Cour d'appel de Riom, 10 décembre 2014, n° 12/01967
Chronologie de l’affaire
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Sur la décision
Référence : | CA Riom, 10 déc. 2014, n° 12/01967 |
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Juridiction : | Cour d'appel de Riom |
Numéro(s) : | 12/01967 |
Sur les parties
- Avocat(s) :
- Cabinet(s) :
- Parties :
Texte intégral
COUR D’APPEL
DE RIOM
Chambre Commerciale
TF
ARRET N°
DU : 10 Décembre 2014
RG N° : 12/01967 (jonction avec 13/1524)
CA
Arrêt rendu le dix Décembre deux mille quatorze
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
M. Claude A, Président
M. Stéphane TAMALET, Conseiller
Mme C D, Conseillère
lors des débats et du prononcé : Mme Carine CESCHIN, Greffière
Sur APPEL d’une décision rendue le 29 mai 2012 par le Tribunal d’instance de Riom
A l’audience publique du 16 octobre 2014 M. A a fait le rapport oral de l’affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l’article 785 du CPC
ENTRE :
SCI B
Prise en la personne de son gérant Monsieur E F
XXX
Représentant : Me Béatrix LEQUENNE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANT
ET :
M. I L P X
XXX
Représentant : Me Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
Mme G L H épouse X
XXX
Représentant : Me Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
RCS de Clermont-Ferrand N° 303 615 736
XXX
Représentant : Me Christine ESPINASSE de la SCP SAVARY-ESPINASSE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIMÉS
DEBATS :
A l’audience publique du 16 octobre 2014, la Cour a mis l’affaire en délibéré au 10 décembre 2014 l’arrêt a été prononcé publiquement conformément à l’article 452 du code de procédure civile :
FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES :
La société anonyme d’économie mixte SA SEMERAP a fait assigner la Sci B devant le tribunal d’instance de Riom aux fins de la voir condamner à paiement de la somme de 4 686,18 € correspondant à des factures impayées d’eau et d’assainissement pour un immeuble sis à XXX ;
Par jugement du 29/05/12, le tribunal susvisé a condamné la Sci B à régler à la SA SEMERAP les sommes suivantes :
— 4 331,18 € (montant des factures – frais de relance et de dossier + frais de fermeture du compteur) avec intérêts au taux légal à compter du 19/11/11 ;
— 300 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Par déclaration reçue le 3/08/12, la Sci B a interjeté appel ;
Par acte du 4/06/13, elle a assigné en intervention forcée les époux X, acquéreurs de l’immeuble en cause depuis le 15/01/01 ;
Par ordonnance du 18/06/13, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des instances ;
Par ordonnance du 31/10/13, le conseiller de la mise en état a déclaré recevable l’assignation en intervention forcée des époux X ;
Par arrêt du 22/01/14, la cour de céans a confirmé cette décision ;
Suivant conclusions transmises le 24/07/14, la Sci B indique le motif de sa non-comparution devant le tribunal d’instance ;
Elle soulève :
* la prescription de la créance de la SA SEMERAP :
L’article L 137-2 du code de la consommation enferme l’action des professionnels pour les biens ou services qu’ils fournissent aux consommateurs dans un délai de 2 ans ; or les factures ont été établies pour une période de consommation allant du 23/12/03 au 23/03/08 ;
L’assignation étant du 6/03/12, la SA SEMERAP ne peut se prévaloir que de prestations à compter du 6/03/10 ; et elle ne peut alléguer un aveu de non-paiement ;
* le défaut de cause de l’obligation de paiement :
La Sci B verse aux débats une attestation notariée de la vente le 15/01/01 entre elle-même et les époux X ;
L’état récapitulatif des consommations de l’immeuble produit par la SA SEMERAP fait ressortir que la Sci B a versé le 5/02/01 la somme de 2 925,12 €, apurant ainsi la consommation antérieure à la vente ;
A compter du 5/02/01, les époux X ont effectué des règlements partiels ; ces derniers ne dénient pas leur consommation, la réception des factures, mais se retranchent derrière le fait que la Sci B devait répartir l’eau entre les différents utilisateurs, un des trois compteurs leur étant commun ; il est étonnant qu’ils ne se soient pas préoccupés du paiement de leur consommation d’eau ;
* le défaut de diligence de la SA SEMERAP dans le recouvrement de sa créance et dans la pose du compteur réclamé par les époux X :
La SA SEMERAP n’a pu ignorer le changement de propriétaire ; en 2004, lors de la vente du lot sis XXX, Mme Y a fait diviser l’unique compteur d’eau de l’immeuble afin de distinguer sa consommation de celle afférente au n° 3 ; et a donc signalé que la Sci B n’était plus propriétaire ;
