Cour d'appel de Rennes, 3e chambre commerciale, 20 octobre 2020, n° 18/06015

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 3e ch. com., 20 oct. 2020, n° 18/06015
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 18/06015
Importance : Inédit
Dispositif : annulation
Date de dernière mise à jour : 29 septembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N°389

N° RG 18/06015 – N° Portalis DBVL-V-B7C-PET4

EURL LES OEUFS NATURE

C/

Société DELAERE PHILIPPE

SA BANQUE CIC OUEST

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me DEMIDOFF

Me SIROT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2020

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre, rapporteur,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller,

GREFFIER :

Mme Julie ROUET, lors des débats et Mme Isabelle GESLIN OMNES lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 06 Juillet 2020 devant Monsieur Alexis CONTAMINE, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 20 Octobre 2020 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

EURL LES OEUFS NATURE, inscrite au RCS de Saint-Nazaire sous le N° 519 147 714, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés au siège

[Adresse 7]

[Localité 3]

Représentée par Me Eric DEMIDOFF de la SCP GAUVAIN-DEMIDOFF, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Franck LOPEZ, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES :

Société DELAERE PHILIPPE pris en sa qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l’exécution du plan de redressement judiciaire de la Société LES OEUFS NATURE

[Adresse 6]

[Adresse 5]

[Localité 4]

N’ayant pas constitué avocat bien que régulièrement assigné par acte d’huissier de Justice en date du 13 décembre 2018

SA BANQUE CIC OUEST

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Pierre SIROT de la SELARL RACINE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES

FAITS ET PROCEDURE :

La société Banque CIC Ouest (le CIC), a accordé certains prêts à l’Eurl Les Oeufs nature dont notamment :

1°) Prêt n° 1401820171702 :

Date du prêt : 10 janvier 2011,

Durée : 84 mois,

Montant en principal : 200.000 euros,

Taux fixe : 3,57 %,

2°) Prêt n°1401820171703 :

Date du prêt 18 janvier 2011,

Durée: 144 mois,

Montant en principal : 200.000 euros

Taux fixe : 3,98 %.

La société Les 'ufs nature a été placée en redressement judiciaire le 15 janvier 2014, la société Delaere étant désignée mandataire judiciaire.

Le CIC a déclaré ses créances par lettre du 10 février 2014. Elles ont été contestées par la société Les 'ufs nature.

Par ordonnance du 28 septembre 2015, le Juge commissaire a :

— Ordonné la jonction des différentes procédures de contestation dont il était saisi,

— S’est déclaré incompétent pour connaître des contestations formées par la société Les Oeufs nature,

— Ordonné le sursis à statuer sur le sort des contestations et a invité le CIC à saisir le tribunal de commerce de Saint Nazaire dans les conditions de l’article R 624-5 du code de commerce,

— Pris acte de ce que l’indemnité conventionnelle ne sera exigible qu’en cas de défaillance dans le paiement des échéances du plan de redressement et que cette somme sera en toute hypothèse réglées qu’en fin de plan,

— Dit que sa décision sera mentionnée sur la liste des créanciers,

— Dit que les dépens seront tirés en frais privilégiés de procédure,

— Ordonné le dépôt au greffe de l’ordonnance,

— Dit que l’ordonnance sera notifiée par LRAR aux parties et qu’un avis sera adressé au mandataire judiciaire.

Le CIC a assigné la société Les Oeufs nature en demandant l’admission des créances relatives aux prêts relatives à l’admission des créances déclarées par le CIC, au passif de la société Les Oeufs nature, en exécution des prêts n°1401820171702 et 1401820171703.

Le 28 janvier 2015, le tribunal de commerce de Saint-Nazaire a arrêté un plan de redressement d’une durée de 8 ans, la société Delaere étant désignée commissaire à l’exécution du plan. Par ordonnance du 2 mai 2017, le président du tribunal de commerce de Saint-Nazaire a prononcé la clôture du redressement.

