dû exposer.

Il ne sera en conséquence pas fait droit aux demandes formées au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a condamné la Banque Populaire de l’Ouest aux droits de laquelle se trouve la société Intrum Justitia à payer à Madame C Z, à titre de dommages et intérêts, la somme de 45 000 €, qui viendra en compensation du montant de la condamnation prononcée ci- après à l’encontre de cette dernière ; Confirme le jugement déféré en ce qu’il a rejeté le moyen tendant à l’annulation du cautionnement souscrit par Madame X Y et condamné celle-ci aux causes de son engagement ;

Infirme pour le surplus le jugement déféré,

et statuant à nouveau,

— Condamne solidairement Monsieur A Y, Madame C Z, Madame X Y, cette dernière à hauteur de 20 000€, à payer à la société Intrum Justitia la somme de 83 988,72 € avec intérêts au taux contractuel de 6,10% sur la base du principal de 67 492,15 € à compter du 11 décembre 2010, au titre du prêt professionnel ;

— Condamne Monsieur A Y à payer à la société Intrum Justitia la somme de 13 525,56 €, avec intérêts au taux légal à compter du 8 janvier 2007 au titre du solde débiteur du compte courant ;

— déboute les parties du surplus de leurs demandes respectives ;

Dit que chacune des parties conservera à sa charge ses propres dépens exposés en première instance et en appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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