Surtout, l’installation en 2008 de compteurs permettant le 'télé-relevé’ a forcément nécessité l’accord des propriétaires ; or aucune démarche n’a été faite auprès de la Sci B ;
Enfin, la boîte aux lettres de l’immeuble est au nom des époux X ; les factures et relances envoyées à la Sci B ont donc été retournées ;
La demande des époux X pour la pose d’un nouveau compteur est du 23/10/06 ; un devis a été établi le 15/02/07, mais les travaux n’étaient pas effectués le 5/02/08, alors qu’ils étaient facturés ;
C’est donc avec mauvaise foi que la SA SEMERAP s’abrite, pour réclamer 8 années de consommation derrière un règlement ;
La Sci B sollicite :
— à titre principal l’infirmation du jugement entrepris, le constat de la prescription de la créance de la SA SEMERAP à son encontre ;
— à titre subsidiaire la constatation du caractère non fondé de l’action pour défaut de cause, la condamnation des époux X à garantir la Sci B de toute condamnation et au paiement des sommes réclamées par la SA SEMERAP ; la condamnation de la partie succombante à lui verser une somme de 2 500 € à titre de dommages-intérêts et une indemnité de procédure de 2 000 € et à supporter les dépens ;
Par conclusions transmises le 10/07/14, la SA SEMERAP relève que la prescription selon une jurisprudence constante repose sur une présomption de paiement et se trouve écartée lorsqu’il y a aveu de non-paiement ;
Or il résulte des écritures de la Sci B (signifiées le 10/06/13) que celle-ci reconnaît ne pas avoir procédé au règlement des factures litigieuses puisqu’elle conteste la cause même de son obligation ;
Sur le prétendu défaut de cause de l’obligation, la SA SEMERAP observe que la Sci B n’a jamais répondu aux mises en demeure et ne s’est pas présenté devant le tribunal d’instance ;
Elle rappelle qu’elle est délégataire du service de l’eau et de l’assainissement sur la commune de Riom ; que la Sci B est titulaire d’un branchement pour son immeuble au XXX ; que les factures lui ont donc été régulièrement adressées, faute pour elle d’avoir avisé la SA SEMERAP d’un changement de propriétaire, comme lui en fait obligation l’article 7 du règlement du service de l’eau ;
Elle souligne que l’immeuble dont s’agit est collectif, la Sci B possédant au sein de la copropriété les lots 1, 2 et 6 ;
Lorsque ses gantes viennent relever les compteurs, ils ne peuvent pas connaître le changement d’usager ; la Sci B doit donc assumer les conséquences de sa négligence ;
L’appelante prétend par ailleurs à tort avoir apuré le compte de l’abonnement avec un dernier versement de 2 925,63 € en février 2001, car le relevé de compte fait apparaître des versements postérieurs (2 le 23/05/03) ;
Selon les époux X, la Sci B s’engageait aux termes de l’acte de vente à demander à la SA SEMERAP l’autorisation de poser deux compteurs d’eau, l’un pour les lots vendus, le second pour les autres ;
Ce que n’a pas fait la Sci B ; qui invoque vainement une division du compteur au n° 5 ;
Les époux X indiquent avoir, devant l’inaction de la Sci B, avoir par courrier du 6/10/06 demandé la pose d’un nouveau compteur ; celui-ci a été installé courant 2008 et la 1re facture a été adressée aux intéressés le 2/12/08 ; jusque-là, les factures étaient toujours adressées à la Sci B titulaire du branchement ; une mise en demeure à cette dernière du 7/07/11 est revenue non distribuée ; après recherches, elle a été localisée à l’adresse de l’un de ses gérants ;
Aucune négligence ne peut être reprochée à la SA SEMERAP ;
La SA SEMERAP fait état de factures pour un total de 4 373,39 €, outre des frais de relance et fermeture de compteur pour 312,69 € ;
Elle accepte néanmoins de s’en tenir à la somme retenue par le tribunal d’instance soit 4 331,18 € en principal ;
Elle conclut à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de la Sci B à lui payer une nouvelle indemnité de procédure de 1 000 €, et à supporter les entiers dépens ;
Selon conclusions transmises le 7/01/14, les époux X concluent sur l’incident à titre principal ; à titre subsidiaire ils confirment être propriétaires de l’immeuble au XXX depuis le 15/01/01 ;
L’acte de cession prévoyait que la la Sci B s’engageait à demander à la SA SEMERAP l’autorisation de poser deux compteurs d’eau pour distinguer les deux nouvelles propriétés issues de la vente ;
Dans l’attente, la Sci B devait se charger de la répartition entre les différents utilisateurs ;
Ils explicitent cette répartition, à partir de trois compteurs dont un principal alimentant la parcelle 276 appartenant à Mme Y depuis 2004 (laquelle a eu un branchement direct en 2005), la parcelle 275 de Mr Z, et les parcelles 217 et 277 qui leur appartiennent ; un autre compteur desservant un studio, un 3e desservant leur maison principale ;