Par jugement du 27 juin 2018, le tribunal de commerce de Saint-Nazaire a :

— Dit le CIC recevable et bien fondée en ses conclusions, fins et prétentions,

— Dit la société Les Oeufs nature et la société Delaere, ès qualités, irrecevables et mal fondées en leur contestation de l’admission des créances du CIC,

— Ordonné l’admission de la créance du CIC au passif de la société Les Oeufs nature , en exécution du prêt n° 1401820171702 contracté le 18 janvier 2011, à titre privilégié et définitif à titre échu à hauteur de la somme de 5.267,20 euros, d’une part, et à échoir à hauteur de la somme de 173 .278,15 euros, d’autre part, et Dit que la somme au titre de l’indemnité conventionnelle ne sera exigible qu’en cas de défaillance dans le paiement des échéances du plan de redressement, et que cette somme ne sera en toute hypothèse réglée qu’en fin de plan,

— Ordonné l’admission de la créance du CIC au passif la société Les Oeufs nature , en exécution du prêt n° 1401820171703, à titre chirographaire et définitif, à titre échu à hauteur de 3.638,22 euros, d’une part, et à échoir à hauteur de la somme de 225.939,33 euros, d’autre part, et Dit que la somme au titre de l’indemnité conventionnelle ne sera exigible qu’en cas de défaillance dans le paiement des échéances du plan de redressement, et que cette somme ne sera en toute hypothèse réglée qu’en fin de plan,

— Dit la société Les Oeufs nature mal fondée en sa demande d’indemnisation formée à l’encontre du CIC, et l’en a déboutée,

— Condamné la société Les Oeufs nature à verser au CIC la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— Ordonné l’exécution provisoire du jugement,

— Condamné la société Les Oeufs nature aux entiers dépens.

La société Les oeufs nature a interjeté appel le 12 septembre 2018.

Le 30 avril 2020, le président de la 3ème chambre civile de la cour d’appel de Rennes a informé les parties qu’il avait décidé de recourir à la procédure sans audience prévue par les dispositions de l’article 8 de l’ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020.

Par lettre du 30 avril 2020, l’avocat de la société Les Oeufs nature a indiqué qu’il s’opposait à la procédure sans audience. L’affaire à été fixée à l’audience du 6 juillet 2020.

Le 11 juin 2020, au vu des dispositions des articles L. 624-2 et L. 624-3 du code de commerce et des principes régissant l’excès de pouvoir, il a été demandé aux parties de faire valoir, pour le 22 juin 2020 au plus tard, toutes observations utiles sur :

— l’interprétation des demandes tendant à la confirmation du jugement en ce qu’il a décidé de l’admission des créances,

— le cas échéant, sur le pouvoir de la cour d’appel, saisie sur recours contre une décision du juge du fond, de statuer sur une demande d’admission de créances au passif de la société Les 'ufs nature.

Les dernières conclusions de la société Les Oeufs nature sont en date du 3 juillet 2020. Les dernières conclusions du CIC sont en date du 1er juillet 2020.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 juillet 2020.

PRETENTIONS ET MOYENS :

La société Les 'ufs nature demande à la cour de :

— Dire et Juger irrecevable la demande subsidiaire relative à l’infirmation du jugement exclusivement en ce qui concerne l’admission de la créance et, statuant de nouveau, d’inviter la partie la plus diligente à saisir le Juge-commissaire à l’effet d’admettre lesdites créances conformément aux termes du jugement dont appel et de l’arrêt à intervenir,

— Infirmer en toutes ses dispositions le jugement,

— Dire et juger que le CIC est irrecevable en son exception de prescription par application des principes de l’Estoppel,

— Dire et juger l’action de la société Les Oeufs nature recevable et non prescrite,

— Prononcer la nullité de la stipulation d’intérêt conventionnelle et subsidiairement la déchéance du droit aux intérêts du CIC de tout droit à intérêts conventionnels sur les deux prêts d’un montant de 200.000 euros consenti à la société Les 'ufs nature,

— Dire et juger qu’au titre de ce prêt, la société Les 'ufs nature est redevable que de l’intérêt au taux légal si ce dernier est inférieur au taux conventionnel,

— Dire et Juger que l’excédent d’intérêts versés au CIC, augmenté du taux d’intérêt légal à compter de chaque échéance et arrêté à la date du Jugement d’ouverture de la procédure, sera imputé sur le capital du prêt restant dû à cette date et la déclaration de créances réduite à ces montants,

— Rejeter les déclarations relatives aux indemnités pour résiliation anticipées,

— Condamner le CIC à payer la somme de 100.000 euros à la société Les Oeufs nature à titre de dommages-intérêts,

— Condamner le CIC au paiement de la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamner le CIC aux dépens.

Le CIC demande à la cour de :

— Dire et juger le CIC recevable et bien fondée en ses conclusions, fins et prétentions.

— Dire et juger la société Les 'ufs nature mal fondée en son appel interjeté à l’encontre du jugement et l’en débouter,

— Confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

— Dire et juger la société Les Oeufs nature irrecevable et mal fondée en l’ensemble de ses demandes et l’en débouter,

A titre subsidiaire : Si la cour devait par extraordinaire considérer qu’elle ne dispose pas du pouvoir juridictionnel de confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a ordonné l’admission au passif de la société Les Oeufs nature des créances du CIC au titre des prêts n° 1401820171702 et 1401820171703 :

— Infirmer le jugement exclusivement en ce qu’il a ordonné l’admission des créances du CIC au passif de la société Les Oeufs nature au titre des prêts n° 1401820171702 et 1401820171703,

— Confirmer le jugement pour le surplus en toutes ses dispositions,

Statuant de nouveau :

— Inviter la partie la plus diligente à saisir le juge-commissaire à l’effet d’admettre les créances déclarées en exécution des prêts n° 1401820171702 et n°1401820171703 conformément aux termes de la déclaration de créance de la Banque et des termes jugement dont appel et de l’arrêt à intervenir,

En tout état de cause :

— Condamner la société Les 'ufs nature à payer au CIC la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— Le condamner aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.

DISCUSSION :

Sur le pourvoir juridictionnel du tribunal de commerce et de la cour d’appel :

La cour d’appel est saisie de la part du CIC d’une demande de confirmation du jugement en ce qu’il a admis ces deux créances.

En réponse à la demande d’observations formulée par la cour sur la difficulté résultant de l’éventuel défaut de pouvoir de la cour d’appel dans la présente instance de statuer sur une demande d’admission de créance, le CIC persiste dans la formulation de sa demande. Il fait valoir que le juge commissaire ne disposerait pas d’une compétence exclusive pour statuer sur l’admission des créances après que la contestation échappant à son pouvoir juridictionnel ait été tranché par la juridiction de fond. Selon le CIC, la cour d’appel, quoique n’ayant pas été saisie sur recours d’une décision d’admission ou de rejet prise par le juge commissaire, aurait le pouvoir de confirmer le jugement en ce qu’il a ordonné l’admission des créances.

Il résulte des dispositions de l’article L. 624-2 du code de commerce et des principes régissant l’excès de pouvoir que le juge-commissaire et la cour d’appel, sur recours prévu aux articles L. 624-3 et R. 624-7, sont seuls compétents pour statuer sur l’admission des créances.

Le moyen tiré du défaut de pouvoir juridictionnel de la cour d’appel statuant dans la procédure de vérification des créances constitue une fin de non-recevoir qui doit être relevée d’office par les juges du fond, ce qui a été fait par note aux parties du 11 juin 2020 sur laquelle elles ont été en mesure de faire valoir leurs observations.

Le tribunal de commerce a été saisi par assignation du CIC d’une demande d’admission des créances du CIC au titre des prêts n° 1401820171702 et 1401820171703.

Le tribunal de commerce a ordonné l’admission des créances du CIC au titre de ces prêts, précisant même que cette admission était ordonnée pour partie à titre privilégié et définitif et à titre échu.

Le tribunal de commerce n’avait pas le pouvoir de statuer sur l’admission de créances et a commis un excès de pouvoir en décidant de ces admissions. Il y a lieu d’annuler le jugement sur ce point. Cette annulation entraine l’annlation de l’ensemble du jugement, les autres demandes dont il était saisi, afférentes à la créance du Crédit Mutuel sur la société Les Oeufs nature, étant indivisibles de celles relatives à l’admission des créances.

Devant la cour d’appel, la demande est irrecevable en ce qu’elle vise une admission de créance qui ne relève du pouvoir de la cour d’appel que dans les cas où elle est saisie sur recours d’une décision du juge commissaire.

Il n’appartient pas à la cour d’appel d’inviter les parties à saisir le juge commissaire. En outre, en tout état de cause, c’est le juge du fond qu’il conviendrait de saisir, d’une demande de fixation de créances, comme le juge commissaire l’a d’ailleurs indiqué dans son ordonnance du 28 septembre 2015.

Les autres demandes visent l’indeminisation du préjudice qu’aurait subi la société Les Oeufs nature du fait des agissements du CIC. Ces demandes sont indivisibles de celles afférentes à la créance du CIC sur la société Les Oeufs nature. Elles sont donc également irrecevables.

Sur les frais et dépens :

Il y a lieu de condamner le CIC aux dépens de premières instance et d’appel et de rejeter les demandes formées au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour :

— Annule le jugement,

Statuant de nouveau et y ajoutant :

— Dit que la cour d’appel, statuant sur recours d’une décision du juge du fond, n’a pas le pouvoir d’examiner une demande d’admission d’une créance au passif de la procédure collective ouverte au profit de la société Les Oeufs nature, ni les demandes indivisibles de cette demande,

— Rejette les autres demandes des parties,

— Condamne la société Banque CIC Ouest aux dépens de premières instance et d’appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

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