La répartition n’a été effectuée par la Sci B qu’au début ; c’est donc du fait de ses manquements qu’elle se retrouve débiteur aujourd’hui des factures d’eau ;
Face à son inaction, ils ont sollicité directement de la SA SEMERAP la pose d’un nouveau compteur, en ont réglé les frais pour 343,19 € le 5/03/07 ;
Par suite, si la cour devait leur imputer une dette au titre des factures, elle devrait déduire ce coût et des dommages-intérêts ;
Ils indiquent qu’à la date du 4/05/08 leur consommation s’élevait à 658 m3 soit 1 630 € ;
Ils concluent à la constatation de la prescription des demandes formées à leur encontre, à la condamnation de la Sci B à leur payer la somme de 343,19 € au titre du changement de compteur, celle de 1 500 € de dommages-intérêts pour non respect de l’obligation à ce titre, à titre subsidiaire à la limitation de leur consommation réelle à 1 630 € et ordonner la compensation avec les condamnations dues par la Sci B ;
Dans tous les cas ils sollicitent à l’encontre de cette dernière une indemnité de procédure de 1 500 €, et la mise à sa charge des entiers dépens.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 4/09/14.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la prescription :
Attendu qu’aux termes de l’article L 137-2 du code de la consommation, l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ;
Qu’il ressort des pièces versées par la SA SEMERAP que les factures dont elle réclame paiement à la Sci B s’échelonnent entre le 22/12/03 et le 2/12/08 (pièces 8, 11, 14, 16, 17,18), alors que l’assignation devant le tribunal d’instance de Riom est du 6/03/12 ;
Que la jurisprudence constante mise en avant par la SA SEMERAP, selon laquelle une courte prescription repose sur une présomption de paiement mise à mal par l’aveu du non-paiement qui résulterait des écritures mêmes de la la Sci B, a été rendue sous l’empire de l’ancien article 2272 du code civil ; que par ailleurs ne peuvent constituer un aveu les conclusions de la la Sci B qui, dans un premier temps (conclusions transmises le 29/10/12), font valoir eu égard à la plus ancienne des factures du 22/12/03 que la la Sci B n’était plus propriétaire de l’immeuble desservi, puis invoquent la prescription de l’article L 137-2 du code de la consommation (conclusions transmises le 10/06/13 et conclusions récapitulatives transmises le 24/07/14) ;
Que la fin de non-recevoir ainsi invoquée par la la Sci B rend la SA SEMERAP irrecevable en ses demandes à l’encontre de cette dernière conformément aux dispositions de l’article 122 du code de procédure civile ;
Sur les autres demandes :
Attendu que les demandes formulées à titre subsidiaire par la la Sci B sont devenues sans objet ;
Que la demande des époux X en condamnation de la la Sci B à leur payer d’une part la somme de 343,19 € acquittée par eux au titre du changement de compteur et d’autre part celle de 1 500 € de dommages-intérêts en réparation du non-respect par la la Sci B de son obligation résultant de l’acte de cession intervenue avec cette dernière le 15/01/01 n’est étayée que par la production :
— d’un courrier à la SA SEMERAP du 5/02/08 (leur pièce 6) évoquant l’acceptation d’un devis-facture du 15/02/07 et d’un règlement par chèque de 343,19 € le 5/03 suivant ;
— d’un extrait de l’acte susvisé (leur pièce 8) dont il résulte que la la Sci B s’engageait à demander à la SA SEMERAP l’autorisation de poser deux compteurs d’eau … l’un servant pour les biens objet de la vente, l’autre pour les biens cadastrés BX 275 et 276 ;
Que l’objet du devis-facture n’est pas précisé, et qu’il ne ressort pas clairement de l’acte de cession que la la Sci B s’était engagée à prendre en charge le coût de pose de deux compteurs ;
Que les époux X doivent être déboutés de leurs demandes indemnitaires ;
Qu’il convient de mettre à la charge de la la Sci B, qui a appelé en la cause les époux X, une indemnité de procédure de 1 500 € ;
Que les entiers dépens seront mis à la charge de la SA SEMERAP et de la la Sci B par parts égales.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et après en avoir délibéré ;
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau, déclare du fait de la prescription la SA SEMERAP irrecevable en ses demandes à l’encontre de la la Sci B ;
Déboute I X et G H ép.X de leurs demandes à l’encontre de la la Sci B ;
Condamne la la Sci B à payer à I X et à G H ép. X la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Fait masse des dépens de première instance et d’appel et dit qu’ils seront supportés par moitié par la SA SEMERAP et la la Sci B ;
Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires.
Le greffier, Le président,
C. Ceschin C. A
Textes cités dans la décision